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Le jus sacrum des Romains.

C'est au jus sacrum qu'on peut faire remonter les premières notions de droit international chez les Romains. Nous en retrouvons les traces entre autres dans certaines fonctions internationales de leur essence. C'est le cas surtout des féciaux, à qui incombaient la déclaration de guerre et la conclusion de la paix. C'était une sorte de corps diplomatique, qui revêtait en même temps des fonctions sacerdotales, car on avait coutume de prendre dans son sein les légats ou ambassadeurs. Aux féciaux revenaient toutes les affaires d'extradition; c'est eux qui étaient chargés de veiller à l'observation des traités de paix conclus avec les peuples étrangers, et de maintenir les traditions diplomatiques.

A côté d'eux fonctionnaient les récupérateurs, qui étaient chargés des revendications entre les ressortissants des nations diverses ou entre États. Les récupérateurs constituaient donc une sorte de cour arbitrale.

D'autre part nous voyons le Sénat statuer sur les réclamations de peuples étrangers, donner des instructions aux légats, discuter les traités d'alliance ou de paix, puis l'opportunité des déclarations de guerre. Plus tard ces privilèges passèrent aux empereurs.

Quant au droit international privé, c'est le prætor peregrinus qui en était chargé *.

Les Romains distinguaient trois catégories de relations avec l'étranger:

1o Les relations guerrières, qui étaient régies par le jus belli ; 2o Les alliances reposant sur des traités formels ;

3o Les relations pacifiques, basées soit sur .des conventions commerciales ou autres, soit sur la coutume.

Ils reconnaissaient quatre causes de guerre l'invasion de leur territoire par des tribus étrangères, l'infraction au principe de l'inviolabilité des légats, la défection et enfin la prise de parti contre Rome ou ses alliés.

Dans l'origine donc, les Romains n'admettaient que la guerre défensive; et encore fallait-il qu'elle fût précédée d'une déclaration formelle. L'ennemi vaincu était de la sorte considéré comme l'ar

tit. 8; lib. 3, tit. 22, 27, 32; Wheaton, Hist., t. I, pp 17 et seq.; Laurent, Hist., t. III; Montesquieu, Grandeur, ch. 6; Manning, p. 7; Pradier-Fodéré, Int. au nouv. droit int. de Fiore, t. I, pp xxvIII, XXIX., Alcorta, Curso de derecho internacional publico, t. I p. 163.

*Lydus De Mag. Rom. I, 38 et 45, L. 24 § 28. De orig. jur. Accarias t. II, n° 734 et t. I, n° 19; De Neumann, Éléments du Droit des Gens moderne européen, p. 13 et 14, traduit par M. de Riedmatten.

tisan de son infortune et par conséquent comme hors la loi. On pouvait le tuer ou le réduire en esclavage et confisquer ses propriétés; mais la pratique admettait maints adoucissements à cette doctrine.

C'est aux Romains que nous devons la post-liminie ou restitutio in integrum, qui s'exerçait sur les personnes et les objets tombés au pouvoir de l'ennemi, puis reconquis.

Nous avons connaissance de nombreux traités conclus, dès les premiers siècles de la République, entre les Romains et les peuples étrangers. Ainsi le traité signé avec le roi latin Porsenna, les conventions commerciales avec Carthage. Plus tard Rome érigea en principe de ne plus reconnaître la neutralité des nations vaincues. Dans le traité de paix celles-ci s'engageaient au contraire à faire en tout, à l'avenir, cause commune avec le vainqueur.

Les stipulations de ces traités portaient en général la cession du territoire, la restitution du butin, le remboursement des frais de guerre, l'échange des prisonniers et l'institution d'otages *.

Lejus gentium des Ro

Le jus gentium des Romains était loin d'être un droit international positif, fondé sur le consentement mutuel des peuples ou mains. sur les pratiques généralement reçues. Les Romains donnaient à cette partie du droit le nom de droit des gens, parce qu'elle avait pour objet de déterminer la conduite de Rome à l'égard des autres nations en cas de guerre; mais ils n'entendaient pas pour cela que les autres nations fussent tenues d'en observer les prescriptions. De toutes les définitions données du jus gentium par les jurisconsultes romains, il ressort clairement que ces mots ne signifiaient point une règle de conduite applicable aux relations internationales, mais seulement un principe général de droit fondé sur la nature humaine, autant du moins que la civilisation d'alors permettait de l'établir et de le comprendre; aussi la législation romaine opposait-elle le droit des gens, jus gentium, à la rigueur du droit civil, jus civile, et même au droit public interne ou politique, jus publicum.

