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sitoire de nos guerres actuelles. D'après nos idées, le pillage ne deviendra jamais un mode d'acquisition régulier. Il donne seulement la faculté matérielle de disposer librement des fruits et de la substance de la chose, autant que les circonstances ne s'y opposent pas. L'occupant ou celui auquel il a cédé l'objet, n'est pas non plus tenu d'en rendre compte, tant que la guerre continue ou que le détenteur actuel de l'objet se trouve à l'état d'ennemi vis-à-vis du propriétaire précédent. Ce dernier toutefois reprendra librement sa chose partout où il la retrouvera, soit sur le territoire neutre, soit dans une partie de son propre territoire non occupée par l'ennemi. Il la reprendra encore librement après la conclusion de la paix, en tant que les dispositions du traité n'excluent pas les réclamations à ce sujet. En un mot, la guerre n'a fait que suspendre temporairement les effets de la propriété privée, qui continue à être placée sous la sauvegarde individuelle et collective des États. Le fait de la détention matérielle remplace provisoirement le droit, pour passer tour à tour entre les mains de l'une ou de l'autre des parties belligérantes. Les lois particulières des États déterminent les conditions sous lesquelles la demande en revendication de l'ancien propriétaire des choses enlevées est admise contre le détenteur actuel soumis à leur juridiction. Mais nulle part le butin ne porte le caractère d'un domaine irrévocable en faveur du détenteur actuel et de ses successeurs. Du moins aucun principe général n'a consacré un domaine que le traité de paix ou des traités préexistants peuvent seuls consacrer.

C'est encore aux lois particulières à déterminer le moment où la propriété commence à être acquise à l'occupant: il n'existe aucune loi générale à ce sujet.1 Anciennement, suivant les dispositions du droit des gens romain alors en vigueur chez la plupart des nations, le moment de l'appropriation de guerre fut celui où la prise de possession ou la détention exclusive ne pouvait plus être troublée ou empêchée par le propriétaire précédent ni par les camarades de guerre; en d'autres termes, dès le moment où les biens enlevés avaient été placés en sûreté devant l'ennemi et ne pouvaient plus être repris qu'à la suite

1 Cocceji sur Grotius III, 6. 3 in fine.

de nouveaux efforts ou par des circonstances accidentelles. Aussi longtemps au contraire que l'action de combat se continuait en réalité et que, par un retour de la fortune, les choses enlevées pouvaient être reprises, le butin n'était pas regardé comme un fait accompli. Cette distinction se retrouve dans plusieurs codes modernes. 2

1

La difficulté de déterminer d'une manière exacte le momentde la prise de possession, a fait admettre encore le terme d'une occupation de vingt-quatre heures. Ce terme a passé en usage chez quelques nations dans les guerres terrestres et maritimes.3 Toutefois il ne laisse pas de présenter certaines difficultés dans l'application, et il ne saurait être regardé comme une règle commune du droit international. Dans les pays régis par le code Napoléon la disposition de l'article 2279 est décisive, laquelle répond éminemment à l'état de guerre: " En fait de meubles la possession vaut titre."

Occupation maritime.

§ 137. Pendant une guerre sur mer, les navires armés des puissances belligérantes, comme les navires privés de leurs sujets, avec les cargaisons, sont susceptibles d'une occupation et d'une saisie valables.4 Par esprit d'humanité on a excepté

1 V. sur les difficultés d'interprétation des lois romaines Ziegler, De juribus majestatis. I, 33, § 79. Les lois ne laissent subsister aucun doute sur le moment de l'occupation. L. 3. § 9. Dig. de vi.

2 V. par exemple Allgemeines Landrecht für die preufs. Staaten. I, 9, § 201. 202. Le butin est regardé comme acquis, s'il a été rapporté par les troupes qui s'en sont emparées, dans leur camp, dans leurs quartiers de nuit ou autrement en lieux sûrs. Tant que l'ennemi est poursuivi, les objets enlevés peuvent être repris par l'ancien propriétaire."

