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l'éteindre c'est ainsi que ces misérables, dans des accès de sauvagerie, ont incendié beaucoup de monuments où étaient des chefs-d'œuvre de l'art et des trésors de science, ainsi que des établissements publics ou privés et même des maisons particulières; c'est par les excès sauvages de ces scélérats, la plupart étrangers à Paris et même à la France, que la belle capitale perd des richesses immenses, qui ne pourront jamais se remplacer, ainsi que de nombreuses archives, même judiciaires, dont l'indication attriste tous les hommes de bien tenant à la justice!

L'œuvre infernale a détruit, entre autres monuments et entièrement pour la plupart : le Palais de Justice, où étaient de belles salles d'audience et de riches bibliothèques ; le palais ou château des Tuileries, si vaste que le feu n'a pu arriver partout; l'Hôtel de Ville, dont il ne reste plus qu'une sorte de squelette; le palais ou hôtel de la Légion d'honneur, qu'on s'empresse de reconstruire; celui où siégeaient le Conseil d'Etat et la Cour des comptes, avec leurs bibliothèques et archives; les bâtiments du Ministère des finances, du Ministère de la marine, de la Préfecture de police, de la Caisse des dépôts et consignations; enfin un certain nombre d'habitations privées, dont on ne comprendrait pas la destruction si l'on n'entrevoyait un concert infernal contre la plus belle capitale des temps modernes. La répression devait être prompte et sévère. De grands coupables, se défendant par les armes jusqu'à la dernière extrémité, ont été tués sur place comme des brigands; d'autres, capturés et mis en jugement, sont condamnés avec plus ou moins de sévérité s'il en est pour qui la justice militaire a été très-clémente, c'est par un sentiment de pitié qui ressemble au mépris, ou bien en ce que la loi pénale applicable ne permettait pas d'assimiler à l'incendie d'habitations la mise à bas d'un monument inhabité.

V

12. Une responsabilité, qu'il importe de fixer, incombe aux communautés d'habitants, appelées communes alors même que leur population en fait des villes. A quel titre, pour quelles causes et dans quels cas, de quelle manière et jusqu'à quel point? Il y a ici des difficultés à résoudre et des distinctions nécessaires, vis-à-vis de l'ennemi envahisseur lui-même.

Chez les peuples primitifs, l'idée de société entre les habitants d'une portion territoriale fit admettre celle d'une certaine solidarité, comme réparation civile, dans des cas où l'on présumait une faute ou une garantie contractuelle. En Egypte, il y eut une loi mettant les obsèques de l'individu tué à la charge de la ville sur le territoire de laquelle il était trouvé. A Rome comme à Athènes, les curies étaient responsables civilement des mauvaises actions d'un de leurs membres. Chez les Germains, tous les membres d'une tribu furent réputés respectivement garants ou cautions, pour les faits dommageables de l'un d'eux: un décret de Clotaire II, en 595, imposa spécialement à chaque canton l'obligation de rendre ce qui avait été pris sur son territoire à un individu quelconque. L'Angleterre étant envahie par les hommes du Nord, ils rendirent toute paroisse responsable du meurtre d'un des leurs, en ordonnant aux barons d'attaquer l'individu mis hors la loi, comme un homme des forêts ou un loup, de le poursuivre de canton en canton par la huée et par le cri. L'ancienne législation française, au temps de la féodalité, admit aussi le principe de la responsabilité des communes, à l'occasion de troubles ayant eu lieu en Normandie. Puis une déclaration du roi, du 8 janvier 1610, alla jusqu'à imposer aux gentilshommes dans leurs terres, aux magistrats

et officiers du roi ou autres ayant charge dans les villes, la responsabilité des soulèvements qu'ils n'auraient pas empêchés, comme s'ils fussent complices. L'idée dominante, dans ces actes législatifs comme dans ceux qui suivirent, était qu'il y a négligence présumée, de la part de ceux qui auraient dû empêcher le désordre. S'il s'agit de délits ordinaires et individuels, la responsabilité présuppose qu'il n'y a d'autre police organisée que celle qui doit exister dans le lieu. Une fois établi un pouvoir général, chargé de protéger l'ordre social et les individus, la responsabilité n'existera que pour délits collectifs et publics, tels que ceux qui résultent de réunions, rassemblements ou attroupements que doit dissiper la police locale 20.

