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Aussi longtemps que le système d'impôt qui frappe les produits agricoles restera maintenu, la production restera réduite; le droit de propriété concédé seul, dans les termes les plus larges et les plus libéraux, sans distinction de races ni de nationalités, serait insuffisant.

A la dîme du dixième du revenu qui frappe le propriétaire foncier, il faut ajouter les droits qui frappent actuellement l'exportation de province à province et l'exportation à l'étranger. Ces deux impôts retombent en totalité sur le producteur : l'acheteur ne tient pas compte des charges qui ont été acquittées par la denrée qui lui est offerte; la concurrence entre les provenances diverses lui sert à établir son prix d'achat, qui représente ce qui est donné au vendeur en échange de l'ensemble des frais jusqu'au moment de la livraison. Quoi qu'on fasse, tout retombe sur le producteur : plus les frais accessoires ajoutés au prix des produits pris sur les lieux de production sont élevés, moins il reste de bénéfice pour lui.

Il est donc indispensable d'abaisser d'abord les droits d'exportation, de tendre à les supprimer complétement à l'aide de réductions successives, comme nous l'avons expliqué (page 121), et de rechercher les meilleurs moyens d'établir un système unique d'impôt qui soumettrait toutes les propriétés à l'action du fisc.

A côté de la propriété privée, qui ne peut lutter à armes égales avec les biens vacoufs, exempts d'impôts, on trouve Constantinople et sa banlieue, dont les maisons, ayant un revenu certain, invariable, bien moins aléatoire que le revenu des champs, sont affranchies de toute taxe, et offrent aux capitaux un placement bien

plus avantageux que celui que leur offre l'agriculture. Si la Turquie est fermement résolue à sortir de l'état de gêne qui la paralyse et la ronge, si elle veut s'arracher à la ruine, elle ne peut y parvenir qu'en rendant la vie à son agriculture et à son exportation.

Pour cela il faut :

Droit de propriété incontestable et légale pour tous les habitants, sans distinction de races ni de nationalités;

Égalité de droits et égalité de charges; égalité devant l'impôt, quels que soient les biens: propriétés particulières ou religieuses, rurales ou urbaines, européennes ou asiatiques, toutes doivent passer sous le niveau égalitaire du fisc, et concourir à former les revenus de l'État ;

Exportation libre de droits de province à province, et de la Turquie à l'étranger, afin que l'agriculture ottomane se trouve, dans l'Empire comme au dehors, placée sous un régime qui lui permette de soutenir la concurrence que la fertilité du sol lui rendra facile.

Avec ces réformes, l'agriculture reprendra son essor, la prospérité renaîtra, et l'empire ottoman redeviendra une grande puissance.

CHAPITRE XV.

INDUSTRIE.

Nous avons vu quel est l'état déplorable de l'agriculture; l'étude que nous allons faire de l'industrie nous montrera une situation encore plus triste. L'industrie n'existe plus, pour ainsi dire.

Cependant la religion mahométane encourage l'industrie comme elle encourage l'agriculture; elle invite même l'homme à s'y livrer.

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Le Koran dit : « Le travail, l'art, l'industrie, garan<< tissent l'homme de la nécessité. O mon serviteur! «meus ta main, et les richesses y descendront en abon<< dance. »>

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Enseignez la science, a dit Mahomet, car celui qui « la désire l'adore; qui en parle loue le Seigneur; qui << dispute pour elle livre un combat sacré, qui la répand « distribue l'aumône aux ignorants, et qui la possède << devient un objet de vénération et de bienveillance. Les << anges briguent l'amitié des savants et les couvrent de « leurs ailes. Les monuments de ces hommes sont les « seuls qui restent, car leurs hauts faits servent de mo« dèle et sont respectés par les grandes âmes qui les <<< imitent. >>

L'histoire nous prouve que ces sages préceptes ont été observés par les premiers musulmans, continuateurs des traditions bibliques. Si l'Ancien Testament nous montre Adam cultivateur, Noé charpentier, David armurier, Salomon vannier, l'islamisme au berceau nous montre aussi Mahomet conducteur de chameaux, commerçant en Yémen, puis dirigeant en Syrie, à l'âge de vingt-cinq ans, les entreprises commerciales de Khadidja, riche veuve qu'il épousa à son retour; Ali, son cousin et son gendre, serviteur à gages; Abou-Bekr, son beau père, le premier des khalifes, tisserand; Omar travaillant les cuirs, Osman marchand de comestibles, etc.

L'exercice de ces professions n'excluait pas plus chez les chefs que chez le peuple l'instruction et les connaissances variées.

Pococke avance que les Arabes ont conservé à l'Europe la connaissance des lettres grecques; Sprenger prétend qu'ils ont créé, pour ainsi dire, la chimie et la pharmacie; Grüner vante leurs connaissances médicales; Montucla leur attribue l'invention de l'algèbre; Toderini leur prête des idées avancées sur l'optique, les lunettes et les clepsydres; J. Burat, l'invention de la porcelaine émaillée; Albategnus, d'après Bailly, avait soulevé un coin du voile qui cachait la découverte qui a immortalisé Newton, etc., etc.

Lorsque l'invasion arabe accomplissait sa marche rapide vers l'Occident, les lettres, les sciences, les arts, l'industrie, étaient chez les Orientaux à la hauteur de leur génie et de leur puissance militaires. L'Europe était, à cette époque, plongée dans les ténèbres de l'i

.gnorance et de la barbarie. Ces duels séculaires, cette lutte gigantesque engagée entre l'Orient et l'Occident, ont ranimé les forces de l'Europe, pendant que la race musulmane, qui avait dépensé sa vigueur juvénile dans cet élan immense qui semblait devoir lui asservir le monde, est entrée dans une période de décadence. C'est au contact des races orientales, aux guerres des croisades, que l'Europe a dû sa renaissance et l'esprit d'entreprises commerciales que provoquent toujours les grandes migrations de populations armées.

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« Commencées au nom et sous l'influence des croyan«< ces religieuses, les croisades ont enlevé aux idées re— << ligieuses, je ne dirai pas leur part légitime d'influence, <«< mais la possession exclusive et despotique de l'esprit « humain. Ce résultat, bien imprévu sans doute, est né << de plusieurs causes. La première, c'est évidemment « la nouveauté, l'étendue, la variété du spectacle qui s'est offert aux yeux des croisés. Il leur est arrivé ce qui arrive aux voyageurs. C'est un lieu commun que « de dire que l'esprit des voyageurs s'affranchit; que « l'habitude d'observer des peuples divers, des mœurs, « des opinions différentes, étend les idées, dégage le ju«gement des anciens préjugés. Le même fait s'est ac«< compli chez ces peuples voyageurs qu'on a appelés les <«< croisés : leur esprit s'est ouvert et élevé par cela seul «< qu'ils ont vu une multitude de choses différentes, qu'ils « ont connu d'autres mœurs que les leurs. Ils se sont « trouvés d'ailleurs en relation avec deux civilisations, << non-seulement différentes, mais plus avancées : la so«< ciété grecque d'une part, la société musulmane de « l'autre. Nul doute que la société grecque, quoique sa

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