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que la règle, telle qu'elle a été proposée par le congrès de Paris, sans aucune addition pour en contrebalancer les effets, serait juste vis-à-vis d'une nation comme celle des États-Unis, dont les navires marchands seraient partout exposés au canon des vaisseaux anglais, sans avoir une marine pour rendre la pareille au Royaume-Uni? Et quand M. Marcy propose à cette règle une addition sous la forme d'une prohibition de toute attaque sur la propriété privée, on refusera difficilement de s'entendre avec lui. Il propose d'ajouter au premier paragraphe de la déclaration du 16 mars les mots suivants: „Et que la propriété privée des belligérants sur la mer ne sera pas exposée à la capture de la part de la marine de leurs adversaires."

Le cabinet de Washington est prêt à accepter le principe ainsi amendé qui abolit la course, et son offre mérite sans doute la considération la plus sérieuse. Comme principe il est incontestable que la propriété privée a autant de droit à être protégée sur mer que sur terre, bien qu'il puisse y avoir quelque difficulté relativement à la mise en pratique de cette proposition, parce que la propriété du gouvernement n'est pas aussi facile à distinguer sur mer que sur terre. Toutefois, en faisant exception pour quelques difficultés, le principe est indubitablement le même dans les deux cas. Une semblable règle serait certainement une grande innovation, et l'on pourrait être tenté de dire que la guerre serait privée de sa vigueur légitime et qu'elle serait affaiblie comme moyen de justice internationale. Mais de grands moyens existeraient encore, et il n'y a pas de doute, par exemple, que le simple blocus des principaux ports des États-Unis ne puisse être d'un grand effet.

Quel que soit le sort réservé à la proposition du cabinet de Washington, il défend évidemment une cause très-juste et très-équitable, plus conforme aux intérêts de la civilisation que la déclaration du 16 mars. (Le traducteur.)

PRATIQUES LICITES DE LA GUERRE.

§ 125. Comme pratiques licites ou conformes au but de la guerre on regarde non seulement la force ouverte, mais aussi des ruses. L'honneur et l'humanité toutefois imposent à ce sujet

aux nations des limites que la raison de guerre permet quelquefois de franchir exceptionnellement.

Est réputée comme pratique absolument illégale et contraire à l'esprit de l'humanité l'empoisonnement des sources et des eaux du territoire ennemi, proscrit également par les lois musulmanes. L'emploi d'armes empoisonnées fut déjà défendu au moyen âge par l'Église: jusqu'au xvr siècle on rencontre cependant des exemples de cet usage barbare. Nous comprenons dans la même catégorie en général toutes les armes qui occasionnent des douleurs inutiles ou des blessures difficiles à guérir, telles que des boulets à pièces, ceux mêlés de verre et de chaux, doubles ou taillés, et sans doute aussi les fusées à la congrève lorsqu'elles sont tirées contre des hommes. Enfin le carnage causé parmi des personnes qui n'opposent aucune résistance et qui en sont incapables, est l'objet d'une réprobation universelle. Une guerre à outrance même qui a été déclarée contre un gouvernement, ne lui permet pas d'avoir recours à des procédés semblables.

Les usages de la guerre proscrivent également, lorsqu'il ne s'agit pas d'actes de représailles ou de précaution tendant à prévenir des désastres irréparables, les ravages du territoire ennemi et les destructions des récoltes et des habitations. Quelquefois les belligérants ont recours à ces pratiques dans le but de faciliter certaines opérations de guerre. Ainsi, d'après un ancien usage anglais, suivi encore pendant la guerre d'indépendance, on regardait comme licites les dévastations du territoire ennemi, dès qu'elles avaient pour but de faire obtenir des contributions des habitants, de contraindre les troupes ennemies à quitter des positions occupées par elles pour couvrir le pays, enfin de nuire à l'ennemi et de le ramener à la raison, en cas de révolte et de rébellion.3

Les lois de la guerre proscrivent encore l'usage des moyens de destruction qui, d'un seul coup et par une voie mécanique, abattent des masses entières de troupes, qui, en réduisant

1) Pütter, Beitr. p. 54.

2) Chap. 1. X. de sagittar. Ward t. I, p. 252. 253.

3) de Martens, Völkerr. § 274 (280).

l'homme au rôle d'un être inerte, augmentent inutilement l'effusion du sang. Citons l'emploi de boulets ramés dans une bataille sur terre, de boulets rouges ou de couronnes foudroyantes dans une bataille navale, projectiles qui souvent suffisent pour anéantir d'un seul coup des navires entiers avec leurs équipages.1

Les lois de la guerre réprouvent également les ruses ou stratagèmes qui constituent des violations de la foi jurée à l'ennemi. Les conventions violées par l'une des parties belligérantes cessent d'être obligatoires pour l'autre. L'honneur ainsi que le propre intérêt repoussent pareillement l'assassinat, la provocation à ce crime, l'excitation des sujets ennemis à la révolte contre leur souverain légitime. La nécessité toutefois d'épargner l'effusion inutile de sang ou d'atteindre plus promptement le but de la guerre doit en quelque sorte légitimer l'emploi de moyens de corruption et les pratiques mises en oeuvre pour corrompre certains individus et provoquer la trahison.3

C'est ainsi que chacune des parties belligérantes peut accepter les offres volontaires qui lui sont faites par des sujets ennemis et en profiter, pourvu qu'elles n'aient pour but aucun acte repréhensible, tel que l'assassinat. Il lui est incontestablement permis de recevoir des transfuges, des déserteurs, d'accueillir les propositions d'un traître et d'envoyer des espions.* Chacune peut se servir de doubles intelligences et se garantir des ruses et de la trahison par les moyens les plus énergiques." Toutefois la dissimulation devra cesser avec l'emploi de la force

1) Sur ces différentes propositions v. Vattel III, § 155–157. 166. 167. de Martens § 268 suiv. Klüber § 244. 262. 263. d'Ompteda § 301. de Kamptz § 289. Bynkershoek (Quaest. jur. publ.: De rebus bellicis chap. 1) n'admet aucune restriction. Contra Ortolan II, 27. 5. Oke Manning p. 149. Wildman II, p. 24.

