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connu par une loi, c'est le défaut d'universalité, le domaine restreint de son action. Si, comme l'affirme Montesquieu, il y a des principes de droit universellement applicables dans leur sens absolu, par contre il n'existe point de loi universelle des nations, pas même chez les peuples qui sont à la tête de la civilisation. L'existence d'une pareille loi impliquerait, en effet, la négation du progrès de la liberté et même de la civilisation.

Les lois internationales ont encore un autre caractère : c'est qu'à la différence des lois civiles, politiques ou administratives, elles ne peuvent être sanctionnées par une autorité supérieure aux relations auxquelles elles doivent s'appliquer. Le caractère obligatoire des lois internationales repose sur une autre base que celle des lois civiles ou politiques. Quelques publicistes établissent cette distinction, parce que, repoussant la dénomination de lois internationales, ils n'admettent que celles de règles internationales. Ortolan, par exemple, intitule son traité sur le droit international maritime : Règles internationales et diplomatiques de la mer. Pour notre part, nous n'avons nul inconvénient à appliquer ici le mot loi, qui, pour nous, n'a pas l'acception étroite et limitée que certaines personnes supposent. Est-ce qu'il n'existe pas des lois morales, des lois physiques, des lois de la quantité, etc. ?

Le caractère obligatoire des lois internationales n'a sans doute pas les mêmes traits distinctifs que celui des lois civiles; mais il n'en est pas moins réel et positif. Les lois internationales ne sont pas seulement obligatoires moralement; elles le sont encore matériellement. Quelle nation, en effet, oserait, dans ses relations extérieures, violer les principes de droit reconnus et respectés par les autres peuples, ou méconnaître les obligations qui en découlent?

Il existe, d'ailleurs, des points de droit international si clairement définis qu'ils ne peuvent prêter à aucun doute quant à leur caractère obligatoire: tel est le cas, par exemple, pour la piraterie.

Un Etat qui se rendrait coupable de ce crime perdrait sa place parmi les nations civilisées et s'exposerait à subir immédiatement les conséquences de sa conduite *.

* Montesquieu, Esprit, liv. 1, ch. 3; Wheaton, Elém., pte. 1, § 10; Grotius, Le droit,. liv. 1, ch. 1, § 14; Bynkershoek, De foro, cap. 3; Leibnitz, Codex, præfat.; Heffter, 1; Felix, ch. 3, § 14; Rayneval, Inst., liv. 1, § 10; Bentham, Works, pt. 1, p. 149; D'Aguesseau, Œuvres, t. Il, p. 337; Martens, Précis, § 9; Halleck, ch. 2, § 13; Lawrence, Com., pte. 1, ch. 1, pp. 114 et seq.; Dana, Elem., by Wheaton, note 7; Rut.

Les États peuvent être

§ 26. Quelques jurisconsultes ont traité la question de savoir si les Etats peuvent être punis pour les offenses qu'ils commettent punis. contre le droit international. Cette question, qui ne repose en quelque sorte que sur la valeur d'un mot, a soulevé de nombreuses discussions. Il est clair cependant qu'un Etat ne peut pas être mis en cause comme un individu, ni condamné ou obligé à subir une véritable condamnation. Néanmoins, un Etat offensé a le droit de demander une réparation et même de tenter de l'obtenir par la force des armes : ce qui suppose toujours une pénalité, un châtiment pour l'offenseur. Au reste, les Etats étant absolument indépendants, les relations de droit pénal qui existent entre les sujets ou les cipoyens d'un même pays ne peuvent exister entre leurs gouvernements. En effet, ces relations supposeraient l'existence d'un tribunal supérieur et, par conséquent, la négation de l'indépendance même des nations.

En raison du caractère des lois internationales, on peut dire qu'il existe un droit des gens fondé sur la situation respective des nations, dérivant logiquement et nécessairement de la nature même des choses, n'ayant même besoin d'aucune sanction extérieure pour être observé, puisqu'il intéresse toutes les nations parvenues au même degré de civilisation.

Il en est de même par rapport au respect réciproque de l'indépendance des Etats; à la nécessité que les nations civilisées éprouvent d'appliquer aux guerres certains principes d'humanité; aux devoirs mutuels de courtoisie internationale, etc., etc.

