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DIPLOMATIQUES

1866

II

PREMIÈRE PARTIE.

PRUSSE.

MÉMOIRE DES SYNDICS DE LA COURONNE RELATIF AUX DROITS DE LA PRUSSE SUR LES DUCHÉS DE SCHLESWIG, DE HOLSTEIN ET DE LAUENBOURG.

Consultation du Syndicat de la couronne relative aux duchés de Schleswig, de Holstein et de Lauenbourg, rédigée en vertu de l'ordre royal du 14 décembre 1864.

Sa Majesté le Roi a daigné prescrire aux syndics de la Couronne, par un rescrit adressé le 14 décembre 1864 au ministre d'État, de lui soumettre un rapport détaillé :

1° Sur les différentes prétentions élevées à la succession dans les duchés de Holstein, de Schleswig et de Lauenbourg;

2. Sur les droits de succession qui peuvent être invoqués par la Maison royale de Prusse;

3o Sur les droits qui ont été transférés par le Traité de paix conclu

ARCH. DIPL. 1866-II

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le 30 octobre 1864 avec le Danemark, à Sa Majesté le Roi et à Sa Majesté l'Empereur d'Autriche.

Dans les Conférences qui ont eu lieu à cet effet entre les syndics de la Couronne réunis sous la présidence du ministre de la Justice, il a paru utile d'examiner tout d'abord le troisième point dont l'importance est majeure au point de vue préjudiciel.

I

Situation légale de la Prusse et de l'Autriche en vertu du Traité de paix
du 30 octobre 1864.

I. Relativement aux trois Duchés, le Traité de paix déclarait dans son article 3, en conformité avec l'article 1 des préliminaires de paix du 1er août 1864 :

« Sa Majesté le Roi de Danemark renonce à tous ses droits sur les duchés de Holstein et de Lauenbourg, en faveur de Leurs Majestés le Roi de Prusse et l'Empereur d'Autriche, en s'engageant à reconnaître les dispositions que Leurs dites Majestés prendront à l'égard de ces Duchés. »

Cette déclaration ne constitue ni plus ni moins qu'une cession complète des trois duchés aux souverains de Prusse et d'Autriche avec renonciation de la part de la Couronne de Danemark à tous ses droits sur ces duchés, quoique le mot « céder » n'y ait pas été employé; mais cette expression se trouve immédiatement après dans l'article 4, et dans les articles 17-21 où il est question « des pays ou duchés cédés. Si dans l'article 3, on s'est servi d'une autre expression, rien ne fait présumer, aucun fait certain ne permet de supposer qu'il ait été dans l'intention des trois Puissances contractantes d'imposer aux souverains de Prusse et d'Autriche, en ce qui touche les dispositions ultérieures qu'ils croiraient devoir prendre, des restrictions et des conditions en faveur des agnats de la maison d'Oldenbourg ou d'autres prétendants à la succession des Duchés. Il a été soutenu, il est vrai, à l'égard de cette disposition des Duchés qui aurait été ainsi acquise à la Prusse et à l'Autriche, que, pour transférer ce droit de libre disposition, la légitimation nécessaire avait fait défaut au Roi Christian IX de Danemark, dont les titres de possession se fondent sur la loi de succession au trône, du 31 janvier 1853, loi qui ne pouvait engager, ni le Schleswig, ni le Holstein. On a prétendu, en conséquence, que pour examiner la question de la validité de la loi de succession au trône, il était nécessaire de se reporter au Traité de Londres, du 8 mai 1852; que ce Traité ne contenait qu'une reconnaissance, avec certaines restrictions, du prince Christian comme souverain futur de tous les pays

de la monarchie danoise; que, relativement à la concession faite à ce sujet au Roi Frédéric VII qui lui a permis de régler l'ordre de succession dans ses États, de manière que, etc., il était bon de se rappeler le SIV du Protocole de Varsovie, du 5 juin 1851, touchant les renonciations qui seraient encore jugées utiles ou désirables et l'article 3 du Traité de Londres qui se réfère au droit fédéral existant, » dispositions qui assurent l'exécution des obligations acceptées par le Danemark dans les négociations de 1851-1852.

