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RÉSUMÉ

DES

PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES

DU MOIS DE MARS 1908

PROCÈS-VERBAL

DE LA

SÉANCE DU 6 MARS 1908

PRÉSIDENCE DE M. E. REUMAUX, Président.

La séance est ouverte à 8 heures trois quarts.

Le Procès-verbal de la précédente séance est adopté.

M. LE PRÉSIDENT fait connaitre que notre Collègue, M. F.-J. Pillet, signale, comme suite à la lettre de M. P. Besson, insérée dans le procès-verbal de la séance du 21 février, qu'il a exprimé lui-même une opinion analogue à deux reprises différentes: l'une sous le titre Avenir de la Navigation aérienne, inséré dans le journal l'Aéronaute, de janvier, février et mars 1901; l'autre dans une étude sur La Vision cérébrale, classée dans la Bibliothèque de notre Société sous le n° 44346.

Une note de M. R. Arnoux, relative aux moteurs à mélange tonnant à grande puissance massique et à la discussion sur ce sujet qui a eu lieu dans la séance du 21 février, est déposée sur le Bureau et sera jointe au dossier de la discussion. Les Collègues que ces questions intéressent pourront consulter cette note aux Archives.

M. LE PRÉSIDENT a le regret de faire connaitre le décès de M. E. FortinHermann. Membre de la Société depuis 1858, fondateur de la Société d'Entreprise générale de distributions et concessions d'eau et de gaz et de travaux publics, administrateur de la Compagnie du gaz, de l'électricité et régie cointéressée des Eaux de Tunis et de la Société Parisienne de publicité.

M. le Président adresse à la famille de ce Collègue les sentiments de douloureuse sympathie de la Société.

M. LE PRÉSIDENT dépose sur le Bureau la liste des ouvrages recus. Cette liste sera insérée dans l'un des plus prochains Bulletins.

M. LE PRÉSIDENT fait connaitre que le Gouvernement du Transvaal et la Chambre des Mines de ce même pays ont ouvert un concours pour primer la meilleure foreuse pratique de petite dimension. Les Prix qui seront distribués seront de 100 000 et 25000 f.

M. LE PRÉSIDENT dit que M. Calmettes, Président de la 5e Section du Comité (Physique et Chimie industrielle) a été nommé délégué de la Société au 2o Congrès international de Sucrerie et des industries de Fermentation, annoncé dans la séance du 21 février.

Le Congrès Colonial Français, auquel MM. Bel et Faucher ont été nommés délégués dans la séance du 24 janvier dernier, se réunira à Paris, le 1er juin, à l'École de Hautes Études Commerciales, 108, boulevard Malesherbes.

M. P. BESSON a la parole pour sa communication sur la Crise de l'apprentissage.

M. P. BESSON rappelle que la crise de l'apprentissage n'est pas chose nouvelle; le 1er décembre 1872, M. Gréard s'exprimait ainsi à la Commission d'enquête sur l'Enseignement professionnel, instituée sur la demande du duc d'Audiffret-Pasquier: «L'apprentissage s'en va; bientôt il n'existera plus ».

A l'heure qu'il est on peut dire que l'on ne fait plus d'apprentis, au plus grand préjudice de la plupart des industries de fin, optique, instruments de précision, mécanique, électricité, instruments de musique, industrie du livre, du meuble, de la carrosserie, armurerie, etc.

La crise est mondiale, mais elle sévit surtout en France, les remèdes n'ayant pas été apportés et, au contraire, la législation ayant porté une entrave complète au recrutement des apprentis.

Les causes de la crise de l'apprentissage peuvent se diviser en plusieurs catégories :

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1° Causes morales. La classe ouvrière cherche de toute facon à ce que ses enfants n'aillent pas à l'atelier, on recherche des places de fonctionnaires ou d'employés; c'est l'opinion de M. Gustave Le Bon dans son ouvrage La Psychologie de l'Education; c'est celle de M. Keller; c'est celle de Diderot dans l'Encyclopédie. « Nos artisans se sont crus méprisables, parce qu'on les a méprisés. Apprenons leur à mieux penser d'eux-mêmes, c'est le seul moyen d'obtenir des producteurs parfaits »; 2o Causes économiques. Devant les besoins croissants, les parents désirant que les enfants gagnent de suite, les dirigent vers le commerce plutôt que vers l'atelier; le patron, d'autre part, ne tient pas à se charger d'apprentis qui ne travaillent pas et qui empêchent les ouvriers de produire autant; enfin, avec le progrès du machinisme et les continuelles modifications dans l'industrie, on comprend qu'un ouvrier hésite à faire un long apprentissage qui peut lui être totalement inutile;

