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avait bien déterminé nos obligations à l'égard du Cambodge, mais il avait négligé de tracer nettement la règle des devoirs politiques du roi Norodom envers la puissance protectrice.

Les effets de cette politique chevaleresque se sont fait sentir jusqu'à nos jours. Nous avons eu les charges du protectorat sans compensation appréciable.

Norodom, d'ailleurs, avait à peine signé la convention du 11 août 1863 avec l'amiral de la Grandière, qu'il entrait en négociation secrète avec la cour de Bangkok, et se liait, à son égard, par un traité de vassalité.

A quels mobiles obéissait le roi du Cambodge? Il ne serait pas difficile de le démêler; mais il nous suffit de constater qu'il se rendait parfaitement compte du caractère et de la portée de sa démarche, puisqu'il l'acccomplit dans le plus grand mystère. Il ne se serait pas à ce point efforcé de céler l'existence de ces engagements avec Siam, s'il n'avait pas clairement compris qu'ils étaient la violation formelle des devoirs qu'il venait de contracter envers la France.

Une indiscrétion commise à la cour de Bangkok révéla, un an plus tard, l'existence de ce traité. Un journaliste anglais publia le texte de la convention secrète. Le Gouvernement français, toujours débonnaire, se borna à exiger que la cour de Bangkok la tint pour nulle et non-avenue et il ne garda pas la moindre rancune à Norodom de sa dissimulation.

Le jour de son couronnement solennel, le 3 juin 1864, à Oudong, le représentant de la France, M. le capitaine de frégate Desmoulins, chef d'étatmajor de l'amiral de la Grandière, lui tint, en effet, ce langage : « Sire, placez avec confiance cette couronne sur votre tête, elle sera solide si vous êtes toujours fidèle à la France. » Ce n'était pas une vaine parole. Les évènements ne tardèrent pas à le montrer.

Depuis 1864, en effet, jusqu'à l'heure actuelle, Norodom ne s'est maintenu sur le trône chancelant du Cambodge que par notre appui, par notre force, par le concours de nos soldats.

Sans nous, le royaume du Cambodge entier aurait subi le sort des provinces du nord annexées par Siam; sans nous, le roi Norodom aurait été dix fois détrôné par la rébellion de ses propres sujets.

Nous verrons plus tard ce que le monarque cambodgien a fait en reconnaissance de ce persévérant appui de la France, mais il est bon de rappeler succinctement auparavant les principaux épisodes de notre intervention protectrice.

Dès le mois de septembre 1864, une vive fermentation se produisait dans le sud-ouest du Cambodge. Les populations de ces provinces n'avaient pas participé à la grande insurrection en faveur du prince Votha; elles n'en avaient pas moins été pressurées et accablées d'exactions par les mandarins de Norodom. Un aventurier, nommé Assoa, qui se faisait passer pour un prince de la famille royale, s'établit dans ces régions et en fit un foyer d'agitations. Un autre prétendant, se disant aussi membre de la famille royale, Pucombo, se créa de son côté des partisans dans les provinces orientales du royaume.

L'autorité royale étant impuissante contre ces agitations, nous dûmes intervenir. L'administrateur français de la province cochinchinoise de Tayminh fut tué, le 7 juin 1866, par les Cambodgiens ralliés autour de Pucombo. Quelques jours plus tard, une petite colonne française, assaillie par les rebelles au milieu des marécages, avait son chef tué avec un certain nombre de soldats.

L'insurrection se généralisa dans les provinces cambodgiennes, à l'est du Mékong, et il nous fallut les reconquérir pour le compte de Norodom. Toute la fin de l'année 1866 fut remplie de combats livrés par nos troupes contre les rebelles. Pucombo, resté seul à la tête de l'insurrection après la capture d'Assoa, battit les troupes royales cambodgiennes, menaça la capitale, et il aurait certainement renversé Norodom sans les défaites que lui infligèrent, en décembre 1866 et en janvier 1867, nos troupes de Cochinchine, sous les ordres du colonel Reboul et des commandants Alleyron et Domange.

Jusqu'à la capture et à la mort de Pucombo, survenue au mois de novembre 1867, nos troupes ne cessèrent de tenir la campagne.

