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tiers à sa garnison, contrairement à la proportion requise dans tous les siéges. Cernée aussi bien que protégée par ses eaux, Mantoue n'a pour débouchés que quatre chaussées longues et étroites. La tête de ces chaussées est défendue par de bonnes fortifications, mais l'assiégeant en élève à son tour devant ces issues, il remplit d'eau ses fossés en saignant les nombreux canaux qui coupent le pays, il s'applique à faire des retranchements presque infranchissables, et dès lors la garnison, quelle que soit sa force, est réduite à subir le blocus sans pouvoir exécuter aucune sortie, tandis que l'assiégeant déploie au dehors avec sécurité tous ses moyens d'attaque.

C'est ce qui est arrivé dans les deux siéges de Mantoue, subis en 1796 par les Autrichiens et en 1799 par les Français, double exemple qui prouve que Mantoue ne vaut pas sa réputation; que sa situation au milieu des eaux lui a seule donné jusqu'au siége de 1799 les apparences d'une place très-forte, et qu'elle ne peut tenir longtemps, dès qu'elle se trouve attaquée par une formidable artillerie de gros calibre, malgré les palliatifs que les Autrichiens ont pu apporter depuis aux défauts de ses fortifications.

Quoi qu'il en soit, l'armée alliée devait d'abord traverser le Mincio sans obstacle, et commencer ensuite les opérations d'investissement, pour préparer les opérations de siége.

Le quartier général fut transporté le 29 juin à Volta; l'Empereur fit jeter plusieurs ponts sur le Mincio pour remplacer ceux que les Autrichiens avaient fait sauter dans leur retraite, et les premières divisions de notre armée commencèrent à défiler, musique en tête et tambour battant.

Quatre kilomètres seulement séparent Volta de Valeggio, premier village que l'on rencontre sur la rive gauche du Mincio, et où l'Empereur établit son quartier général le 1er juillet.

C'est entre Valeggio et Borghetto, c'est-à-dire au même endroit précisément, que les troupes sardes franchirent le Mincio, il y a onze ans, malgré la vigoureuse résistance des Autrichiens. Borghetto, situé en face de Valeggio, sur une hauteur, offre l'un des points de vue les plus pittoresques de la Lombardie. A ses pieds, le Mincio, encaissé dans un lit fort étroit, entre des rives escarpées, roule des flots précipités et bondit par dessus de hautes écluses, en cascades tumultueuses. Les ruines du château de Valeggio complètent le charme du paysage; mais ce qui lui donne un aspect grandiose et tout à fait étrange, ce sont deux manoirs féodaux élevés sur les deux rives du Mincio, et réunis autrefois par un pont, à l'aide duquel les Gonzague maîtrisaient au moyen âge le passage du fleuve et de la vallée.

L'Empereur s'arrêta quelques instants devant ce magnifique rideau. En cet endroit, les Autrichiens avaient brûlé un pont en bois, que nos pontonniers eurent bientôt reconstruit sur ses anciens piliers, en même temps qu'ils en jetaient un second en barques. Le passage de nos troupes sur ce point dura la moitié de la journée.

L'Empereur passa à dix heures, et arriva à Valeggio vers dix heures et demie. Une grande partie des habitants étaient accourus au-devant de lui, et telle était leur allégresse en apercevant la tête de nos colonnes, qu'ils poussaient les cris de Viva l'Imperatore! viva il liberatore! viva il vincitore! longtemps avant que l'Empereur eût abandonné son quartier général de Volta. Les hommes pleuraient, les femmes agitaient leurs mouchoirs, les jeunes filles jetaient à nos soldats des fleurs cueillies dans les champs.

Aucune ville n'avait peut-être plus souffert que Valeggio du passage des Autrichiens. C'est d'ailleurs un de ces lieux marqués d'avance pour être le théâtre de luttes militaires ou pour servir de passage aux troupes. Les différentes actions que les Sardes eurent à y soutenir en 1848 lui ont donné une certaine célébrité. C'est là que le général Schlick avai reçu le commandement général de l'armée, sous les ordres de l'empereur François-Joseph I". Celui-ci, accompagné de l'archiduc Maximilien et du duc de Modène, coucha à Valeggio la veille de la bataille de Solferino. Des régiments, partis de Vérone le 24 au soir, traversèrent la ville le 25 au matin, affamés, à jeun depuis la veille. La commune n'ayant plus de pain, le général autrichien l'obligea à fabriquer à la hâte des miches de maïs, avec lesquelles la faim des troupes fut tant soit peu apaisée. Elles repartirent aussitôt pour se rendre dans la plaine de Guidizzolo, où elles allaient se heurter aux colonnes du général Niel.