Savigny rapporte l'origine du jus gentium aux conquêtes de Rome. Suivant cet auteur, dès que Rome entra en relations avec les peuples voisins, ses tribunaux se trouvèrent saisis d'une foule d'aflaires spéciales, exclusivement particulières aux étrangers. D'un autre côté, quand leur domination s'étendit, il était impossible que

Holtzendorff, Völkerrecht p. 242, 599.

Le droit international

a la fin de la première époque

les Romains n'eussent pas l'idée abstraite d'un droit commun basé sur la nature humaine même, sur les notions de justice innées chez tous les hommes, sans rechercher si ce droit était réellement reconnu par tous les peuples.

Savigny établit nettement la distinction entre ce qui, selon le droit romain, appartenait au jus gentium et ce qui correspondait au jus civile. « Certaines règles et certaines institutions, dit-il, étaient communes à l'un et à l'autre, notamment celles qui s'appliquent aux contrats les plus usuels, tels que contrats de vente, de louage et de société. »

Un grand nombre d'institutions, bien qu'appartenant exclusivement au droit civil romain, mais généralement basées sur le droit naturel, existaient, toutefois sous des formes différentes, chez les autres nations; c'est pour cette raison que, lorsque Rome eut accru ses relations avec les autres peuples, ses tribunaux reconnurent dans la pratique les institutions du droit général qui correspondaient à celles du droit civil; ils admirent, par exemple, qu'un mariage contracté selon le droit des gens est aussi valide que le mariage civil, quoiqu'il soit privé de quelques-uns des effets de ce dernier. Bientôt, ainsi que le fait observer Savigny, à mesure qu'il s'assimilait les nations conquises, le peuple romain perdit son individualité et son caractère exclusif, et le jus gentium acquit une plus grande importance *.

Nous devons ajouter que les Romains avaient de bonne heure incorporé dans leur législation maritime les principes du code nautique des Grecs; et à mesure que leur commerce et leurs relations avec les autres nations s'accrurent, cette législation prit un caractère plus général et devint plus libérale dans ses stipulations. On conserve encore de nombreux fragments de ces anciennes lois, qu'on retrouve dans le code Théodosien, dans le Code, le Digeste et les Pandectes de Justinien, et dans les Basiliques et les constitutions maritimes promulguées par l'empereur Léon VI.

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Malgré les progrès accomplis jusqu'à la chute de l'empire romain dans la sphère générale du droit des gens, il s'en fallait encore de

Wheaton, Hist., t. I, pp. 23 et seq.; Ward, Hist., vol. I, pp. 171 et seq.; Cantu, Hist. univ, t. V. p. 237; Laurent, Hist., t. III; Halleck, ch. I, §4; Alcorta, t. I, p. 63; Rutherforth, Inst., book 2, ch. 9 § 10; Manning, p. 8; Ompteda, Lit., t. 1, §§ 32-44; Savigny, System., t. I, liv. 1, 3, § 22; Savigny, Geschichte, t. I, ch. 1, § 1; Pardessus, Us et coutumes, t. I, chs. 1-5; Vergé, Précis de Martens, t. I, p. 41; Pradier-Fodéré, Int. au nouv. droit int. de Fiore, t. I, p. xi. Lawrence, Commentaire, p. 106.

beaucoup que les relations internationales fussent régies par les principes d'une stricte justice; le droit international ne pouvait guère être considéré que comme étant dans un état en quelque sorte rudimentaire.

L'invasion des tribus germaniques, répandant sur leur passage ces idées de liberté et d'indépendance qui accélérèrent la chute des Césars, rendit encore plus incertaine et plus changeante la situation des peuples entre lesquels Rome avait servi de trait d'union, et c'est en vain qu'on chercherait, à la fin de cette époque, un principe fixe, un centre constant de rapports internationaux. Ces rapports sont si variés, si contradictoires et surtout si peu stables, qu'on pressent déjà la dissolution du vaste empire.

