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Je ne suis point un ennemi systématique des plantes nouvelles ou peu connues; je les admets toutes, au contraire, dans mon champ d'expériences, et je les propage, dans la contrée que j'habite, quand leur culture me paraît offrir quelque avantage.

J'ai donc semé, dès l'automne de 1866, sur un espace d'environ 30 centiares, un hectogramme de galega que je m'étais procuré au prix de 2 fr. 50 c., chez un grainier de Paris. Les eunes plantes ne parurent qu'au printemps suivant, mais jelles crurent assez rapidement et, dans le courant de l'été, je pus récolter un peu de graine et ensemencer une seconde pièce à la suite de la première.

Séduit alors par la belle apparence de cette légumineuse, j'écrivis qu'elle me semblait mériter les éloges qu'on lui décernait, d'autant plus que d'après les essais de M. GilletDamitte et les analyses de M. Gaucheron, elle était un tiers plus nutritive que le foin des meilleures prairies naturelles et artificielles. J'ajoutai, néanmoins, que son introduction trop récente ne me permettait pas d'en apprécier la valeur. L'hiver de 1868, fut, on le sait, très-rigoureux, le galéga résista parfaitement à la gelée et me donna, dès le printemps, une première coupe assez abondante, qui mêlée à d'autre fourrage fut consmmée par les bestiaux et ne leur fit aucun mal. J'avais bien lu qu'à la ferme impériale de Vincennes, deux agneaux étaint morts après avoir mangé du galéga, mais vingt autres qui en avaient également mangé n'avaient même pas été malades. Je ne pouvais donc voir dans ce fait, signalé par le régisseur, M. Houdebine, qu'une malheureuse coïncidence.

Cependant l'été vint et avec lui une excessive sécheresse qui se prolongea jusqu'à la fin d'août. Le galega, dès lors, ne poussa presque plus; ses tiges durcirent, devinrent sousligneuses et prirent une saveur amère très-prononcée; on les coupa en octobre, mais on ne les offrit point aux habitants de de l'étable et de la bergerie. On les mit, je crois, sur le fumier sans même les utiliser comme litière. Les façons et l'engrais n'avaient pourtant pas été épargnés à la plante favorite de MM. Pépin et Gillet-Damitte et je commençais à m'étonner qu'elle répondit si mal à mes soins. Notre sol est, à la vérité, très-sec et très-brûlant, mais la luzerne y donne quatre ou cinq coupes et le trèfle y réussit aussi très-bien. A la fin de l'hiver dernier, le galéga ressuscita de nouveau et vers le le 15 avril il mesurait 35 à 40 centimètres. Je pensai qu'il était temps de le faucher. Un homme sûr, intelligent, qui partage souvent avec mon berger le soin du troupeau, s'acquitta de cette besogne et déposa une partie de sa récolte dans le râtelier de trois brebis south-down qui nourrissaient leurs agneaux. Une heure ou une heure et demie plus tard on trouva deux de ces brebis étendues sur le sol et à peu près. asphyxiées. Un vétérinaire de Fontenay fut immédiatement appelé, mais il arriva trop tard et ne put essayer aucun remède. J'ai raconté cet accident dans une publication agricole. Je l'ai presqu'en même temps signalé à la Société centrale. d'Agriculture de Belgique, qui a commencé, cette année même, des expériences sur le galéga.

Voici la lettre que j'adressais, le 19 mai, au secrétaire M. Van-Den-Broch.

Monsieur le Secrétaire,

« J'ai vu, dans vos intéressants rapports, que plusieurs membres de la Société d'Agriculture de Belgique s'occupaient activement de la propagation du galega. Je cultive cette

plante depuis trois ans, et dans mon terrain calcaire-siliceux, son rendement a toujours été inférieur à celui du trèfle et de la luzerne. Au mois d'octobre 1867, j'ai présenté à l'Exposition agricole de Binche un échantillon de galéga, accompagné d'un paquet de graines. Le Jury m'a décerné pour cet apport un troisième prix (médaille de bronze).

« Jusqu'à présent je n'avais fait manger à mes animaux que quelques tiges de cette légumineuse, et je ne la croyais pas nuisible; mais un accident, arrivé dernièrement chez moi, m'a appris qu'il était prudent de s'en défier. Voici, du reste, ce qui s'est passé :

<«<Le 21 avril, pendant que j'assistais au Concours régional d'Angers, une petite pièce de galéga officinal a été fauchée dans mon champ d'expériences, et trois brebis-mères en parfaite santé, on reçu pour leur repas du soir une partie de cette première coupe. Une heure après, deux de ces brebis, affreusement météorisées, tombaient et expiraient avant qu'on pût les secourir, tandis que la troisième qui avait dédaigné la nouvelle plante, continuait à se bien porter. Cet accident m'a prouvé que le galéga ne devait être donné aux bestiaux qu'avec de grandes précautions, et j'ai résolu de ne jamais en faire usage sans l'additionner d'une certaine quantité de fourrage sec. »

Recevez, etc.