Après la déroute, on vit repasser les mêmes troupes sous le commandement du général Clam-Gallas. Elles étaient sans souliers, sans sacs, sans armes, sans chefs. Les officiers, ne pouvant plus modérer leur fuite, étaient restés en arrière. Les soldats n'avaient pas même voulu passer par Volta, qui porte encore les traces des balles piémontaises de 1848. Ils avaient pris des paysans et les poussaient en avant, la baïonnette dans les reins, pour se faire indiquer la route la plus courte et la plus sûre afin d'arriver à Valeggio. Ils suivirent les crêtes des collines appelées les Besetti. En prévision d'une retraite précipitée, l'état-major autrichien avait fait construire des ponts subsidiaires le long du Mincio. Il y en avait un à l'endroit dit les Buffoni, un second à côté du pont ordinaire de Borghetto, un troisième aux Ferri, un quatrième à Torre, d'autres encore à Goito et sur d'autres points. Après la retraite, ces ponts

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avaient tous été détruits pour arrêter d'une heure la marche des Français.

L'empereur François-Joseph 1" précédait la retraite. Atteints par l'orage épouvantable qui sauva l'armée autrichienne de la poursuite rapide de nos soldats, le duc de Modène, l'archiduc Maximilien et l'empereur s'égarèrent. Ce dernier entra dans Valeggio à six heures un quart, consterné, abattu, exaspéré. Il ne s'y arrêta que quelques instants et reprit la route de Vérone.

Tandis qu'une partic de nos troupes traversait le Mincio à Valeggio, d'autres corps d'armée passaient par Goito, par Monzambano et par Pozzolo. Le lendemain, l'armée française tout entière était concentrée sur la rive gauche du Mincio; ses avant-postes campaient à Capo, à huit kilomètres de Vérone.

Partout l'ennemi avait disparu, laissant tout le long de la route des travaux de défense qui témoignaient à la fois et de son découragement et de notre force.

Les Sardes, qui tenaient la droite de la ligne de l'armée ennemie, furent chargés de l'investissement de Peschiera. Le corps d'armée du maréchal Baraguey-d'Hilliers fut chargé de les appuyer, et le roi Victor-Emmanuel II fixa son quartier général d'abord à Rivoltella, puis à Ponte, sur le lac de Garde, à quatre kilomètres de la forteresse.

Le lac de Garde, connu des anciens sous le nom de Benacus, est le plus grand lac de l'Italie; il a trente-trois mille milles de long de Riva au nord à Peschiera; au sud, il a une lieue de large dans sa partie supérieure, deux lieues de Torri à Maderne, et quatre lieues plus au sud vers la presqu'île Sermione. Il court du nord-est au sud-ouest, et il s'élève de cent mètres au-dessus de l'Adriatique; sa profondeur va jusqu'à trois cents mètres en quelques endroits, et particulièrement entre Gargnano et Casteletto. Le cours principal reçu par ce lac est la Sarca, qui vient s'y perdre au nord, et en ressort à Peschiera sous le nom de Mincio. Des sources nombreuses paraissent l'alimenter, car ses eaux, très-limpides, sont près du fond froides en été et chaudes en hiver, même quand la surface est presque glacée. Ses vents réguliers sont le sovero (nord) et l'ora (sud). Il est exposé à des tempêtes qui y soulèvent de très-fortes vagues.

Le lac de Garde est renommé par la quantité prodigieuse de poissons de diverses espèces qu'il nourrit; plusieurs de ces espèces sont remarquables par la délicatesse de leur goût; les plus importantes sont : les sardines, qui s'avancent par flots au printemps et en automne vers la rive méridionale; les truites saumonées, les meilleurs poissons du lac; les aloses, les anguilles, les brochets, les carpes, les tanches,

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