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négociations à venir; et par suite vous eussiez troublé ses projets de nous amener successivement jusqu'à la présentation du projet de loi qui vous est soumis aujourd'hui.

Si, à cette époque, il vous avait fait connaître ses vues de céder sans résistance à l'exigence de la conférence, vous n'auriez pas accordé des fonds, dépensés en pure perte, sans autre utilité que de déverser sur la nation le ridicule d'avoir fait des vaines parades de résistance, et vous n'auriez confié des subsides qu'à un ministère dont la marche vous aurait paru plus conforme à vos volontés unanimes d'alors; je dis vos vues unanimes d'alors; mais, Messieurs, je me trompe, il n'y avait pas unanimité, mais il y avait une immense majorité dans les chambres et dans la nation qui applaudissait aux dispositions de résistance qu'imprimait en apparence le gouvernement; la prompte réunion de notre belle armée, car vous vous souviendrez avec quelle activité furent poussés tous nos armements dans les mois de décembre et janvier adjudication de chevaux, mobilisation de plusieurs régiments de réserve, etc., et ce, longtemps avant que la Hollande n'ait opéré la concentration de ses troupes; depuis, l'appel d'un général illustre dans les rangs de cette belle armée prouve suffisamment que le ministère avait intérêt à donner confiance à ses paroles pour aplanir la route où il voulait nous conduire; car il m'est impossible d'admettre que toutes ces démonstrations étaient en vue des négociations; tout le monde a pensé que toutes ces demandes d'hommes et d'argent, ces paroles et ces votes, étaient sincères et sérieux.

Depuis cette époque, tout est changé une partie du ministère s'est retirée, et la moitié restante vient vous dire qu'il y a nécessité d'accepter les conditions onéreuses et déshonorantes que la conférence impose à la nation.

Oui, Messieurs, il y a déshonneur pour le pays d'abandonner 400,000 de vos frères sans résistance; de vos frères sans le secours et l'énergie desquels vous ne seriez peut-être rien aujourd'hui. Mais la résistance est impossible, dit-on; nous n'avons pas les forces nécessaires, et une nation de 4,000,000 d'habitants ne peut vouloir résister à l'Europe entière! Je dis, moi, que c'est se jeter dans le vague que de raisonner ainsi; et je demanderai quelles seront les forces qui viendront nous attaquer alors seulement j'indiquerai qu'avec une armée aussi vaillante, animée du meilleur esprit, désirant une occasion de se venger d'un ennemi déloyal, soutenue par le

sentiment de sa force et de la sainte cause de fraternité et d'honneur national qu'elle a défendue, joint aux communications promptes et faciles que nous donnent les chemins de fer, avantage immense que nous avons sur nos ennemis, nous pouvons résister à toutes les éventualités que vous cherchez à enfanter pour jeter la crainte dans les esprits.

Vous pouvez faire une résistance d'autant plus avantageusement, que par ces communications vous pouvez, à votre volonté, éloigner une partie de votre armée du point de concentration, pouvant la reporter rapidement et en peu d'instants à ce point ou sur tout autre, selon que les mouvements de l'ennemi s'opéreront, et toujours en rapport avec les forces qu'ils vous présenteront; dans le cas d'hostilité, ces avantages seraient plus grands encore; mais il est inutile et même désavantageux d'entrer dans plus de détails pour faire comprendre ma pensée de résistance; elle ne se bornerait pas à dire : Si tu avances, je recule; elle serait réelle et vigoureuse si un ennemi se présentait pour prendre possession des parties non cédées, c'est ainsi que je les dénomme; jamais je ne les céderai.

