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formule. De nombreuses classifications ont été proposées sans avoir obtenu l'assentiment général. Les usages internationaux se réduisent seulement à la règle suivante, à savoir: que les peuples qui veulent rester neutres, doivent s'abstenir de fournir aux belligérants ou à l'un d'eux les objets de première nécessité, dont l'emploi est un moyen direct de faire la guerre, c'est-à-dire de nuire à l'ennemi, de le combattre. Or il y a des objets dont l'usage est exclusivement possible pendant la guerre. Ce sont les armes, les munitions de guerre, l'artillerie. Il y en a d'autres qui sont également utiles et nécessaires pour la guerre et la paix, tels que les chevaux. Il y a des matières premières propres à la fabrication des armes et des munitions. de guerre, à l'habillement des militaires, à la construction, au radoub et à l'armement des vaisseaux. Enfin l'or, l'argent et le cuivre, monnayés ou en barres, peuvent être considérés comme des moyens propres pour se procurer des objets de première nécessité. Ajoutons encore qu'à certains moments et dans certaines circonstances des objets peuvent acquérir pour les belligérants une importance qu'ils n'auront pas dans d'autres.

L'idée de la contrebande, on le voit, est une idée complexe, variable selon les temps et les circonstances, et qu'il est difficile de déterminer d'une manière absolue et constante. Il faut donc que les nations se mettent d'accord sur la nature et les limites exactes de la contrebande, soit en général soit particulièrement au commencement d'une guerre. Car il ne peut être loisible aux belligérants d'imposer, suivant leurs intérêts spéciaux, et dès qu'ils en auraient les forces nécessaires, aux nations neutres des restrictions plus ou moins onéreuses. Rien ne les autorise à donner des lois.

Afin de constater le droit actuel on doit donc en premier lieu consulter les traités conclus par les nations européennes,

1 La formule proposée par Jouffroy p. 130, 134 nous paraît trop vague: elle aurait besoin d'être longuement expliquée à chaque cas de guerre.

Les distinctions proposées par Grotius (III, 1, 5) sont insuffisantes, quoiqu'elles aient été adoptées par bien des publicistes. V. Wheaton, Histoire p. 75 (2e édit. I, p. 169). A l'égard de Bynkershoek comparez Phillimore III, 380.

Heffter, droit international. 3e éd.

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Ces traités ne

y compris les peuples du Nouveau - monde.1 sont d'abord obligatoires qu'entre les contractants et doivent être interprétés de la manière la plus stricte, car ils contiennent un droit de répression et établissent des juridictions presque pénales.2 A défaut de traités, il faut puiser la décision dans les usages internationaux universels à la constatation desquels la concordance des traités peut aussi servir de preuve. D'après ces usages, la contrebande est exclusivement limitée aux armes, utensiles et munitions de guerre, en d'autres termes aux objets façonnés et fabriqués exclusivement pour servir dans la guerre, non pas aux matières premières propres à la fabrication des objets prohibés. Cette règle forme la base des divers traités conclus entre les puissances maritimes dans le cours du XVIII® siècle. La France l'a reconnue dans le traité d'Utrecht (articles 19 et 20), et elle a toujours été considérée depuis comme faisant partie de son droit maritime. Elle se retrouve dans les déclarations de la neutralité armée, dans le traité entre la Russie et l'Angleterre du mois de juin 1801 et dans un grand nombre de traités de commerce et de navigation conclus depuis 1815.3

1 Ces traités sont indiqués par Pöhls p. 1104 suiv. Oke Manning p. 284 suiv. Ortolan II, p. 167. Hautefeuille II, p. 317. Phillimore III, 374. Halleck XXIV, 16. 17. Schmidlin, De juribus gentium mediarum § 38 suiv. 2 Le juge Sir William Scott n'a pas été du même avis dans son jugement contre des navires hollandais chargés de bois de construction (1779). V. Wildman II, 222. Schmidlin, loc. cit. § 43.