D

Que la nature de ces obligations pourrait être déduite d'une série de résolutions de la Diète fédérale et d'autres documents authentiques, en ce sens que le Schleswig n'aurait point été incorporé au Danemark et que toutes les parties de la monarchie devraient avoir une situation indépendante et des droits égaux, c'est-à-dire que, pour ce qui concerne en particulier les duchés, il devrait également leur être assuré une représentation avec voix délibérative.

Que la Prusse et l'Autriche avaient été, en conséquence, fondées à élever la question de savoir si les conditions desquelles dépendait la reconnaissance de Christian IX comme successeur au trône pour l'ensemble de la monarchie, aux termes du Traité de Londres, avaient été remplies; que les deux Puissances avaient, en effet, soulevé cette objection, ainsi qu'il résulte des discussions de la conférence de Londres, des 12, 17 et 28 mai, dans lesquelles la Prusse et l'Autriche avaient refusé leur assentiment au Traité du 8 mai 1852, et démontré d'une façon décisive la caducité du Traité par le motif que l'ordre de succession dans les Duchés n'avait point été réglé légalement ni avec le consentement des agnats et des États.

Que, dès lors, on ne pouvait admettre que l'article 3 du Traité de paix de Vienne, du 30 octobre 1864, ait exclu en droit tout examen ultérieur des droits de possession de Christian IX, et qu'on se trouvait en face d'une cession pure et simple des trois duchés consentie par lui en sa qualité de possesseur légitime. Que ce n'étaient point, en conséquence, de simples raisons d'équité, mais de véritables raisons légales qui obligeaient la Prusse et l'Autriche à prouver qu'à la mort de Frédéric VII, survenue le 15 novembre 1863, quelqu'un possédait des droits mieux fondés que ceux de Christian IX à la succession dans les Duchés.

Que si l'on allègue que la Prusse et l'Autriche ont acquis les Duchés par droit de conquête, il y a lieu de faire une distinction essentielle. En effet, si, d'un côté, les vainqueurs, la Prusse et l'Autriche, peuvent invoquer vis-à-vis du Danemark et des autres Puissances le droit de la conquête admis par le droit des gens, d'un autre côté, on ne pourrait se prévaloir de ce droit de conquête vis-à-vis des Duchés euxmêmes, et soutenir, en interprétant de la sorte le Traité de paix de

Vienne, que toutes autres prétentions à la succession dussent être écartées.

On a dit encore que la Prusse et l'Autriche n'avaient eu dans le cours de la guerre d'autre but que de délivrer les Duchés et qu'elles n'avaient jamais songé à posséder les Duchés, en tant qu'il existait à leurs yeux une personne mieux fondée en droit que Christian IX, pro suo ou animi sibi habendi; que cette possession ne devait avoir qu'un caractère fiduciaire, qu'à l'appui de cette interprétation on n'avait qu'à se reporter aux déclarations officielles faites pendant la période qui a précédé et celle qui a suivi la paix de Vienne.

Par toutes les raisons qui viennent d'être énumérées, il est indispensable, pour rédiger la consultation prescrite par le Roi, sur la question de savoir quels droits avaient été transférés à la Prusse et à l'Autriche par le Traité de Vienne, de résoudre d'abord la question suivante : Christian IX avait-il des droits légitimes sur le Schleswig et leHolstein.

