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blic mais les grands frais qu'exigeoient les Gravures, me firent abandonner ce projet, & ces matériaux sont restés comme oubliés dans mon Cabinet pendant plus de vingt ans. Enfin les ayant fait voir à un Amateur (*) rempli des mêmes vues & occupé des mêmes objets, il espéra pouvoir les mettre en œuvre; les difficultés qui m'avoient arrêté ne lui parurent point infurmontables. Je ne lui diffimulai pas que diverses occupations importantes ne me laiffoient que peu de temps à donner à cet Ouvrage; mais fon zele l'engagea à m'offrir de travailler de concert avec moi pour finir les Descriptions & les Deffeins imparfaits, & pour ajouter ce qui manquoit des uns & des autres, fe propofant de me mettre en état de m'acquitter avec le Public des engagements que j'avois pris de donner ce Traité qui complete celui des Arbres & Arbustes.

LES Planches ont été exécutées par les Graveurs les plus habiles en ce genre ; & quoiqu'on apperçoive différentes manieres dans les hachures, parce que l'Ouvrage étoit trop confidérable pour être fait par une même main, cependant elles ont été portées à un degré de perfection que l'on voit dans peu d'Ouvrages; ce qui a déterminé les Libraires à n'épargner ni foins, ni dépenses pour qu'il n'y eût rien à defirer à la partie typographique de ce Traité, dont nous allons rendre un compte abrégé.

EN examinant la plupart des Vergers & des Efpaliers plantés d'Arbres fruitiers, on eft furpris qu'un objet aussi intéressant soit fi éloigné de sa perfection, principalement pour le choix des efpeces, & même pour leur culture.

(*) M. LE BERRIAYS.

A L'ÉGARD du choix des efpeces, les uns plantent des Arbres pour tirer un revenu de leurs fruits: ceux-là ne prenant confeil que de leur intérêt, donnent la préférence aux fruits qui font précoces ou fort gros; ces deux qualités étant plus avantageuses pour la vente que la délicateffe des fruits, elles déterminent leur choix; & on ne peut les en blâmer, puifqu'ils prennent le moyen le plus propre à remplir leurs vues. D'autres plantent des Arbres pour leur ufage particulier & la fourniture de leur maison : ceux-ci reglent souvent le nombre des efpeces qui doivent entrer dans leurs Jardins, d'après la Quintinye, qui s'est propofé d'établir fon choix fur le mérite & la bonté des fruits de chaque genre. Cependant, en fuivant les confeils de ce célebre Auteur, on mettroit dans un même Verger foixante-cinq Ambrettes, autant d'Epines d'hiver, foixante-dix Echafferis, tous fruits médiocres; & feulement vingt-quatre S. Germains, qui eft un fruit bien fupérieur à ceux que nous venons de nommer. Plufieurs Propriétaires fe décident auffi par leur goût particulier, qui fouvent n'est pas le plus général; mais quand on travaille pour foi, on doit être maître de suivre fon inclination. D'autres enfin s'en rapportent entiérement à leur Jardinier qui fouvent remet la décision au Pépiniérifte qu'il a affectionné; & celui-ci plus occupé de fon débit que de l'avantage du Propriétaire, fournit les efpeces qu'il a le plus abondamment dans fes Pépinieres.

LAISSANT à part ces motifs d'un intérêt personnel, if faut convenir qu'il ne feroit pas aifé, même à celui qui auroit fait une étude fuivie des fruits, de donner de bons confeils à qui voudroit faire un plant confidérable. Car le goût est une sensation perfonnelle & libre à laquelle on ne peut imposer de Loix : ainfi chacun est autorisé à donner la préférence à un fruit fur un autre. Les uns se

