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départ de la politique française du but qu'elle a si glorieusement atteint.

L'élu du 10 décembre venait de sauver d'un péril imminent sa patrie, et avec elle l'Europe entière. Il avait préservé la France d'une nouvelle révolution, qui menaçait de renverser les fondements de toute société; il avait mis la civilisation d'une moitié du monde à l'abri de la barbarie du socialisme. Posant d'une main ferme les assises de l'avenir, il consolidait l'ordre gouvernemental par des institutions conformes aux vœux et aux besoins de son pays.

coup

Délivrée d'affreuses angoisses par le d'État du 2 décembre, la France respirait de nouveau : sous l'impression profonde de la reconnaissance et de l'admiration, elle remettait avec autant de bonheur que de sécurité ses destinées entre les mains de Louis-Napoléon, auquel 7,824,189 suffrages décernaient le diadème. L'acclamation de tout un peuple rétablissait l'empire.

Malgré les éminents services que Louis-Napoléon avait rendus à la cause monarchique en fermant le gouffre de la révolution, qui, plus menaçante que jamais, s'apprêtait à bouleverser encore l'Europe à peine remise de la tourmente de 1848, le rétablissement de l'empire français fut loin de recevoir de la part des cabinets étrangers tout l'accueil que

faisaient présager les sentiments inspirés aux divers gouvernements les éminentes qualités personnelles de Napoléon III.

pour

Plusieurs causes avaient contribué à engendrer une sorte de réserve, pour ne pas dire de froideur, dans les rapports des puissances étrangères avec le nouvel empire français.

Dominées par les appréhensions que fit naître partout la lutte, aussi opiniâtre que funeste, engagée par l'Assemblée Nationale contre le gouvernement du prince président, désireuses d'être prêtes pour toute éventualité, les trois cours du Nord avaient resserré les liens de la sainte alliance et reconstitué sur une base plus large leur coalition contre la France.

La vieille diplomatie qui se faisait gloire d'avoir renversé un colosse tel que Napoléon Ier applaudissait sans doute à la résolution du peuple français de rétablir la monarchie, mais elle n'envisageait pas pour cela avec moins de défiance la restauration de la dynastie napoléonienne.

Le prince président avait, il est vrai, dans son discours de Bordeaux proclamé que : « L'EMPIRE C'EST LA PAIX! » mais dans le message qu'il avait adressé au Sénat, le 4 novembre 1852, il avait dit aussi, en parlant de la résolution du peuple français de rétablir l'empire:

« Il satisfait à un juste orgueil, parce que, relevant

a.

avec liberté et avec réflexion ce qu'il y a trente-sept ans l'Europe entière avait renversé par la force des armes, au milieu des désastres de la patrie, le peuple venge noblement ses revers, sans faire de victimes, sans menacer aucune indépendance, sans troubler la paix du monde. »

A la fermeté de ce langage, la Russie comprit incontinent de quel poids la voix de la France impériale allait peser bientôt dans la balance des conseils de l'Europe. Elle vit dans le rétablissement de la dynastie napoléonienne un obstacle insurmontable à cette domination universelle à laquelle elle se croyait jusque-là providentiellement appelée. On sait de quelles réserves elle eut soin d'entourer la reconnaissance de l'empire français. Mieux inspirées, les deux grandes puissances allemandes surent résister avec énergie aux suggestions de la cour de Pétersbourg, qui voulait les entraîner à suivre son exemple. Néanmoins le renouvellement de la sainte alliance entravait la liberté de leurs mouvements dans leurs rapports avec le gouvernement de Napoléon III; ce lien inopportun empêchait surtout l'Autriche de s'abandonner aux sincères et profondes sympathies que, depuis l'avénement de son jeune et chevaleresque empereur, elle avait témoignées hautement et en toute occasion au digne successeur de Napoléon 1er.

Le gouvernement anglais, on ne saurait le nier, avait mis un grand empressemeut à reconnaître. l'empire français; mais on sait ce qu'il en coûta au cabinet Derby-Disraéli. Le langage de certains hommes d'État, et surtout les invectives violentes auxquelles la presse périodique de Londres donnait chaque matin un libre cours, faisaient assez voir qu'une partie considérable du peuple anglais gardait encore rancune à Louis-Napoléon d'avoir, dans l'affaire Pacifico, forcé le cabinet de Saint-James à respecter ceux que la France couvrait de sa protection. Pour la première fois depuis des années le lion britannique s'était arrêté devant l'énergique volonté de la France. Il en était resté de l'autre côté du détroit un vif ressentiment qui ne se traduisait pas seulement par des diatribes incessantes, par des attaques passionnées dans la presse et au sein du parlement, mais qui se faisait jour jusque dans les régions officielles. On se souvient que, sous l'empire de ces regrettables préoccupations, deux membres du cabinet Aberdeen, l'un dans un banquet, l'autre dans une réunion électorale, s'oublièrent jusqu'à éclater en amères récriminations contre l'empereur des Français.

Les États secondaires, s'apercevant de la froideur qui régnait entre le gouvernement de Napoléon III et les grandes puissances, ne mettaient pas non

plus beaucoup d'empressement à nouer des relations intimes avec lui. Les journaux belges, sardes, espagnols n'appréciaient qu'avec malveillance la nouvelle situation faite à la France par son empereur. La Suisse et la Belgique devenaient des foyers d'agitation où les ennemis les plus acharnés de Napoléon III forgeaient impunément des armes contre lui. Enfin, la situation d'alors pouvait se résumer par un seul mot l'isolement. Le nouvel empire français n'avait pas d'ennemis déclarés, mais il n'avait pas non plus d'amis sur lesquels il pût compter.

:

Cette situation, qui pour tout autre gouvernement aurait pu être une cause de faiblesse, devint, grâce à la perspicacité et à la fermeté de Napoléon III, un puissant élément de force. Le nouvel empereur sut se soustraire à la tentation de rendre à l'Europe méfiance pour méfiance; il ne chercha point les règles de sa conduite ni les principes de sa politique dans les souvenirs ou les traditions du passé; et de même qu'au lieu d'imiter les fautes de la coalition parlementaire à l'intérieur, il s'était appliqué à les tourner à son profit, de même il sut se garder de retourner contre la coalition diplomatique du dehors les armes qu'elle employait contre lui. La France pèse d'un trop grand poids en Europe pour que tous les yeux ne se fixassent pas sur son gouverne

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