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Cet armistice fut suivi d'une entrevue de l'empereur des Français et de l'empereur d'Autriche. Dans cette entrevue, qui eut lieu à Villafranca, le 11 juillet, la paix fut décidée. Voici en quels termes Napoléon III annonça cette nouvelle à sa vaillante armée :

<< Soldats !

« Les bases de la paix sont arrêtées avec l'empereur d'Autriche; le but principal de la guerre est atteint; l'Italie va devenir pour la première fois une nation. Une Confédération de tous les États de l'Italie, sous la présidence honoraire du Saint-Père, réunira en un faisceau les membres d'une même famille; la Vénétie reste, il est vrai, sous le sceptre de l'Autriche; elle sera néanmoins une province italienne faisant partie de la Confédération.

<«< La réunion de la Lombardie au Piémont nous crée de ce côté des Alpes un allié puissant qui nous devra son indépendance; les gouvernements restés en dehors du mouvement ou rappelés dans leurs possessions comprendront la nécessité de réformes salutaires. Une amnistie générale fera disparaître les traces des discordes civiles. L'Italie, désormais maîtresse de ses destinées, n'aura plus qu'à s'en prendre à elle-même si elle ne progresse pas régulièrement dans l'ordre et la liberté.

« Vous allez bientôt retourner en France; la patrie reconnaissante accueillera avec transport ces soldats qui ont porté si haut la gloire de nos armes à Montebello, à Palestro, à Turbigo, à Magenta, à Marignan et à Solferino; qui, ert deux mois, ont affranchi le Piémont et la Lombardie, et ne se sont arrêtés que parce que la lutte allait prendre des proportions qui n'étaient plus en rapport avec les intérêts que la France avait dans cette guerre formidable.

« Soyez donc fiers de vos succès, fiers des résultats obtenus, fiers surtout d'être les enfants bien-aimés de cette France qui sera toujours la grande nation, tant qu'elle aura un cœur pour comprendre les nobles causes et des hommes comme vous pour les défendre.

• Au quartier impérial de Valeggio, le 12 juillet 1859.

« NAPOLÉON. >>

Voici le texte de la proclamation que le roi Victor-Emmanuel II publiait à la même occasion :

« Soldats,

« Après deux mois de guerre nous sommes arrivés vainqueurs sur les

bords du Mincio. Unis à nos courageux alliés, nous avons triomphé par

tout.

<< Votre courage, votre discipline, votre persévérance, ont excité l'admiration de toute l'Europe. Le nom du soldat italien est dans toutes les bouches.

Moi, qui ai eu la gloire de vous commander, j'ai pu apprécier tout ce qu'il y a eu d'héroïque et de sublime dans votre conduite pendant le cours de cette guerre. Il est inutile, soldats, de répéter que vous avez acquis les plus grands titres à ma reconnaissance et à celle de la patrie.

<< Soldats,

<«< Des affaires d'État importantes m'appellent dans la capitale. Je confie le commandement de l'armée au digne et brave général La Marmora, qui a partagé avec nous les dangers et les victoires de cette campagne.

<< Maintenant, je vous annonce la paix ; mais si jamais, dans l'avenir, l'honneur de notre patrie nous rappelle au combat, vous me verrez paraitre pour vous commander, bien assuré que nous marcherons de nouveau à la victoire.

« Monzambano, le 12 juillet 1859. »

De son côté, l'empereur d'Autriche remercia sa fidèle armée dans un ordre du jour dont voici le texte :

« Appuyé sur mon bon droit, j'ai engagé la lutte pour la sainteté des traités, en comptant sur l'enthousiasme de mes peuples, sur la vaillance de mon armée et sur les alliés naturels de l'Autriche.

« J'ai trouvé mes peuples prêts à tous les sacrifices; de sanglants combats ont de nouveau montré au monde l'héroïsme de ma brave armée et son mépris de la mort; combattant un ennemi supérieur en nombre, après que des milliers d'officiers et de soldats ont scellé de leur sang leur fidélité au devoir, elle reste ferme, courageuse, inébranlable, et attend avec joie la continuation de la lutte. Sans alliés, je ne cède qu'aux circonstances malheureuses de la politique, en présence desquelles mon devoir était, avant tout, de ne plus verser inutilement le sang de mes soldats, de ne plus imposer à mes peuples de nouveaux sacrifices. Je conclus la paix en la basant sur la ligne du Mincio.

« Je remercie mon armée de tout mon cœur; elle m'a montré de nouveau que je puis compter sur elle d'une manière absolue pour les combats à venir.

« Vérone, le 12 juillet 1859.