3 Traités entre les Etats de l'Amérique du Nord et du Sud: la Colombie du 3 décembre 1824, le Chili du 16 mai 1832 (art. 14), l'Amérique centrale du 5 décembre 1825, le Mexique du 5 avril 1831 (art. 16), Venezuela du 20 janvier 1836 (art. 17). Martens, Nouv. Recueil t. VI, p. 831; t. X, p. 334; t. XI, p. 442; t. XIII, p. 554. Nouv. Supplém. t. II, p. 415. Traité entre la France et le Brésil du 28 janvier 1826 (art. 21). Nouv. Recueil t. VI, p. 874; entre la France et le Texas du 25 septembre 1839 (art. 6). Nouv. Recueil t. XIII, p. 988; entre la France et la NouvelleGrenade du 1 octobre 1846. Traité entre la Prusse et le Brésil du 9 juillet 1827. Nouv. Recueil t. VII, p. 274; entre la Prusse et le Mexique du 18 février 1831 (art. 11). Nouv. Recueil t. XII, p. 544. Traité entre les villes hanséatiques et Venezuela du 27 mai 1837 (art. 16). Nouv. Recueil t. XIV, p. 242. Traité entre les Pays-Bas et le Texas du 18 septembre 1840 (art 17). Nouv. Recueil t. I, p. 379. Comp. Preufs. Allgem. Landrecht t. II, tit. 8, § 2034 suiv. de Steck p. 203. Nau § 156. 157. Wheaton, Histoire p. 324 suiv.

Il y a une autre classe d'objets qui, dans les traités seulement et dans les lois intérieures de plusieurs nations, sont indiqués comme objets de contrebande. Ainsi on y a compris :

1° les chevaux, qui en général sont exclus expressément dans le code prussien (II, 8, 2036), tandis que les traités américains mentionnés ci-dessus prohibent seulement les chevaux de cavalerie;

2o toutes les matières premières propres à la fabrication des armes et munitions de guerre, le fer, la fonte, l'acier, le salpêtre, le soufre; les munitions navales, telles que le bois de construction, le chanvre, le goudron;1

3° les vivres ou matières alimentaires;2

4° l'or, l'argent et le cuivre monnayés ou en barres.3

Ces divers objets ne sont pas d'un usage direct et exclusif pour la guerre ou uniquement propres à la guerre. On ne saurait donc prétendre qu'ils portent nécessairement le caractère de contrebande. C'est seulement dans le cas où, par leur transport vers l'un des belligérants, le commerce neutre prend le caractère de secours manifestement hostile, que l'autre belligérant a le droit d'empêcher de fait.

On doit ranger dans la même catégorie certains objets nouveaux que les progrès de la science ont appliqués de nos jours aux besoins de la guerre. Telles sont les machines à vapeur, la houille etc., qui jouent un rôle si important dans les guerres maritimes modernes. Considérées en elles-mêmes, toutes ces choses sont également utiles et nécessaires pour la paix et pour la guerre. Elles ne sont donc pas, par leur nature, du nombre des marchandises prohibées. Il va sans dire aussi que les choses nécessaires pour les propres besoins

1 Cette classe d'objets a provoqué fréquemment des discussions ardentes. V. Wheaton, Intern. Law II, p. 187 (édit. franç. p. 141).

2 Les Provinces - Unies ont obtenu en 1741 de la Suède la révocation d'une prohibition relative à ces objets, qui, en France, n'ont jamais été compris parmi ceux de contrebande. Pothier, Traité de la propriété no. 104. Valin, Comment. sur le Code des prises art. 11. V. de Martens, Récits II, p. 166. Il n'en a pas été ainsi en Angleterre. Wheaton, Intern. Law II, p. 198 (édit. franç. p. 148). Phillimore III, 375.

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Cocceji, De jure belli in amicos § 15. 20 comprend ces choses parmi les objets de guerre dans certains cas. V. surtout Jouffroy p. 136 suiv.

du navire neutre ne sont jamais regardées comme objets de contrebande.1

Nous devons noter enfin que lors de la guerre de Crimée les puissances alliées ont pratiqué les principes les plus libéraux; qu'elles n'ont compris sous le nom de contrebande que les armes, les munitions et les objets uniquement destinés aux usages de la guerre, en maintenant à cet égard les dispositions des traités existants; qu'enfin les prohibitions d'exporter ne s'appliquaient qu'aux territoires respectifs des belligérants.2 Ce bel exemple ne sera sans doute pas perdu dans les guerres maritimes futures!

