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No 19.

LE DUC DE GRAMONT AU COMTE DE BENEDETTI A WILDBAD.

(Télégramme.)

Paris, le 7 juillet 1870, onze heures quarante-cinq minutes, soir.

Partez pour Ems; un attaché que je fais partir demain matin vous y portera les intructions; il arrivera à Ems à onze heures du soir. Faites prévenir le chef de gare où vous descendrez.

N° 20.

LE DUC DE GRAMONT AU COMTE BENEDETTI.

Paris, le 7 juillet 1870.

Monsieur le comte, ayant accepté l'offre que vous m'avez faite de vous rendre à Ems auprès du roi de Prusse, je crois utile de vous envoyer ci-incluses toutes les pièces qui peuvent vous mettre au courant de la situation.

Je joins donc ici :

1o Le télégramme et le rapport par lequel M. le baron Mercier me rend compte de l'entretien où le maréchal Prim lui a parlé pour la première fois de la candidature du prince de Hohenzollern au trône d'Espagne;

20 Le télégramme que j'ai moi-même adressé à M. Le Sourd à la réception de cette grave nouvelle;

3o La réponse télégraphique et le rapport de M. Le Sourd, résu mant les explications de M. de Thile;

4° La dépêche que j'ai adressée à notre chargé d'affaires à Berlin pour lui exposer la manière de voir du gouvernement de l'Empereur et faire appel à la sagesse et à la modération du roi de Prusse;

5o La déclaration que, pressés par le sentiment public, nous avons cru devoir porter à la tribune du Corps-Législatif;

6o Un nouveau rapport de M. Mercier qui m'est parvenu ce matin, et qui donne un aperçu de l'excitation causée en Espagne par la combinaison dont le maréchal Prim est le promoteur.

Ces documents vous feront connaître l'état des choses et me dispenseront d'insister plus longuement sur la portée de l'intrigue que l'on nous a dérobée avec tant de soin et sur les explications que la seule révélation d'un projet aussi blessant pour notre dignité que contraire à nos intérêts était de nature à faire naître.

En résumé, le prince de Hohenzollern a accepté la candidature au trône qui lui avait été offerte par le maréchal Prim. Le cabinet de Berlin n'a pas ignoré les faits, mais il déclare y être demeuré étranger, officiellement du moins, et, d'après le langage tenu par M. de Thile, le prince de Hohenzollern serait seul engagé dans cette négociation.

Au point où la question en est arrivée, et avec le caractère qu'elle a pris par suite de l'émotion ressentie en France, il est d'un grand intérêt que la lumière se fasse avec les véritables dispositions de la Prusse, et nous attendons les plus utiles résultats de la mission dont vous êtes chargé auprès du Roi, car nous avons le ferme espoir qu'après avoir entendu de votre bouche l'exposé sincère et vrai de la situation telle qu'elle est réellement, S. M., avec sa haute raison, ne voudra pas laisser plus longtemps planer le doute sur les intentions de son gouvernement. Si le chef de la famille de Hohenzollern a été jusqu'ici indifférent à cette affaire, nous lui demandons de ne plus l'être, et nous le prions d'intervenir sinon par ses ordres, au moins par ses conseils, auprès du prince et de faire disparaître, avec les projets fondés par le maréchal Prim sur cette candidature, les inquiétudes profondes qu'elle a partout suscitées.

L'agitation qui en est déjà la conséquence en Espagne, l'ardeur que montrent les partis à reprendre la lutte, annoncent que la guerre civile est certaine si l'exécution de ce plan était poursuivie, et personne ne doute que, prenant possession du trône dans de telles conditions, le nouveau souverain ne fût réduit à l'impossibilité de se maintenir en Espagne. En le détournant de la pensée de s'engager davantage dans cette négociation, en lui donnant le moyen d'en sortir honorablement, le Roi lui épargnerait les épreuves d'une entreprise qui peut faire couler beaucoup de sang espagnol, mais qui ne présenterait réellement aucune chance sérieuse de réussite après les malheurs qu'elle aurait causés.

Quant à nous, monsieur le comte, nous verrions surtout dans l'intervention du roi Guillaume pour mettre obstacle à la réalisation de ce projet, les services qu'elle rendrait à la cause de la paix et le gage de l'affermissement de nos bons rapports avec la Prusse. Le gouvernement de l'Empereur apprécierait un procédé qui, l'on n'en saurait douter, recevrait en même temps l'approbation universelle. Inspirez-vous de ces considérations, faites-les valoir auprès du

Roi, et efforcez-vous d'obtenir que S. M. conseille au prince de Hohenzollern de revenir sur son acceptation.

J'attache un grand intérêt à connaître aussitôt que possible, et par le télégraphe, le résultat de vos démarches.

Agréez,

N° 21.

Signé GRAMONT.

LE DUC DE GRAMONT AU COMTE BENEDETTI.

Paris, le 7 juillet 1870, minuit.

