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« 1° De maintenir ce duché dans la ligne de conduite tracée par Votre Majesté, c'est-à-dire de ne pas laisser dégénérer l'expression du sentiment patriotique, et surtout d'organiser militairement toutes les ressources que l'on pouvait tirer de ce pays, ainsi que des duchés de Parme et de Modène ;

« 2o De contraindre, par la présence du drapeau français sur les frontières de la Romagne, le gouvernement autrichien à observer strictement la neutralité dans les États du Pape;

<< 3o De garantir les habitants contre un retour offensif de l'Autriche, et de leur permettre de faire éclater sans entrave l'expression de leur sympathie pour la cause de l'indépendance italienne et de leur reconnaissance pour les bienveillantes intentions du gouvernement de Votre Majesté.

« La mission militaire du cinquième corps était :

« 1o D'empêcher un corps autrichien de faire une pointe sur la Toscane, et de priver l'ennemi des précieuses ressources de l'Italie centrale ;

« 5° De menacer le flanc gauche de l'armée autrichienne en compromeltant ses lignes de retraite et hâter son abandon des duchés de Parme et de Modène dès après la première victoire de l'armée alliée.

« Ces divers buts ont été atteints heureusement, et sans coup férir, par la présence seule à Livourne, à Florence, aux débouchés des Apennins, des troupes du cinquième corps.

« 1° Au point de vue politique :

<«< La Toscane a joui de la plus grande tranquillité sans que sa liberté fût troublée. Sous la protection du drapeau français, l'armée toscane, désorganisée après le 27 avril, a pu se réorganiser assez vite pour qu'aujourd'hui elle donne au cinquième corps un appoint de dix mille soldats armés, équipés, et prêts à se mesurer avec l'ennemi; pour qu'une division de volontaires, aux ordres du général Mezzacapo, s'organise également à Florence, sans que le pays soit privé du régiment des gendarmes toscans, fort de deux mille hommes et suffisant pour maintenir la tranquillité : en outre, la neutralité n'a pas été violée par l'ennemi dans les États pontificaux.

Enfin l'enthousiasme qui s'est produit dans tous les lieux parcourus par le cinquième corps, depuis le jour de son débarquement à Livourne jusqu'à celui de sa jonction avec l'armée de Votre Majesté ; les ovations qu'il a reçues, lui et son chef, à Livourne, à Florence, à Lucques, à Massa, à Parme et dans toutes les localités petites ou grandes où il a dû s'arrêter, sont un témoignage authentique et qui ne saurait manquer de produire un effet moral considérable.

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« 2o Au point de vue militaire :

« La présence du cinquième corps en Toscane, ou plutôt d'une division d'infanterie, d'une brigade de cavalerie et de neuf batteries, a retenu les corps autrichiens qui, des bords du Mincio, semblaient prêts à se jeter sur les riches plaines qui avoisinent la rive droite du Pô; la présence de ce corps prêt à déboucher sur l'armée autrichienne a imprimé à cette armée une crainte assez vive pour qu'elle se soit hâtée, dès après la bataille de Magenta, d'abandonner Ancòne, Bologne, et successivement toutes les positions sur la rive droite du Pô, faisant sauter des ouvrages qui avaient coûté beaucoup de temps et d'argent.

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<< Tels sont, Sire, les résultats qui ont été la conséquence de l'envoi par Votre Majesté du cinquième corps en Toscane et dans les duchés. Il me reste à faire connaître en peu de mots à Votre Majesté les opérations, malheureusement jusqu'à ce jour toutes pacifiques, de la partie de ce corps réunie en Toscane.

« Le 12 mai dernier, la presque totalité de la première division du cinquième corps (division d'Autemarre) débarquait à Gènes.

« Je me trouvais moi-même dans cette ville avec une partie de mon état-major.

« Le 14, le 3o de zouaves, de la division d'Autemarre, est envoyé à Bobbio.