3 De Thou rapporte que cet usage a été observé lors de la reprise de la ville de Lierre en Brabant en 1595. Grotius III, 6. 3.

4 Büsch, Ueber das Bestreben der Völker neuerer Zeit, einander in ihrem Seehandel recht wehe zu thun. Hamburg 1800. Jouffroy, Droit maritime. p. 57 suiv. Zachariae, 40 Bücher vom Staat. IV, 1, p. 111. Weil, Constitut. Jahrbücher. 1845. I, p. 260. Pour la jurisprudence v. N. Carlos Abreu, Tratado jurid. politico sobre las presas marit. Cadix 1746. Traduct. franç. 1758 et 1802. R. J. Valin sur l'Ordonnance de 1681, et son Traité

seulement les canots, les ustensiles des pêcheurs des côtes, ainsi que les biens naufragés. En France notamment la jurisprudence, suivant d'anciens usages, s'est refusée constamment à valider la saisie de canots pêcheurs, même par voie de représailles.1

Les guerres maritimes, comme nous l'avons déjà observé, avaient, jusqu'aux traités de 1815, principalement pour but la destruction du commerce ennemi. Tant que les intérêts d'un commerce avide continueront à peser exclusivement, ou du moins d'une manière prépondérante sur leurs causes et leur direction, il ne faudra pas s'attendre à les voir changer de caractère.

Le principe pratiqué jusqu'à ce jour a été le suivant: tous les biens qui se trouvent sur mer, qu'ils appartiennent au gouvernement ou à des particuliers, sont regardés comme une bonne prise échue à la partie ennemie, dès qu'elle parvient à s'en emparer. Nous verrons par la suite jusqu'à quel point les licences et les droits des neutres dérogent à ce principe. Il produit ses effets, dès le moment de l'ouverture des hostilités, par rapport aux navires, avant même que leurs capitaines en aient été informés, ainsi que la jurisprudence anglaise moderne l'a décidé constamment.2 Quelquefois néanmoins un certain délai est accordé à cet effet: ainsi, dans la guerre de Crimée, les puissances occidentales ont, par une déclaration des 27 et 29 mars 1854, permis aux navires russes de quitter, pendant un délai de six semaines, leurs ports respectifs, pour retourner dans leur patrie; la France a accordé en 1870

des prises ou principes de la jurisprud. franç. concernant les prises. A la Rochelle et Paris 1782. de Steck, Versuch über Handels- und Schifffahrtsverträge. Halle 1782. p. 171. G.-Fr. de Martens, Essai concernant les armateurs. 1795. Merlin, Répert. univ. mot:,,Prise maritime.“ Nau, Völkerseerecht. § 265 suiv. Wheaton, Intern. Law. IV, 3, § 9 suiv. (§ 359 de l'édit. de Dana). Wurm dans Rotteck et Welcker, Staats - Lexicon. V. Prise. Pando p. 412. Ortolan II, p. 39. Wildman II, p. 118 et surtout de Pistoye et Duverdy, Droit des prises maritimes. Paris 1855. Halleck, ch. XX.

1 Sirey, Rec. gén. I, 2, 331 et 296. Merlin, loc. cit. Ortolan II, 49. Halleck, ch. XX, 23.

2 V. de Steck, Ueber Handelsverträge p. 171. Staatscanzlei. VI, p. 426. Nau, Völkerseerecht. § 257. Law IV, 1, § 10. 11. de Pistoye et Duverdy II, p. 89.

Faber, Neue europ.
Wheaton, Intern.