déclarent pour les fruits fondants, tandis que d'autres aiment mieux les caffants. Cependant il y a des fruits qui, indépendamment des goûts de fantaisie, méritent la préférence fur tous les autres. Cela étant, il femble qu'on pourroit établir comme une regle générale de faire choix des bons plutôt que des médiocres. Quelque naturel que cela paroiffe, nous ofons dire que cette regle eft susceptible de restriction. En effet celui, par exemple, qui ne planteroit que des Fraifiers des Bois, des Cerifiers de Montmorency des Pruniers de Dauphine, des Pêchers de groffe Mignonne, des Poiriers de Beurré, &c. auroit les fruits communément réputés les meilleurs; mais tous les ans il éprou veroit de longues difettes, & rien n'eft plus contraire à la bonne économie que de fe fournir avec profufion pendant quelques mois des fruits les plus excellents, & de refter au dépourvu le refte de l'année. Il paroît plus raisonnable de se ménager une fucceffion de fruits, de forte que fi l'on n'eft pas toujours dans l'abondance jufqu'au fuperflu, on ne foit jamais dans l'extrême indigence. Ainfi comme il n'est pas poffible d'avoir pendant toute l'année d'excellents fruits, il faut faire enforte que les médiocres ne manquent point. C'est-là dispenser avec intelligence les dons de la Nature; & le moyen de s'affurer de ces reffources, eft de planter les efpeces & les variétés d'Arbres dont les fruits fe fuccedent, depuis les plus précoces jusqu'aux plus tardifs, faisant enforte de proportionner le nombre de chaque espece aux besoins de la saison où elle mûrit. Une plantation ne remplit donc point du tout fon objet, lorsque trop nombreuse en Arbres dont les fruits concourent pour le temps de la maturité & ne produisent qu'une abondance momentanée, elle manque des efpeces dont les fruits fe confervent jufqu'aux nouveaux. Elle est

encore incomplete lorfqu'elle n'eft compofée que des plus excellents fruits de chaque faifon; parce que ces fruits, ordinairement délicats, étant fujets à manquer, il faut fuppléer à ceux-là par des fruits de moindre qualité, mais qui donnent plus abondamment & plus conftamment. D'ailleurs il faut du fruit pour les compotes & les confitures; or ce ne font pas toujours les fruits les plus agréables à manger cruds qui réuffiffent le mieux dans le fucre. Une compote de Griottes ou de Poires de S. Germain ne feroit pas préférée à une compote de Cerises communes ou de Poires de Martin-fec. De même les confitures d'Abricots-Alberge & de Mirabelle font plus eftimées que celles de gros Abricots & de Prunes de Dauphine.

CES défauts très-communs dans les plantations, viennent de ce que la plupart des Propriétaires ne connoissent point affez toutes les efpeces d'Arbres pour faire euxmêmes un bon choix. Peu de Jardiniers même les connoiffent fuffifamment, & il n'y en a prefque aucun qui fe donne la peine de les raffembler dans les Jardins de leurs Maîtres.

C'EST principalement pour faciliter & répandre cette connoiffance que nous avons entrepris notre Traité des Arbres Fruitiers. Nous ne nous fommes point propofés d'y faire une longue énumération de tous les fruits bons, médiocres & mauvais. Nous en avons exclus toutes les Poires & Pommes à Cidre, & tous les Raifins qui ne font propres que pour faire du Vin. Les fruits de table font seuls la matiere de ce Traité; & quoiqu'entre ceux-ci même, nous ayions fait un choix des meilleures especes, & que nous en ayions omis un grand nombre qui font

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plus connues qu'elles ne méritent de l'être, nous ne confeillons à perfonne de cultiver toutes celles dont nous faifons mention; quelques-unes n'étant que des fruits de fantaisie, d'autres ne réuffiffant que dans certains climats ou dans certains terreins, & d'autres n'étant propres qu'à diversifier le coup d'œil d'un Verger ou d'une Fruiterie : mais il a été néceffaire de rendre cette collection affez nombreuse, pour fatisfaire à tous les goûts, & fuffire à tous les ufages qu'on peut faire des fruits.

OBSERVER dans toutes les Saifons de l'année plus de trois cents variétés d'Arbres; épier & faifir le moment où chacune de leurs productions eft au point qui peut établir leur caractere; prendre les dimensions de ces productions, en examiner la forme, la couleur, la faveur, les différences qu'elles reçoivent de l'âge, de la force, de l'état des Arbres, de la nature du terrein, de l'exposition, de la température de l'air; diftinguer les caracteres constants des accidentels; tels font les objets de notre travail, dont la longueur & les détails ne nous ont point rebutés, étant foutenus par le defir de faire un Ouvrage utile au Public, & comptant que nos obfervations lui procureront des connoiffances auffi diftinctes qu'elles font nécessaires. Cette entreprise offroit bien des difficultés à furmonter ; les remarques suivantes les feront appercevoir.

1°. CHAQUE Arbre a un port &, pour ainfi dire, une façon d'être qui lui eft particuliere; elle eft fans contredit le résultat des caracteres qui diftinguent un Arbre des autres : un Connoiffeur les apperçoit, il en eft frappé; mais ces petites différences ne peuvent être rendues sensibles, ni par les figures, ni par le discours. Celui qui les apperçoit

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