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LE CHEVALIER NIGRA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Paris, le 25 avril 1866.

Votre circulaire, résumée par télégraphie, a produit profonde impression. En général, opinion publique nous est favorable, bien qu'on eût désiré que l'on eût attendu avant d'armer.

J'ai dit à Drouyn de Lhuys que la situation faite à l'Italie, par les armements autrichiens, était telle qu'il n'est pas possible de ne pas prendre les mesures que l'on prend.

Drouyn de Lhuys a demandé au prince de Metternich, dans une conversation, pourquoi l'Autriche avait armé, et si elle a intention d'attaquer l'Italie. Metternich a dit que l'Autriche craignait une attaque de l'Italie. Drouyn de Lhuys réplique que l'on savait bien que l'Italie n'aurait pas attaqué la première. Metternich demanda si la France pouvait lui garantir cela. Drouyn de Lhuys répéta que l'Italie n'aurait point attaqué la première.

Conversation en reste là.

Drouyn de Lhuys m'a dit qu'il lui semble impossible que l'Autriche pût se contenter de la dernière réponse de la Prusse.

N° 96

Signé: NIGRA.

LE CHEVALIER NIGRA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Télégramme.

Paris, le 30 avril 1866.

La nouvelle donnée par l'Indépendance belge a sa source dans la conversation entre Drouyn de Lhuys et Metternich, que j'ai signalée par mon télégramme de ce matin. Drouyn de Lhuys m'a dit qu'il n'avait donné aucune garantie formelle, qu'il avait exprimé une opinion suggérée par le bon sens.....

Drouyn m'a répété aujourd'hui que l'Empereur regrette que nous ayons armé.

Je lui ai fait observer que l'Autriche avait pris mesures menaçantes, que nous n'avions pas encore frontières militaires et que l'Autriche avait attaqué première en 1859. Drouyn dit que l'Autriche assure formellement qu'elle ne veut pas attaquer Italie.

Signé NIGRA.

No 97

LE COMTE PULIGA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Berlin, le 26 avril 1866.

Bismarck m'a dit qu'il sait aussi que les armements autrichiens redoublent, non-seulement en Vénétie, mais partout.

Que jusqu'à présent il n'a pas de réponse officielle à la note du 21, et que l'Autriche donne pour prétexte de ses armements l'attitude de l'Italie.

M. Werther doit déclarer aujourd'hui officiellement, sans pourtant laisser copie de la dépêche, qu'il est inadmissible qu'on prenne pour prétexte à conserver les armements l'attitude de l'Italie;

Que la Prusse considère, dans l'état actuel, l'Italie comme nécessaire pour l'équilibre européen, et qu'elle ne pourrait pas rester indifférente à une attaque contre l'Italie.

Bismarck s'est mis d'accord avec le ministre de la guerre, et il espère obtenir aujourd'hui même l'assentiment du Roi pour effectuer de nouvelles mesures défensives.

Signé: PULIGA.

N° 98

LE COMTE PULIGA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Télégramme.

Berlin, le 26 avril 1866,

M. Werther a télégraphié ce soir avoir communiqué à M. Mensdorff le contenu de la dépêche prussienne dont je vous ai envoyé le résumé

Le comte Mensdorff a écouté la déclaration avec calme et se réservant d'en parler à l'Empereur.

Il a dit en attendant au ministre prussien, que l'Autriche, à la suite d'informations précises venues d'Italie, ne pouvait s'empêcher d'aug menter ses armements; que pourtant elle ne voulait attaquer ni la Prusse ni l'Italie.

Demain arrive la réponse officielle de l'Autriche, motivant maintien des armements sur l'attitude de l'Italie.

M. Werther écrit aussi qu'elle doit contenir une proposition d'arrangement définitif sur la question des duchés.

Ici la situation est jugée grave, mais il m'est impossible pour le moment de vous dire ce qu'il en sortira.

Je ne verrai Bismarck qu'après-demain pour lui laisser le temps de prendre les ordres du Roi.

Signé PULIGA.

N 99

LE COMTE PULIGA AU GÉNÉRAL DR LA MARMORA

Télégramme.

Berlin, le 29 avril 1866.

En présence de la dépêche autrichienne du 26 remise ici hier et qui prend prétexte des armements de l'Italie pour refuser de désarmer, la Prusse refuse de son côté de désarmer.