Le concours de nos soldats et l'autorité grandissante de la France en Cochinchine, affirmée par un traité conclu avec Siam et par l'occupation, sans coup férir, au cours de cette même année 1867, des provinces occidentales du Delta du Mékong demeurées sous la domination annamite, procurèrent au roi Norodom une sécurité qu'il n'avait pas connue et une indépendance effective dont il n'avait pas encore joui.

Il en profita pour exercer sur le Cambodge un despotisme sans frein et sans controle, dont les effets furent tels, au bout de quelques années, que son frère, le prince Votha, n'eut, pour ainsi dire, qu'à paraitre, en 1876, pour être accueilli comme un libérateur par les provinces orientales. Nous dùmes encore intervenir. Nos canonnières remontèrent le fleuve pour prêter leur appui aux mandarins royaux qui tenaient la campagne contre les rebelles, Ce furent encore nos troupes de Cochinchine qui, en février 1877, mirent les rebelles en déroute dans la province du Baphnom, devenue le principal foyer de la sédition.

Le prince Votha, forcé de se réfugier au Laos, n'a cependant pas cessé de menacer la tranquillité du Cambodge; ses partisans y font de temps en temps des incursions, et c'est une de ses bandes qui attaquait naguère notre poste de

Sambor.

Les faits done justifient amplement l'appréciation émise aux premières pages de son beau livre sur le royaume de Cambodge par M. Moura, notre ancien résident à Phnom Penh, l'homme de France qui connait le mieux le Cambodge, à savoir que « sans l'intervention politique de la France dans ces contrées, cel intéressant petit Etat n'existerait plus à cette heure. »

Qu'a fait le roi Norodom en reconnaissance de cet appui? Qu'avons-nous obtenu de lui tant au point de vue des intérêts français que de notre action civilisatrice en ludo-Chine?

Il convient, pour répondre nettement à ces questions, de résumer d'abord quelques notions précises sur le royaume protégé, sur sa population, ses ressources, son état social et son gouvernement.

La superficie actuelle du Cambodge est à peu près le cinquième de celle de la France. Le pays s'étend sur les deux rives du grand fleuve Mékong, au nord de notre colonie de Cochinchine. Il touche à la mer dans le golfe de Siam et confine à l'est aux montagnes el aux forêts désertes de l'Annam. Le Cambodge est borné au nord par le royaume de Siam et des principautés laotiennes plus ou moins vassales de Bangkok. La ligne de démarcation entre Siam et le Cambodge a été arrêtée par la Convention conclue à Bangkok en 1867 entre le Gouvernement français et le Gouvernement siamois.

Ce traité laissait au royaume de Siam les provinces cambodgiennes de Battambang et d'Angkor annexées de fait depuis de longues années. Le royaume de Siam renonçait par compensation à toute prétention à la suzeraineté sur le Cambodge, et il reconnaissait notre protectorat sur cet Etat. Le Gouvernement français s'engageait, de són côté, à ne pas incorporer le Cambodge à ses possessions de Cochinchine. Cet acte diplomatique est encore à présent en vigueur.

La grande artère de l'Indo-Chine orientale, le fleuve Mékong, est malheureusement barrée à la sortie du Laos par les cataractes des Khong, puis à lentrée du Cambodge par les rapides de Sambor qui interrompent la navigation.

De Sambor jusqu'à la mer, sur un parcours de près de cinq cents kilomètres, le Mékong, accessible aux gros bateaux, roule un volume d'eau prodigieux. Sa largeur, entre Sambor et Phnom-Penh, capitale actuelle du Cambodge, varie entre deux et trois kilomètres.

Il recouvre une étendue immense à l'époque de ses crues annuelles et fertilise le pays de ses limons. A Phnom-Penh, le Mékong se partage en plusieurs bras. ARCH. DIPL. 1886.