L'on paraît craindre les dépenses que cet état de choses exigerait, et que nos finances nous manquent; mais, Messieurs, n'avez-vous pas dit tous Que vous étiez prêts à faire tous les sacrifices nécessaires pour le maintien de l'intégrité du territoire; alors la nation ne s'effrayait pas, lorsque M. le Ministre de la guerre vous disait qu'en cas de lutte armée, il pourrait être obligé d'employer en un mois le budget de la guerre entier; et aujourd'hui l'on trouve le sacrifice de quelques écus trop grand, et l'on préfère abandonner 400,000 compatriotes aux vexations de toute espèce, que vous-mêmes n'avez pu supporter! car rappelez-vous les causes de votre révolution; rappelez-vous vos pétitions de 1828 et 1829, exprimant si énergiquement les douleurs que vous ressentiez du joug hollandais, sous lequel vous prétendiez, avec raison, ne pouvoir respirer assez de liberté indispensable à la vie; eh bien, voilà la position dans laquelle vous replongez si inhumainement et impitoyablement les Limbourgeois et les Luxembourgeois, oubliant le premier principe, le principe sacré de votre foi Ne faites pas aux autres ce que vous ne voudriez pas qu'il vous soit fait ; et l'on dira que la Belgique est éminemment catholique! Que l'on juge.

Pour moi, Messieurs, qui, dans toutes les circonstances de ma vie

politique, dans toutes les occasions qui se sont présentées, n'ai jamais hésité de sacrifier mes intérêts et ma position même pour parvenir à rompre ce joug si humiliant que je ne savais supporter ; jamais, non jamais, je ne consentirai à y replacer mon semblable et mes frères, et je suis, comme toujours, prêt aux plus grands sacrifices, même celui de mon bras, pour éviter à ma nation cette humiliation, qui détruit et anéantit le principe de votre existence même; principe qui a fait de trop grands progrès dans la civilisation des peuples pour le faire rétrograder. Si la conférence parvient à lui barrer sa marche, ce ne sera que momentanément; la contrainte imposée à ces 400,000 habitants ne servira qu'à rendre cette marche plus triomphale et vous amènera une guerre dans peu de temps, dans un moment où vous ne serez plus dans la position, comme aujourd'hui, de l'empêcher, ni de prendre une part active et honorable; car votre soumission aux volontés de la conférence sera envisagée par l'Europe comme l'effet de la pusillanimité et de la peur; l'on vous forcera d'éloigner des rangs de votre armée des guerriers versés, par l'expérience, dans l'art des combats; l'on vous forcera de désarmer, de réduire votre belle armée, et lorsque vous ne ferez plus poids dans la balance, que l'on ne vous craindra plus, que la désunion sera parmi vous, alors de nouvelles exigences seront suscitées pour l'exécution de plusieurs points bien obscurs du traité; tels que le solde de l'encaisse de la société générale, le fonds de l'agriculture, les avances de diverses industries, les domaines vendus, toutes propriétés appartenant au syndicat, et pour lesquelles rien n'a été stipulé, qui serviront de prétexte pour allumer la guerre, et la guerre générale, car alors les populations fatiguées et mécontentes de leur position la rendront générale.

Dans toutes les questions que soulève cette discussion, une seule m'a principalement occupé, celle de la séparation; elle m'a toujours paru suffisante pour que toutes celles qui ont rapport aux intérêts du commerce et de l'industrie n'aient pas besoin d'être disséquées pour me convaincre de la nécessité de repousser la loi de toutes mes forces.

M. DE THEUX, Ministre des affaires étrangères et de l'intérieur. -Messieurs, je n'ai que peu de mots à répondre aux observations faites par l'honorable préopinant sur ce que j'ai dit dans votre séance du 30 décembre dernier. Nous savions, dit-il, que tout était con

sommé, puisque une note émanée du cabinet britannique, et que nous avions reçue au mois de mai précédent, considérait la question territoriale comme définitivement tranchée. Mais je ferai remarquer, Messieurs, que peu de jours auparavant le même cabinet nous avait notifié une déclaration semblable sur la question de la dette, et comme ce nonobstant nous avions obtenu depuis une réduction considérable sur la dette, nous pouvions espérer également des concessions à l'égard des territoires, moyennant des compensations.

