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pour les peuples; et sur ce point, je l'espère, comme sur le reste, la Charte sera une vérité. »

Ces raisons prévalurent, malgré les efforts de M. Mauguin pour les combattre : l'amendement de M. Salverte, auquel le gouvernement adhérait par l'organe du garde des sceaux, fut adopté à l'unanimité.

Cette unanimité ne se retrouva pas lorsqu'il fallut voter sur le dernier article du projet de loi, ainsi rédigé par la commission :

er

La présente loi est exécutoire à partir du 1er janvier 1832. Néanmoins les revenus des biens composant l'ancienne dotation et l'apanage d'Orléans, perçus ou à percevoir jusqu'au 1 janvier 1832, et les sommes de I million 500,000 fr. touchées par mois du trésor, seront définitivement attribués à la liste civile.

Sur cet article, M. Cabet proposait un amendement qui, déclarant la loi exécutoire à partir du 7 août 1830, statuait que les revenus des domaines non compris dans la dotation de la couronne, et les sommes touchées au-delà de celles que la Chambre venait de fixer, seraient imputés sur les premiers. paiements à faire à la liste civile.

Je concevrais qu'on eût payé 200, 300, 400,000 fr. par mois, disait l'auteur de cet amendement; mais 1 million 500,000 fr., quand le premier projet de liste civile, qui porte 18 millions, avait soulevé tant de réclamations, dès qu'il avait été connu, je dis que le fait ne me paraît pas justifiable, et qu'il ne faut plus parler d'économie, de Charte-vérité, si l'on peut se permettre de pareilles infractions. »

Au nom de l'article 19 de la Charte, M. Salverte affirmait qu'il n'y avait qu'une manière de compter : la Chambre, du premier jour du règne, devait voter 12 millions; si l'on accordait davantage, il y aurait deux listes civiles : l'une qui ne serait fondée sur aucune loi, et l'autre que la Chambre allait voter aujourd'hui. Cependant l'amendement ne fut pas adopté, et quoique cette décision de la Chambre parût annoncer une issue favorable pour l'article de la commission, cet article n'en fut pas moins écarté par la question préalable, au scrutin secret, à une majorité de 10 voix sur 294 votants.

Séance du 14. Une disposition toute semblable à l'article de

la commission, si ce n'est qu'elle rendait la loi exécutoire du jour de l'avénement du roi, était présentée par M. le général Stroltz: elle devint le sujet d'une longue délibération. M. Salverte voulait qu'on rejetât cette disposition, par la raison que ce qui aurait été payé de trop sur la liste civile devait figurer dans les comptes des ministres, et que ce serait pour ceux-ci l'objet d'une demande en supplément de crédit. Si cette demande motivée se résolvait en une indemnité quelconque, la Chambre jugerait la valeur de l'indemnité et la valeur des motifs. Jusqu'au moment où les ministres auraient fourni des renseignements exacts et des documents précis sur les dépenses faites, il n'y avait, dans l'opinion de l'honorable membre, aucune décision à prendre.

Après avoir dit que l'amendement du général Stroltz ne tendait qu'à concilier la pensée qui avait fait rejeter l'amendement de M. Cabet, et celle qui avait déterminé l'adoption de la question préalable sur l'article de la commission, M. le garde des sceaux insinuait que, à la suite d'une révolution, la première année de l'avénement avait pu et dû donner lieu à des sacrifices, à des réparations, à des actes de bienfaisance. En suivant le ministre sur ce terrain, M. Mauguin ne refusait pas de consentir l'allocation à titre d'indemnité; mais sous la condition expresse que, soit devant la Chambre, soit devant úne commission nommée par elle, les conseillers de la couronne justifieraient la nécessité de l'indemnité et présenteraient un tableau des dépenses consommées. Faute de cette justification, de ce tableau, la question serait de savoir si le ministre des finances n'était pas obligé de rendre compte des sommes indûment payées ; si la Chambre n'en devait pas exiger la restitution. Au surplus, le résultat de la discussion avait été, hier, de ne pas accorder les 10 millions reçus en trop ; il était de la dignité de la Chambre de persister dans son vote. Enfin on avait parlé de générosité, de bienfaits répandus par le prince; l'orateur reconnaissait que la générosité était la plus belle, la plus noble des qualités d'un roi; mais pour qu'il y 1832.

Ann. hist.

pour

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eût générosité, il fallait que la royauté payât de ses propres fonds et non avec l'argent des contribuables. Il n'y aurait pas bienfait si le prince était toujours indemnisé de șa bienfaisance par le trésor de l'État.

M. le président du conseil pensait que la question qui s'agitait devant la Chambre avait été déplacée. Selon lui, ce n'était ni une question d'argent, ni une question de dignité; c'était une question de bonne foi : comme, dans les douzièmes provisoires demandés jusqu'alors à la Chambre, jamais les allocations de la liste civile n'avaient été contestées, le ministre en concluait qu'il était évident pour tout le monde que les dépenses de la liste civile ne pourraient soulever aucune réclamation, et que les sommes payées lui seraient définitivement acquises. Ainsi M. Casimir Périer croyait que le ministère avait suivi les intentions de la Chambre, celles de la France entière, en accordant à la couronne une juste allocation, qui avait été déterminée sur le chiffre définitif présenté par le ministère précédent, où se trouvaient MM. Laffitte et Dupont (de l'Eure).

