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reste, point d'unité, ici une quasi-monarchie, là une quasi-république, du fédéralisme, de l'empire, que sait-on? Tout, excepté la paix et la Charte, c'est-à-dire excepté ce qui rassure tous les intérêts, ranime toutes les industries, élève toutes les intelligences, protége tous les droits! Là, au contraire, le désir de la stabilité, la fidélité à la Charte populaire de 1830, le maintien de la révolution dans les voies qu'elle-même se fraya, la liberté avec un roi, la paix avec la Belgique affranchie; en un mot, des immunités plus nombreuses et plus inviolables que jamais au dedans, au dehors plus de garanties que jamais pour notre indépendance et notre sécurité.

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Quant aux hommes, ce système, fort de talents, comptait, dans la Chambre des députés, entre toutes les grandes renommées d'affaires et de tribune, quatre défenseurs éminents par leur influence, leur capacité, leur dévouement et leur courage. A moins d'être infidèle à la loi fondamentale du système représentatif, la couronne devait les vouloir pour appuis. Elle les a voulus. Et lui reprochera-t-on d'avoir tenu trop peu de compte de l'ancienneté des services et de l'éclat des succès, d'avoir traité également des situations qui pouvaient n'être pas toutes égales? Non : la couronne n'a point ce reproche à redouter. Elle a voulu que tous les hommes de talent et de cœur brillassent dans ses conseils; elle a voulu que celui qui commença, en quelque sorte, le système du 13 mars, en sauvant, même dans le feu de la révolution, l'inamovibilité de la magistrature, qui depuis lors foudroya tant de fois l'émeute et la propagande, qui lança tant d'arrêts sévères dans la discussion des affaires de la Pologne ou 'Italie, comme dans la discussion des affaires intérieures et des lois politiques, se réunît, dans le cabinet, à des hommes avec lesquels il y avait siégé, avec lesquels il en était sorti.

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A son défaut, il fallait bien que le ministère se constituat. La couronne a convoqué près d'elle les autres organes de la majorité. L'opposition accusait l'absence d'un président du conseil. Le plus grand nom militaire de la France a rempli ce vide.

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Ainsi constitué, le cabinet bravera l'ouragan des injures qui accusent, non le ministère, mais une opposition réduite à de telles extrémités; et convaincu que tous les intérêts de l'ordre, que tous les intérêts de la liberté sont liés à sa cause, qu'il s'agit du sort de la monarchie de juillet, qu'il doit et peut la sauver de ses ennemis divers, il se présentera sans crainte devant les Chambres, qui prononceront, en connaissance de cause, sur le système et sur les hommes. (Débats du 12.)

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Mais il s'en fallait que les journaux de l'opposition concédassent à leur plus puissant adversaire que les nouveaux ministres fussent les représentants de la majorité.

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On ne cesse de nous dire qu'on veut des ministres dans le sens de la majorité, lisait-on dans le Constitutionnel du 12; c'est une déception dont est temps de faire justice. L'immense majorité de la Chambre n'a-t-elle pas voté l'abolition de l'hérédité de la pairie? MM. Guizot, de Broglie, Thiers, Soult et leurs collègues, ne sont-ils pas, au contraire, des partisanз très prononcés de l'hérédité? La majorité de la Chambre n'a-t-elle

pas voulu abaisser le cens d'éligibilité et le cens électoral au-dessous du taux déterminé par la Charte octroyée ? Les doctrinaires, au contraire, n'outils pas voulu l'élever quand ils l'ont pu avec impunité ? N'étaient-ils pas les auteurs de la loi du double vote que la révolution de juillet a détruite?

«La majorité de la Chambre des députés n'avait-elle pas voulu le rétablissement du divorce, l'abolition de l'anniversaire du 21 janvier, l'exclusion franche et irrévocable des Bourbons de la branche aînée ? N'avait-elle pas voulu la publicité et la concurrence dans les marchés? N'avait-elle pas demandé que les travaux commencés dans une session pussent être continués dans la session suivante? Toutes les résolutions qu'elle a prises sur ces divers sujets et sur d'autres n'ont-elles pas été combattues et repoussées par les doctrinaires? M. de Broglie n'a-t-il pas été à la tête du parti qui les a fait rejeter dans la Chambre des pairs? Ne s'est-il pas déclaré l'ennemi de la majorité de la Chambre des députés?