On vous dit que nous n'ignorions pas les dispositions renfermées dans le protocole du 6 décembre : c'est vrai; mais à ce protocole le Ministre de France n'avait pas encore adhéré, à ce moment il était connu que la discussion de l'adresse dans la chambre des députés devait provoquer des débats qui faisaient préjuger un changement de cabinet à Paris, et l'on sait, en outre, que l'orateur qui se montrait le plus opposé à la politique de l'ancien ministère à notre égard, était désigné comme appelé à revenir au pouvoir, à revenir à la direction des affaires étrangères. Dès lors on pouvait penser que le premier résultat de son avénement eût été le refus d'adhérer aux propositions formulées par les plénipotentiaires des autres cours. Nous avions donc un motif de former de légitimes espérances.

D'ailleurs, Messieurs, quel intérêt aurions-nous eu à vous cacher la vérité? Tous les budgets étaient votés; il n'y avait plus de crédit à demander pour la guerre ; le ministère étant, sous ce rapport, parfaitement à l'aise, nous n'avions aucun motif de nous taire, s'il Ꭹ eût eu quelque chose d'accompli; nous n'avions donc aucune raison personnelle de cacher l'état des choses au sénat.

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M. LE BARON DUBOIS. Messieurs, quand je demandais des renseignements diplomatiques dans une de nos dernières réunions, j'aurais voulu épargner à la nation bien des inquiétudes, bien des dépenses, bien des catastrophes; j'aurais voulu que le sénat eût pu dès lors exprimer le véritable sens de son adresse au discours du trône; car, Messieurs, quels que soient les termes de cette adresse présentée, discutée et votée en moins d'une séance, à laquelle je n'ai point assisté, je n'ai jamais pensé que ce fût votre dernier mot sur une question de paix ou de guerre avec toutes les puissances.

M. le Ministre des affaires étrangères n'a répondu aux diverses interpellations qu'en disant que les négociations étaient encore

ouvertes; l'illusion s'est ainsi prolongée, les idées de résistance se sont propagées, les armements ont augmenté, et des charges inutiles ont été imposées au pays.

Je n'examinerai pas jusqu'à quel point l'espoir du gouvernement pouvait être fondé de conserver la totalité du territoire en prenant une attitude hostile, alors qu'il devait reconnaître, comme à présent, que la question en litige n'en était pas une seulement avec la Hollande, mais avec la confédération germanique, qu'elle était résolue par l'Angleterre et promise par la France; alors qu'il était incontestable, comme aujourd'hui, qu'une résistance, par la force, aux décisions de la conférence était impossible.

Applaudissons, Messieurs, aux efforts que le gouvernement a faits et au succès qu'il a obtenu pour la réduction de la dette; déplorons, mais ne le blâmons pas d'avoir échoué pour la conservation des parties du Luxembourg et du Limbourg, et rendons aujourd'hui un juste hommage aux Ministres restés aux affaires, pour leur noble dévouement aux intérêts généraux du pays, venant défendre un projet de loi qui, plus que tous autres, blesse leurs plus chères affections!

Messieurs, que pourrai-je ajouter aux raisons de votre commission? vos convictions sont formées; je suis loin de me flatter d'y rien changer; je crois devoir motiver mon vote, et je sollicite à cet effet peu d'instants de votre indulgence.

Une nation entourée comme la nôtre ne peut prétendre à subsister contrairement à l'intérêt de ses puissants voisins.

En 1814, la coalition contre la France constitua nos provinces avec la Hollande; après quinze ans, nous brisâmes cette union et nous fùmes assez heureux de faire reconnaître notre indépendance, à certaines conditions que la nation et le Roi, à son choix, accepterait.

Quelles raisons peut-il y avoir aujourd'hui plus qu'alors pour méconnaître le danger de répudier des conditions améliorées encore par une diminution notable sur la dette?

Nos premiers engagements vis-à-vis les puissances intervenantes ont-ils perdu leur validité par le fait seul de la non-acceptation du Roi de Hollande? a-t-il été mis en demeure? n'avons-nous pas dans l'intervalle maintefois invoqué l'exécution? Questions à résoudre, au moins douteuses.

Messieurs, nous ne plaidons pas devant un tribunal, mais devant

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