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dans la partie la plus importante qu'il est presque impossible d'en établir le sens. Je vous envoie le comte Daru, en vous priant de le faire repartir immédiatement, car nous ne pouvons plus attendre. Pendant que le Roi vous remet d'heure en heure, sous prétexte de se concerter avec le prince de Hohenzollern, on rappelle en Prusse les hommes en congé, et on gagne sur nous un temps précieux. A aucun prix nous ne pouvons donner à nos adversaires aujourd'hui ces mêmes avantages qui ont été en 1866 si funestes à l'Autriche. Et d'ailleurs, je vous le dis nettement, l'opinion publique s'enflamme et va nous devancer, Il nous faut commencer; nous n'attendons plus que votre dépêche pour appeler les 300,000 hommes qui sont à appeler. Je vous en prie instamment, écrivez-nous, télégraphiez-nous quelque chose de bien clair. Si le Roi ne veut pas conseiller au prince de Hohenzollern de renoncer, eh bien! c'est la guerre tout de suite, et dans quelques jours nous sommes au Rhin. Le Roi est désormais en cause. Après l'aveu qu'il a fait d'avoir autorisé l'acceptation, il faut qu'il la défende, ou du moins qu'il conseille et obtienne la renonciation; mais ce qui est pour nous plus important que la renonciation elle-même, c'est de savoir promptement à quoi nous en tenir.

Ainsi donc, mon cher comte, je vous prie de m'écrire par la poste en chiffres pour me confirmer vos télégrammes, et surtout le plus tôt possible par le retour du comte Daru et du comte de Bourqueney.

Pour vous mettre bien au courant de la situation, je vous envoie les derniers télégrammes que j'ai reçus de Madrid et de Pétersbourg. Celui de Madrid vous servira pour mettre à l'aise la conscience du Roi, s'il se croit lié par les avances espagnoles, auxquelles il s'est rendu avec si peu d'égards pour nous. Mille amitiés et tout à vous.

Signé: GRAMONT.

N° 66.

LE COMTE DE GRANVILLE A LORD LYONS.

Foreign-Office, le 10 juillet 1870.

Mylord, dans un entretien que j'ai eu aujourd'hui avec le marquis de La Valette, je lui ai dit confidentiellement que j'avais appris de M. Layard, que le général Prim, d'une façon toute officieuse, s'occu

pait avec M. Layard de rechercher le moyen de terminer la question de la succession espagnole sans atteinte à l'honneur de l'Espagne,

Le gouvernement de la Reine à la complète persuasion que le gouvernement français ne désire pas la guerre et n'envisage seulement cette extrémité que dans le but d'empêcher la réalisation d'une éventualité qu'il considérerait comme attentatoire à l'honneur et aux intérêts de la France. En exprimant cette conviction au marquis de La Valette, j'ajoutai que les nouvelles de Madrid, dont je venais justement de lui faire part, donnaient lieu d'éviter pour le moment toute décision précipitée. Je suis, etc.

N° 67.

Signé: GRANVILLE,

(Extrait.)

LORD LYONS AU COMTE DE GRANVILLE.

Paris, le 10 juillet 1870.

J'ai eu ce matin l'honneur de recevoir les dépêches de Votre Seigneurie, relatives à la question de Hohenzollern, des 6 et 8 courant, ainsi que celle d'hier.

J'ai parlé cette après-midi au due de Gramont dans le sens des deux premières dépêches d'hier. J'ai remercié Son Excellence au nom de Votre Seigneurie pour la franchise des communications qu'il m'a faites, et pour la confiance amicale qu'il a témoignée au gouvernement de Sa Majesté. J'ai fait observer que le gouvernement de Sa Majesté pouvait difficilement coinprendre que le choix du prince de Hohenzollern pour roi d'Espagne fût une affaire d'une assez grande importance pour une grande nation comme la France pour justifier des mesures extrêmes.