Dès l'ouverture de la session dernière, la majorité de la Chambre élective demanda que les fonctions publiques fussent confiées à des hommes purs et dévoués à la révolution de juillet. Les ministres, poussés par les doctrinaires, n'ont-ils pas, au contraire, écarté du gouvernement tous les hommes sincèrement dévoués à la révolution et protégé les carlistes?»>

Bientôt on laissa le passé pour le présent, et l'ordonnance qui reculait au 19 novembre l'ouverture des Chambres si impatiemment demandée, celle qui bouleversait les attributions de plusieurs ministères, celle qui donnait au maréchal Soult une présidence plus nominale, disait-on, que réelle, et enfin la nouvelle création de pairs, aussi bien sous le rapport des choix que sous le point de vue constitutionnel, devinrent un texte à des critiques non moins vives. On attendit ainsi l'ouverture des Chambres, au jugement desquelles on a vu qu'amis et ennemis du ministère s'en rapportaient également pour la décision de ce procès dont la masse du public, soit par suite de cette tiédeur politique qui suit ordinairement les révolutions, soit qu'elle ne partageàt pas toutes les antipathies de la presse, ne s'était pas mêlée avec la même chaleur que les journaux. Il est en outre un autre symptômé remarquable de l'état de l'opinion, c'est qu'aucune des réélections qui eurent lieu entre les deux sessions ne fit perdre une seule voix à l'ancienne majorité.

Dans l'intervalle, quelques actes d'administration et surtout deux événements d'une haute portée dont nous parlerons bientôt occupèrent l'attention publique,

Parmi les premiers, on remarqua la nomination de M. Maurice Duval, ancien préfet de Grenoble, à la préfecture de la Loire-Inférieure, et dont l'installation à Nantes n'eut pas lieu sans troubles. Mais une mesure qui valut au ministère des éloges unanimes, ce fut le rétablissement de la classe des sciences morales et politiques de l'Institut, par une ordonnance rendue le 27 sur le rapport de M. Guizot. Il faut signaler aussi la nomination d'une commission pour préparer l'institution de colonies agricoles libres et forcées, à l'exemple de celles qui existent en Hollande et en Belgique au grand avantage de ces deux pays, et dont l'introduction en France comme asile, correction, répression, et enfin comme moyen de rendre à l'agriculture des espaces jusqu'ici perdus pour elle, est désirée par tous les bons esprits.

On a vu que les affaires de Belgique et de Hollande étaient devenues l'objet d'une négociation particulière entre les gouvernements français et anglais. Ils avaient eufin senti la nécessité de mettre à exécution les décisions de la conférence de Londres. En conséquence, une convention fut signée à Londres, le 22 octobre, par M. de Talleyrand et lord Palmerston, portant que les rois de Hollande et de Belgique seraient requis de prendre, au 2 novembre, l'engagement de retirer avant le 12 leurs troupes des places qu'ils occupent sur leurs territoires respectifs, dans les limites tracées par le traité du 15 novembre 1831. Faute de consentir à cette évacuation de la part du roi Guillaume, un embargo serait mis sur tous les vaisseaux hollandais dans les ports de France et d'Angleterre, et l'escadre anglo-française arrêterait tous les bâtiments de la même nation qu'elle pourrait rencontrer en mer. De plus, si au 15 novembre il se trouvait encore des troupes hollandaises sur le territoire belge, une armée française entrerait en Belgique pour expulser celles de ces troupes qui occuperaient la citadelle d'Anvers et les forts voisins.

