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sujet, je prends la liberté d'alléguer pour ma justification que le général de Gerlach m'écrit qu'il trouve mon exposé incomplet, attendu qu'il y manque un petitum, une opinion nettement formulée sur ce qu'il y aurait à faire, selon moi.

soyons

A la fin de mon rapport, le temps m'a fait défaut; autrement j'aurais prouvé encore plus nettement que la situation actuelle nous recommande de ne pas fixer notre politique par des décisions ou même par des promesses, avant que nous mieux édifiés sur les vues des autres puissances; car, dès que nous nous serons prononcés, nous cesserons d'être intéressants pour les autres, et, au lieu de rechercher notre appui, ceux à qui nous sommes utiles nous payeront d'ingratitude en jouissant de leur sécurité, tandis que leurs adversaires prendront une attitude hostile. Il nous est impossible de régler à notre gré les rapports des autres grandes puissances entre elles, mais nous pouvons nous réserver la liberté de tirer parti, dans la mesure de ce qu'exigent notre sécurité et nos intérêts, des changements qui se produiront sans nous et peut-être malgré nous.

Nos rapports avec la Russie, l'Angleterre et l'Autriche sont tels qu'ils ne nous empêchent pas de nous rapprocher de ces puissances, si les circonstances nous font trouver quelque avantage à ce rapprochement. En ce qui concerne la France, le contraire n'a pas lieu, il est vrai; mais, d'après le passé et d'après la situation dynastique, il y a là des germes d'antipathie réciproque; aussi n'est-ce qu'au prix de ménagements infinis que nous pouvons conserver la faculté de nous rapprocher de la France, si les circonstances le commandent, aussi facilement que des trois autres puissances. Je ne prétends pas prêcher à priori une alliance prusso-française, mais je regarde comme évident que notre position perdra de son importance et que les autres cabinets compteront moins avec nous, dès que, parmi les décisions possibles pour la Prusse, il faudra considérer comme chimérique la chance d'une alliance avec la France; or, nous pouvons nous trouver malgré nous dans des situations où de deux maux ce serait le moindre. Si l'on admet ce point, il s'ensuit que jusqu'à nouvel ordre nos rapports avec la France doivent être tels qu'ils nous permettent à toute époque de nous rapprocher encore davantage de

cette puissance, sans qu'il en résulte un préjudice ou une humiliation pour nous, et que les autres cours soient persuadées que cette voie nous est ouverte. Je regarde cette impression comme décisive surtout pour nos relations avec l'Autriche et les autres cours allemandes. A partir du moment où une alliance austro-française, d'où la Prusse serait exclue, entrerait dans le domaine de la réalité, l'Autriche prendrait, je n'en doute pas, un ton très-élevé vis à-vis de nous, et les États de l'Allemagne n'auraient plus d'autre boussole pour leur politique que celle de la crainte de la France et de l'Autriche.

L'opinion que j'émels paraît être partagée par le cabinet de Vienne; l'Autriche ne cherche nullement un abri dans l'édifice branlant de la Confédération; elle recherche ouvertement l'amitié de la France; sa presse officieuse se targue du succès de ses efforts, parce qu'on sait à Vienne que l'Autriche ne peut compter sur les États allemands et sur leur vote en matière de questions fédérales et douanières qu'autant qu'elle peut les faire croire à son alliance avec la France. L'archiduc Maximilien, qui est à Francfort aujourd'hui, et en l'honneur duquel le comte de Rechberg donne une soirée, est accompagné du comte de Mensdorff'. La presse gouvernementale de l'Autriche tire parti de cette circonstance pour prouver que le voyage de Son Altesse Impériale à Paris a un but politique, et qu'on en profitera pour engager des négociations. Ces démonstrations ne manquent pas de produire leur effet sur mes collègues, et quand même ils ne croient pas encore que le voyage de l'archiduc soit destiné à préparer la visite de l'Empereur à Paris, il est un autre bruit qui trouve de l'écho chez eux : c'est celui d'après lequel on doit décider à cette occasion Louis-Napoléon à se rencontrer avec l'empereur d'Autriche à Rome, sous les auspices du Saint-Père. On parle comme d'une chose encore plus certaine d'une visite prochaine de l'empereur Alexandre à Paris; on sait que ce souverain voulait déjà faire cette excursion il y a quatre ans environ, lorsqu'il était à Darmstadt en qualité d'héritier présomptif, qu'il en avait

1 Le comte de Mensdorff-Pouilly était alors lieutenant-feld-maréchal et divisionnaire I. R. dans le 7° corps d'armée (Brescia).

demandé la permission à l'empereur Nicolas et l'avait obtenue. J'ai oublié pour quel motif il n'a pas donné suite à ce projet. Des voyageurs venant de Paris racontent que l'empereur Napoléon a exprimé à des officiers prussiens, notamment au prince de Reuss, lors de sa présentation, le désir et l'espérance de voir manœuvrer les troupes prussiennes. Comme il ne s'exprime guère sans préméditation, on en a conclu qu'il voudrait être invité à venir à Berlin. Naturellement Hatzfeldt saura mieux que moi ce qu'il en est; mais si le fait était exact, je verrais dans cette visite le couronnement de la politique prussienne dans la question d'Orient et une preuve éclatante de sa justesse. Le souverain des Français joue en ce moment un rôle tellement considérable dans les combinaisons de la politique européenne, et son amitié, réelle ou même apparente, est tellen:ent recherchée par les princes les plus puissants, que ce serait non-seulement un hommage formel à la Prusse, mais encore un fait d'une haute importance politique, s'il visait à l'honneur de faire sa visite à notre auguste maître, pendant que les empereurs de Russie et d'Autriche songent peut-être à venir au-devant de lui jusqu'à Paris, et que nombre d'autres princes ne sont occupés qu'à songer au moyen de pouvoir suivre l'exemple du roi de Wurtemberg sans que leur position en souffre. On peut déplorer cette situation, mais on ne peut rien changer à des faits; on ne peut qu'en tirer parti; or, dans l'état où sont les choses, une visite de l'empereur des Français à Berlin se présenterait, selon moi, comme une victoire diplomatique, et le refus de l'inviter, dans le cas où il aurait réellement la velléité de venir, comme une faute politique.

