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quelque chose par le comte de Lützow '; aucun des agents autrichiens ne doit laisser copie de la pièce en question.

La Russie adressera prochainement une communication officielle à la Confédération; elle dira qu'elle accepte dans tous les cas les deux premiers points, ceux qu'on appelle allemands, si l'Allemagne ne rompt pas la neutralité à cause des deux autres; cette démarche fera une impression favorable sur la Confédération et offrira une arme utile contre les demandes que l'Autriche pourrait faire à ses confédérés. S'il survenait un changement à Munich et que mon collègue Schrenk arrivât au gouvernail', cela ne gâterait rien pour le moment. Schrenk est pénétré des défauts de la politique autrichienne, et il la combattra tant qu'il aura l'espoir de détourner l'Autriche d'une rupture; mais si cette puissance se met à faire la guerre, il ne croit pas qu'on puisse la laisser embourbée. On peut se demander si, dans ce cas, le roi Maximilien consentirait à une prestationd esecours onéreuse et stérile. Je ne considère pas la question comme pratique, parce que je conserve toujours la conviction que l'Autriche ne partira pas en guerre sans être sûre de nous, quelque loin qu'elle pousse ses démonstrations.

On dit que la France a tracé à l'Autriche son programme : elle devra défendre à la Russie de franchir la frontière turque sur un point quelconque, même en Asie, sous peine d'une déclaration de guerre immédiate. Ce serait pour l'Autriche un pas de plus dans le système d'après lequel on a fermé les principautés aux Russes, tandis qu'en théorie elles restent ouvertes à leurs adversaires. Si l'Autriche accepte ce programme, elle essayera sans doute de nous associer à ses agissements, nous et la Confédération. A mon avis, nous ne pouvons pas prêter la main à cette ruse grossière, pour faire croire, en cas de rupture, que la Russie a joué le rôle d'agresseur, et pour invoquer ensuite le traité d'avril. De cette manière, la Turquie tout entière rentrerait dans la catégorie des principautés danubiennes protégées par le dernier article additionnel.

Le comte de Solms-Laubach m'a dit que le prince Bernard de

'Envoyé d'Autriche à Darmstadt.

Cf. le document suivant.

3 M. de Schrenk fut nommé ministre de la maison du Roi et des affaires étrangères de Bavière; il remplit ces fonctions du 1er mai 1859 au 4 décembre 1864.

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Solms (frère du roi Georges) a rapporté du Hanovre la nouvelle d'un complet revirement de ce royaume en notre faveur; il a ajouté qu'il ne pouvait pas m'en dire davantage, mais que bientôt nous saurions à quoi nous en tenir. Dans l'affaire de la constitution du Hanovre et de la voix à obtenir à la Diète, l'Autriche aurait-elle par hasard montré trop sans façon le bout de l'oreille? Le départ de mon collègue de Trott'est aussi un événement heureux. S'il pouvait être suivi de celui de quatre ou cinq autres crypto-autrichiens'!»

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8 mai. (Lettre.) « J'ai l'honneur d'adresser ci-joint à Votre Excellence une copie de la communication que M. de Glinka a faite à chacun de mes collègues. Je m'étais attendu à voir le gouvernement russe s'adresser directement à l'assemblée fédérale afin de constituer, par les actes de la Diète, une base officielle de négociations. Quant à la chose elle-même, je me serais promis de cette manière de procéder des résultats plus sérieux pour l'avenir. Cependant il est incontestable que mes collègues sont très-satisfaits du fond de la communication, et que la plupart d'entre eux, notamment les plus prudents, sont enchantés de la forme adoptée; ils sont heureux d'être dispensés des discussions désagréables qu'aurait pu entraîner une communication officielle faite au sein de l'assemblée fédérale. Dans une séance de la commission qui vient de finir, le comte de Rechberg s'est également exprimé dans le même sens. D'après lui, la question de savoir si l'Allemagne peut encore être considérée comme neutre pourrait prêter matière à controverse.