Cette convention, qui amena une quasi dissolution de la conférence de Londres, les trois puissances du Nord ne voulant

pas concourir à des mesures coërcitives contre la Hollande, fut transmise immédiatement aux cabinets de La Haye et de Bruxelles. Celui-là, comme on pouvait le prévoir, refusa de s'y soumettre. La flotte combinée anglaise et française, qui s'était réunie à Spithead, fit voile dans les premiers jours de novembre pour les côtes de Hollande et y établit un blocus maritime que la mauvaise saison ne tarda pas à interrompre. En même temps l'embargo était mis sur tous les navires hollandais dans les ports d'Angleterre et de France.

D'un autre côté, une armée française forte de 70,000 hommes, comptant dans ses rangs deux fils du roi, les ducs d'Orléans et de Nemours, passait la frontière le 15, sous les ordres du maréchal Gérard, pour se diriger sur la citadelle d'Anvers. Le 22, elle était réunie tout entière autour de la forteresse, et c'est là que nous irons la retrouver pour ajouter une nouvelle page à l'histoire des triomphes militaires de la France.

Ainsi, après tant de négociations, on allait essayer du fer pour trancher le nœud de la question belge, et tandis que le gouvernement prenait cette mesure qu'il jugeait décisive pour l'affermissement de la paix en Europe, un autre événement avait lieu et devait servir d'une manière encore plus certaine à consolider la paix intérieure du pays : la duchesse de Berry, dont la présence dans l'Ouest équivalait à une continuelle provocation à la guerre civile, était arrêtée à Nantes.

Le nouveau cabinet avait reconnu dès l'instant de sa formation la nécessité d'effectuer cette arrestation. C'est du moins ce qui paraît résulter des deux circulaires adressées le 13 octobre aux commandants militaires et aux préfets dans l'Ouest par le ministre de la guerre et le ministre de l'intérieur. «ll faut, disaient-ils l'un et l'autre, à peu près dans les mêmes termes, que les bandes de malfaiteurs qui désolent encore l'Ouest disparaissent; il faut que leurs chefs, quels que soient leur nom et leur rang, tombent tous dans les mains de la puissance publique. » Les faits prouvèrent bientôt que ces paroles avaient été prises au sérieux,

Malgré les renseignements très divers qui semblaient se réunir pour détourner l'attention sur d'autres points, le gouvernement avait eu des raisons de penser que la duchesse venait souvent à Nantes, ou plutôt qu'elle y résidait. Mais on ignorait toujours le lieu exact où elle trouvait un refuge, et peut-être l'eût-on ignoré long-temps encore, au milieu d'un pays qui offrait tant de ressources à la duchesse pour se soustraire à toutes les recherches, si l'un de ses affidés ne l'avait lui-même vendue. Ce misérable instrument d'un acte légitime d'ailleurs et nécessaire au repos de la France était un étranger, Juif renégat, à qui son apostasie avait valu de hautes protections et que la duchesse de Berry avait comblé de bienfaits. Le 6 novembre, vers cinq heures du soir, il avertit l'autorité qu'elle venait d'arriver à Nantes, qu'elle était dans la maison de mademoiselle Duguigny, rue Haute du Château. Tout le quartier fut aussitôt cerné par 1,200 hommes d'infanterie, appuyés de la garde nationale. La nuit entière se passa en vaines perquisitions dans la maison de mademoiselle Duguiguy, et le lendemain à dix heures, on désespérait de rien découvrir, lorsque, derrière une cheminée dont la plaque, tournant sur elle-même, donnait entrée dans une petite chambre, et où du feu avait été allumé toute la nuit, la duchesse, qu'une chaleur insupportable avait forcée de se trahir elle-même (1), fut trouvée avec M. Guibourg, avocat de Nantes, M. de Mesnars et mademoiselle Stylie de Kersabiec. On saisit en outre dans la maison plusieurs sacs d'argent, une correspondance, des proclamations au nom de Marie-Caroline, une presse clandestine, des caractères et des outils d'imprimerie, des papiers divers. Les prisonniers furent conduits avec toutes sortes d'égards au Château, sans que le calme le plus complet eût cessé de régner un instant dans la ville. Conformément à des ordres antérieurs, la duchesse fut ensuite embarquée sur un bâtiment

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(1) • Vous m'avez fait une guerre de saint Laurent, dit-elle en sortant de sa retraite.

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