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3° Causes législatives. La loi du 22 février 1851 prévoyait un contrat écrit, verbal ou pas de contrat; en fait, jamais le contrat écrit n'a

été beaucoup pratiqué; en 1860, sur 19 742 apprentis, il y avait seulement 4 500 contrats écrits; le contrat verbal n'est guère observé par les partis qui cherchent surtout à n'être pas liés. L'État a commencé à réglementer les heures de travail pour les enfants par la loi du 19 mai 1874; c'est sous le cabinet peu révolutionnaire du duc de Broglie que la loi fut présentée par M. de Meaux; elle défendait le travail de nuit et organisait l'inspection du travail; après sont venues les lois du 2 novembre 1892, la Circulaire ministérielle du 14 octobre 1899, enfin la fameuse loi du 30 mars 1900, qui fait couler tant d'encre : l'article premier de la loi fixe le maximum des heures de travail pour les enfants ágés de moins de dix-huit ans à dix heures, et l'article 2 fixe également ce maximum à dix heures pour les adultes qui sont utilisés conjointement avec les enfants, même quand lesdits enfants ne sont plus présents à l'atelier.

Patrons et ouvriers ont été d'accord pour supprimer les apprentis devant cette impossibilité de faire des heures supplémentaires, ou des travaux nocturnes; en fait, l'apprentissage a été reporté à dix-huit ans, au plus grand profit du recrutement des apaches, vagabonds, alcooliques; il y a lieu de souhaiter que, tout d'abord, le Parlement vote la proposition de loi de M. Rudelle, abrogeant ce malheureux article 2.

ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL. L'enseignement professionnel n'a pas la prétention de remplacer l'apprentissage, mais simplement de donner aux apprentis des notions générales scientifiques, dessin ou autre. permettant de leur ouvrir un débouché plus large dans l'avenir. M. Gréard au Congrès de 1889, et M. René Leblanc, Inspecteur général de l'enseignement professionnel, sont d'accord sur ce point. Malheureusement, ȧ peine 50 000 enfants reçoivent cet enseignement, alors qu'on estime le nombre nécessaire à 500 000; à Paris, on compte seulement 1500 enfants dans les écoles professionnelles, les écoles primaires supérieures et les cours complémentaires, sur 15 000 élèves sortant des écoles primaires. Dans les écoles de l'Etat l'enseignement n'est pas assez pratique, il est trop dogmatique; c'est ce qui fait que les écoles professionnelles de la Ville de Paris fournissent, à côté d'ouvriers de tout premier ordre, des jeunes gens beaucoup moins bons que ceux fournis par l'atelier et ayant par contre beaucoup de prétentions.

Pour ce qui est des écoles primaires supérieures, M. René Leblanc lui-même est obligé d'avouer qu'au 1er janvier 1903, sur un total de 43 293 élèves, on n'en trouve que 6054 suivant les sections professionnelles, soit 28 0/0; en 1907, sur 46 193 élèves on en trouve seulement 6000 dans les dites sections, soit 12.980/0. Il y a quelques années, M. Méline écrivait qu'en France il y avait 82 écoles d'agriculture, coutant 4 millions de francs, avec 651 professeurs et 2850 élèves, soit 4 élèves par professeur. Dans ces conditions, le coût d'un élève est de 1400 f par an!

Les Associations privées font ce qu'elles peuvent, mais, sur les 4 223 cours où sont inscrits 93 000 auditeurs, combien y en a-t-il qui sont suivis ?

Le seul remède, c'est de fonder des cours de demi-temps de 4 h. 1/2 à 6 h. 1/2, d'encourager patrons et ouvriers à les faire fréquenter, leur

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montrer que tous y trouveront leur avantage. Le Conseil du Travail et la Ligue de l'Enseignement demandent que l'enseignement professionnel soit obligatoire; outre l'impossibilité matérielle, il est plus que probable que cette obligation resterait lettre morte devant l'impopularité qu'elle aurait à subir de la part des ouvriers et des patrons. On ne peut obliger un patron à faire des apprentis; si on lui met des obstacles ou des entraves, il n'en fera pas, et la crise de l'apprentissage restera insoluble. Il en est de même si on veut le soumettre à la visite de véritables délégués du travail, patrons ou ouvriers, pour reconnaître si l'apprentissage est bien réel; nous sommes par contre d'accord pour dire que s'il y a un contrat d'apprentissage il doit être écrit et pour admettre le diplôme conféré à la fin de l'apprentissage par un Comité composé de patrons et d'ouvriers. Il faut encourager l'initiative privée dans le devoir social de faire des apprentis; nous pensons avec Colbert que:

a Il faut laisser faire les hommes, qui s'appliquent sans peine à ce qui convient le mieux; c'est ce qui apporte le plus d'avantage. »

M. LE PRÉSIDENT remercie M. Besson de son intéressante communication.

M. Besson a parfaitement déduit les causes de la crise de l'apprentissage, qui préoccupe tous les industriels. La fabrication francaise vaut surtout par le fini de l'exécution, c'est-à-dire par l'habileté des ouvriers.