Quoi qu'il en soit, aux nouveaux États nés de ses ruines, Rome a transmis son idée, et avec son idée son droit. Ainsi se sont conservés les principes communs les plus importants, qui, en sc combinant avec l'esprit des peuples du Nord, sont devenus nécessairement les fondements d'un autre ordre de choses et d'une civilisation nouvelle.

Alors aussi se répandirent les doctrines de la religion chrétienne, et peu à peu leur application imprima un caractère plus marqué de modération et une plus grande extension aux principes du droit des gens, que n'avaient pu leur en donner les systèmes défectueux et si divers des mythologies grecques et romaines; toutefois les progrès du christianisme furent comparativement lents, et les persécutions subies par les premiers chrétiens engendrèrent naturellement un esprit de représailles. De plus, il ne faut jamais perdre de vue, lorsqu'on étudie l'histoire des relations internationales sous le règne de Constantin et des empereurs chrétiens qui lui succédèrent, que les contestations qu'ils avaient avec les États barbares n'étaient pas de nature à développer les adoucissements du régime belliqueux, ou même à inspirer l'observation des usages reconnus de la guerre ou les pratiques antérieurement établies des rapports internationaux pendant la paix. Il est à remarquer aussi que toutes les branches des connaissances étaient sur le déclin, avant l'introduction du christianisme dans l'empire*.

Wheaton, Hist., t. I, p. 27; Ward, Hist., vol. I, pp. 171-210; Laurent, Hist., t. V, pp. 510 et seq.; Gibbon, Histoire de la décadence; Garden, Traité, t. I, pte. 1.

DEUXIÈME ÉPOQUE.

DEPUIS LA CHUTE DE L'EMPIRE ROMAIN JUSQU'A

LA PAIX DE WESTPHALIE.

476-1648.

lufluence

du

A la chute de l'empire romain, un grand nombre de villes avaient droit romain conservé leur ancienne constitution municipale et vivaient encore la législation sous le régime du droit qui les gouvernait depuis longtemps.

sur

de l'Europe

moderne

Savigny, qui a étudié soigneusement l'histoire du droit au moyen àge, établit que, même avant la découverte des Pandectes à Amalfi, les lois romaines avaient continué de faire partie intégrante de la législation européenne. A l'appui de sa thèse, il allègue que, du temps des barbares, les peuples vaincus gardaient une partie de leurs droits leurs terres n'étaient pas entièrement confisquées leur liberté personnelle et leurs coutumes étaient respectées; on leur reconnaissait généralement le privilège de se régir par leurs propres lois, et le plus souvent les constitutions municipales étaient maintenues intactes. Un autre élément, un autre pouvoir tendait encore à cette époque à perpétuer la tradition de la législation romaine : cet élément, c'était l'Église, qui contribuait aussi pour sa part à rapprocher et à unir les peuples.

Aussi, lors de la création de l'empire d'Occident, Charlemagne n'éprouva-t-il aucune difficulté à donner, pour règle commune aux divers peuples placés sous son sceptre, le droit romain considéré dans ses principes les plus généraux et confondu avec le jus gentium dans le sens de droit naturel.

Une autre preuve de l'influence prépondérante des principes du droit sur la civilisation romaine et du rôle que celle-ci a été appelée à jouer au moyen âge, consiste dans l'importance acquise par les jurisconsultes tantôt ce sont les professeurs de la célèbre université de Bologne que l'on autorise à régler, en qualité d'arbitres, les différends survenus entre les divers États de l'Italie et Frédéric Barberousse; tantôt ce sont les villes lombardes qui, pour trancher leurs démêlés, font appel à l'opinion des légistes: ces derniers, il est vrai, se prononcent le plus souvent dans un sens favorable aux prétentions de l'Empereur *.

Wheaton, Hist., t. I, pp. 28-30; Savigny, Geschichte, t. I, ch. 3; t. III, ch. 16; Ward, Hist., vol. I, pp. 211-237; Manning, pp. 8-10; Guizot, Hist. de la civilisation en France; Ch. Giraud, Int. hist. au droit romain, pp. 456 et seq.; Pradier-Fodéré, Int. au nouv. droit int. de Fiore, t. I, pp.

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