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tout cas, on verra plus loin que, dans l'Europe civilisée et chrétienne, on ne doit pas admettre de pareilies hypothèses, qu'il faut les croire impossibles. »

Il y a donc des cas où l'engagement trop onéreux pourrait être réputé nul, des hypothèses prévues quoique supposées impossibles où l'État ainsi écrasé pourrait vouloir se dégager. Mais comment opérer une libération, ou quelque modification, sans violation de la foi des traités et sans guerre nouvelle? Il ne serait pas ici permis de s'affranchir par un mode arbitraire, tel que celui qu'on appelle en droit international dénonciation ce n'est admis qu'au cas de réserve stipulée, soit sous condition, soit pour telle époque ou après tel temps; et ce serait déjà trop que de l'admettre contre certaines conventions qui règlent seulement quelques interdictions ou garanties, telles que celles de St-Pétersbourg et de Genève. Le meilleur moyen, selon la raison, serait de faire appel à l'opinion et à la justice en démontrant la nécessité d'une modification, de demander une médiation ou même un arbitrage par des puissances neutres qui seraient impartiales; et nous engageons à méditer ces justes réflexions de Mamiani (p. 292): «Avant qu'un peuple prenne le parti extrême de déchirer un traité avec le fer et les révolutions, il faut qu'il ait acquis la conviction claire et absolue qu'il est blessé dans son droit; il faut aussi qu'il ait provoqué le même sentiment chez les autres nations, au moins chez ceux de leurs citoyens qui sont les plus capables d'une opinion mûre et sérieuse. Il doit ensuite recourir à de puissantes médiations; tenter des arrangements équitables et pacifiques; se prêter de luimême à toutes les compensations et à toutes les réparations dues aux intérêts lésés; épuiser enfin tout moyen direct ou indirect de conciliation ou de persuasion. Il est vrai, du reste, que dans la plupart des cas, ces remontrances légales et amiables et ces expédients seront repoussés par cette

même puissance prépondérante qui avait un jour signé l'odieux et onéreux traité. En ce cas, le recours aux moyens violents de la guerre et de la révolution sera bien plus excusable. Mais qu'on y recoure ou non, qu'on viole les conventions ou qu'on s'y soumette, c'est toujours un malheur et même une honte pour la civilisation européenne, de voir que la pratique consacre, quoique la science les repousse, tant de conventions internationales, tant de dispositions du droit commun, de voir aussi qu'on trouve juste, bon et louable, en deçà d'un fleuve, ce qu'au delà on appelle injuste, mauvais et abominable. »

IV

10. Résumons à grands traits, au seul point de vue du sujet actuel, les atteintes récemment portées à des traités anciens, même exécutés, ainsi qu'aux droits garantis et consolidés qui pourtant devaient être irrévocables.

Les traités de 1815, limitant le territoire français tel qu'il était en 1792 et lui assurant par contre la garantie de toutes les puissances signataires, avaient donné à l'Allemagne et particulièrement à la Prusse tout ce qu'elles pouvaient réclamer sans trop d'injustice, tellement que celle-ci obtenait même une partie de la Pologne et de la Saxe. Voulant plus encore, dans des vues de politique intérieure et d'agrandissement démesuré, la diplomatie prussienne a conçu et réalisé le projet gigantesque du rétablissement de l'ancien empire d'Allemagne, sous une direction nouvelle. Pour cela il lui fallait, non pas seulement un remaniement général de la carte de l'Europe, œuvre exigeant un concours de volontés qui n'eût pu être obtenu, mais l'emploi avec succès de toutes les ruses et violences que comportent les habiletés politiques et des guerres fomentées ou dirigées sans scrupules. Une première entreprise, honteuse pour la Prusse, a été l'enlè

vement, d'abord concerté avec l'Autriche, des deux duchés de Slesvig-Holstein, qui dépendaient du Danemark ou devaient avoir une sorte d'autonomie : dans cette conquête inexcusable, qui a indigné l'Europe entière, se trouve une violation flagrante des traités, même les plus respectables, comme l'expliquent notamment des documents officiels déjà cités (Voy. notre ch. xxi, n° 8, note 21). Aussi l'honorable ministre français, dans sa circulaire aux agents diplomatiques, reprochait-il amèrement à la combinaison austroprussienne de ne s'appuyer que sur la force, d'être une pratique funeste et un élément de dissolution, après avoir montré la violation des traités, dont il disait : « Les traités de Vienne avaient réglé les conditions d'existence de la monarchie danoise; ces conditions sont renversées. Le traité de Londres était un nouveau témoignage de la sollicitude de l'Europe pour la durée de l'intégrité de cette monarchie; il est déchiré par deux puissances qui l'avaient signé ! »

Dans l'intérêt de l'Allemagne entière, comme dans celui de chacun des nombreux États allemands, le congrès de Vienne, où tous étaient représentés, avait constitué une confédération, dont l'acte fondamental s'efforçait d'assurer la perpétuité, en pondérant les voix pour tous votes dans les délibérations, en ne donnant à l'Autriche que la présidence, quoiqu'elle eût eu autrefois un droit supérieur, en stipulant une garantie mutuelle pour toutes possessions et en créant un système d'arbitrage pour le cas de différends à vider 16.