La proposition tendant à régler le troisième point de garantie

1 Le délégué de la Hesse électorale. Son successeur fut le baron de Dornberg, nommé d'abord ad interim.

2 Le ministre répondit entre autres à M. de Bismarck ce qui suit: Vous apprendrez peut-être avec intérêt que M. de Tallenay a écrit récemment à l'ambassadeur de France à Londres qu'il était décidé que la Bavière marcherait avec l'Autriche, si celle-ci se joignait aux puissances occidentales et prenait part à la guerre. Lorsque le comte de Bernstorff communiqua ce fait à son collègue de Bavière, celui-ci se contenta de répondre que cela lui paraissait très-probable. Discrétion absolue sur ce point. Je crois comme vous qu'il y aura lieu de combattre énergiquement les demandes que l'Autriche nous adresse à l'effet d'obtenir une extension encore plus grande de nos obligations et de celles de l'Allemagne en ce qui concerne les principautés. (Lettre particulière adressée à M. de Bismarck, le 7 mai 1855.)

recommence à être vivement discutée. On y voit, en général, un heureux expédient pour tourner la difficulté, car la Russie ne peut voir une atteinte à sa souveraineté et à sa dignité dans le fait que, dans le cas où elle dépasserait le nombre déterminé de vaisseaux, d'autres puissances s'entendraient pour user du droit qui leur appartient de toute façon de lui déclarer la guerre si cette éventualité se réalisait. Les amis de la Russie prétendent que les puissances occidentales n'accepteront pas cette proposition; le comte de Rechberg, au contraire, croit que la Russie la déclinera et, à ce propos, se plaindra de la conduite du prince Gortschakoff. En admettant même que ce dernier ait exprimé un avis défavorable sur la proposition, il n'en est pas moins probable que les vues du cabinet russe sont encore inconnues ici, la proposition étant trop récente.

M. de Glinka persiste à affirmer nettement l'existence de la dépêche secrète autrichienne dont j'ai parlé à plusieurs reprises. Le seul indice, d'ailleurs très-faible, que j'aie encore pu recueillir, vient du Hanovre. Le comte de Kielmansegge m'a demandé aujourd'hui si j'avais reçu des nouvelles d'un revirement de la politique hanovrienne en faveur de la Prusse, dont il avait entendu parler confidentiellement. En parlant des motifs possibles d'un pareil revirement, il dit que, si la nouvelle était fondée, ce changement d'altitude aurait été provoqué peut-être par les démarches de l'Autriche. Il disait ignorer l'existence et la nature de ces démarches; seulement il croyait que, si l'Autriche avait des projets de ce genre, elle commencerait par s'adresser au Hanovre, parce que dans ce royaume on redoutait plus qu'ailleurs de voir la Confédération se dissoudre et de se trouver isolé avec la Prusse. M. de Glinka pense que l'exactitude de ses renseignements se confirmera dans quelques semaines au plus tard. Tout le monde a éprouvé une impression de surprise à la suite des dépêches télégraphiques annonçant les changements effectués dans le ministère des affaires étrangères en France. M. de Tallenay, qui est partisan de la paix, en est frappé très-désagréablement. On croit que l'Empereur veut éloigner de son entourage des hommes d'une certaine indépendance, tels que Drouyn de Lhuys et Thouvenel, et choisir le comte Walewski comme un instrument de sa politique personnelle.

M. de Dalwigk est venu me voir ces jours derniers; il s'est plaint de la prétendue obstination avec laquelle la Russie refusait toute concession aux conférences et mécontentait les diplomates allemands de Vienne; il s'en est référé aux assertions générales et inexactes, selon moi, de M. de Drachenfels, et il a manifesté une grande surprise lorsque, pour lui prouver le contraire, je lui ai communiqué la proposition russe tendant à maintenir en deux articles le traité de 1841 et à autoriser la Porte à laisser le passage libre aux flottes de puissances étrangères lorsqu'elle se croirait menacée. M. de Dalwigk a vu la dedans une concession très-grande, mais ignorée jusqu'à présent. Je ne rappelle cet entretien que pour montrer comment on profite du silence que les puissances représentées à la conférence se sont réciproquement promis de garder, pour répandre en Allemagne, par l'intermédiaire des agents diplomatiques, des nouvelles défavorables sur la conduite de la Russie 1. »

18 mai.

