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et en même temps justement incriminé par ceux pour lesquels cette exécution des contrats était nécessaire.

Il y a, pour cette situation, deux solutions opposées également arbitraires, et il y en a nécessairement une équitable.

L'une des solutions arbitraires, celle que l'on a adoptée par les lois précédentes, et notamment celle du 10 mars, consiste à accorder des délais, sursis toujours accepté par les condamnés qui retardent leurs cris de malédiction jusqu'au moment où ces délais expirent.

L'autre solution, également arbitraire, mais moins usurpatrice, eût consisté à décliner d'autorité toute responsabilité pour l'État, à déclarer que les événements étaient comme les saisons, dans la main de la Providence, que l'État ne pouvait, pour chaque décision politique qu'il devait prendre, s'enquérir si tel futur contingent serait favorable on non aux accepteurs, souscripteurs et endosseurs d'effets de commerce, que c'était l'alea ordinaire des opérations commerciales et des entreprises humaines, qu'il n'avait par conséquent qu'à laisser le droit commun et l'initiative individuelle se combiner librement pour parer aux difficultés des échéances. On ne saurait nier que cette dernière façon d'agir eût été plus conforme au principe de la liberté économique et qu'en fait les intéressés auraient peut-être trouvé d'eux-mêmes le meilleur parti à tirer d'une mauvaise situation; mais cette attitude n'a pas été adoptée.

La solution réellement équitable a été entrevue par divers membres de l'assemblée, à propos de la question des loyers, proche parente de celle des échéances. Dans cette solution, l'État acquiert réellement le DROIT d'intervenir entre les particuliers, parce qu'il se reconnaît le DEVOIR d'indemniser la partie lésée par sa faute. L'État, représentant la nation entière, reconnaît la solidarité de tous les membres de la nation et la justice de répartir sur tous, fardeau supportable pour chacun, le dommage souffert pour elle par les plus exposés.

L'art. 8 du projet de loi sur les loyers, qui posait ce principe parfaitement conforme à l'esprit de notre législation, a été repoussé avec effroi, non que la justice en fût contestée, mais en raison de la difficulté d'exécution. Comment indemniser les propriétaires? Ne faudrait-il pas indemniser aussi les locataires, les fermiers, indemniser les victimes des réquisitions de guerre en nature ou en argent, indemniser l'atelier agricole et industriel dévasté, ruiné, et cela en plus d'une indemnité de 5 milliards qu'il faut payer à l'ennemi? Comment y suffire? Cette façon d'argumenter, de se refuser aux impérieuses lois du raisonnement par l'embarras d'y conformer sa conduite est celle de la plupart des hommes et des assemblées,

mais n'a aucune valeur scientifique. Un problème existe-t-il plus ou moins parce que la solution en est trouvée ou non? N'est-il pas indispensable même, pour que cette solution soit trouvée, que toutes les données du problème aient été posées et reconnues justes? Cette énumération des intérêts à indemniser, des questions à résoudre, qui a effrayé l'Assemblée, constitue précisément les données du problème économique posé à la France par le cataclysme de 1870-71. Ce problème ne disparaîtra pas parce que l'on se couvrira les yeux pour ne pas le voir.

Est-il rationnel, scientifique et moral d'attendre, avant de reconnaître un devoir démontré, de savoir d'abord comment l'on s'y prendra pour le remplir, d'introduire, dans les questions du DROIT, les tactiques pitoyables de la politique sans principe, d'opposer la chicane à la démonstration, d'épuiser les ressources de la subtilité pour se dérober aux conséquences de la logique ? Si, au contraire, en politique pure comme en économie, l'esprit s'élevant au-dessus de considérations mesquines, planait dans la sphère de la raison et du droit, nul doute qu'il y trouverait l'inspiration salutaire et la solution honorable des problêmes devant lesquels le sentiment du juste et du vrai ne permet pas de reculer.

EUG. PACINI.

BULLETIN

EXPOSÉ DES MOTIFS POUR L'EMPRUNT DE DEUX MILLIARDS
CINQ CENTS MILLIONS.

Le traité de paix définitif entre la France et l'Allemagne a été signé le 10 mai à Francfort et les ratifications en ont été échangées le 20 du même mois.

