DES ARBRES FRUITIERS; CONTENANT LEUR FIGURE, LEUR DESCRIPTION, Par M. DUHAMEL DU MONCEAU, de l'Académie Royale des Chez SAILLANT, Libraire, rue Saint Jean de Beauvais. M. DCC. LXVII I. AVEC APPROBATION ET PRIVILEGE DU ROI. PRÉFACE. ÉTUDIER les Ouvrages du Créateur, contempler l'admirable spectacle de la Nature, est une occupation bien digne de l'homme qui pense. Dans quelque point de vue qu'il fe place, il n'apperçoit rien qui ne mérite fon attention, rien qui ne le conduise à faire des réflexions utiles. Mais dans la variété infinie d'objets qui composent cet immense tableau, ceux qu'on nomme de premiere néceffité doivent le toucher plus que tous les autres ; tels font les Bleds, la Vigne, les Bois, les Bestiaux, refsources, principales pour sa vie, fa sûreté, & même ses plaisirs. OUTRE ces objets précieux, la Nature lui en offre d'autres, qui, fans être auffi intéressants, peuvent arrêter ses regards & mériter fes foins. L'agrément & l'utilité des Arbres fruitiers, doivent leur affurer le premier rang dans cette claffe. A leurs fleurs, l'un des plus beaux ornements des Jardins au Printemps, fuccedent les fruits qui font la partie la plus brillante des richeffes de l'Eté & de l'Automne. Pendant toute l'année ils fourniffent nos tables de mets d'autant plus agréables qu'ils flattent & réveillent le goût à la fin des repas les plus fomptueux & les plus recherchés. Le parfum, la fraîcheur, la faveur, la délicatesse des bons fruits font des qualités avouées de tout le monde : mais plusieurs prétendent que l'usage en eft dangereux, & que, pour être fervi dans des vafes précieux, cet aliment n'en est pas moins contraire à la fanté; qu'étant froid, il produit dans l'eftomac des crudités qui a troublent les digestions, font un mauvais chyle, & occafionnent des fievres opiniâtres, & fouvent vermineuses. J'ai rapporté dans mes Observations Botanico-Météorologiques des faits bien conftatés qui déchargent les fruits de ces accufations, & plufieurs célebres Médecins les ont pleinement justifiés de reproches qui ne doivent tomber que fur l'intempérance de ceux qui, s'abandonnant à leur appétit, en usent fans modération. Si je n'étois retenu par les bornes d'une Préface qui ne peut être trop courte, je démontrerois facilement que cette nourriture délicieuse, & unique de nos premiers peres, n'est devenue nuisible que parce que l'homme s'y livre sans réserve. Je n'ai garde cependant de conseiller à tout le monde indistinctement de manger de toutes fortes de fruits. Sur cet aliment comme fur tout autre, chacun doit déterminer d'après fa propre expérience l'ufage qu'il en peut faire, tant pour la quantité, que pour l'efpece. Mais auffi il feroit inconfidéré de vouloir profcrire fans restriction tous les fruits de deffus nos tables : j'en appelle à tous les âges & à tous les Peuples qui ont conftamment recherché les fruits. L'affurance de leurs fuffrages, autant que le goût que j'ai pour les bons fruits, m'a porté dans le temps même où j'étois occupé des objets de la premiere néceffité, la Culture des Terres, la Confervation des Grains, le rétablissement des Forêts, &c. (*) à raffembler dans nos Jardins les meilleures efpeces d'Arbres fruitiers, à les décrire, à les faire deffiner par les plus habiles Artistes dans la vue de composer l'Ouvrage que je donne aujourd'hui au Pu (*) Les Eléments d'Agriculture, 2 vol. in-12; le Traité de la Confervation des Grains, 2 vol. in-12. & le Traité des Bois & Forêts en 8 vol. in-4°. fe trouvent chez L. F. DELATOUR, Libr. rue S. Jacques. |