Mon cher comte, je vous envoie le jeune Bourqueney avec un chiffre, afin que vous puissiez me renseigner le plus tôt possible sur le résul tat de votre démarche auprès du Roi. Nous savons, par les aveux du prince lui-même, qu'il a combiné toute l'affaire avec le gouvernement prussien, et nous ne pouvons pas accepter la réponse évasive avec laquelle M. de Thile cherche à sortir du dilemme qui lui a été posé. Il faut absolument que vous obteniez une réponse catégorique, suivie de ses conséquences naturelles. Or, voici la seule qui puisse nous satisfaire et empêcher la guerre :

« Le gouvernement du Roi n'approuve pas l'acceptation du prince de Hohenzollern, et lui donne l'ordre de revenir sur cette détermination, prise sans sa permission. »

Il restera ensuite à me faire savoir si le prince, obéissant à cette injonction, renonce officiellement et publiquement à sa candidature. Nous sommes très-pressés, parce qu'il faut prendre les devants dans le cas d'une réponse non satisfaisante, et dès samedi commencer les mouvements de troupes pour entrer en campagne dans quinze jours.

Vous citerez au Roi tous les exemples que vous connaissez de certaines couronnes interdites à certains princes pour des raisons d'ordre politique le duc de Nemours en Belgique, un prince anglais, russe ou français en Grèce, un Murat à Naples désavoué par l'Empereur, etc.

J'insiste surtout sur la nécessité de ne pas laisser gagner du temps par des réponses évasives; il faut que nous sachions si nous avons la paix; ou si une fin de non-recevoir nous oblige à faire la guerre.

Si vous obtenez du Roi qu'il révoque l'acceptation du prince de

Hohenzollern ce sera un immense succès et un grand service. Le Roi aura, de son côté, assuré la paix de l'Europe.

Sinon, c'est la guerre.

Quant au prince, son règne en Espagne ne durera pas un mois; mais la guerre provoquée par cette intrigue de M. de Bismarck, combien durera-t-elle, et quelles en seront les conséquences?

Ainsi donc, pas d'ambages et pas de lenteurs. Jamais mission ne fut plus importante: puissiez-vous y réussir, c'est mon vœu le plus ardent.

Tout à vous,

Signé GRAMONT.

P. S. Tenez-vous en garde contre une réponse qui consisterait à dire que le Roi abandonne le prince de Hohenzollern à son sort, et se désintéresse de tout ce qui arrivera; qu'il restera neutre en présence de toutes les éventualités qui pourraient être la conséquence de ses résolutions individuelles.

Nous ne pourrions accepter cette réponse comme satisfaisante, car le gouvernement du Roi ne peut se désintéresser aujourd'hui par de simples paroles d'une situation qu'il a contribué à créer.

Il faut qu'il la modifie. qu'il la redresse, pour que nous acceptions l'assurance de son désintéressement.

No 22.

M. MERCIER DE LOSTENDE AU DUC DE GRAMONT.

(Télégramme.)

Madrid, le 7 juillet 1870, 4 heures 20 minutes du soir.

J'ai vu le maréchal Prim. Je lui ai communiqué l'impression de l'Empereur. Répétition de notre conversation de l'autre jour, seulcment plus accentuée de ma part. Enfin, il m'a dit : « Comment sortir de là? Je ne vois qu'un moyen : que le prince me dise qu'il rencontre des obstacles au consentement du Roi, et alors, au lieu d'insister, je lui facilite sa retraite. » Je lui ai dit : « Prenez l'initiative. » Il m'a répondu qu'il ne le pouvait, et prie qu'on ignore qu'il nous a ouvert cette issue. Il me semble dificile qu'elle mène bien loin.

N° 23.

LE COMTE DE BEUST AU COMTE DUBSKÝ, A MADRID.

(Télégramme.)

Vienne, le 7 juillet 1870.

D'après une communication que vient de me faire le ministre d'Espagne, le Gouvernement a décidé de proposer la candidature Hohenzollern aux Cortès. Elle déclare que cette résolution n'est prise que pour satisfaire l'opinion nationale et qu'elle ne renferme aucun dessein inquiétant. J'ai répondu que l'idée pouvait être excellente, mais que son effet serait déplorable. La notoriété de la volonté nationale en faveur d'une combinaison qui mettait en péril la paix de l'Europe ne m'était pas connue, et il était à espérer que le peuple et le gouvernement espagnol écouteraient l'appel que la France faisait à leur sagesse et à leur amitié. Notre avis était d'autant moins suspect que nous avions en tout temps observé la plus complète impartialité et la plus grande réserve à l'égard des affaires de l'Espagne.

No 24.

M. SAGASTA, AUX REPRÉSENTANTS DE L'ESPAGNE A L'ÉTRANGER.

(Circulaire,)

Madrid, le 7 juillet 1870.

Monsieur l'ambassadeur, Votre Excellence connaît les importantes déclarations qui ont été faites au sein des Cortès constituantes, le 11 juin dernier, par Son Excellence M. le président du conseil des ministres. En exposant aux représentants de la nation espagnole les démarches jusqu'alors infructueuses qui avaient été faites dans le but de trouver un candidat au trône qu'ils ont relevé en vertu de leur incontestable souveraineté, le président du conseil leur manifesta que le gouvernement provisoire d'abord, puis le pouvoir exécutif, et plus tard le gouvernement de Son Altesse le Régent l'avaient honoré d'une confiance illimitée, l'autorisant à faire toutes les démarches et à entreprendre toutes les négociations nécessaires dans le but d'obtenir dans une question d'une si haute importance un résultat satisfaisant.

Muni de ces pleins pouvoirs, le maréchal Prim avait, dans l'accom

ARCH, DIPL. 1871-1872.

I.

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