Le jour où, par la diminution de l'apprentissage, l'habileté des ouvriers viendrait à décroitre, nos exportations seraient singulièrement compromises.

C'est à l'atelier, sous l'œil des maitres qu'autrefois se formaient ces habiles apprentis qui gardaient la tradition tout en s'initiant aux méthodes nouvelles. L'apprentissage écarté de l'atelier par les transformations de l'industrie et les exigences nouvelles du législateur pourrat-il se reconstituer,, non dans des écoles professionnelles dont l'objet est différent mais dans de véritables écoles d'apprentissage organisées ad hoc? On est en droit d'en douter; l'expérience cependant est à tenter puisqu'aussi bien on ne reconnaitra l'erreur commise que si cette tentative échoue et l'on ne doit pas oublier que le rétablissement de l'apprentissage sous une forme ou sous une autre est une question vitale pour l'industrie française et plus spécialement pour la fabrication parisienne.

M. G. HERSENT a la parole pour sa communication sur les Grands ports français. Leur transformation. Leur autonomie.

M. G. HERSENT rappelle la lutte économique si intense dont le monde presque entier est actuellement le théâtre les efforts de chaque pays pour s'outiller de façon à pouvoir soutenir avantageusement la concurrence de ses rivaux, le développement considérable du mouvement industriel et commercial qui entraine celui des installations maritimes, tout conduit à donner un singulier caractère de gravité à l'état pour ainsi dire stationnaire où nos installations maritimes sont restées depuis quelques années.

L'apparition des grands transatlantiques modernes, tels que le Lusitania et le Mauretania, vient encore aggraver la situation et compliquer ce problème d'un élément nouveau. M. Georges Hersent a donc cru le moment venu de poser nettement, et dans toute son ampleur, la question de nos grands ports français. Il a été ainsi amené à étudier le problème sous toutes ses faces, et par suite à se poser les questions sui

vantes :

1o Le principal objectif d'un grand port étant d'abriter les navires qui lui sont destinés, l'on est logiquement amené à étudier tout d'abord les dimensions des grands navires modernes et à supputer celles qu'ils atteindront dans un avenir prochain. A ce propos, on peut également passer en revue quelles sont les mesures déjà prises ou en préparation à l'étranger, dans le but de répondre à ce nouvel état de choses;

2o Quelles conditions doivent remplir aujourd'hui nos grands ports français pour satisfaire, d'une part, aux exigences du commerce international et, d'autre part, à celles non moins impérieuses d'une architecture navale sans cesse en progrès?

Et, puisque tout programme d'exécution pour des travaux de cette nature doit forcément se répartir sur une période de huit à dix ans, cette deuxième partie du problème doit être complétée de la façon sui

vante :

Quelles sont les conditions que l'on doit prévoir, dès à présent, comme indispensables pour les grands ports, d'ici quinze à vingt ans, afin, qu'une fois réalisées, ces diverses améliorations ne soient pas déjà démodées ?

3o Quels sont les ports français que leur situation géographique et leurs conditions naturelles prédestinent à ce rôle prépondérant?

4° Quel parait être le moyen pratique de réaliser ce programme, en tenant compte des nécessités urgentes de notre situation économique en même temps que des ressources limitées dont semblent actuellement disposer nos budgets?

5° Quel devrait être dans cet ordre d'idées le moyen de régir dorénavant nos grands ports, de manière à leur constituer une vie propre et véritablement autonome, directement liée aux intérêts locaux, régionaux et nationaux, auxquels ils doivent satisfaire ?

Autrement dit, quel est en somme le moyen de les mettre à même de se développer progressivement au fur et à mesure de leurs besoins nouveaux?

En ce qui concerne les dimensions probables des grands navires de demain, M. G. Hersent se trouve amené, par l'étude approfondie des récents progrès de l'architecture navale, à envisager comme devant être atteints d'ici quinze à vingt ans, les chiffres énormes de 300 à 330 m pour la longueur, 30 à 35 m pour la largeur et 13 à 15 m pour le tirant d'eau. Ces données, qui peuvent paraitre exagérées à ceux qui n'ont pas étudié la question de très près, se trouvent d'ailleurs confirmées dans une série de documents des plus intéressants que cite M. Hersent, documents qui sont malheureusement trop peu connus de nous.

Ces chiffres sont d'autant plus intéressants que l'on construit en ce moment, en Angleterre surtout, une série d'immenses cargo-boats du

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