Faisant toute concession pour le ressentiment que le secret av ec lequel ce choix avait été mùri était de nature à produire en France, toujours est-il, ai-je dit, que le gouvernement de Sa Majesté a la confiance que le gouvernement de l'Empereur agira avec calme et modération dans la direction future de la discussion. Il ne peut que regretter le langage altier (strong language) dont ont usé le gouvernement et la presse française. Il est plus inquiet encore des préparatifs milïtaires qui sont en voie d'exécution, et doit se demander si dans cet état de choses il serait judicieux de persévérer dans ses efforts pour amener une solution amiable. Le gouvernement de Sa Majesté a, M. de Gramont le sait, usé de tous ses efforts pour arriver à une sem

blable solution, mais il ne peut s'empêcher de craindre que la précipitation des efforts du gouvernement français ne rende tous les efforts négatifs.

M. de Gramont a répondu que, dans cette affaire, les ministres français ne faisaient que suivre et non pas diriger la nation. L'opinion publique ne leur permettrait pas de faire moins qu'il n'ont fait.

Quant aux préparatifs militaires, la prudence ordinaire commande qu'ils ne soient point retardés. Au milieu d'un calme profond et alors que le cabinet français et les Chambres françaises s'occupent de réduire le budget militaire, la Prusse a fait éclater une mine qu'elle avait préparée dans le secret. Il est nécessaire que la France soit au moins aussi avancée que la Prusse dans ses préparatifs militaires.

M. de Gramont me dit ensuite qu'il allait m'expliquer exactement la position de la question. Le roi de Prusse avait dit la veille au soir à M. Benedetti qu'il avait, en effet, consenti à ce que le prince de Hohenzollern acceptât le trône d'Espagne et que, ayant donné son consentement, il lui était maintenant difficile de le retirer. Sa Majesté avait ajouté, toutefois, qu'elle donnerait une réponse définitive à la France après son entretien.

Ainsi, a fait observer M. de Gramont, deux choses sont claires, c'est que le roi de Prusse est partie consentante à l'acceptation de la Couronne par le prince, et, en second lieu, que la décision du prince à persister dans son acceptation ou à la retirer sera prise de concert avec Sa Majesté. Ainsi donc, dit M. de Gramont, l'affaire est maintenant, sans conteste, une affaire entre la France et le Roi.

Le gouvernement français voudrait, continua M. de Gramont, différer encore un peu, pendant 24 heures par exemple, ces grands et ostensibles préparatifs de guerre, tels que le rappel de la réserve, qui ont pour effet d'enflammer la France. Tous les préparatifs ostensibles doivent cependant être faits sans retard. Les ministres français seraient imprudents s'ils couraient le risque de permettre à la Prusse de gagner du temps par des prétextes dilatoires.

En terminant, M. de Gramont me dit que je pouvais annoncer à Votre Seigneurie que si le prince de Hohenzollern, sur le conseil du roi de Prusse, consentait à retirer son acceptation de la couronne d'Espagne, toute l'affaire serait finie.

M. de Gramont, toutefois, ne me cacha pas d'autre part, que si le prince, après en avoir conféré avec le Roi, persistait à se poser comme candidat au trône d'Espagne, la France déclarerait immédiatement la guerre à la Prusse.

J'envoie ce soir copie de cette dépêche confidentiellement au mi

nistre de Sa Majesté à Madrid par le courrier de cabinet, capitaine Bagge.

No 68.

(Extrait.)

M. LAYARD AU COMTE DE GRANVILLE.

Madrid, le 10 juillet 1870.

J'ai pensé mieux remplir le but des instructions contenues dans votre télégramme du 7 courant en faisant ressortir à Son Altesse, dans des termes aussi énergiques que je me croyais en droit de le faire, l'immense gravité de la situation où se trouve placée l'Espagne, l'anxiété ressentie à ce sujet par le gouvernement de la Reine et le très-ardent désir de Votre Seigneurie que des mesures compatibles avec la dignité de l'Espagne soient trouvées pour abandonner l'intention de proposer la couronne au prince de Hohenzollern, intention qui a si offensé la France et pourrait même amener la guerre.