Cas où il y a lieu à saisir pour contrebande de guerre et conséquences.

§ 161. Le trafic d'objets prohibés ne constitue pas à lui seul le délit de contrebande de guerre. Il faut en outre que les navires neutres, par le transport de ces objets dirigé vers les ports ou les forces navales de l'ennemi, se soient rendus coupables d'un acte contraire aux devoirs de la neutralité et qui entraîne leur saisie légitime. Une puissance neutre a sans doute la faculté de défendre d'une manière absolue à ses propres sujets la vente et la délivrance de certaines denrées.a Mais seule aussi elle a le droit de réprimer les infractions commises à ses règlements, et les belligérants ne sauraient y prétendre sous aucun prétexte. Il leur est permis tout au plus de se plaindre de violation des devoirs de la neutralité, si les règlements des puissances neutres donnaient lieu à cacher le commerce de contrebande (§ 148).

Le délit de contrebande de guerre est réputé éteint, dès que le navire porteur d'objets suspects ou prohibés a achevé

1 de Kaltenborn II, 420.

2 V. Hautefeuille II, p. 411 et la brochure déjà citée de E. W. Asher, Beiträge zu einigen Fragen der neutralen Schifffahrt. Hamb. 1854.

p. 219

3 V. pour la jurisprudence anglaise Wheaton, Intern. Law II, (édit. franç. p. 165). Wildman II, p. 218. Jouffroy p. 154. Ortolan II, p. 178. de Kaltenborn II, p. 421. Halleck XXIV, 10. 11.

4 Nau, Völkerseerecht § 193 suiv.

son voyage. Ce principe est presque généralement admis; néanmoins la jurisprudence anglaise s'est refusée à l'appliquer dans un grand nombre de cas.1

Un usage très-ancien fondè en partie sur les dispositions des lois romaines et sur les doctrines des romanistes, autorise les belligérants à s'emparer des objets de contrebande transportés vers les ports ennemis, et à faire valider la saisie par un acte connu sous le nom de jugement ou de déclaration de bonne prise. Le navire saisi lui-même ne peut être déclaré de bonne prise que dans les cas où ses armateurs ou propriétaires avaient pleine connaissance de la destination clandestine du chargement ou de la cargaison. Dans quelques traités, une exception a été expressément admise en faveur des navires saisis: ils permettent au capitaine de continuer librement le voyage, après avoir abandonné les objets prohibés trouvés à bord.4 D'ailleurs le capitaine n'est sujet à aucune responsabilité personnelle: il encourt seulement la perte du fret et des dépenses.

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En ce qui concerne les choses non comprises sous la dénomination d'objets de contrebande, ni d'après les règles générales, ni d'après les conventions spéciales, les belligérants ne peuvent les saisir sous aucun prétexte. Cependant on a vu souvent ces derniers élever la prétention d'avoir le droit d'arrêter les navires neutres destinés pour les ports ennemis et de s'approprier les cargaisons qu'ils portaient, en en payant le prix aux propriétaires. C'est ce que l'on appelle le droit de

Wheaton, Intern. Law IV, 3. 23 Comparez aussi Halleck XXIV, 8. origines de cette juridiction Wheaton, Histoire p. 82

1 Jacobsen, Seerecht p. 422. 423. (édit. franç. p. 26). Wildman II, p. 218. 2 V. sur les (2e édit. p. 179).

3 V. déjà à ce sujet la loi 11. § 2. D. de publicanis Jacobsen, Seerecht p. 642. Oke Manning p. 309: il cite la,, haute autorité" de Bynkershoek et de William Scott. Pando p. 496. Wildman II, p. 216. Phillimore III, 371. Hautefeuille IV, p. 343. Halleck XXIV, 5. Dans la pratique on ne respecte pas partout cette distinction. Pour la jurisprudence française v. Ortolan p. 180 et Jacobsen p. 656. Massé § 216.

4 Les traités entre les États de l'Amérique du Nord et ceux du Spl cités plus haut au § 160, accordent expressément au capitaine cette i V. aussi de Steck, Handelsverträge p. 208. 209.

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