<< FRANÇOIS-JOSEPH. »

Ce fut le prince Napoléon qui porta à la ratification de l'empereur d'Autriche, à Vérone, les préliminaires de paix de Villafranca. On raconte qu'en signant ce traité François-Joseph I laissa tomber une larme dont la trace est restée sur le papier; puis, qu'ayant brusquement apposé son nom au bas de la convention, il prit le bras de Son Altesse Impériale, en lui disant :

« Prince, je vous souhaite de ne jamais signer un pareil traité. »

XIV

RETOUR DE L'EMPEREUR

La paix de Villafranca avait été annoncée le 12 juillet aux Parisiens par une salve de cent un coups de canon.

On illumina, on pavoisa les maisons, mais avec moins d'enthousiasme, avec moins d'élan qu'on ne l'avait fait pour célébrer les grandes victoires de Magenta et de Solferino. Ce fut un mélange de surprise et de joie qui ne permettait pas, tellement les deux impressions étaient simultanées, de dire laquelle des deux l'emportait sur l'autre.

Ce sentiment fut celui des masses; mais il y a une opinion plus haute et plus vaste, l'opinion de celui qui, voyant et appréciant tout, pouvait mieux savoir que personne ce qui était dans l'intérêt de la France, de l'Italie, de l'Europe. Cette opinion est celle de l'Empereur, qui revenu en France avec rapidité, à travers les mêmes cités enthousiastes, et au milieu des mêmes ovations populaires, par le mont Cenis, était arrivé, sans apparat, le 17 juillet, au palais de Saint-Cloud, où il recevait trois jours après, dans la soirée, les grands corps de l'État qui allaient connaître sa pensée. Dès huit heures, un grand nombre de sénateurs, de députés et de conseillers d'Etat se pressaient dans les salons du palais.

A huit heures et demie, l'Empereur et l'Impératrice entrèrent dans le salon de Mars. Un cri unanime de Vive l'Empereur! Vive l'Impératrice! accueillit à plusieurs reprises Leurs Majestés. Elles étaient accompagnées des grands officiers et officiers de service, ainsi que de la grande maitresse et des dames de service de Sa Majesté l'Impératrice.

Leurs Excellences M. Troplong, président du Sénat, le comte de Morny, président du Corps législatif, et Baroche, président du conseil d'Etat, adressèrent chacun un discours de félicitations à l'Empereur, qui leur fit la réponse suivante :

<< Messieurs,

<< En me retrouvant au milieu de vous, qui, pendant mon absence, avez entouré l'Impératrice et mon Fils de tant de dévouement, j'éprouve le

besoin de vous remercier d'abord, et ensuite de vous expliquer quel a été le mobile de ma conduite.

Lorsque, après une heureuse campagne de deux mois, les armées française et sarde arrivèrent sous les murs de Vérone, la lutte allait inėvitablement changer de nature, tant sous le rapport militaire que sous le rapport politique. J'étais fatalement obligé d'attaquer de front un ennemi retranché derrière de grandes forteresses, protégé contre toute diversion sur ses flancs par la neutralité des territoires qui l'entouraient, et, en commençant la longue et stérile guerre des siéges, je trouvais en face l'Europe en armes, prête, soit à disputer nos succès, soit à aggraver nos

revers.

« Néanmoins, la difficulté de l'entreprise n'aurait ni ébranlé ma résolution, ni arrêté l'élan de mon armée, si les moyens n'eussent pas été hors de proportion avec les résultats à attendre. Il fallait se résoudre à briser hardiment les entraves opposées par les territoires neutres et alors accepter la lutte sur le Rhin comme sur l'Adige. Il fallait partout franchement se fortifier du concours de la révolution. Il fallait répandre encore un sang précieux qui n'avait que trop coulé déjà : en un mot, pour triompher, il fallait risquer ce qu'il n'est permis à un souverain de mettre en jeu que pour l'indépendance de son pays.

« Si je me suis arrêté, ce n'est donc pas par lassitude ou par épuisement, ni par abandon de la noble cause que je voulais servir, mais parce que dans mon cœur quelque chose parlait plus haut encore : l'intérêt de la France.

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Croyez-vous donc qu'il ne m'en ait pas coûté de mettre un frein à l'ardeur de ces soldats qui, exaltés par la victoire, ne demandaient qu'à marcher en avant?

« Croyez-vous qu'il ne m'en ait pas coûté de retrancher ouvertement devant l'Europe de mon programme le territoire qui s'étend du Mincio à l'Adriatique?

<< Croyez-vous qu'il ne m'en ait pas coûté de voir dans des cœurs honnêtes de nobles illusions se détruire, de patriotiques espérances s'évanouir?

« Pour servir l'indépendance italienne, j'ai fait la guerre contre le gré de l'Europe; dès que les destinées de mon pays ont pu être en péril, j'ai fait la paix.

«Est-ce à dire maintenant que nos efforts et nos sacrifices aient été en pure perte? Non. Ainsi que je l'ai dit dans les adieux à mes soldats, nous avons droit d'être fiers de cette courte campagne. En quatre combats et deux batailles, une armée nombreuse, qui ne le cède à aucune en orga

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