M. de Bismarck a proposé au Roi la mise sur le pied de guerre de toute l'artillerie, ainsi qu'on a pratiqué pour les corps de frontière. Il doit y avoir demain conseil de généraux présidé par le Roi. Bismarck m'a dit que le cas échéant il faudra à la Prusse quinze jours pour l'achat des chevaux et dix jours pour l'appel des réserves. Faut-il écrire à Govone de revenir?

Signé: PULIGA.

N° 100

LE COMTE DE BISMARCK AU COMTE DE WERTHER, A VIENNE

Berlin, le 30 avril 1866.

Extrait (1). Le gouvernement impérial cherche à justifier la nouvelle attitude. qu'il a prise par la dépêche du 26, en alléguant les nouvelles qui lui sont parvenues d'Italie.

D'après ces renseignements, l'armée du roi Victor-Emmanuel se serait mise en mesure d'attaquer la Vénétie. Les nouvelles qui nous arrivent de l'Italie, soit directement, soit par l'intermédiaire des cours étrangères, concordent à déclarer qu'il n'a pas été fait dans ce pays d'armements d'un caractère menaçant contre l'Autriche, et elles nous raffermissent dans la conviction que le cabinet de Florence est loin de vouloir attaquer le territoire autrichien, sans motif de provocation. S'il était vrai que, dans l'intervalle et principalement dans ces derniers jours, on eût commencé à faire des préparatifs militaires en Italie, il ne faudrait probablement y voir que la conséquence des armements dont l'Autriche a pris l'initiative, de même que les mesures que nous avons décrétées le 28 mars n'ont été provoquées que par eux.

Nous sommes persuadés que l'on mettrait en Italie autant d'empressement à suspendre ces armements, qu'on en a mis naguère, en Prusse, dès que les causes qui les ont occasionnés auraient disparu.

No 101

LE CHEVALIER NIGRA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Paris, le 1er mai 1866.

Hier soir à la réception des Tuileries, l'Empereur, me voyant, s'approcha et me dit : C'était bien la peine de me demander conseil pour faire tout le contraire de ce que je conseillais.

J'expliquai longuement à l'Empereur les raisons qui avaient poussé

(1) Voir le texte entier, Archives 1866, t. II, p. 416.

le gouvernement à armer, c'est-à-dire l'attitude menaçante de l'Autriche, les mesures militaires qu'elle avait prises, mesures qui se prenaient à peine à la veille des hostilités; le caractère offensif de ces mesures, puisque pour sa défensive il suffit du quadrilatère et des garnisons ordinaires; le manque de frontières du côté de l'Italie; l'éloignement des secours pouvant venir de la France dans le cas d'une attaque de la part de l'Autriche; enfin, l'opinion publique en Italie, qui exigeait impérieusement que le gouvernement pourvût à la sûreté de l'État. Cette dernière raison a été appréciée par l'Empereur; mais quant à l'idée d'une agression de la part de l'Autriche, l'Empereur persiste à dire qu'elle n'est pas fondée, l'Autriche ayant tout récemment déclaré qu'elle n'avait aucune intention d'attaquer l'Italie.

L'Empereur ajouta qu'il serait désirable que, si la rupture a lieu, elle vint du Nord, c'est-à-dire de l'Allemagne. Il a recommandé la prudence et surtout de ne rien précipiter.

Le gouvernement français est préoccupé des interpellations qui auront lieu jeudi au Corps législatif. Nos armements rendent la situation très-difficile.

On exigera de lui une déclaration explicite au sujet de l'attitude qu'il prendra vis-à-vis de l'Italie.

Si l'Italie n'avait pas armé, sa réponse aurait été facile. Il aurait peut-être dit: Si l'Autriche attaque l'Italie, la France s'y opposera par la force des armes; si au contraire l'Italie attaque la première, elle le fera à ses risques et périls. Maintenant, en présence des armements que les amis de la paix à tout prix ont intérêt à présenter comme simultanés, ou comme presque simultanés, la réponse du gouvernement français sera plus embarrassée.

C'est là la principale raison pour laquelle on désapprouve ici les armements immédiats ordonnés par l'Italie.....

Je reçois avec le plaisir le plus vif les deux télégrammes par lesquels vous m'annoncez les votes unanimes du Parlement au sujet des mesures financières extraordinaires. J'en donne communication à M. Drouyn de Lhuys ainsi que de la circulaire.

Signé: NIGRA.

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