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Diverses questions relatives aux droits des neutres.

§ 153. La liberté du commerce et de la navigation des nations neutres, tant entre elles qu'avec les belligérants, n'a jamais été contestée en principe. Les auteurs l'ont proclamée, les traités ont souvent reconnu que le commerce et la navigation des peuples neutres étaient en eux-mêmes libres. Les divergences des publicistes, et les contestations des États n'ont rapport qu'à la détermination des restrictions que cette liberté doit subir dans l'intérêt des belligérants. A cet égard il faut distinguer principalement les trois questions suivantes :

I. Quels sont les droits des neutres en cas de blocus des côtes et des ports de l'une des puissances en guerre par les escadres de l'autre?

II. Quelles sont les branches spéciales du commerce que les belligérants peuvent interdire aux gouvernements et aux sujets neutres?

III. Quels sont les moyens que les belligérants peuvent employer licitement, à l'égard des neutres, dans la poursuite du but légitime de la guerre?

Ces questions sont étroitement liées entre elles.

On peut reprocher généralement aux publicistes de s'être attachés, dans l'examen de ces questions, à des points de vue trop exclusifs, en partant de principes établis a priori. A la liberté absolue du commerce des États neutres, défendue par les uns, d'autres ont opposé un droit de nécessité créé au profit des belligérants. Nous croyons qu'en premier lieu il faut consulter le droit consacré par des conventions et par l'usage constant; à leur défaut les règles générales précédemment exposées sur les rapports respectifs des États.

Il existe sur cette matière une infinité de monographies, pour la plupart des écrits de circonstance et des pamphlets qui ont pour objet tantôt la défense des belligérants, tantôt celle des neutres. Elles sont indiquées par de Kamptz § 257. Les anciens auteurs déjà: Albéric Gentile (De jure belli I, chap. 21); Grotius (III, 1, 5. 9, 4. 17, 3), Henri Cocceji (De jure belli in amicos Exerc. curat. t. II, p. 19); Bynkershoek (Quaest. juris publ. I, chap. 10 suiv.) se sont occupés des questions relatives aux droits des neutres. Il faut faire remarquer ensuite les nombreux ouvrages qui

sont consacrés à l'examen de la jurisprudence anglaise antérieure aux traités de Paris et de Hubertsbourg (1763), et expliquée dans le Discourse on the conduct of Great Britain in respect to neutral nations during the present war, by Charles Jenkinson (depuis Lord Liverpool). Londres 1757 (2e édit. 1794; 3e édit. 1801); les pièces et les documents relatifs aux contestations entre l'Angleterre et la Prusse en 1752 et indiqués par de Kamptz no. 17-21; le traité déjà mentionné ci-dessus, publié par l'Espagnol Don Carlos Abreu en 1758 et surtout l'ouvrage du publiciste danois Martin Hübner, intitulé: De la saisie des bâtiments neutres etc. A la Haye 1758. Trad. allem. ibid. 1789. C'est un plaidoyer en faveur de la liberté des neutres (v. là-dessus les observations de Wheaton, Histoire p. 159 suiv.

2e édit. I, p. 273). Jean Ehrenreich de Behmer († 1777), dans ses Observations sur le droit de la nature et des gens touchant la capture et la détention des vaisseaux et effets neutres. Hambourg 1771, et en latin dans son Novum jus controv., est entré dans la même voie. La controverse a été reprise avec une énergie redoublée pendant la guerre de l'indépendance américaine. Les principaux ouvrages de cette époque, écrits dans l'esprit de la neutralité armée ou dans un esprit plus libéral encore, sont les suivants:

Ferd. Galiani, Dei doveri etc. (v. ci-dessus § 144. n. 2),

et pour la défense de la pratique usitée, l'ouvrage de Lampredi, Juris publici universalis theoremata, Liburni 1778, suivi d'un livre intitulé: Del commercio dei popoli neutrali in tempo di guerra. Firenze 1778. Trad. en français par Penchet. Paris 1802.

Totze, La liberté de la navigation. Londres et Amsterdam 1780.