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Il y a là le plus bizarre carrefour de rivières. L'un de ces bras du Mékong tourne brusquement au nord et va remplir à une centaine de kilomètres de distance le colossal réservoir naturel du Tonly-Sap, immense lac temporaire, long, à l'époque des hautes eaux, de 130 kilomètres, sur une largeur moyenne de 25, avec une profondeur de 12 à 14 mètres d'eau. Les autres bras du Mékong se dirigent en éventail vers le sud, à travers notre Cochinchine, dont le delta, sillonné dans toutes les directions de bras de fleuves, de canaux et d'arroyos, présente un magnifique réseau de navigation intérieure. Nous avons dit qu'à l'époque des crues, le courant du Mékong allait remplir le grand lac Tonly-Sap. Le phénomène inverse se produit à la saison sèche. Le courant s'établit du lac au fleuve, le lac se vide au point de n'avoir plus qu'un mètre de profondeur, et de n'occuper que le sixième de la superficie couverte au temps des hautes eaux. Ce va-et-vient du courant du Mékong vers le Tonly-Sap contribue à faire de ce bassin l'un des plus poissonneux du globe.

Les pêcheries y occupent près de trente mille individus, et le poisson du lac, séché et salé, s'exporte sur tous les marchés de l'Extrême-Orient. L'extrémité nord du Tonly-Sap baigne les provinces devenues siamoises de Battambang et d'Angkor. Cette partie du lac a été neutralisée par une convention avec Siam. Nous en reproduisons le texte aux annexes (V. ci-après p. 36). Les vapeurs des messageries fluviales de Saigon desservent régulièrement depuis quelque temps Phnom-Penh et toute la région du lac jusqu'à Battambang.

La population du Cambodge est évaluée par M. Bouinais, ancien chef de cabinet du gouverneur de la Cochinchine, à un million et demi d'habitants. M. Moura, l'ancien résident de France à Phnom-Penh, l'estimait à un total notablement inférieur. Indépendamment des Cambodgiens proprement dits, on rencontre au Cambodge des Chinois immigrés en assez grand nombre, plus de cent mille, des Annamites, sujets français, plus nombreux encore, des Malais, etc.

pour

«Le Cambodgien, a écrit le docteur Thorel, l'un des explorateurs du Mékong, est plus grand et surtout plus robuste que l'Annamite; c'est le plus vigoureux des Indo-Chinois. » Malheureusement sa paresse, son insouciance, son dédain l'instruction annihilent cet avantage physique. Tous les observateurs qui ont écrit sur le Cambodge s'accordent à dire que le Cambodgien succombe, dans la lutte pour l'existence, non seulement devant le Chinois, mais surtout devant l'Annamite. Celui-ci, plus laborieux, plus actif, plus intelligent et plus économe, s'infiltre peu à peu dans le royaume, défriche des terres, exerce des métiers et tend à se substituer, à la longue, à la race indigène.

La principale céréale du Cambodge est le riz. Les terres arrosées par le Mékong le produisent avec abondance, sans travail. Cette fécondité du sol contribue à entretenir l'indolence des Cambodgiens. On y cultive aussi avec succès la canne à sucre, le poivrier, dans la province de Compot, sur le golfe de Siam; parmi les plantes textiles, la ramie et le coton, qui est, après le riz, la plus importante culture du Cambodge; on élève avec succès les vers à soie; l'indigotier y réussit très bien; de même, le tabac, le poivrier-bétel, le cardamone. Les forêts sont nombreuses et renferment des essences précieuses, notamment diverses variétés de bois de teck. Il y a des pâturages et du bétail en abondance. Tous les boufs consommés en Cochinchine proviennent du Cambodge. Les renseignements fournis par MM. Aymonnier, le docteur Thorel, M. Moura, M. Bouinais, ne laissent aucun doute sur l'étendue des richesses naturelles du pays.

La population indigène n'en tire toutefois qu'un fort médiocre parti. L'apathie naturelle de la race, les vices de son organisation sociale et le mauvais gouvernement concourent à ce résultat.

