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relatif à des immeubles, il peut y avoir conflit entre les législations qui régissent les pays auxquels appartiennent ces personnes et où les immeubles sont situés. Le conflit des lois peut donc en certains cas prendre une grande gravité et soulever de sérieuses difficultés.

La différence des lois ne résulte point des caprices des législateurs; elle a sa raison d'être dans la différence des mœurs et des traditions des peuples; et il ne dépendrait pas de la bonne volonté des hommes d'État de la corriger. Ainsi lorsque les lois anglaises et les lois françaises sont en conflit, en matière de testament, ce conflit a sa raison d'être dans la constitution sociale des deux pays. En Angleterre, il n'y a point de lois uniformes pour tout l'État; chaque comté a ses coutumes qui règlent la transmission des biens; ces coutumes admettent le droit d'ainesse et la liberté testamentaire : il n'y a donc point de motif pour que l'Angleterre décline la compétence des législations étrangères en matière de testament, ces législations ne peuvent modifier la sienne, puisqu'elle admet que chaque Anglais peut disposer librement de ses biens et qu'il doit le faire selon la coutume qui régit le lieu du RoyaumeUni où il a son domicile. En France, au contraire, la liberté absolue de tester n'existe pas, le droit d'aînesse est aboli admettre comme valable un testament fait selon les lois d'un pays où ces droits existent serait porter atteinte à l'un des principes du droit public de la France.

IV. Ces considérations font ressortir toute l'importance du droit des gens privé. Ce droit qui règle les

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droit des gens rapports privés des nations a des causes plus profondes

privé.

Règles générales

du

privé.

et produit des effets plus graves que celui qui règle les rapports publics des États. Le droit public des États peut être méconnu ou même violé sans que les États en éprouvent de grands dommages et sans que les nations aient à en souffrir sérieusement; elles peuvent subsister encore que les États auxquels elles appartiennent modifient leur droit public dans leurs rapports avec les États voisins. Lors au contraire que, par suite des relations que les États ont entre eux, les lois privées des nations sont violées ou anéanties, les nations en sont intimement atteintes et à la longue leur ruine peut s'ensuivre. La France, à l'époque de la Révolution, a trop souvent violé les principes du droit public qui réglait les rapports des États de l'Europe, et, bien qu'elle en ait beaucoup souffert, son existence nationale n'a point été compromise, parce qu'elle a toujours su défendre ses lois privées; les Polonais, au contraire, qui, dans leurs rapports avec les États, ont respecté le droit public établi; n'ont point été capables de défendre leurs lois privées; ils ont cessé de former un État, et ils ne forment plus qu'une nation divisée, qui, tout en protestant contre cette division, est cependant menacée d'en périr.

De même que, dans chaque nation, le droit public de la nation dérive de son droit privé, de même, dans droit des gens les rapports des nations entre elles, le droit des gens public dérive du droit des gens privé. Il en résulte que les nations doivent respecter réciproquement leurs lois et leurs coutumes, et que les lois d'une nation ne sauraient être appliquées sur le territoire d'une autre,

si ce n'est en vertu des lois mèmes qui sont établies dans ce territoire. Toute nation a le droit de demander aux autres de tenir compte de ses lois autant que ces lois ne contredisent point celles des autres nations.

Dans chaque pays, les juges et les agents de l'autorité ont pour premier devoir de faire respecter les lois et les coutumes nationales aussi bien par les nationaux que par les étrangers; en cas de conflit entre les lois nationales et les lois étrangères, ils doivent prendre les lois étrangères en considération autant que les lois nationales le permettent. L'étranger a le droit de le réclamer et le juge doit y consentir. L'étranger ne doit pas être mieux traité que le national; il ne doit pas l'être moins bien. Le traiter mieux, c'est lui accorder un privilége; le traiter moins bien, c'est manquer au respect que les nations se doivent entre elles. Une législation étroite et exclusive, un sentiment irréfléchi de la supériorité absolue des lois nationales, l'ignorance des lois étrangères, peuvent aveugler l'esprit des juges et les entraîner à méconnaître les droits des étrangers. Ils se rendent en ce cas coupables d'un véritable déni de justice.

v.

Lorsque le droit des gens privé est violé, lorsque, par exemple, il y a déni de justice, la nation lésée n'a, pour obtenir réparation, d'autre ressource que la négociation ou la guerre; mais la nation qui a violé le droit des gens privé par ignorance, par inintelligence ou par passion, ne devient ni plus instruite, ni plus perspicace, ni plus sage par le seul effet de la guerre; la guerre ne procure d'autre avantage à

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Progrès du

privé.

la nation lésée, si elle est victorieuse, qu une réparation d'honneur ou une réparation en argent. C'est en vain que l'on essayerait d'obliger la nation coupable, si elle est vaincue, à modifier ses lois et à changer sa conduite; les traités qu'elle signerait n'amenderaient point ses mœurs, et ses mœurs seraient plus puissantes que les traités. La conduite la plus prudente et la plus habile en pareil cas est la modération; c'est la conduite que tiennent en général les nations; elles se bornent à négocier et se contentent de réparations modestes. Il est rare qu'une guerre éclate à propos d'un conflit de droit des gens privé.

C'est à cette conduite des nations qu'il faut attribuer les droit des gens progrès du droit des gens privé. Au lieu d'en appeler aux armes, elles se sont étudiées les unes les autres, elles ont mieux compris leurs mœurs respectives, elles les ont respectées davantage, elles ont senti les inconvénients des conflits, et se sont efforcées de les prévenir. C'est ainsi que les coutumes établies par le régime féodal ont disparu ou tendent à disparaître du droit international; c'est ainsi que la France a renoncé au droit d'aubaine et l'Angleterre au droit d'allégeance. La plupart des nations sont arrivées à accorder aux étrangers l'exercice de tous les droits civils. La Russie admet même les étrangers à participer à l'administration civile. Le code prussien, le code autrichien et le code italien prescrivent, en certaines matières, de prendre les lois étrangères en considération. Le respect réciproque que se doivent les nations est une nécessité; les nations en ont fait une coutume qu'elles observent; elles tendent à introduire cette

coutume dans leurs lois et à la transformer en obligation. Mais les nations ne peuvent accomplir ces progrès sans l'intervention des États qui représentent l'ensemble de leurs forces et de leurs intérêts. Il faut que l'État intervienne pour que le respect des lois étrangères se traduise en actes, pour que les jugements rendus entre les nationaux et les étrangers soient exécutés et produisent leurs effets. Il y a donc une relation constante entre le droit des gens privé, qui règle les rapports des nations, et le droit des gens public, qui règle les rapports des États.

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