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forcée avec obligation de rompre charge, reposaient sur un abus flagrant.

Ce sont ces dernières que le congrès de Vienne s'est proposé d'abolir à jamais, tout en déterminant les conditions sous lesquelles les autres pourraient être maintenues.

:

Toutefois l'on retrouve dans les décisions prises à cet effet en 1815 la trace d'hésitations analogues à celles que révèle la définition ambiguë donnée à cette époque au principe de la liberté fluviale (1). Il n'y avait cependant point à se méprendre sur la nature de la réforme que réclamait alors l'opinion publique l'on entendait que la navigation intérieure fùt désormais et définitivement affranchie de l'arbitraire financier des autorités riveraines et que les taxes qu'elle aurait à acquitter « ne fussent plus considérées comme une source de revenus directs. » C'est en ces propres termes que s'exprimait lord Clancarty dans la séance du 3 mars 1815, apportant dans cette question spéciale la netteté et l'esprit pratique dont il avait déjà donné plus d'une preuve à ses méticuleux collègues.

L'on se persuada sans doute que cette formule anglaise était trop peu diplomatique, qu'elle assignait à l'autonomie des États intéressés une limite peutêtre embarrassante et en la repoussant, il est vrai semblable que le comité du congrès se préoccupa de certaines rentes auxquelles continuait à pourvoir

(1) Voir pages 33 à 39; 74 à 100.

l'administration rhénane. Aussi pour tout concilier, recommanda-t-il, « comme norme approximative », l'octroi en vigueur sur le Rhin.

Sauf cette critique qu'atténuent d'ailleurs les difficultés inhérentes au règlement de ce point délicat, l'on ne peut que rendre hommage aux vues relativement libérales qui ont inspiré l'article 3 du traité de Vienne.

Cette clause importante que, pour plus de clarté, je diviserai en paragraphes, est ainsi conçue :

§ 1. « Les droits de navigation seront fixés d'une manière uniforme, invariable et assez indépendante de la qualité différente des marchandises pour ne pas rendre nécessaire un examen détaillé de la cargaison, autrement que pour cause de fraude et de contravention. >>

§ 2. « La quotité de ces droits sera fixée d'après les circonstances locales, qui ne permettent guère d'établir une règle générale à cet égard. »

§3 « Ces droits ne pourront en aucun cas excéder ceux existants actuellement. »

§ 4. « On partira, en dressant le tarif, du point. de vue d'encourager le commerce, en facilitant la navigation, et l'octroi établi sur le Rhin pourra servir de norme approximative. >>

De même que la rédaction de M. de Humboldt relative au libre exercice de la navigation fluviale a donné lieu à des distinctions contraires au droit des pavillons étrangers, de même aussi les stipulations qui précèdent ont été diversement expli

quées comme des textes obscurs « où chacun fait sa glose ».

Ainsi plus d'un gouvernement a prétendu qu'en subordonnant aux conditions locales la quotité des taxes de navigation, tout en déclarant que ces taxes ne pourraient dépasser celles déjà existantes au temps du congrès de Vienne, l'on avait autorisé les États riverains à établir le tarif qu'ils jugeraient convenable, sans qu'ils fussent tenus de prendre pour base de leurs évaluations les seuls intérêts de la batellerie commune (1).

Quelques-uns ont même soutenu qu'en indiquant comme taux maximum l'octroi perçu en 1815 sur le Rhin, le congrès avait formellement sanctionné toutes les impositions fluviales qui étaient levées à cette époque, quelles qu'en fussent la légalité, l'origine et la destination et que dès lors il dépendait du bon vouloir de chaque État de changer ou de maintenir telles quelles ces diverses impositions.

L'on allait même plus loin dans cette étrange argumentation en alléguant que l'octroi du Rhin ayant été proposé comme norme approximative et cet octroi servant en partie, comme autrefois celui de la Meuse (2) à couvrir quelques anciennes charges étrangères à la navigation, les signataires du traité de Vienne avaient implicitement reconnu le principe que le tarif fluvial pourrait être « une source de revenus directs ». L'on appuyait d'ailleurs ce

(1) Voir l'ouvrage « die Elbzölle », Leipsik, 1860. (2) Traité de barrière du 15 novembre 1715.

lord

raisonnement du fait que le comité de 1815 avait rejeté l'explication contraire donnée par Clancarty.

Et lorsque l'on opposait à ces ingénieux commentateurs le libellé si formel du § 4 qui prescrivait d'avoir en vue dans l'élaboration du tarif les intérêts du commerce et de la navigation, ils répondaient que ce texte était tellement inconséquent qu'il n'y avait pas lieu d'en tenir compte. Selon eux, en effet, l'on ne pouvait sérieusement considérer une taxe, quelque minime qu'elle fût, comme un stimulant, et par conséquent comme un bienfait pour les industries qui devaient l'acquitter, et que « dresser un tarif » et en même temps « encourager le commerce et faciliter la navigation étaient des actes absolument contradictoires.

Ces arguties montrent jusqu'à quel point la réforme fluviale, si juste, si opportune, si naturelle qu'elle paraisse aujourd'hui, a été longtemps contestée, combattue, paralysée, et surtout combien, dans un dispositif qui vise, comme celui dont il s'agit, des pratiques consacrées par un long usage, il convient de prévoir les résistances et les subtilités de l'égoïsme et de la routine.

L'article 3 (est-il besoin d'y insister?) est d'une lecture aussi simple que son sens est logique. Aux perceptions multiples, variables et tracassières, il substitue des droits uniformes, fixes et aussi indépendants que possible de la nature des cargaisons. Comme d'ailleurs il a pour but de formuler une

règle générale applicable à tous les fleuves communs, il ne peut naturellement déterminer d'avance le taux de ces droits, puisqu'ils doivent surtout dépendre de l'importance des travaux d'entretien qui ne sauraient être sur le Weser les mêmes que sur le Pô; mais il leur assigne une limite maxima, en disposant d'une part qu'ils n'excéderont en aucun cas les droits actuellement perçus, et d'autre part que les tarifs nouveaux pourront être calqués sur celui du Rhin. Et afin d'empêcher que sur telle ou telle voie conventionnelle la communauté riveraine, abusant de la latitude qui lui était nécessairement laissée, ne réclamât de la batellerie des redevances excessives, l'article ajoute qu'en établissant l'octroi fluvial, l'on se préoccupera de satisfaire aux exigences légitimes du commerce et de la navigation, disposition qui n'associe nullement deux idées incohérentes et à laquelle la mauvaise foi seule peut prêter un sens contradictoire et par conséquent absurde.

$ 2.

Les stipulations de 1815 sur le service des taxes fluviales n'auraient point suscité les discussions subtiles que je viens de résumer, si elles avaient fait nettement ressortir le principe fondamental dont elles n'étaient que l'expression affaiblie, principe que lord Clancarty proposait de reconnaître par cette simple déclaration : « L'octroi ne pourra être considéré comme une source de revenus

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