Quand nous sommes arrivés au Cambodge, la décadence semblait irrémédiable. Notre premier résident auprès du roi Norodom, M. Doudart de Lagrée, le chef de la célèbre exploration du Mékong et du Yunnam, écrivait en 1865 dans un rapport adressé au contre-amiral Roze: « Il n'existe pas de classe moyenne au Cambodge. Il n'y a que des maudarins ne travaillant pas, et une

population misérable et exploitée à outrance. Tout le commerce est aux étrangers, Chinois, Malais, Annamites. N'ayant plus aucune garantie dans les lois du pays et complètement appauvri par les exactions, le peuple est incapable d'offrir la moindre résistance aux révoltes armées. La classe des mandarins, deux ou trois fois plus nombreuse qu'il ne faudrait, ne peut être satisfaite qu'en partie par le roi. Il a beau diviser de plus en plus l'autorité, augmentant ses fonctionnaires dans les provinces, le nombre des mécontents est toujours considérable..... Le pays est sans forces et incapable de se soutenir sans un appui étranger. »

Le gouvernement au Cambodge est, selon l'expression de M. Moura, absolu et despotique pur sang. » Le roi a droit de vie et de mort sur ses sujets, il les taxe, à son gré, sans mesure ni contrôle: il est censé le propriétaire exclusif du sol dont les particuliers n'ont jamais qu'une jouissance précaire, aux conditions dictées par la volonté royale. Une situation particulière est faite toutefois à trois personnes de la famille royale: l'Objareach, le roi qui a abdiqué; l'Obbareach, second roi, et la reine-mère. Ils portent la couronne, le titre royal, et reçoivent des provinces en apanage. Par un abus singulier, le caprice royal a conféré parfois ces dignités, par exemple celle d'Objareach, ou roi qui a abdiqué, à des princes qui n'avaient jamais régné. La dignité d'Objareach est actuellement vacante au Cambodge.

L'ordre de succession au trône ne ressemble en rien à celui qui est suivi dans les monarchies d'Europe ou d'Orient. Tous les princes et, à défaut, les princesses de la famille royale peuvent aspirer à la couronne. A la mort du roi, l'héritier est désigné parmi eux par le conseil des cinq plus hauts mandarins du

rovaume.

La cour du Cambodge a conservé les plus extravagantes traditions du faste asiatique.

Le palais royal renferme tout un peuple de serviteurs. Le roi a onze épouses légitimes et un nombre illimité de concubines. Il entretient, indépendamment de celles-ci, plusieurs centaines de danseuses et de chanteuses. Trois cents pages font le service intérieur du palais. Le nombre des gardes, des esclaves mâles et femelles est extrêmement considérable. Les princes et princesses de la famille royale et les fils du roi âgés de plus de treize ans vivent hors de l'enceinte du palais. Le roi leur fait une pension en général fort maigre, mais ils s'entourent d'un nombre considérable de clients volontaires, d'esclaves et de corvéables dont le travail les fait vivre.

Le roi est entouré d'un conseil de cinq grands mandarins ou ministres, sous la direction desquels une foule de mandarins d'un ordre inférieur administre on plutôt rançonne les provinces. Presque tous, écrit M. Moura, vivent d'exactions ou de cadeaux plus ou moins volontaires.

L'esclavage et le servage avec toutes leurs conséquences iniques et dégradantes, ont été jusqu'ici les fondements de la société cambodgienne..

Rien ne rappelle, en ce pays, le régime quasi-démocratique de la commune annamite que nous avons trouvé en Cochinchine et au Tonkin.

Les sujets cambodgiens censés hommes libres, les inscrits, paient un impôt de capitation, la location des terres que le roi veut bien leur permettre de cultiver, un impôt spécial sur le riz, et ils sont astreints à quatre-vingt-dix jours de corvée par an. Les produits du sol acquittent, en outre, une taxe d'un dixième de la valeur perçue aux douanes intérieures. Le gouvernement dispose encore de divers monopoles, tels que celui de l'opium et de l'eau-de-vie, et il perçoit des droits importants sur les pêcheries. Les quatre-vingt-dix jours de corvée dus par chaque inscrit équivalent à un réel servage, bien que le corvéable puisse se racheter à prix d'argent. Le quart des journées de corvée est à la disposition du mandarin choisi pour patron par le corvéable, le reste à celle

du roi.