Dans mes communications avec le général Prim et M. Sagasta j'ai fait de mon mieux, en obéissance à vos instructions, pour ne pas exercer la moindre pression qui pourrait offenser le gouvernement espagnol, et en même temps je ne leur ai pas caché l'inquiétude du gouvernement de Sa Majesté et son désir que le gouvernement espagnol trouve moyen de renoncer au projet Hohenzollern. Les représentations que j'ai faites ont été reçues d'une façon amicale et j'ai toute raison de le croire, n'ont occasionné aucun sentiment d'offense.

N° 69.

LE DUC DE GRAMONT AU COMTE BENEDETTI, A EMS.

Télégramme.)

Paris, le 11 juillet 1870, 4 heure du matin.

Vous ne pouvez vous imaginer à quel point l'opinion publique, est exaltée. Elle nous déborde de tous côtés, et nous comptons les heures. Il faut absolument insister pour obtenir une réponse du Roi. négative ou affirmative. Il nous la faut pour demain; après- demain serait trop tard.

Le régent d'Espagne, après une conférence, a décidé d'envoyer au prince quelqu'un qui sera autorisé à voir le Roi et même M. de Bismarck pour demander le retrait de la candidature; ce sera le général Dominguez ou M. Silvela. Vous pouvez vous servir de cette information si vous le jugez nécessaire au succès de vos efforts; mais il serait bien préférable pour le gouvernement de devoir le retrait de la candidature à la seule intervention du Roi.

Si vous réussissez, télégraphiez de suite et venez à Paris apporter vous-même les détails de la négociation.

No 70.

LE COMTE BENEDETTI AU DUC DE GRAMONT.

(Télégramme.)

Ems, 14 juillet, 1 h. 30 m. du soir.

Je quitte le Roi. Durant une audience que j'ai prolongée pendant une heure. j'ai invoqué tous les arguments imaginables pour déterminer S. M. à me permettre de vous annoncer qu'elle invitera le prince de Hohenzollerr à renoncer à la couronne d'Espagne, sans lui cacher cependant que je considérais ce conseil comme un ordre. Le Roi s'y est refusé, me déclarant qu'il devait laisser à son parent la plus entière liberté après comme avant son acceptation. Restant sur le terrain où il s'est placé. le Roi a prétendu qu'il sortirait du rôle d'abstention qu'il s'est tracé depuis l'origine en déférant à ma demande, et il m'a donné constamment à entendre que l'initiative de la renonciation devait venir du prince Léopold, qui a pris l'initiative de l'acceptation. J'ai combattu cette manière de voir en représentant au Roi nos nécessités intérieures. Je lui ai parlé de la défiance et de l'irritation des esprits en France, de l'obligation où nous sommes de donner publiquement des explications attendues avec impatience, des dangers nouveaux que créait chaque heure de retard, de la gloire qu'il recueillerait personnellement en interposant son autorité pour prévenir de terribles calamités. Sa Majesté a maintenu sa résolution. Après me l'avoir plusieurs fois demandé dans le cours de l'audience, le Roi, avant d'y mettre fin, m'a vivement engagé à vous télégraphier en son nom qu'il croyait recevoir ce soir ou demain une communication du prince Léopold, qui a dû rejoindre son père à Sigmaringen, et qu'il s'empresserait de me donn er une réponse définitive. Vous jugerez de l'importance qu'il faut donner à cette déclaration du Roi, et de la mesure dans laquelle il peut nous convenir d'en tenir compte

Pendant que j'insistais sur la nécessité d'adopter une prompte résolution, il a échappé au Roi de me dire : « Je n'ignore pas les pré

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