Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

81

pen

Le 18 juin 1819, l'Autriche présenta à la conférence de Dresde la déclaration suivante : « La sée des hautes parties contractantes à Vienne paraît avoir été de reconnaître aux seuls sujets riverains le droit à la libre navigation et non d'étendre aux non riverains cet avantage pour lequel il n'y aurait pas de réciprocité. » La même opinion fut exprimée en ces termes par le gouvernement prussien dans une dépêche adressée en 1857 à son délégué près la commission européenne du Danube: « D'après les négociations du congrès de Vienne sur l'article 109, il n'est pas douteux qu'il n'a pas été dans l'intention de cet acte d'accorder aux non riverains un droit de navigation sur les fleuves conventionnels (1). »

D'ailleurs la pratique est venue confirmer cette interprétation sur les fleuves qui traversent le territoire prussien, c'est-à-dire sur l'Elbe, sur le Weser, sur l'Ems et sur le Rhin (2), comme sur les cours d'eau austro-russes, tels que la Vistule, le Dnieper et le Pruth (3). La législation rhénane de

(1) < Nach den Verhandlungen der Wiener Congres Akte, über art. 109, ist es nicht zweifelhaft dass es nicht in der Absicht jener Akte gelegen hat den Nicht-Uferstaaten ein Recht zur Schiffahrt auf den conventionnellen Flüssen beizulegen.» (Dépêche du baron de Manteuffel du 26 août 1857.)

(2) Art. 4 de l'acte de l'Elbe de 1821. Art. 42 et 3 de l'acte du Rhin de 1831. Art. 6 de l'acte de l'Ems de 1843. Art. 1 de l'acte du Weser de 1823 comparé à l'acte de l'Elbe dont il reproduit textuellement plusieurs dispositions.

(3) Convention de Saint-Pétersbourg duaoût 1818.

17

Le Douro, d'après la convention du 23 mai 1840, était abso

1831 était si formelle en ce point et telle était la rigueur du gouvernement qui s'en considérait comme le gardien, qu'il y a de longues années, une maison de commerce de Poméranie ne put noliser un bâtiment pour l'intercourse directe de Stettin à Cologne, quoique ces deux ports appartinssent à la Prusse riveraine et que l'armateur, le capitaine et les gens d'équipage fussent sujets prussiens (1). A Berlin l'on se précautionnait avec une méfiance si jalouse contre l'intervention étrangère, que l'on entendait la paralyser dans son action indirecte la plus légitime et la moins apparente, en exerçant une sorte d'inquisition sur la nationalité des capitaux engagés dans la navigation rhénane. C'est ainsi que le 12 septembre 1843 le commissaire de Prusse à Mayence remit à ses collègues un projet d'article séparé secret, d'après lequel les actionnaires étrangers des compagnies de bateaux à vapeur « n'auraient pu voter dans les assemblées et délibérations de ces compagnies » et ce droit n'aurait appartenu qu'aux actionnaires des États riverains du Rhin et à ceux des États allemands. Cette étrange motion ne fut point accueillie par la commission centrale (2).

lument fermé aux étrangers et les États riverains ne s'étaient pas même reconnu le droit au cabotage réciproque. Malgré cette double restriction, les commissaires portugais et espagnols déclarèrent dans le préambule de ladite convention qu'ils s'étaient réunis pour régler la libre navigation du Douro. (1) Débats de la chambre des communes en 1830. (2) Protocole XVIII de 1843.

83

Néanmoins, ainsi que je le faisais observer à l'instant, l'article 109 parait à première vue inoffensif; bien plus, sa lecture pour un esprit non prévenu éveille d'autant moins le soupçon ou le doute, que. le principe de liberté y apparaît sous la forme d'un double pléonasme et ce n'est qu'à l'aide du protocole qui s'y rapporte et de plusieurs règlements particuliers auxquels il a servi de base, que l'on en tire une conséquence contraire à l'égalité entre riverains et non riverains.

L'on dirait, en parcourant les actes du traité européen du 30 mars 1856 qu'à l'intervalle de près d'un demi-siècle, les puissances signataires du traité de 1815 se soient préoccupées de mettre un terme aux divergences nées de cette équivoque. Dans son article 15, déjà cité, le congrès de Paris déclare en effet vouloir étendre au Danube les principes posés par le congrès de Vienne et il stipule en conséquence que... « sauf les règlements de police et de quarantaine à établir pour la sûreté des États séparés ou traversés par le fleuve, il ne sera apporté aucun obstacle quel qu'il soit à la libre navigation. » Et comme pour mieux préciser son but quant au régime réservé à la navigation étrangère, il ajoute dans son article 16 « que sous le rapport des droits à prélever aux embouchures, comme sous tous les autres, les pavillons de toutes les nations seront traités sur le pied d'une parfaite égalité. »

La connexité qui existe dans ces textes entre la

84

mention des maximes fluviales de 1815 et celle de l'entière liberté de navigation convenue pour le Danube, semble justifier dans l'espèce cet aphorisme de Vattel: « Si celui qui s'est exprimé d'une manière obscure, a parlé ailleurs plus clairement sur le même sujet, il est le meilleur interprète de lui-même. >>

Cependant ce raisonnement ne pourrait être opposé à toutes les puissances signataires du traité de 1856, si l'on en juge par les négociations postérieures auxquelles l'exécution de ce traité a donné lieu. Comme la plus intéressée dans la question, l'Autriche a été la première à édifier ses co-contractants sur sa doctrine en matière de navigation intérieure. Elle a cru sans doute devoir se départir de l'esprit d'exclusivisme qu'elle avait apporté quarante ans plus tôt dans les conférences de l'Elbe; mais tout en ne repoussant pas le concours des pavillons étrangers (j'indiquerai ailleurs dans quelles limites), elle n'en a pas moins prétendu laisser entre les mains des seuls sujets riverains le trafic fluvial proprement dit.

Or en s'expliquant en 1858 sur cette importante réserve, le cabinet de Vienne n'a pas hésité à la défendre en invoquant précisément le texte rédigé M. de Humboldt en 1815 et l'explication donnée à cette époque aux mots «< sous le rapport du commerce (1).

par

(1) Conférence de Paris du 16 août 1868.

Ainsi, aux yeux de l'Autriche, le second traité de Paris ne pouvait être considéré comme une interprétation nouvelle du traité de 1815.

La Prusse, on le conçoit, n'eut garde de se démentir en soutenant un avis contraire; mais envisageant la thèse sous un autre aspect, elle arriva à condamner le système que le gouvernement impérial entendait introduire sur le courant danubien. Pour elle, le traité de 1815, consulté sur le point en discussion, avait réellement le sens limitatif que lui ont reconnu les riverains de l'Elbe, du Weser et du Rhin. Mais le congrès de 1856 avait innové dans le cas spécial soumis à ses délibérations; il avait positivement élargi pour le Danube, mais pour ce fleuve seulement, les principes de 1815 (1)..

L'argumentation de la France se réduisit à cette simple observation : « Si des doutes pouvaient exister sur l'esprit et sur la portée des maximes du congrès de Vienne, ils seraient dissipés par la disposition primitive et fondamentale du traité de 1814 », qui porte en substance que sur le Rhin et éventuellement sur les autres fleuves internationaux <«< la navigation sera libre, de telle sorte qu'elle ne puisse être interdite à personne. »

Quant à l'Angleterre, elle exposa nettement sa pensée sur la valeur de l'article 10) du traité de 1815 en déclarant que, selon elle, l'expression

(1) Mémoire du gouvernement prussien inséré dans les archives commerciales de Prusse du 19 mars 1858.

« ZurückWeiter »