Un autre droit découle encore du caractère général des lois internationales. Nous voulons parler du droit international particulier, qui s'appuie sur les actes volontaires des Etats, sur les pratiques suivies, sur les principes admis dans certaines circonstances, sur les règles de courtoisie consacrées entre certains Etats, sans pour cela créer aucun droit en faveur des autres nations, enfin sur tout ce qui donne lieu à un rapport international spécial ou transitoire *.

herforth, Inst., b. 1, ch. 5, § 1; Massé, t. I, §§ 34-36; Laferrière, Cours, t. I, pp. 290 et seq.; Eschbach, Int., § 38; Vergé, Précis de Martens, §§ 4, 9; Pradier-Fodéré, Una página, par Calvo, préf.; Pradier-Fodéré, Grotius, t. I, pp. 91 et seq.: Manning, pp. 59, 60; Ward, v. 1, ch. 1; Bowyer, chs. 5, 7.

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Phillimore, Com., v. I, § 11; Vattel, Le droit, liv. 2, ch. 1, § 4; Heffter, § 3; Halleck, ch. 2, § 16; Wildman, v. I, pp. 31, 32.

Diversité des

sources.

Ouvrages des

SECTION II. SOURCES DU DROIT INTERNATIONAL

§ 27. Si presque tous les publicistes sont d'accord sur l'énumération des sources du droit international. il n'en est pas de même à l'égard de leur classification et de leur importance. On observe surtout entre les auteurs nord-américains et anglais et ceux du centre de l'Europe une divergence notable d'opinion sur la valeur et l'autorité légale que les uns et les autres accordent aux sentences des tribunaux. Cette dissidence provient de la différence des systèmes politiques et administratifs qui régissent les pays auxquels appartiennent ces divers auteurs. Une sentence ou décision judiciaire est considérée en Angleterre et aux Etats-Unis comme une preuve évidente de la juste application de la loi : c'est une déclaration de la loi commune. Chez les peuples monarchiques du continent européen, les décisions judiciaires ne jouissent pas de la même autorité, et il arrive souvent que les publicistes européens - Hautefeuille est de ce nombre — accordent plus de crédit aux opinions des publicistes qu'aux jugements rendus par les tribunaux.

Pour déterminer l'ordre des sources du droit international, il est donc nécessaire d'avoir égard aux conditions spéciales de l'organisation intérieure de chaque Etat. Ainsi les décisions d'un tribunal pourront avoir une valeur plus grande en Angleterre qu'en France, en France qu'en Espagne, etc., comme aussi les opinions d'un auteur auront plus de force en France qu'aux Etats-Unis. Sans perdre de vue ces considératious, qui ont une grande importance pratique, nous allons maintenant indiquer quelles sont les sources du droit international, puis examiner chacune d'elles en particulier *.

§ 28. La source du droit international la plus abondante sans publicistes. contredit consiste dans les œuvres des publicistes. La condition indispensable, pour qu'un ouvrage soit considéré comme source du droit international, est qu'il provienne d'une autorité reconnue. « Si les principaux publicistes, dit Kent, sont d'accord sur un principe, la présomption en faveur de la légitimité de ce principe aura une

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Wheaton, Elem., pte. 1, ch. 1, § 12; Heffter, § 8; Halleck, ch. 2, § 17; Manning. pp. 76, 77; Polson, sect. 3; Bello, prélim., §7; Martens, Précis, § 11; Klüber, Droit, § 3; Fiore, t. I, pp. 84 et seq.; Vergé, Précis de Martens, t. I, p. 62.; Dana, Elem., by Wheaton, note 11.; Renault, Introduction, §§ 23-25.

force telle qu'il ne pourrait être violé que par une nation qui se ferait un jeu de la loi et de la justice. » La même doctrine a été défendue par Mackintosh dans son discours sur l'annexion de Gênes au royaume de Sardaigne.

Mais pour conserver toute leur autorité, les publicistes n'ont pas besoin d'être unanimes dans l'expression de leurs opinions. Leur divergence offre même un gage certain d'impartialité, et c'est pour cela que, dans les différends internationaux, on cite fréquemment les auteurs qui ont écrit avant la naissance du conflit pour la solution duquel leurs opinions sont invoquées. Lorsque les publicistes d'un État combattent les prétentions de leur gouvernement, on peut, sans crainte de se tromper, en induire un puissant argument contre la valeur de ces mêmes prétentions. C'est ce qui arriva notamment pour la fameuse question Canstatt, si lumineusement débattue par Sir R. Phillimore (1). Ce même publiciste dit avec juste raison que si l'autorité de Zouch, de Lee, de Mansfield, et, plus encore, celle de Lord Stowell, est contraire à une prétention de l'Angleterre; si Valin, Domat, Pothier et Vattel sont opposés à une prétention de la France; si Grotius et Bynkershoek s'opposent à une réclamation de la Hollande; si Puffendorf s'élève contre une prétention de la Suède; si les avis de Heineccius, de Leibnitz et de Wolff ne sc montrent point favorables à une demande de l'Allemagne; enfin si Story, Wheaton et Kent repoussent une exigence des États-Unis, le poids de ces diverses opinions ne pourra pas moins que d'être prépondérant.