La révolution de 89 et des lois plus démocratiques encore ayant attribué au peuple la souveraineté, puis donné une puissance considérable à la réunion d'habitants appelée Commune, sa responsabilité fut logiquement étendue pour différents cas. Dans le décret des 23-26 février 1790, «< concernant la sûreté des personnes et des propriétés », il fut dit, art. 5« Lorsqu'il aura été causé quelques dommages par un attroupement, la commune en répondra si elle a été requise et si elle a pu l'empêcher. » Dans celui des 2-3 juin 1790, «< concernant les poursuites à exercer contre les individus qui séduisent, trompent et soulèvent le peuple » : « Tous les citoyens de chaque commune qui auront pu empêcher le dommage causé par les violences, en demeureront responsables... » Dans un dernier décret de 1790 (6-12 octobre), relatif aux séditions, attroupements et autres attentats contre l'ordre public : « L'indemnité des dégâts et dommages sera prise d'abord sur les biens des coupables, et

20 Voy. Baluze, Capit. reg. franc. p. 19; Aug. Thierry, Hist. de la conq. de l'Angl., liv. 6, t. 1, p. 175; Dalloz, Rép., v° Communes; Amb. Rendu, de la responsabilité des communes, 1847, n° 2.

subsidiairement supportée par les communes qui ne les auraient pas empêchés lorsqu'elles l'auraient pu et qu'elles auraient été requises par les officiers municipaux, qui seront responsables de leur négligence à cet égard. » Dans la loi du 16 prair. an : « Lorsqu'il sera commis des pillages de grains, farines ou subsistances sur le territoire d'une commune, la municipalité qui n'aura pas prévenu ou dissipé les attroupements, et tous les habitants de la commune qui n'auront pas désigné les auteurs, fauteurs ou complices du délit, seront solidairement responsables de la restitution des objets pillés... » La législation actuelle sur la responsabilité des communes, en France, se trouve tout entière dans une loi fameuse, du 10 vendémiaire an iv, qui sans doute fut motivée par des circonstances révolutionnaires et dirigée principalement contre la commune de Paris ayant alors des forces armées, mais qui n'en régit pas moins toutes les villes et communes où se trouvent une autorité et des moyens pouvant prévenir ou faire cesser de graves désordres. La Convention, menacée par des sections que provoquait à une révolte la Commune, faisant battre le rappel, avait dès l'an I décrété ceci : « Le comité de législation rendra compte incessamment de l'état de la législation sur la responsabilité des communes et sections de communes et de la force armée, dans les cas de trouble à la tranquillité publique, d'émeute ou de sédition, de rassemblements contraires à la libre circulation des grains ou de pillage des propriétés, et présentera ses vues sur les moyens de faire exécuter et perfectionner les lois relatives à cet objet. >>

La loi de l'an iv est intitulée : « Loi sur la police intérieure des communes. » Son titre 1er se borne à poser le principe de la responsabilité civile de « tous citoyens habitant la même commune », pour tous « attentats commis sur le territoire de la commune, soit envers les personnes, soit

envers les propriétés ». Les titres i et un autorisent certains moyens de police intérieure, que des lois postérieures ont autrement réglés, ainsi que les conditions d'obtention des passe-ports pour voyager. Dans le titre iv se trouvent notamment ces dispositions, les plus importantes: « Chaque commune est responsable des délits commis à force ouverte ou par violence, sur son territoire, par des attroupements ou rassemblements, armés ou non armés, soit envers les personnes, soit contre les propriétés nationales ou privées, ainsi que des dommages-intérêts auxquels ils donneront lieu (art. 1). Dans le cas où les habitants de la commune auraient pris part aux délits commis sur son territoire par des attroupements et rassemblements, cette commune sera tenue de payer à la République une amende égale au montant de la réparation principale (art. 2). Si les attroupements ou rassemblements ont été formés d'habitants de plusieurs communes, toutes seront responsables des délits qu'ils auront commis, et contribuables tant à la réparation et dommagesintérêts qu'au paiement de l'amende (art. 3). Les habitants de la commune ou des communes contribuables qui prétendraient n'avoir pris aucune part aux délits, et contre lesquels il ne s'élèverait aucune preuve de complicité ou participation aux attroupements, pourront exercer leur recours contre les auteurs et complices des délits (art. 4). Dans les cas où les rassemblements auraient été formés d'individus étrangers à la commune sur le territoire de laquelle les délits ont été commis, et où la commune aurait pris toutes les mesures qui étaient en son pouvoir à l'effet de les prévenir et d'en faire connaître les auteurs, elle demeurera déchargée de toute responsabilité (art. 5). Lorsque par suite de rassemblements ou attroupements un individu domicilié ou non sur une commune y aura été pillé, maltraité ou homicidé, tous les habitants seront tenus de lui payer, ou en cas de mort à

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