« Le 17, le cinquième corps, moins la division d'Autemarre, reçoit de Votre Majesté l'ordre de se rendre à Livourne, où doivent être transpor tées directement de France les troupes de la deuxième division (Ulrich) arrivant de Paris. La brigade de cavalerie légère du général de Lapérouse reçoit également l'ordre de s'embarquer pour Livourne, tandis que la division d'Autemarre est détachée provisoirement du cinquième corps au premier corps à Voghera.

« Le 23 mai, je débarquais à Livourne, où ne tardaient pas à se concentrer la deuxième division, la brigade de cavalerie, l'artillerie de réserve et le parc arrivant de France.

« Le 31 mai, je transportais mon quartier général à Florence; la première brigade de la deuxième division, la cavalerie, l'artillerie et tous les services administratifs se concentraient dans cette ville, tandis que la deuxième brigade se portait de Lucques à Pistoja, occupant par des postes avancés tous les débouchés des Apennins et le noeud des routes. Le général toscan Ulloa portait, sur mon ordre, la brigade organisée de sa division également aux débouchés principaux de la Romagne.

« Le 12 juin, le but politique que Votre Majesté voulait d'abord et avant tout atteindre par la présence du cinquième corps étant accompli, il me

fut permis de commencer mon mouvement pour rallier la division d'Autemarre et me joindre à l'armée de Votre Majesté.

« Tandis que je dirigeais la division toscane sur Parme, par le duché de Modène et par la route du col de l'Abetone, je fis marcher les troupes françaises qui se trouvaient de Lucques à San-Marcello et à Florence, par Lucques, Massa, Pontremoli et Parme.

« Cette marche de seize jours, effectuée dans des conditions atmosphériques souvent peu favorables, m'a permis de constater la vigueur et l'excellente discipline des troupes de Votre Majesté.

« La division Ulrich (14° bataillon de chasseurs, 18°, 26°, 80° et 82° de ligne), les 6o et 8o de hussards de la brigade de Lapérouse, l'escadron des guides toscans que j'ai joint à notre cavalerie, les neuf batteries divisionnaires ou de la réserve, les deux batteries du parc du cinquième corps, ont dû marcher sous une température très-élevée, et plusieurs fois ces troupes ont eu à supporter de violents orages qui ont grossi les torrents et présenté certaines difficultés.

« L'état sanitaire s'est maintenu dans les conditions les plus favorables, et je n'ai qu'à me louer de la discipline parfaite maintenue dans tous les corps par les chefs et par les officiers.

« Le contact avec les populations n'a donné lieu à aucune plainte.

« Le passage du Pô à Casal Maggiore, à douze kilomètres de Mantoue, ainsi que la construction du pont de bateaux, ont été des opérations faites avec intelligence, activité et zèle.

« Les troupes que j'amène à Votre Majesté et qui opèrent aujourd'hui avec l'armée principale, à Goïto, seront dignes, je n'en doute pas, de celles qui, plus heureuses, ont déjà battu l'ennemi.

« Le Prince commandant le cinqième corps de l'armée d'Italie,

« JÉRÔME NAPOLÉON. »

Ainsi, le 4 juillet, la jonction du cinquième corps avec le reste de l'armée alliée était complétement effectuée. Les troupes françaises se trouvaient donc renforcées d'une division d'infanterie, d'une brigade de cavalerie, d'un parc d'artillerie et des dix mille Toscans du général Ulloa. Mais un armistice allait séparer les combattants, et bientôt la paix allait rapprocher les deux armées. Le cinquième corps ne devait plus assister qu'à des entrevues d'empereur et à des apprêts de départ.

XII

CONCOURS DE LA MARINE

La marine française a connu, dans la campagne de 1859, la même douleur et le même regret que le cinquième corps. La paix a été conclue quand l'heure était venue pour elle d'opérer contre Venise, qu'elle cût sans peine arrachée des mains de l'Autriche, comme l'armée de terre eût emporté d'assaut les forteresses du quadrilatère, si on leur en eut donné la glorieuse mission. Toutefois, le rôle passif de la marine française n'a pas été sans utilité pendant cette campagne. Ce rôle est complétement résumé dans un rapport adressé à Son Excellence M. l'amiral Hamelin, ministre de la marine, par M. le vice-amiral Romain-Desfossés, commandant en chef l'escadre de la Méditerranée. Voici ce rapport:

« Vaisseau la Bretagne, Lossini Piccolo, le 25 juillet 1859.