Interpellé de la sorte, ce dernier déclara que, lorsqu'il avait consenti à signer l'ordonnance accordant 12 millions à la liste civile pour les cinq derniers mois de 1830, il ne l'avait fait que dans la confiance que ce serait sauf à compter. Mais M. Laffitte n'avait pas eu la même pensée que son collègue. Il répétait que le ministre avait été de bonne foi en payant à la liste civile les sommes touchées par elle, puisque personne n'avait élevé de difficultés sur le chiffre de 12 millions, demandé pour 1830, ni sur celui de 18 millions, demandé pour 1831. Il y avait donc eu d'abord approbation tacite de la Chambre, et approbation formelle, lorsqu'elle avait voté la loi des trois douzièmes, qui autorisait le paiement de la liste civile sur le pied de 18 millions. Ces considérations déterminèrent la Chambre à sanctionner l'amendement du général Stroltz.

Il ne restait plus qu'à procéder au scrutin sur l'ensemble

eut

du projet de loi. Le nombre des votants était de 366. Il Y d'une part 259 boules blanches, et de l'autre 107 boules noires. La majorité pour l'adoption était considérable; toutefois, eu égard à la nature de la loi, le chiffre des boules noires ne laissa pas que de causer une certaine sensation.

Pendant ces débats sur la loi de la liste civile, et avant qu'elle ne fût mise en discussion dans la Chambre des pairs, cette Chambre eut à s'occuper de différents projets déjà adoptés par celle des députés (Voy. l'Ann. de 1831, page 349), et qui suscitèrent de graves dissidences entre les deux branches du pouvoir législatif.

Le gouvernement et la Chambre élective avaient introduit dans le règlement définitif du budget de 1829 plusieurs dispositions, dont trois, entre autres, furent signalées à la Chambre des pairs (séance du 9 janvier) par M. le comte Roy, rapporteur de la commission, qui avait examiné le projet, comme incompatibles avec la nature et l'objet d'un règlement de budget antérieur. La première de ces dispositions (article 10 du projet) fixait un terme de déchéance pour les sommes versées aux bureaux de postes et non réclamées; la seconde (article 14) prescrivait au gouvernement de passer avec publicité et concurrence les marchés au-dessus de 10,000 francs; la troisième (article 15) portait qu'à l'avenir aucune somme ne pourrait être allouée aux ministres à titre de frais de premier établissement. La commission concluait au rejet de ces dispositions.

11 janvier. Dans la discussion, M. le rapporteur reproduisit devant la Chambre les considérations principales qui avaient déterminé la commission à demander la suppression de l'article 10.

Elle a d'abord eu pour objet, disait-il, de maintenir le principe que la loi appelée le règlement du budget antérieur ne doit contenir dispositions conformes à sa nature; qu'elle est une loi annuelle, qui n'agit que des que sur le passé et sur des faits accomplis ; qu'elle ne peut par conséquent présenter aucune disposition perpétuelle et d'avenir; qu'il n'en pourrait être autrement sans destruction de l'autorité constitutionnelle de la Chambre des pairs, et de sa libre participation à la législation, puisqu'il

arrive trop souvent qu'elle est forcée par les circonstances de donner son assentiment, quoiqu'en protestant, aux lois du budget dont la loi de règlement fait partie: cette première considération est de la plus haute importance.

En outre, il importait qu'une telle disposition, qui établissait pour l'avenir un principe rigoureux d'expropriation, ne fût pas inséré dans un acte où personne n'irait le chercher. Aucune voix ne s'étant élevée pour combattre ces motifs, la suppression de l'article fut adoptée.

M. le duc de Broglie ayant fait observer que les réflexions que venait de présenter M. le rapporteur s'appliquaient identiquement à l'article 11, relatif à la remise de tout ou partie des droits du sceau, pour la délivrance des,lettres de naturalité et de dispenses d'âge ou de parenté pour mariage, cet article, bien qu'il eût été demandé par le gouvernement, fut aussi rejeté.

L'article 14, dont la disposition était trop importante, suivant la commission, pour être improvisée à la tribune par amendement, pour être placée dans une loi annuelle, et l'article 15, qui défendait généralement et indéfiniment de faire une dépense qui, selon les circonstances, les temps et les personnes, pouvait être utile et commandée par des considérations d'un grand intérêt public, éprouvèrent le même sort que les précédents. Le scrutin secret donna ensuite 91 suffrages contre 2 en faveur de la loi.

Elle revint le 18 à la Chambre des députés, avec l'approbation du gouvernement. Mais les doctrines qui avaient obtenu l'assentiment de la Chambre des pairs en cette occasion ne furent point partagées par la commission de l'autre Chambre, comme il parut d'après le rapport présenté le 2 février par M. Passy.

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Que sont, en effet, les lois de finances, disait-il? Des lois qui, bien que renouvelées tous les ans, n'en pourvoient pas moins à des nécessités durables et permanentes. Aussi les fai's que, dans leur succession non interrompue, elles approprient aux besoins d'une seule année, ne formeĥtils pas un tout isolé et complet? Liés à l'avenir comme au passé, ces faits sont d'ailleurs soumis à des règles dont l'influence les modifie parfois

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