Il paraît que les légations françaises ont reçu l'ordre de donner à leur gouvernement des renseignements confidentiels sur le traité du 15 avril 1. Du moins Montessuy, parlant d'après des instructions qu'il a reçues avant-hier, a dit à moi et à d'autres personnes que déjà l'année dernière, à propos de la discussion des propositions de paix à faire par l'Autriche, la France avait promis aux deux autres

Il s'agit ici du traité conclu à Paris, le 15 avril 1856, entre l'Autriche, la France et la Grande-Bretagne, relativement à la garantie de l'intégrité de l'empire turc. Voir le Nouveau Recueil général des traités, de G. F. MARTENS, t. XV, p. 790.

contractants de conclure plus tard un traité de ce genre, qu'on fit la paix ou non, et que l'Autriche et l'Angleterre avaient insisté pour obtenir l'accomplissement de cette promesse. Le traité fournit à l'Angleterre une preuve au moins formelle que l'entente entre la France et la Russie n'est pas encore un fait accompli, et que LouisNapoléon croit encore avoir besoin de l'alliance anglaise; la France obtient ainsi l'avantage de tenir l'Autriche séparée de la Russie, et se garantit contre les velléités que pourrait avoir la première de ces puissances de se replacer sur le terrain de la Sainte-Alliance au moyen d'un changement de ministère; grâce au 15 avril, l'Autriche a la satisfaction de pouvoir encore une fois se draper dans le manteau de l'alliance occidentale aux yeux de l'Allemand inquiet; mais pour nous le traité prouve que l'Autriche ne cesse de considérer l'alliance avec les puissances occidentales comme plus avantageuse que l'union avec ses confédérés allemands. »

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Rapport sur la question de la Constitution du Holstein-Lauenbourg.

27 mai 1856. « J'ai reçu hier par Cologne la lettre de Votre Excellence, datée du 24, sur les négociations relatives aux duchés danois; celle du 8' m'est arrivée dernièrement par la même voie. Dans l'intervalle, j'ai parlé de cette affaire à une partie de mes collègues, et je me suis convaincu que la grande majorité d'entre eux serait très-disposée à défendre les duchés contre les prétentions du Danemark si l'on prouvait qu'il y a eu violation des droits garantis en partie par la Confédération, et si une voix compétente s'en plaignait à la Diète. On considérerait certainement comme compétents les états provinciaux de Lauenbourg ou de Holstein, mais

D'après un rapport du ministre plénipotentiaire prussien à Copenhague, on crut que les duchés se décideraient à porter plainte à la Diète. Dans ces circonstances, le ministre de Manteuffel désira connaître l'opinion de M. de Bismarck sur la façon de traiter l'affaire, et être renseigné sur les sentiments des délégués à la Diète. Dans sa lettre du 24 mai, M. de Manteuffel priait M. de Bismarck d'examiner si la situation ne commandait pas d'adresser un avertissement amical au cabinet de Copenhague et d'inviter la cour de Vienne à s'associer à cette démarche de la Prusse.

non des membres isolés de ces corporations ni une minorité du conseil d'État de la monarchie.

En général, on ne croit pas ici qu'un des duchés formule une plainte, surtout depuis que mon collègue de Danemark a dit et répété confidentiellement qu'il avait été pendant assez longtemps inquiet sous ce rapport, mais qu'actuellement il partageait avec son gouvernement la conviction qu'aucune plainte ne sera déposée. L'opinion du ministre royal à Copenhague est toute différente, ainsi que je le vois par ses rapports du 29 avril, du 19 et du 24 mai, que je renvoie ci-joint. Je demande la permission de garder encore la brochure intitulée l'Assemblée des états provinciaux du Holstein contre le ministre; je voudrais en faire usage auprès de mes collègues. Elle peut surtout agir sur le comte de Rechberg personnellement. Jusqu'à présent je n'ai pas parlé de l'affaire à ce dernier, parce que je regarde comme certain que le cabinet de Vienne, malgré le désintéressement qu'il affiche, profitera de cette occasion pour s'attacher le gouvernement danois. Les contrariétés que le comte Hartig1 a essuyées lors de son départ de Copenhague ne changeront pas grand'chose à ces visées, qui sont une conséquence nécessaire de l'ensemble de la politique autrichienne; quant à l'opinion publique, qui en Allemagne se prononce contre ces projets, on s'imaginera que par le moyen de la presse on en aura raison.

Par contre, étant donné l'attitude de la Bavière en présence des discussions qui ont eu lieu à la Diète, et les déclarations du baron de Schrenk sur les sentiments de la cour de Munich, on peut s'attendre à ce que la cour bavaroise prenne franchement fait et cause pour les duchés.

En outre, je puis supposer que Bade, Darmstadt, les duchés saxons, le Brunswick-Nassau, ainsi que la 15 et la 17 curie en première ligne, approuveront toute mesure prise pour protéger les droits de l'Allemagne contre le Danemark. Si je ne nomme pas en toutes lettres les autres membres de la Confédération, je ne veux pas dire par là qu'ils soient disposés à se prononcer dans le

1 Ci-devant ministre plénipotentiaire de Prusse auprès de la cour de Danemark.

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