A l'époque de la révolution française appartiennent les publications sui

vantes:

de Steck, Essais sur divers sujets. 1799.

D. A. Azuni, Sistema universale dei Principii del diritto marit. 1795; en français 1805.

Büsch, Ueber das Bestreben der Völker neuerer Zeit, einander in ihrem Seehandel recht wehe zu thun. Hamburg 1800.

Prof. Schlegel, Sur la visite des bâtiments neutres.

Copenhague 1800,

et les pamphlets opposés des publicistes anglais Alexandre Croke et Robert Ward.

Rayneval, De la liberté des mers. Paris 1801.

J. N. Tetens, Considérations sur les droits réciproques des puissances belligérantes et des puissances neutres. Copenhague 1805 (en allemand déjà en 1802).

Jouffroy, Le droit des gens maritime. 1806.

Et à la fin de cette période:

(Biedermann) Manuel diplomatique sur le dernier état de la controverse concernant les droits des neutres. Leipz. 1814.

V. aussi Jacobsen, Seerecht p. 521 suiv. et les ouvrages de Reddie (p. 289 ci-dessus), de Hautefeuille, de Massé, de Leschkof, de Spazovitzel (du

commerce neutre. St. Petersbourg 1851), de Cauchy (le droit public maritime. Paris 1862), de Gessner (p. 55) ainsi que le National Review, Lond. January 1863. p. 116.

Droit de blocus.1

§ 154. Nous avons déjà fait connaître le droit de blocus au § 111 et 121 ci-dessus, qui est principalement le droit du belligérant de s'emparer sur mer où sur terre des abords d'une forteresse, d'un port, d'une rade et même de toutes les côtes de son ennemi, et d'y exercer les droits d'une occupation passagère pendant tout le temps qu'il se maintient dans la possession réelle vis-à-vis de cette partie du territoire ennemi,2 à l'effet d'empêcher toute communication avec le dehors. Ce pouvoir du belligérant de dicter des lois dans le rayon momentanément soumis à sa disposition, n'a jamais été contesté. Les nations neutres l'ont toujours reconnu, et doivent le respecter comme une opération militaire garantie par les usages de la guerre (147). Conséquemment elles devront s'abstenir de tout empiétement à l'exécution du blocus et elles se rendront coupables d'une violation des lois de la guerre par toute sorte de manoeuvres qui font craindre que le but du blocus ne soit manqué et qu'il ne devienne illusoire. La saisie du navire neutre contrevenant ou d'autres moyens de transport, avec leur cargaison, quels que soient leur nature et leur propriétaire, ainsi que la confiscation de ces objets sera la suite incontestable de l'infraction. Les personnes qui se trouvent à bord

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1 Grotius III, 1, 5. Bynkershoek, Quaest. 1, § 11. de Steck, Handelsvertr. p. 188 suiv. Nau, Völkerseer. § 200 suiv. Jouffroy, Droit marit. p. 159. Jacobsen, Seerecht p. 677 suiv. Wheaton, Intern. Law IV, 3. 25 et son Histoire des progrès p. 84. Pöhls, Seerecht IV, p. 1142. § 523 suiv. Oke Manning p. 219. Wildman II, p. 178. p. 287. Hautefeuille III, p. 1. Massé p. 211. p. 145. Halleck XXIII.

2 Hautefeuille III, p. 54. 55 et p. 14. 21.

Pando p. 497. Ortolan II. Phillimore III, 238. Gessner

Ortolan II, p. 291 qualifie

à tort le blocus une substitution d'une souveraineté à l'autre. Il ne saurait être question d'une souveraineté sur la mer libre.

8 Wildman II, p. 200. La jurisprudence anglaise la plus recente autorise le propriétaire des marchandises à fournir la preuve de sa non

du navire ne pourront être soumises à aucune punition, vu qu'il n'y a point de lois pénales communes sur mer; mais il y aura lieu à des représailles et même à un traitement hostile en cas de résistance ou de rébellion.

Tout d'accord que l'on soit actuellement sur la nature du blocus et sur les principes généraux ci-dessus expliqué, néanmoins l'application de ces derniers ne manque pas d'offrir des difficultés et un grand nombre d'opinions divergentes.