Nous devons faire remarquer à cette occasion que dans beaucoup de circonstances l'autorité accordée aux publicistes est en quelque sorte solennellement consacrée par l'appui que les doctrines professées théoriquement reçoivent de la part des hommes politiques et des gouvernements, ou de telle ou telle sentence judiciaire, c'est-à-dire que cette source du droit international peut alternativement emprunter aux autres une partie de sa force et contribuer elle-même à accroître la valeur et le prestige de celles qui l'appellent à leur aide *.

§ 29. Le droit international a sa source principale dans les traités par lesquels les États fixent et déterminent leurs relations aussi

(1) Voir l'affaire Canstatt.

Phillimore, Com., vol. I, pt. 1, ch. 7; Kent, Com., vol. I, § 19; Bello, prélim, §8; Wheaton, Elém., pte. 1, ch. 1, § 12; Halleck, ch. 2, §§ 26, 27; Manning, p. 56; Fiore, t. I, pp. 87, 88; Wildman, vol. I, pp. 3336; Polson, sect. 3, §2; Pradier-Fodéré, Fiore, t. I, pp. 88, 89.

Traités et conventions.

L'histoire.

bien en temps de guerre qu'en temps de paix. De même que la loi
juridique est en général la manifestation du droit, les traités con-
clus entre les nations sont la manifestation la plus efficace et la
plus légitime du droit international. Dans toute la rigueur du droit,
la force obligatoire des traités et des conventions ne s'impose qu'aux
parties contractantes. Mais lorsqu'un traité diminue les exigences
d'une loi antérieure ou résout une question pratique qui a donné
naissance à de graves dissentiments, ses effets s'étendent immé-
diatement aux parties contractantes, et successivement aux autres
États qui sont en relations avec elles. Quelquefois les traités affir-
ment les principes du droit des gens généralement reconnus, ou
établissent des règles
règles particulières entre les contractants;
d'autres fois encore ils tranchent des questions douteuses ou ap-
portent dans les relations internationales le germe fécond de nou-
velles idées.

Dans tous les cas, et quelle que soit la nature ou la portée de leurs stipulations, les traités sont incontestablement la source la plus importante et la plus irrécusable du droit international. Cela est si vrai que tous les publicistes, d'accord sur ce point avec la raison même des choses, admettent qu'une série de traités résolvant d'une manière uniforme une question identique peut être considérée comme traduisant l'opinion même des nations sur la matière.

D'ailleurs, si l'on réfléchit que le droit public externe est un droit non écrit, dont par conséquent la codification n'a pas été possible jusqu'ici, il faut reconnaître, avec Heffter, dont nous partageons l'opinion, que les textes et l'interprétation des traités internationaux sont le témoignage le plus évident de l'accord des gouvernements *.

§ 30. L'histoire des guerres, des traités de paix et de commerce, des négociations de toute espèce entre les États est encore une des grandes sources du droit international. Il est indubitable que l'histoire, n'étant par elle-même que la manifestation dans le temps et dans l'espace des lois de l'esprit humain, présente un ca

* Wheaton, Elém., pte. 1, ch. 1, § 12; Bynkershoek, Quæst., lib. 1, cap. 10; Heffter, § 8; Phillimore, Com., vol. I, §§ 52 et seq.; Manning, pp. 74, 75; Fiore, t. I, pp. 89, 90; Polson, sect. 3, § 2, p. 15; Wildman, v. I, p. 2; Martens, Précis, § 11; Klüber, Droit, § 3; Madison, p. 39; Halleck, ch. 2, § 28; Ortolan, Règles, t. I, liv. 1, ch. 4. pp. 66 et seq.; Lawrence, Elém., by Wheaton, note 10; Pradier-Fodéré, Fiore, t. I, pp. 90, 91; Alcorta, t. I, p. 486; Hall, International law., p. 7; Renault, introduction, §§ 26-30; Neumann, Grundiss des Huetigen europaischen Völkerrechts, § 2.

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