Cette lettre lue dans une des séances du Conseil administratif a fait naître une intéressante discussion :

Plusieurs membres ont pensé que les inconvénients reprochés au galéga, provenaient de sa trop grande richesse en azote; d'autres ont dit, au contraire, que l'excès de principes nutritifs ne pouvait le rendre dangereux et qu'il contenait très-probablement une substance essentielle, amère, plus ou moins toxique. M. Th. de Biseau, propriétaire à Entre-Monts, rapporte enfin, dans une communication écrite, qu'il a fait

mourir une chèvre en la forçant à manger du galega. Il affirme à son tour, que cette légumineuse renferme une essence âcre, nauséabonde, qui est un violent poison pour les animaux domestiques (1).

La question se trouve donc aujourd'hui nettement posée : doit-on considérer le galéga officinal comme une des meilleures plantes fourragères connues, ou faut-il, à cause de ses propriétés malfaisantes, le renvoyer définitivement à l'Ecole de Botanique du Jardin des Plantes, d'où il a été récemment tiré.

La chimie qui rend à l'agriculture tant de services ne tardera pas sans doute à s'emparer de ce problême et à nous en donner la solution. Quant à moi, je suis forcé d'interrompre mes expériences sur le galéga; les chaleurs de l'été l'ont, cette fois, complètement détruit et j'ai fait labourer le terrain qu'il occupait pour l'ensemencer en froment.

Vers la fin du dernier siècle plussieurs auteurs ont parlé avec éloge du galéga vulgaire ou rue de chèvre, et en ont recommandé la culture. Je lisais, l'autre jour, dans la Revue Economique de 1791, dirigée par Deyeux et Parmentier, un article signé Reynier qu'on aurait pu croire emprunté au Petit Moniteur du soir.

En voici les premières lignes :

« Le galéga vulgaire réunit toutes les qualités qu'on peut désirer pour former une excellente prairie artificielle. Une expérience de quinze années et plus me convainc qu'il est un aliment très-sain et très-nourrissant pour toutes sortes de bétails, principalement pour le cheval et pour les bêtes à cornes qui le mangent avec une grande avidité, et auxquelles il donne du lait en abondance, de très-bonne qualité.

« La hauteur à laquelle il s'élève, qui égale quelquefois celle d'un homme d'une taille médiocre, le grand nombre des tiges

(1) Journal de la Société centrale d'Agriculture de Belgique, juin 1869.

que porte chaque plante, souvent jusqu'à vingt-cinq et trente dès la troisième année; la vigueur avec laquelle il se ramifie, jusqu'à produire des touffes de feuillages de plus d'une brasse de contour; la promptitude avec laquelle il végéète, au point de prendre cet accroissement dans l'espace de trois mois, sont une preuve non contestable qu'une seule récolte de cette plante est. plus abondante et plus riche que toutes celles qu'on peut faire en sain-foin, en trèfle et en luzerne pendant tout le cours de l'année (1) »

Rien de nouveau donc sous le soleil ou du moins très-peu de choses; nous faisons bien souvent du vieux neuf sans nous en douter. On rencontre, au surplus, dans les anciens livres un grand nombre de procédés et de méthodes réinventés ou rajeunis par les écrivains de nos jours. Mes lecteurs en auront la preuve s'ils veulent entreprendre avec moi quelques promenades à travers les vieux journaux d'agriculture. On peut sans cesser de suivre la voie du progrès, prêter de temps en temps l'oreille aux échos du passé et regarder en arrière pour mesurer le chemin parcouru. Parmentier, Daubenton, Young et l'abbé Tessier, sont, du reste, d'excellents maîtres, et leurs leçons valent quelquefois celles de nos modernes professeurs. E. BONCENNE fils.

DES PLANTATIONS D'AUTOMNE

EN TEMPS DE SÉCHERESSE.

Tout le monde connaît les procédés à employer pour les plantations automnales qui peuvent se résumer en ces quelques mots :

(1) Revue Physico-Economique 1791, vol, II, pages 88 et 89.

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