§ 155. La première question très-controversée est celle de savoir: A partir de quel moment le blocus sur mer est-il réputé réellement établi à l'égard des neutres?1 La nature des choses, il est vrai, semble l'indiquer. Du moment où, devant le lieu bloqué, des bâtiments de guerre sont stationnés en permanence et en assez grand nombre pour empêcher toute espèce de communication avec la place ou le port investi. Plusieurs traités contiennent des dispositions formelles à ce sujet. Ainsi le traité de neutralité armée (article 3) s'exprima en ces termes: ,,Pour déterminer ce qui caractérise un port bloqué, on donne cette dénomination à un port où par suite de la disposition prise par la puissance qui l'attaque avec des vaisseaux arrêtés et suffisamment proches, il y a un danger évident d'entrer." L'Angleterre consentit à insérer cette définition dans la convention de juin 1801, en substituant toutefois la particule alternative ou à la conjonctive ct.2 Quelques traités vont jusqu'à fixer le nombre des vaisseaux qui doivent être stationnés devant un port pour qu'il soit réputé être réellement bloqué. La plupart de ces traités appartiennent au XVIII° siècle: celui de 1818 entre le Danemark et la Prusse exige (article 18) la présence

complicité. Oke Manning p. 320. De même la jurisprudence américaine. Halleck XXIII, 36.

1 V. surtout Wheaton, Intern. Law II, p. 222 suiv. édit. fr. II, 172. Halleck XXIII, 4. Gessner p. 169.

2 Martens, Recueil VII, p. 176. La définition originaire se trouve dans le Code général de Prusse (Allgem. Preufs. Landrecht) partie I. tit. 9. § 219:,, Le lieu bloqué est celui dont des batteries de terre ou des vaisseaux ennemis stationnés au dehors ferment l'accès." V. Wheaton,

Histoire p. 326 (II, 86). de Steck p. 188. 189. Nau, Völkerseerecht § 202 suiv.

de deux vaisseaux pour le moins.1 Enfin la déclaration de Paris du 16 avril 1856 § 4 porte: „Les blocus, pour être obligatoires, doivent être effectifs, c'est-à-dire maintenus par une force suffisante pour interdire réellement l'accès du littoral de l'ennemi."

La distance à laquelle les bâtiments de guerre doivent se trouver du port bloqué, dépend naturellement des circonstances. Il suffira qu'ils soient stationnés de manière à pouvoir surveiller l'entrée du port et en retenir tout navire qui tenterait de passer à leur insu.

Toutefois, suivant un usage généralement admis, qui repose sur la position indépendante des nations neutres, la seule présence de forces ennemies devant une place ne suffit pas pour la faire considérer comme en état de blocus formel. Cela est vrai surtout lorsqu'il s'agit d'un blocus maritime. Il faut que l'existence du blocus soit portée à la connaissance des nations neutres, soit par la voie d'une notification diplomatique, soit par des avertissements locaux ou personnels. Ainsi la déclaration faite par le commandant de l'escadre chargée du blocus au capitaine d'un navire neutre, que le port dans lequel il veut entrer est bloqué, équivaut à une notification faite par la voie diplomatique. On distingue à cet égard entre la notification générale et spéciale ou de fait.2

Après que la notification a été faite, le blocus continue d'exister alors même que les vaisseaux chargés de le former ont été forcés de s'éloigner momentanément par suite de coups de vents, de tempête ou autres accidents de mer. Dans ce cas le blocus notifié conserve les mêmes effets que le blocus de fait. Cette interprétation est conforme à la pratique constante des nations comme aux règles de l'analogie. Enfin l'état de blocus régulièrement publié par un gouvernement

1 Klüber, Droit des gens § 297 donne par erreur le chiffre de vingt. Le traité de 1753 entre la Hollande et les Deux-Siciles (art. 22) exige que six vaisseaux au moins soient arrêtés devant le port. V. de Steck p. 188. Martens, Nouveau Recueil IV, p. 532. Hautefeuille III, p. 60.

2 V. surtout Hautefeuille III, p. 61-92.

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