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LA RÉPUBLIQUE DU VENEZUELA.

GÉOGRAPHIE ET STATISTIQUE.

Sous ce nom que porte aujourd'hui la région la plus orientale du groupe des États colombiens (1), la République du Venezuela mérite une sérieuse attention de la part des armateurs, des industriels et des négociants belges, comme aussi de la part des émigrants européens qui, chaque année, quittent notre vieux monde pour aller s'établir dans la jeune et libre Amérique.

Ce pays doit acquérir une haute importance et s'élever à une grande prospérité, également réservée à toutes les anciennes possessions espagnoles, que la liberté, de mieux en mieux pratiquée, finira par rapprocher de la puissante République-modèle les ÉTATS-UNIS de l'Amérique du Nord.

Le Venezuela est borné à l'est par l'océan Atlantique, à l'ouest par les Républiques de la Nouvelle-Grenade et de l'Équateur, au nord par la mer des Antilles, au midi par

(1) La dénomination de COLOMBIE, toute contemporaine, constitue une légitime et tardive réparation envers Christophe Colomb, dépouillé de son droit de discubridor par son heureux successeur en navigation, Améric Vespuce.

l'empire du Brésil. Son immense territoire présente une superficie de dix-sept mille trois cent vingt milles carrés géographiques, soit plus de quatre-vingt-quinze mille kilomètres carrés, environ 35,000 lieues. Une pareille étendue implique une variété prononcée de climats et le contraste marqué de zones principales avec des distinctions nettement tranchées.

La première zone est surtout agricole, sans qu'elle soit pour cela entièrement cultivée, faute d'une population en rapport avec son étendue. Partant du littoral pour se prolonger jusqu'aux plaines ou savanes, elle embrasse un espace de huit mille cent trente-sept lieues carrées, dont seulement cinq cents se trouvent exploitées avec plus ou moins d'activité, de fruit et de succès.

A cette zone agricole se rattachent cinquante baies et trente-deux ports, dont plusieurs, admirablement situés et quelques-uns assez animés, offrent au commerce d'inépuisables éléments d'échange, de richesse, de prospérité. Tels sont la Guayra, Caracas, Cumana, Maracaibo, Puerto-Cabello. Les voyageurs les plus compétents, les mieux autorisés, ceux qui ont parcouru et étudié le Venezuela du temps de la domination espagnole (c'était alors la capitainerie-générale de Caracas), ceux qui ont visité l'Amérique méridionale et centrale depuis la proclamation de l'indépendance, tous ces voyageurs s'accordent à dire que :

Sept millions d'habitants vivraient heureux, au sein de l'abondance, dans cette zone agricole où se trouve actuellement disséminée une population de sept à huit cent mille âmes.

Quel champ ouvert, combien de ressources assurées aux entreprises et à l'établissement de nombreux colons qui s'éloignent chaque jour de l'Europe, pour aller conquérir en Amérique une fortune agricole, industrielle, commerciale;

fortune garantie d'avance au travail intelligent, persévérant, qui s'appuie sur l'ordre, l'esprit de famille et l'économie. Comment se fait-il que les Allemands, les Suisses, les Basques, les Irlandais, dont les émigrations périodiques se dirigent de préférence vers les États-Unis et vers le bassin du Rio de la Plata, ne songent pas encore à la zone maritime et agricole du Venezuela? Ils s'y enrichiraient pourtant, tout en concourant à enrichir leur patrie d'adoption.

La seconde zone, dite des Llanos ou Savanes, présente un espace d'environ neuf mille lieues carrées; elle compte à peine cent mille habitants. Ces savanes se composent de vastes plaines arrosées par de nombreux cours d'eau, et qui ressemblent beaucoup aux Pampas du Pérou, de BuenosAyres, du bassin du Rio de la Plata. C'est dire que les Llanos ou Savanes du Venezuela conviennent admirablement à l'entretien d'innombrables troupeaux de bétail et de chevaux, à l'aide desquels on pourrait se créer une source intarissable de revenus.