« Monsieur l'amiral,

« Honoré par la confiance de l'Empereur du commandement en chef des forces navales de la Méditerranée, je dois compte à Votre Excellence de la répartition et de l'emploi que j'en ai dù faire, d'après les termes de vos instructions, au moment où elles ont eu pour mission spéciale de seconder, dans la mer Adriatique, les grandes opérations de l'armée de Sa Majesté.

« Ces forces navales comprenaient dix vaisseaux de ligne et quatre frégates à hélice; deux de ces vaisseaux et deux frégates se trouvaient déjà détachés, sous le commandement particulier du contre-amiral Jurien de la Gravière, pour assurer le blocus effectif de Venise.

« Votre Excellence m'avait prescrit de laisser quatre vaisseaux et deux frégates en réserve à Toulon, sous les ordres du contre-amiral Jéhenne : c'était done avec quatre vaisseaux, y compris la Bretagne, qui porte mon pavillon, que je devais me rendre dans le golfe de Venise et y réunir les éléments divers de la flotte expéditionnaire.

« Le plus important de ces éléments, si l'on considère la nature des

eaux où nous devions opérer, était une nouvelle escadre récemment constituée par les ordres de Sa Majesté, et qui, sous le nom de flotte de siége, venait, avec cinq avisos et six transports à hélice, compléter l'ensemble des forces navales placées sous mon commandement supérieur.

«La flotte de siége fut confiée à l'habile direction du contre-amiral comte Bouët-Willaumez, qui arriva à Toulon le 1er juin pour activer l'appropriation spéciale et l'armement des bâtiments destinés à en faire partie.

« Elle se composait de quatre frégates à roues et de vingt-cinq batteries flottantes et canonnières, pour la plupart d'un faible tirant d'eau, bardées de fer par le travers ou par l'avant, c'est-à-dire admirablement propres à démanteler des fortifications.

« Les frégates à roues et les batteries flottantes furent armées si rapidement, que, dès le 12, le contre-amiral Bouët-Willaumez put partir pour l'Adriatique avec cette première et lourde division de la flotte de siége.

Après une relâche forcée de trois jours à Messine pour renouveler son approvisionnement de charbon, il atteignit le onzième jour la baie d'Antivari, que Votre Excellence m'avait désignée comme point de rendez-vous général de la flotte expéditionnaire. Afin d'avancer autant que possible le moment de cette réunion, je m'étais décidé à faire remorquer chaque groupe de canonnières, au fur et à mesure qu'elles seraient prêtes. par un de mes quatre vaisseaux.

« L'Arcole partait le 15 avec six de ces petits bâtiments.

« Le 18, au point du jour, le vaisseau l'Alexandre suivait, avec six autres canonnières à la remorque, et, le soir du même jour, je quittais Toulon avec la Bretagne et deux avisos traînant après nous nos dix dernières canonnières, et laissant à Toulon le vaisseau le Redoutable, qui devait, trois jours après, conduire le dernier groupe de la flotte, composé de deux transports chargés de munitions de guerre et de deux canonnières toscanes.

« Le 30 juin, toutes ces forces, après des difficultés de navigation que les marins devinent, et qu'il est inutile par conséquent d'énumérer à Votre Excellence, étaient réunies à Antivari, où elles se ravitaillaient en charbon au moyen des nombreux transports du commerce que vous aviez d'avance dirigés sous escorte vers ce point neutre. J'y avais été rallié la veille par une division navale sarde, composée de deux frégates à hélice et de trois corvettes et avisos à roues. Cette division, commandée par le capitaine de vaisseau Tolosano, s'était immédiatement rangée sous mon commandement.

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