Vous connaissez, Messieurs, les obligations qui résultent de ce traité : deux milliards doivent être payés à l'Allemagne avant le 1er mai prochain. Trois milliards, dont l'intérêt sera assuré dans nos budgets de chaque année, seront remboursés en 1874 à l'aide de négociations financières qui auront lieu seulement vers le moment de leur échéance.

D'ici à cette époque, nous n'avons à nous occuper que des payements indispensables pour délivrer le pays des troupes allemandes qui l'occu pent encore et imposent à la dignité et aux intérêts de nos compatriotes les plus pénibles sacrifices.

En prolongeant de près de trois mois les souffrances des populations

comprises dans les départements occupés, l'odieuse et criminelle insurrection, dont l'anéantissement vient de mettre en relief une fois de plus l'incomparable bravoure de nos soldats et leur dévouement à la cause de l'ordre, a rendu plus urgentes encore les mesures financières que nous avons à vous proposer.

Aux termes du traité de paix, ce n'est qu'après le versement des trois premiers demi-milliards (1,500,000,000 francs que la France sera replacée, vis-à-vis de l'Allemagne, dans les conditions qui résultaient pour elle des préliminaires de paix du 26 février, et que le nombre des troupes d'occupation sera réduit au chiffre déterminé par la convention militaire du 11 mars.

Il importe avant tout de hâter ce résultat. Nos concitoyens y trouveront le soulagement moral et matériel qu'ils attendent avec une légitime impatience et que nous eussions voulu nous-mêmes leur apporter plus tôt; d'un autre côté, le trésor verra les dépenses mises à sa charge pour l'alimentation des troupes allemandes notablement réduites.

Mais le gouvernement n'a pas pensé que là dussent s'arrêter les vœux de l'assemblée et du pays.

L'intérêt général commande, selon lui, de limiter immédiatement l'occupation à la zone déterminée dans les préliminaires de paix et comprenant, indépendamment de Belfort, les six départements de la Marne, de la Meuse, des Ardennes, des Vosges, de la Meurthe et de la HauteMarne.

Il est indispensable pour atteindre ce but, de porter à deux milliards la somme à payer à l'Allemagne.

Nous venons avec confiance, Messieurs, réclamer de vous les autorisations nécessaires pour faire face à ces payements.

Mais malheureusement nous ne pouvons nous borner à cette première demande. Les travaux entrepris pour établir les résultats financiers des exercices 1870 et 1871 nous permettent, en effet, de constater l'existence de déficits notables dans les recettes de l'exercice 1870, et, nous ne pouvons vous le dissimuler, les recettes de l'exercice 1871 seront certainement au-dessous des prévisions.

En admettant que ces déficits soient sensiblement atténués par de fortes réductions de dépenses dans les six derniers mois de cette année, par la perception d'impôts nouveaux et par une reprise générale et rigoureuse du travail et des affaires, nous ne pouvons cependant concevoir l'espoir de voir descendre au-dessous du chiffre de 500 millions le montant des découverts dont nous sommes menacés, toutes compensations faites, pour les deux exercices.

L'emprunt seul peut nous permettre de parer à ces multiples et douloureuses exigences, et de rétablir nos budgets dans une situation normale.

Le gouvernement vous demande en conséquence la faculté de contracter un emprunt dont le chiffre pourra s'élever à 2,500,000,000 de fr.; mais il y a lieu de croire que cette somme est une limite extrême qu'il ne sera pas obligé d'atteindre.

L'opération financière que nous allons entreprendre est la plus importante de toutes celles qui aient jamais été tentées, et si, pour en assurer le succès, nous avons le droit de compter sur la confiance que notre grand et généreux pays n'a cessé d'inspirer aux nations étrangères, nous comptons plus encore sur l'énergique concours que, dans son patriotisme, la France entière ne peut manquer de nous apporter.

Grâce à tous ces efforts, nous avons la conviction qu'il nous sera possible d'offrir à l'Allemagne, dans un avenir prochain, des garanties financières qui, fortifiées déjà par l'exécution loyale des engagements pris, seront acceptées par elle et nous permettront ainsi de délivrer proptements les départements de la Champagne et de la Larraine de l'occupation étrangère.