Enfin, la troisième zone, qui se développe sur une étendue de plus de dix-huit mille lieues carrées, se divise en forêts vierges et en montagnes à peu près dépourvues de culture, mais qu'il serait facile de conquérir au travail et à la fécondité. Dans la partie boisée de cette zone, sur quelques éclaircies des forêts vierges, vivent environ cent mille habitants, dont quelques milliers d'Indiens presque indépendants; il y a aussi des tribus indigènes qui sont soumises, à demi gagnées à la civilisation et qui entretiennent des relations bienveillantes avec des familles créoles, soit d'origine espagnole, soit de sang mêlé, qui complètent la population de cette partie du Venezuela.

Les géographes et les voyageurs évaluent à seize millions d'âmes le chiffre des colons qui trouveraient là les moyens

de vivre dans une prospérité bien supérieure à celle des squaters et des pionniers des prairies et des savanes de l'ouest des États-Unis.

Du reste, la présence et le voisinage des tribus indigènes, les unes soumises, les autres indépendantes, ne sont point des obstacles à une colonisation et à des travaux de défrichements, même entrepris sur une échelle restreinte. La preuve en est donnée par la sécurité des familles créoles de race blanche et de sang mêlé qui résident actuellement dans cette zone, et cela sans le moindre inconvénient. En effet, la plupart des tribus indiennes du Venezuela sont d'un caractère doux avec un penchant marqué à l'indolence. L'état sauvage proprement dit n'existe pas, puisque ces Indiens s'adonnent à des travaux de culture et sont groupés en agrégations de quarantes ou cinquante familles. A l'exception des Guaïbas, des Goagiros et des Guayaribos (Caraïbes), il ne faudrait que quelques mesures intelligentes pour les amener tous à un progrès social, dont ils seraient les premiers à profiter. Enfin, les tribus à demi-sauvages, dont je désigne plus haut les noms, et qui se rattachent à la souche jadis redoutée des Caraïbes, ne tarderaient point à comprendre les divers avantages d'une culture raisonnée et d'une civilisation bienfaisante.

D'après les renseignements statistiques publiés pour l'année 1871, le chiffre total de la population du Venezuela s'élevait, en 1865, à un million cinq cent soixante cinq mille âmes.

Voici les classifications établies par l'Almanach de Gotha : Quatre cent mille blancs;

Neuf cent mille métis;

Quarante mille Indiens, dont douze mille seulement seraient indépendants.

Il resterait sans qualification précise un chiffre d'environ deux cent vingt-cinq mille habitants; l'insuffisance de ces calculs s'explique, du reste, par l'immense étendue des trois principales zones du Venezuela, et par la difficulté d'un recensement régulier.

Je n'ai donc pas la prétention de tracer, à Bruxelles, un tableau normal qui ne peut émaner que de l'administration supérieure de Caracas, laquelle ne nous a fait connaître jusqu'à présent que les résultats d'un recensement qui remonte à quelques années de date.

Le fait est que les différentes circonstances signalées dans l'avant-propos de mon étude sur la République de l'Équateur, doivent être également invoquées en faveur de l'essor de la population du Venezuela. Par conséquent, la plupart des chiffres publiés en Europe peuvent être bien au-dessous de la réalité; mais ce qu'il importe de constater, c'est l'étendue de chaque zone et principalement la variété des climats, des productions, des ressources qui s'offrent aux indigènes et aux colons étrangers, pour faire de ce pays une terre promise où le travail, l'intelligence, l'activité offrent tant de trésors à recueillir. Voilà ce que je vais essayer, en évitant de tomber dans la moindre exagération.

PRÉCIS HISTORIQUE.

Les premiers navigateurs espagnols qui visitèrent les côtes de cette partie du nouveau monde, depuis l'Orénoque jusqu'à l'isthme de Panama, les désignèrent d'abord sous le nom de Terre-Ferme (1) Tierra firma.

Le roi Ferdinand d'Aragon donna à la partie occidentale.

(1) Voir Oviedo, Historia de las Indias, Barica, etc., tome I, Historiadores.

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