Pour arriver à établir ce fait, on a soutenu que la loi de succession au trône du 31 juillet 1853, avait également acquis force de loi dans le Schleswig et dans le Holstein. Que non-seulement le Gouvernement prussien avait déjà exprimé une manière de voir tout opposée dans une dépêche du 15 mai 1864, opinion qu'il avait longuement motivée au sein de la conférence de Londres, mais que les raisons mises en avant relativement à la non validité de la loi de succession au trône, c'està-dire le défaut du consentement de la part des agnats et des États étaient parfaitement fondées. Car cette lacune, même si on admettait que la déclaration du duc Christian en date du 30 décembre 1852, renfermât une renonciation à la succession qui l'obligerait, lui et tous ses descendants, subsisterait toujours, parce que le consentement des agnats venant après le duc Christian, dans la ligne d'Augustenbourg n'avait pas été obtenu.

Que cette circonstance était déjà en elle-même concluante, et que le second point à savoir, si le consentement des États était aussi nécessaire pour la validité de la loi de succession au trône en ce qui touche les Duchés, et si ce consentement étant nécessaire, avait été donné, importait dès lors peu.

En ce qui touche ce point, il y a premièrement lieu de se reporter aux discussions et résolutions de la Diète fédérale déjà mentionnées, et à leurs effets relativement à la position des États dans le Schleswig et le Holstein, et de faire remarquer, en particulier, que c'est précisément à la suite de la révolution fédérale du 11 février 1858, que le Roi de Danemark avait abrogé l'ordonnance du 4 juin 1854 et la Constitution du 2 octobre 1855, en vigueur dans le Holstein; secondement, on peut faire valoir que la loi de succession au trône n'avait pas été soumise aux États des duchés, ni même le

paragraphe correspondant du nouveau projet de loi destiné en quelque sorte à remplacer la loi de succession, ce paragraphe ayant été expressément exclu des délibérations des États.

Que d'après cela, on peut dire :

1° Que le titre de possession du Roi Christian IX sur les Duchés de Schleswig et de Holstein, ne se fonde que sur la loi de succession au trône, du 31 juillet 1853;

2o Que cette loi exigeait, pour être valide, le consentement des agnats et de la représentation des États;

3° Que ce consentement aurait dû être donné, au plus tard jusqu'à la vacance du trône survenue le 25 novembre 1863', mais n'avait point été donné;

4 Que, bien que la possession des Duchés ait été en même temps transféré à Christian IX, cette possession n'était point une possession légitime;

5° Que la Prusse et l'Autriche sont dès lors fondées et tenues à élever cette objection (no 4), et ont pour tâche de rechercher si quelqu'un n'aurait pas acquis par la mort de Frédéric VII, un droit plus légitime que celui de Christian IX sur les Duchés;

6° Que la Prusse et l'Autriche ne peuvent se prévaloir du droit qu'ils tiennent de la conquête que vis-à-vis des Puissances étrangères et vis-à-vis du Danemark, mais non pas contre les duchés et les prétendants légitimes;

7° Que si le Traité de Vienne accorde à la Prusse et à l'Autriche vis-à-vis de ces derniers un droit de copossession provisoire, il leur impose en même temps l'obligation de chercher en commun à régler définitivement la situation légale des Duchés et l'ordre de succession. Qu'au surplus, le représentant royal près de la Diète fédérale, adoptant les déclarations que venait de faire le représentant de l'Autriche dans la séance du 1er décembre 1864, avait fait connaître qu'il était chargé d'ajouter que le Gouvernement royal entrevoyait, grâce à la conclusion de la paix, la possibilité d'amener la solution définitive de la question litigieuse, au moyen de pourparlers entre les deux Puissances et avec les prétendants aux Duchés.

Mais le Comité des syndics de la Couronne est arrivé à un résultat différent en s'appuyant sur les raisons suivantes.

On sait qu'au mois de juin 1850, sur l'invitation adressée par le Roi de Danemark, aux grandes Puissances, une Conférence de plénipotentiaires se réunit à Londres, pour constater l'accord complet de ces Puissances en ce qui touche le maintien de la monarchie danoise dans l'intérêt de l'équilibre européen. On rédigea dans cette Conférence, le 2 août, la déclaration qui suit:

S 1. Le désir unanime des dites Puissances est que l'état des pos

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