Ne perdons pas de vue, Messieurs, qu'aujourd'hui la question financière domine de toute sa gravité la question politique; n'oublions pas que non-seulement les Prussiens foulent encore notre sol, mais que les engagements pris par nous et non exécutés les ramèneraient fatalement dans nos foyers déjà délivrés de leur présence.

Nous reverrions donc ces masses ennemies, que nos conventions antérieures ont rejetées au-delà de la Seine, réenvahir nos départements de l'ouest et du midi, pressurer le pays et exiger peut-être des sacrifices plus douloureux encore que ceux imposés par eux lors de la première invasion.

Que l'étranger s'éloigne! voilà le cri de la France; que l'étranger s'éloigne ! voilà le cri de nos cœurs, qui tous battent à l'unisson, et coupables de lèse-nation seraient ceux qui, par une agitation soit réelle, soit factice, viendraient jeter l'inquiétude dans les esprits et entraver le succès d'une heureuse entreprise d'où dépend le salut de la patrie.

La France a engagé sa parole; elle ne reculera devant aucun sacrifice, quelque lourd qu'il soit, pour la respecter.

Mais, pour réaliser ces promesses, ces obligations, il lui faut l'ordre et la tranquillité, et nous n'hésitons pas, pour obtenir l'un et l'autre, à faire un énergique appel aux sentiments patriotiques de tous les Français.

Il faut, devant la grande opération qui se prépare, que nos divisions s'effacent ; il faut que le travail renaisse, que notre commerce se réveille, que les relations se rétablissent et qu'enfin le crédit reprenne tout son essor. C'est avec l'aide de l'assemblée nationale que le gouvernement espère accomplir cette noble et sainte tâche de la pacification des esprits et de la libération du pays.

Cet emprunt aura pour effet d'imposer à l'État la création de charges nouvelles; mais les éléments déjà recueillis, pour la préparation du budget de 1872, me laissent la conviction qu'elles n'excéderont pas les forces vives du pays. Vous reconnaîtrez certainement, Messieurs, lorsque ce document vous sera soumis, que, sans porter atteinte au progrès de son agriculture et de son industrie, au développement de son commerce intérieur, extérieur, la France peut trouver en elle les ressources nécessaires pour faire face à toutes ses obligations.

Le chiffre de notre dette se trouvera considérablement accru; mais le gouvernement est tellement résolu à introduire dans nos finances l'économie la plus stricte et la plus sévère, qu'à l'exemple des États-Unis il pourra réduire, par des mesures d'un effet rapide et certain, ces charges nouvelles. C'est ainsi que nous verrons renaître avec l'ordre et le travail, seuls éléments de la véritable richesse, une prospérité réelle et durable, qui garantira aux épargnes et à tous les capitaux qui nous auront été confiés, une solide et légitime rémunération.

Alors, Messieurs, la France, à l'abri de toutes nouvelles convulsions révolutionnaires, délivrée de la présence de l'étranger, pourra, dans toute sa liberté et dans toute son indépendance, choisir la forme définitive du gouvernement qui devra assurer désormais sa stabilité et sa puissance.

Projet de loi.

Le président du conseil des ministres, chef du pouvoir exécutif de la République française, propose à l'Assemblée nationale le projet de loi suivant, qui sera présenté par le ministre des finances chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.

Article 1er. Le ministre des finances est autorisé à contracter un emprunt dont le chiffre pourra s'élever jusqu'à 2,500,000,000 de fr. ; il en fera la réalisation dans la forme, aux taux et aux conditions qui concilieront le mieux les intérêts du Trésor avec la facilité des négociations.

Art. 2. Sera compris dans ce chiffre de 2,500,000,000 de fr. la somme nécessaire pour couvrir les dépenses matérielles de l'emprunt, ainsi que tous les frais quelconques de change, transports et négociations. (POUYER-QUERTIER.)

ÉVALUATION DES CHARGES EXTRAORDINAIRES DE LA FRANCE ET MOYENS D'Y FAIRE FACE PAR LES DIVERSES CONTRIBUTIONS, L'IMPOT SUR LE REVENU, ETC.

M. Victor Bonnet a publié dans la Revue des Deux-Mondes (livraisons 1er et 13 avril dernier), des articles sur le remaniement de nos impôts

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