(Lettre particulière autographe *.) — « Retenu dans ma chambre par une indisposition, je n'ai pu voir que quelques-uns de mes collègues; néanmoins je veux vous dire quelques mots sur leurs impressions.

Le comte de Rechberg m'a abordé en disant qu'il regrettait mon prompt retour, car il lui prouvait que les tentatives d'un rapprochement entre l'Autriche et nous n'avaient pas réussi. Dans le cours de la conversation, je lui expliquai pour quelle raison, selon moi, en présence des expériences faites par Sa Majesté, l'initiative d'une entente ne pouvait pas venir de Berlin; j'ajoutai qu'en restant disposée à accueillir avec bienveillance les démarches que l'Autriche ferait dans ce sens, Sa Majesté donnait une preuve certaine de ses sentiments de fidèle confédéré. Le comte de Rechberg me dit qu'il

1 Le 8 mai 1855, le ministre télégraphia à M. de Bismarck que le Roi voulait qu'il vînt aussitôt que possible passer quelques heures à Berlin pour émettre ses propositions sur ce qu'il y avait lieu de faire à la Diète dans la question d'Orient. M. de Bismarck télégraphia le 9 mai au ministre que pour le moment il n'y avait rien à faire à Francfort, et que, par suite, il comptait partir le jour même pour arriver à Berlin le lendemain dans la matinée. Le 12 mai, il présenta au Roi son rapport sur la dernière séance de la Diète.

*Soumise au Roi.

comptait que la parfaite entente entre nous pourrait être amenée en quelques semaines; que ce n'était plus qu'une question de forme et d'initiative, question qu'on pourrait tourner peut-être si nous faisions les premiers pas à Francfort, et qu'il était prêt à soumettre à son cabinet. Il était d'avis que les vues des deux cours se rapprocheraient par la force des choses; qu'en essayant de faire appel aux nationalités, la France pourrait finalement amener l'Autriche à s'allier avec la Russie, et que les puissances occidentales, en posant à la Russie des conditions exagérées, feraient naturellement cesser toute solidarité entre Vienne et Paris. Malgré toutes ces affirmations si rassurantes en général, je n'ai pas réussi à découvrir quel programme spécial mon interlocuteur pouvait concevoir comme base d'une entente.

Je lui demandai s'il avait en vue la réunion des contractants du 20 avril pour soutenir dans les deux sens les dernières propositions de l'Autriche; il répondit que, d'après lui, l'Autriche n'essayerait cette fusion que si les puissances occidentales posaient des conditions tout à fait exagérées; pour le moment, il semblait admettre que le refus de ces puissances serait accompagné de contre-propositions qui pourraient encore fournir des éléments de négociation. Je lui parlai des symptômes qui, indépendamment des expériences faites par nous à l'occasion de notre mission spéciale à Vienne, devaient continuer à nous mettre en défiance contre la politique autrichienne : l'attitude de la presse de Vienne, la conduite du comte de Buol en présence de notre communication ou de notre question du 1er mai, les démarches faites auprès des cours d'Allemagne, les efforts pour renverser Von der Pfordten en Bavière, etc. Il protesta énergiquement contre cette dernière intention; son plus vif désir, dit-il, était de voir Von der Pfordten rester à son poste; la Bavière retrouverait difficilement un ministre aussi calme et aussi sensé, et nous étions bien dans l'erreur en identifiant le parti ultramontain avec l'Autriche; le premier faisait chorus avec cette puissance dans la question actuelle, mais il avait, au fond, des visées et des projets tout différents. Ces paroles me surprirent d'autant plus que Rechberg est l'ami de jeunesse de M. de Schrenk, le successeur probable de Von der Pfordten, et qu'ils vivent tous deux dans l'intimité la plus étroite. Notre conversation a eu naturellement un caractère tout à fait con

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