Quant à la justice, on aura une idée de la façon dont elle est rendue aux malheureux inscrits par la citation de ce senl article du code cambodgien: "Dans les condamnations pécuniaires, un tiers de l'amende prononcée revient

au roi, le second tiers au plaignant et le troisième aux juges qui ont fixé la peine. » La peine, dit à ce sujet M. Bouinais, sera toujours très forte, car le mandarin trouve son profit à l'élever. Les plaidoiries les plus éloquentes sont les cadeaux que les malheureux plaideurs apportent à leurs magistrats fantaisistes, et ceux-ci trouveront encore moyen d'augmenter leurs épices en faisant payer pour l'apposition du cachet destiné à garantir l'authenticité de la sen

tence. >>

L'esclavage est encore une des grandes plaies du Cambodge.

Les esclaves peuvent être rangés en trois catégories, à savoir les esclaves pour dettes; les esclaves d'Etat; les esclaves à vie généralement d'origine sauvage.

La législation de l'esclavage pour dettes est particulièrement abominable. Le débiteur est adjugé comme esclave au créancier quand il ne peut payer la dette contractée. Il a théoriquement le droit de se racheter, mais tout le produit de son travail appartenant au maître, il ne peut jamais faire aucun bénéfice et réunir la somme nécessaire à sa libération.

Les enfants nés de parents esclaves sont esclaves aussi. Tout est calculé d'une façon si inique pour perpétuer la situation des malheureux débiteurs, que les seuls cas de libération connus sont ceux où un parent ou un ami charitable avance le montant de la rançon.

Les esclaves d'Etat à perpétuité sont les condamnés pour certains crimes, les descendants des condamnés, et les prisonniers de guerre; ils ne peuvent se racheter que sous le bon plaisir du roi,

Quant aux esclaves à vie, d'origine sauvage, ce sont des malheureux capturés dans des battues dirigées contre les tribus errantes dans les bois et les montagnes, ou achetés sur les marchés du Laos, où cette chasse à l'homme se pratique encore sur une grande échelle.

On ne sera pas surpris qu'une société ainsi soumise au despotisme le plus extravagant, en proie aux plus odieuses iniquités sociales, soit allée s'appauvrissant et se dégradant. Ce qui étonne, c'est que le Cambodge ait pu suffire jusqu'à ce jour à l'entretien du mandarinat, de la famille royale, du monarque et de son invraisemblable sérail.

Ceux de nos résidents qui se succédèrent de 1867 à 1876 à Oudong d'abord, puis à Phnom-Penh où Norodom porta sa capitale, furent tous frappés de ce fait que notre protection ne couvrait en définitive qu'un système d'abus monstrueux. Le pays se ruinait et se dépeuplait. Le rôle de protecteur ainsi conçu était il digne de la France? Etait-ce pour permettre à Norodom de consommer la ruine de son royaume, d'aflamer son peuple au profit du harem que nos soldats avaient combattu, avaient vaincu les rebelles Assoa, Pucombo et le prince Votha? Ne manquions-nous pas à notre devoir de puissance civilisatrice en n'usant pas de l'autorité que nous donnaient sur Norodom les traités et les services rendus pour contrôler son pouvoir et exiger de lui de sérieuses réformes?

Ce fut la pensée du gouverneur de la Cochinchine au lendemain de la répression de l'insurrection du prince Volha. Nous venions pour la seconde fois en moins de dix années de sauver Norodom du détrônement. L'amiral Duperré et notre résident à Phnom Penh parvinrent à décider le roi à la promulgation d'un certain nombre de réformes administratives en vue de soulager les populations cambodgiennes, et d'établir une certaine régularité tant dans la perception des taxes que dans l'administration de la justice. Les mêmes ordonnances royales préparaient l'abolition de l'esclavage. Une convention, en date du 28 juillet 1877, conféra au représentant du protectorat français la faculté d'assister au Conseil des ministres cambodgiens.

Nous fimes, par contre, peu de temps après, à Norodom une concession du plus fâcheux caractère. Il lui fut permis de promulguer une ordonnance royale, aux termes de laquelle les Annamites, sujets français, perdaient leur nationalité après un an de séjour au Cambodge. Il en résulta que cent mille de nos sujets

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