16 Article final du congrès de Vienne, juin 1815.

« Les puissances qui ont signé le traité conclu à Paris, le 30 mai 1814, s'étant réunies à Vienne, en conformité de l'art. 32 de cet acte, avec les princes et États leurs alliés, pour compléter les dispositions dudit traité.....; désirant maintenant comprendre dans une transaction commune les différents résultats de leurs négociations, afin de les revêtir de leurs ratifications réciproques, ont autorisé leurs plénipotentiaires à réunir dans un instrument général les dispositions d'un intérêt majeur et permanent, et à joindre à cet acte, comme parties intégrantes des arrangements du congrès, les traités, conventions, déclarations,

Ainsi que l'a remarqué M. Wheaton, c'était une alliance égale entre États indépendants, avec existence permanente devant se perpétuer. « Non-seulement la souveraineté intérieure, ajoutait-il, mais aussi la souveraineté extérieure de chacun des États de la confédération, n'est altérée que dans les cas prévus par les lois fondamentales de la confédération, où le gouvernement fédéral peut représenter cette souveraineté extérieure. Dans tous les autres cas, les Etats confédérés demeurent indépendants les uns des autres, comme aussi de toute puissance étrangère. Leur union forme ce que les publicites allemands nomment Staatenbund, c'est-à-dire un système d'Etats confédérés, terme dont ils se servent par opposition au terme Bunderstaat, c'est-à-dire un gouvernement fédéral suprême. » L'expérience ayant révélé l'utilité de quelques modifications ou stipulations nouvelles, des améliorations étaient apportées à l'acte fédératif, conformément à ses prévisions et avec le concours de tous Etats confédérés,

règlements et autres actes particuliers, tels qu'ils se trouvent cités dans le présent traité.....II. Allemagne..... Art. 43. Confédération germanique. Les princes souverains et les villes libres d'Allemagne, en comprenant dans cette transaction LL. MM. l'empereur d'Autriche, les rois de Prusse, de Danemark et des Pays-Bas, et nommément l'empereur d'Autriche et le roi de Prusse, pour toutes celles de leurs possessions qui ont anciennement appartenu à 1 Empire germanique; le roi de Danemark pour le duché de Holstein, le roi des Pays-Bas pour le grand-duché de Luxembourg; établissent entre eux une confédération perpétuelle, qui portera le nom de Conféderation germanique. Art. 44. Le but de cette confédération est le maintien de la sûreté intérieure et extérieure de l'Allemagne, de l'indépendance et de l'intégrité des États confédérés.-Art. 45. Les membres de la Confédération, comme tels, sont égaux en droits; ils s'obligent tous également à maintenir l'acte qui constitue leur union.-Art. 46. Les affaires de la Confédération seront confiées à une diète fédérative, dans laquelle tous les membres voteront par leurs plénipotentiaires, soit individuellement, soit collectivement, de la manière suivante, sans préjudice de leur rang: 1o Autriche, 1 voix; 2o Prusse, 1; 3o Bavière, 1; 4o Saxe, 1; 5o Hanovre, 1; 6o Wurtemberg, 1; 7o Bade, 1; 8° Hesse électorale, 1; 9° Grand-Duché de Hesse, 1; 10o Danemark, pour Holstein, 1; Pays-Bas, pour Luxembourg, 1; 12° Maisons grand-ducales de Saxe, 1; 13° Brunswick et Nassau, 1; 14° Mecklembourg Schwerin et Strelitz, 1; 15° Holstein-Oldem

par actes de la Diète en assemblée générale des 28 juin 1832 et 30 octobre 1834. Après exécution du traité fondamental pendant 50 ans, la Prusse a détruit tout, au moyen de stratagèmes et violences qui ont été jusqu'à l'amoindrissement de l'Autriche elle-même et à l'absorption de plusieurs Etats, dont le seul tort était d'être fidèles à la foi jurée.

La Diète étant présidée par l'Autriche, la Prusse a voulu y avoir la prépondérance, puis elle l'a dissoute et a fait la guerre à l'Autriche, surprise et vaincue. Menacée de perdre même sa capitale, cette grande puissance a été réduite à la dure nécessité de demander la paix et de subir des conditions humiliantes. Non-seulement elle a été exclue de la confédération, reconstituée par la Prusse sous le nom de « Confédération de l'Allemagne du Nord; » non-seulement il ne lui est resté que la faculté de former avec quelques Etats du Sud, si cela se pouvait, une confédération distincte qui serait indépendante et restreinte. De plus, elle a dû abandonner à la

bourg, Anhalt et Schwartzbourg, 1; 16° Hohenzollern, Lichtenstein, Reuss, Schaumbourg-Lipp, la Lippe et Waldeck, 1; 17° Les villes libres de Lubeck, Francfort, Brême et Hambourg, 1; Total, 17 voix. Art. 47. L'Autriche présidera à la diète fédérative. Chaque État de la Confédération a le droit de faire des propositions, et celui qui préside est tenu à les mettre en délibération dans un espace de temps qui sera fixé. Art. 48. Lorsqu'il s'agira de lois fondamentales à porter, ou de changements à faire dans les lois fondamentales de la Confédération, de mesures à prendre par rapport à l'acte fédératif même, d'institutions organiques ou d'autres arrangements d'un intérêt commun à adopter, la Diète se formera en assemblée générale, et dans ce cas, la distribution des voix aura lieu de la manière suivante :...... Art. 51. La Diète siégera à Francfort-sur-Mein. - ..... Art. 53. Les États de la Confédération s'engagent à défendre non-seulement l'Allemagne entière, mais aussi chaque État individuel de l'union, en cas qu'il fût attaqué, et se garantissent mutuellement toutes celles de leurs possessions qui se trouvent comprises dans cette union..... Les États confédérés s'engagent de même à ne se faire la guerre sous aucun prétexte, et à ne point poursuivre leurs différends par la force des armes, mais à les soumettre à la Diète. Celle-ci essaiera, moyennant une commission, la voie de la médiation. Si elle ne réussit pas, et qu'une sentence juridique devienne nécessaire, il y sera pourvu par un jugement austrégal bien organisé, auquel les parties litigantes se soumettront sans appel..... >>

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