A part

sorte,

trente jours aux bâtiments de commerce ennemis. les concessions de cette sorte, les parties belligérantes exercent leurs droits, tant sur la haute mer que dans leurs eaux ou dans celles de l'ennemi, soit directement par des navires d'État armés en course, soit par des commissions ou des lettres de marque délivrées régulièrement à des corsaires ou armateurs privés, à moins qu'on n'y ait renoncé définitivement.1 Des troupes de terre même, lors de l'occupation d'un port ennemi, s'empareront valablement des navires de guerre qui y sont stationnés, et en ce cas les règles restrictives, relatives au butin ordinaire, ne sont point appliquées.2 Sont considérées comme illicites les prises faites sur le territoire neutre, de même que celles faites moyennant une violation de l'autorisation d'entrée dans un port neutre.3

§ 138. Pour fixer le moment où une prise sur mer doit être réputée accomplie, on suivait autrefois les dispositions du droit romain relatives au butin de terre, que nous avons déjà expliquées. Plus tard les lois et les traités publics ont pris souvent pour base le terme d'une détention de vingt-quatre heures: ils en faisaient dépendre les droits du capteur et ceux de recousse au profit du précédent propriétaire. Ce terme néanmoins a cessé également de former une règle du droit commun. Ainsi le Code général de Prusse (I, § 208) dispose encore à ce sujet ce qui suit: „Les biens et les navires capturés par des corsaires ne sont regardés comme perdus que du moment où ils ont été conduits dans un port ennemi ou neutre." D'après un ancien usage, en vigueur en France dès le règne

1 Autrefois l'entrée de corsaires dans une rivière ennemie, pour y faire une prise, était regardée comme un acte illicite et criminel. Cette défense n'a aucun caractère général et cesse d'être obligatoire, dès que la commission n'en fait pas mention. de Pistoye et Duverdy I, p. 112. Wildman II, p. 361.

2 Martens, Versuch über Caperei. § 34. de Pistoye et Duverdy I, p. 111. 3 Wildman II, p. 147. Wheaton, Elements. IV, 2, § 14 (§ 386 édit.

de Dana). Oke Manning p. 385. Phillimore III, 451.

4 Martens § 55 suiv. Wheaton, Intern. Law IV, 2, § 12. édit. de Dana § 367. 1.

5 Valin, sur l'Ordonnance de 1681. III, 9. 1. V. sur le principe de cette institution Wildman II, p. 354.

de Charles VI (1400), et dès lors chez toutes les autres nations sur mer, le capteur doit justifier de la légalité de la capture devant le conseil des prises compétent, en faisant approuver par ce dernier son titre d'acquisition. Les formalités prescrites à ce sujet doivent être observées par les corsaires privés comme par les navires de l'État. Le capteur doit avant tout conduire le navire capturé dans un port du territoire auquel il appartient ou, s'il y a lieu, dans un port neutre, et tant que ses droits n'ont pas été régulièrement constatés, il lui est défendu de disposer arbitrairement des objets saisis.2 La destruction de la prise ne pourra être excusée que dans les cas de nécessité extrême.3

Sont regardés comme étant compétents pour statuer sur la validité des prises, d'après la pratique constante des États, tantôt les tribunaux ordinaires, tantôt les conseils de prise et les commissions spéciales du pays auquel appartient le capteur. Un État neutre ne possède aucune espèce de juridiction régulière en matière de prises, alors même que des navires capturés ont été conduits dans ses ports.4 Les consuls établis par l'une des parties belligérantes dans le territoire neutre, ne peuvent pas non plus être regardés comme compétents, attendu que les fonctions consulaires n'impliquent pas ordinairement une juridiction maritime. Le gouvernement français avait, il est vrai, investi ses consuls d'une commission pareille, mais il l'a révoquée par Décret impérial du 18 juillet 1854. Par la même raison on ne pourra, à ce sujet, accorder aucune autorité aux ministres plénipotentiaires.5 Cependant il suffit pour la validité de la saisie, quoique les objets capturés se trouvent encore sur le territoire neutre, qu'elle soit reconnue par la suite.6

1 Valin, sur l'Ordonnance de 1681. II, p. 309.

2 Wildman II, p. 168.

3 Clark, Papers read before the Juridical Society. Londres 1864. Bluntschli, V. R. § 672.

4 Jouffroy p. 282. Hautefeuille IV, p. 294. Comparez cependant § 172. 5 Phillimore III, 469. Martens § 37. Wheaton § 15. Oke Manning

p. 380.

6 Wheaton, Intern. Law IV, 2, § 13 in fine (édit. franç. II, p. 44). Oke Manning p. 382.

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