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question comme purement matérielle; elle a son côté indivisible, sinon politique au premier chef. L'Autriche lutte pour sa légitime influence en Allemagne; et si la Prusse était seule à la tète d'un Zollverein qui embrasserait toute l'Allemagne, bien des gens craindraient la reprise des tentatives d'union restreinte qui se sont produites dans les dernières années.

Les principaux arguments du comte se sont concentrés dans l'appel aux devoirs de la Prusse à l'égard de l'Allemagne et en récriminations sur la froideur que la Prusse affiche envers des États de même origine. Je lui ai répliqué que, dans les dernières années, la Prusse a appris à connaître quelle tâche ingrate c'est de remplir des devoirs à l'égard de l'Allemagne; qu'elle est résolue à régler d'une manière pratique et bourgeoise ses intérêts financiers et économiques; qu'elle serait enchantée de laisser la porte ouverte à ceux de ses confédérés qui, ayant les mêmes intérêts, seraient naturellement tentés de venir à elle; mais que dans aucun cas elle ne chercherait à gagner leur accession par des concessions non justifiées par une utilité réelle. Le gouvernement royal est loin de donner aux États allemands qui ont trouvé les propositions de l'Autriche avantageuses le conseil de ne pas les accepter; de même il se garde de donner ou d'essayer de donner aux résolutions du cabinet impérial, dans ses rapports avec ces États, une direction qui ne fût pas conforme à la manière dont le cabinet impérial envisage ses devoirs envers la Confédération. Ce que nous désirons, c'est d'arriver à une entente amiable avec tous nos confédérés, mais surtout avec l'Autriche, qui est le plus puissant, et nous ne croyons pas qu'on puisse trouver un obstacle à cette entente dans le légitime désir de la Prusse de régler l'économie de ses finances suivant ses besoins particuliers. En somme, l'impression que m'a laissée cet entretien est qu'actuellement on considère ce qui n'a peut-être pas été le cas dės le début la dissolution du Zollverein comme souhaitable, en comptant, je suppose, que le besoin de reconstituer l'union ne tardera pas à se faire sentir assez vivement, chez nous en particulier, pour amener une reprise du projet d'union douanière qui aurait plus de succès qu'aujourd'hui. Quant à la fermeté de notre résolution d'abandonner le Zollverein avec une partie de nos alliés actuels plutôt que

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de former une union douanière avec l'Autriche, je ne crois pas qu'on se fasse encore des illusions à cet égard. Je ne puis m'expliquer que dans ce sens la décision avec laquelle on repousse notre offre de conclure un traité de commerce.

Tous les ministres allemands présents à Vienne étaient dans l'antichambre du comte de Buol et attendaient avec un air d'anxiété le résultat de notre entretien. Quand je sortis, ils m'adressèrent des questions auxquelles je ne pus répondre, mais qui me prouvèrent que leurs gouvernements n'approuveront et ne partageront probablement pas l'attitude décidée du comte de Buol.

Je voudrais, sauf meilleur avis, laisser à Votre Excellence le soin de faire au moins deviner aux agents diplomatiques des gouvernements intéressés présents à Berlin, que la Prusse a essayé d'établir une entente loyale, mais que la froideur de l'Autriche l'oblige de renoncer à renouveler sa tentative. Nous attendrons ensuite pour nous assurer si l'ardent désir des États du centre de voir s'établir l'entente est capable d'influencer le cabinet de Vienne au point de lui faire modifier son attitude.

Je vous fais encore observer qu'aucune minute de ce rapport ne figurera parmi les documents de l'ambassade, parce que le peu de temps qui reste jusqu'au départ du courrier anglais ne permet pas d'en prendre copie.

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24. Rapport immédiat sur le séjour à la cour impériale, à Ofen.

Ofen, 25 juin 1852. — « Par une lettre du comte de Buol, datée du 21 courant, j'ai été invité à me trouver le 24 à la cour impétrale, à Ofen, pour remettre mes lettres de créance à l'Empereur.

En conséquence, je me suis rendu ici le 23, par le bateau à vapeur. Mon arrivée avait été annoncée de Vienne par une dépêche télégraphique. J'ai trouvé au débarcadère un des équipages de l'Empereur et la nouvelle que Sa Majesté avait fait gracieusement mettre à ma disposition un des appartements du château. Hier matin, le lieutenant feld-maréchal comte de Grünne est venu m'annoncer que l'Empereur me recevrait à midi. Après avoir fait d'abord une