2) Macchiavel (dei discorsi III, 40) se prononce également contre cet emploi des ruses de guerre. V. aussi Vattel III, § 176.

3) Pufendorf VIII, 6. 18. Vattel III, § 180. Klüber § 243 note a. Grotius (III, 1, 21) a manifesté des doutes à ce sujet. d'Ompteda § 303. de Kamptz § 291.

4) Il sera question de l'espionnage à la fin du livre III. V. aussi Vattel III, § 181. Klüber § 266.

5) Vattel III, § 182.

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ouverte. Ainsi au commencement du combat d'escadres ennemies, chacune devra arborer son véritable pavillon.'

L'ennemi qui, pendant le combat, fait usage d'armes illicites, se place en dehors des lois de la guerre. La loi du talion le frappera impunément, lorsque surtout elle atteindra les vrais coupables.

TRAITEMENT DES PERSONNES ENNEMIES ET DES
PRISONNIERS.

§ 126. Les lois de la guerre de l'ancien monde n'ont établi aucune barrière contre le traitement arbitraire des prisonniers. Livrés à la merci du vainqueur, ils n'avaient qu'à choisir entre la mort et l'esclavage. Les lois modernes des nations chrétiennes, avec leurs principes pleins d'humanité, ne dépassent pas à ce sujet les limites de la stricte nécessité, ainsi que nous l'avons déjà observé. Elles distinguent les personnes ennemies selon leurs conditions en différentes catégories, dans l'ordre suivant:

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I. Le droit de la guerre proprement dit, celui de vie et de mort, n'est applicable qu'aux personnes ennemies qui portent des armes, aux combattants ou aux troupes régulières. A leur égard il est permis de faire usage de tous les moyens de destruction. Le devoir d'épargner la vie humaine peut prévaloir dans certains cas individuels, mais il devra toujours céder devant la raison de la guerre qui est le point fondamental. Dès que celle-ci le permet, il ne faut pas refuser d'accorder pardon aux troupes ennemies, pourvu qu'elles aient toujours observé une conduite analogue, à moins que la nécessité de rétablir l'égalité du combat n'exige l'emploi de représailles.

Les individus non combattants qui forment le train ou la suite de l'armée, tels qu'aumôniers, chirurgiens, vivandiers, quartiers- maîtres, sont à la vérité l'objet de ménagements individuels, mais dans la mêlée générale ils subissent le sort commun. Ils n'échappent pas au traitement de prisonniers, à moins

1) Bouchaud, Théorie des traités de commerce. p. 377. Ortolan II, p. 33. Wildman II, p. 25.

2) Zachariae, Vom Staat. XXVIII, 7. 2. (t. IV, 1. p. 99).

que des traités ou des capitulations ne leur assurent un traitement différent.1

Les lois de la guerre, qui sont celles de la légitime défense, s'opposent également à ce qu'on se porte à des excès envers un ennemi terrassé ou blessé, qui d'ailleurs n'échappe pas au sort de prisonnier. Les soins dus aux blessés de l'ennemi dépendent à la vérité de la générosité du vainqueur: mais un intérêt de réciprocité lui conseille de ne pas refuser leur ces soins, après avoir assuré la position de ses propres blessés et malades. Jamais il ne devra se permettre de les tuer: dans un seul cas un acte aussi féroce trouverait une explication, celui où il serait démontré que les soldats mis à mort s'étaient rendus coupables d'un forfait semblable.

Une certaine inviolabilité est assurée aux parlementaires qui observent les signaux conventionnels en s'approchant du camp. On leur accorde les délais et les sûretés nécessaires pour rentrer librement dans leur camp.

II. Les individus qui n'appartiennent pas à l'armée, ceuxlà mêmes qui sont chargés du maintien de la sûreté et de l'ordre intérieurs, jouissent de la protection des lois de la guerre. Ils ne peuvent être soumis à un traitement violent que lorsqu'ils ont commis des actes d'hostilités. La seule condition d'ennemi ne justifie pas des procédés semblables. Mais on peut naturellement prendre envers les personnes sus-indiquées des mesures de sûreté de toute sorte, les désarmer, les arrêter et en exiger des otages.

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Les sujets ennemis qui, lors de l'ouverture des hostilités, se trouvent sur le territoire de l'une des puissances belligérantes ou qui y sont entrés dans le cours de la guerre, devront obtenir un délai convenable pour le quitter. Les circonstances néanmoins peuvent aussi rendre nécessaire leur séquestration provisoire, pour les empêcher de faire des communications et de porter des nouvelles ou des armes à l'ennemi.

1) Klüber (Droit des gens § 247), par de singuliers motifs, avoue ne pas comprendre pourquoi les non-combattants ne seraient pas assujettis au traitement ordinaire des prisonniers.

2) Grotius III, 4. 19.

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