visite au comte de Buol, j'eus l'honneur de remettre à l'heure dite mes lettres de créance à Sa Majesté Impériale. L'Empereur me reçut seul, tandis que dans les derniers temps la première audience des ambassadeurs avait eu lieu en présence du ministre des affaires étrangères. Sa Majesté portait l'uniforme de notre régiment de cuirassiers, avec la croix de l'ordre de l'Aigle noir; après avoir reçu mes lettres de créance, Elle a commencé par m'exprimer sa vive reconnaissance pour le contenu de la lettre autographe de Votre Majesté Royale, que j'ai eu l'honneur de porter à Vienne. Sa Majesté ajouta qu'en tout temps Elle appliquerait ses efforts à conserver et à favoriser de son côté les rapports de bon voisinage et de bonne amitié qui existaient heureusement entre les deux pays, et cela dans le sens indiqué par la lettre de Votre Majesté. Sa Majesté était tout heureuse de voir que tout germe de trouble dans l'intime union des deux monarchies était écarté; si parfois les cabinets partaient de points de vue différents en ce qui concernait certains détails relatifs aux intérêts matériels, cela n'empêcherait pas la Prusse et l'Autriche de s'entendre parfaitement sur toutes les autres questions politiques. Relativement à la question des douanes, Sa Majesté croyait devoir maintenir le programme de l'union des droits douaniers, convaincue qu'Elle est qu'une fusion des intérêts matériels peut seule donner à l'Allemagne ce degré de consolidation dont elle a besoin pour garantir sa sécurité intérieure aussi bien que son rang parmi les puissances européennes. Tant que cette manière de voir ne sera cependant pas partagée par le gouvernement de Votre Majesté, l'Empereur s'attend du moins à ce que les efforts de l'Autriche et de la Prusse, pour donner à la Diète une position plus forte et plus puissante en Allemagne, trouveront dans l'entente des deux grandes puissances la garantie d'un succès certain. Quant aux questions de droit fédéral, le comte de Buol les discutera à nouveau avec moi; et Sa Majesté ne renonce pas à l'espoir que l'accord se fera bientôt. dans la question douanière, grâce aux pourparlers que j'allais reprendre avec le ministre. Je répondis à l'Empereur que j'avais l'ordre de Votre Majesté Royale de répéter encore verbalement que la consolidation et l'extension des rapports étroits qui unissaient les deux cours n'étaient pas seulement pour Votre Majesté un vœu per

sonnel, mais encore qu'Elle les reconnaissait, aujourd'hui plus que jamais, comme une nécessité politique, et que Votre Majesté était disposée à faire tout ce qui est en son pouvoir, en tenant compte de la situation de la Prusse, pour prévenir les vœux de l'Empereur.

Ensuite je me suis appliqué, autant que les circonstances le permettaient, à exposer à Sa Majesté les vues du gouvernement royal sur la question douanière encore pendante; je Lui ai montré que tout ce qui pouvait se faire en faveur de la réalisation des vœux du gouvernement impérial se trouvait en germe dans l'empressement de la Prusse à conclure un traité de commerce avec l'Autriche aussitôt après la reconnaissance du Zollverein reconstitué, traité qui permettrait de s'assurer de la possibilité de prendre une résolution définitive en vue d'une fusion douanière.

Sa Majesté a écouté mon exposé avec attention; Elle m'a adressé quelques questions qui s'y rapportaient; puis, après quelques paroles gracieuses pour ma personne, Elle s'est mise à parler d'autre chose, notamment du voyage que Sa Majesté vient de faire dans l'est de la Hongrie. Sa Majesté a été très-satisfaite des preuves de vif attachement que la population Lui a données partout sur son passage; Elle a retracé le caractère original des pays qu'Elle a traversés et des troupes de paysans à cheval qui L'avaient escortée de station en station.

Après s'être informé de la santé et des projets de voyage de mon très-gracieux Maitre, et m'avoir dit combien il se réjouissait de revoir cet été Sa Majesté la Reine à Ischl, l'Empereur m'a congédié. L'audience avait duré une demi-heure environ. J'ai eu ensuite l'honneur d'être reçu par l'archiduc Henri, l'archiduc Albert et madame l'archiduchesse Hildegarde, et d'être invité à dîner avec l'Empereur, qui a de nouveau daigné s'entretenir avec moi et s'est montré fort gracieux à mon égard. Sa Majesté a parlé surtout de la famille impériale de Russie et du jugement extrêmement favorable que l'empereur Nicolas a porté sur l'armée de Votre Majesté Royale; à ce propos Elle a dit avec chaleur que l'impétuosité de la cavalerie prussienne et hongroise, qui avait provoqué les critiques de l'empereur de Russie, Lui plaisait mieux que la lenteur des mouvements de la cavalerie russe.

Le soir, j'ai eu l'honneur d'être invité à une partie de campagne que la cour projetait; le but de l'excursion était un endroit de la montagne voisine qu'on nomme la « belle bergerie ». Ce nom vient d'une légende qui raconte que jadis le roi Mathias Corvin y avait honoré de son attention une belle bergère..... »

25. Rapport sur la crise du Zollverein.

15 juillet 1852. (Envoi d'un exemplaire du journal officiel de Nassau, du 15 juillet, dont l'article de fond traite la « question douanière ».) « Votre Excellence verra par cet article à quelles fâcheuses interprétations a donné lieu l'article publié par la Gazette de Spener sur l'attitude du gouvernement royal dans la question douanière. L'article en question a été reproduit par presque tous les journaux de l'Allemagne du Sud, et n'a pas peu contribué à propager l'espérance que nous céderons. De mon côté, j'ai déjà fait le nécessaire pour éclairer le public de l'Allemagne du Sud sur le véritable état des choses; cependant il serait peut-être fort à souhaiter que cet article fût démenti par une feuille dont les attaches avec le gouvernement soient hors de doute. A cet égard, je ne puis que laisser ce soin à Votre Excellence. Me trouvant hier à Wiesbaden, où j'ai été présenter mes hommages au roi des Belges Léopold, j'ai pu me renseigner, par les connaissances que j'ai dans la ville, sur les sentiments de la population de Nassau et de HesseDarmstadt, et surtout des industriels et des commerçants. Tout le monde s'accorde à considérer la sortie de l'Allemagne du Sud du Zollverein comme le plus grand malheur qui puisse frapper la prospérité et le commerce. En même temps on persiste dans la conviction que les gouvernements de l'Allemagne du Sud n'en viendront pas à cette extrémité quand ils seront persuadés de l'inébranlable fermeté du gouvernement royal.

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