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à son aide, violant ainsi une fois de plus le droit des gens (1). Tandis que les Hongrois indignés proclamaient leur indépendance, l'Autriche, sûre de son succès, les traitait de plus en plus comme rebelles. En Transylvanie, la guerre prit un caractère atroce. Puis aux défaites succédèrent les supplices. Les Conseils de guerre siégèrent en permanence; le président du ministère hongrois fut fusillé; un grand nombre d'officiers pendus; les patriotes emprisonnés, incorporés dans l'armée autrichienne ou exilés. Avec l'Autriche et la Russie, la cause de l'absolutisme l'emportait, la force triomphait du droit ; et les malheureux Hongrois, coupables d'avoir voulu forcer leur roi à respecter la Constitution, devaient nécessairement être qualifiés de rebelles et traités en conséquence.

(1) Si l'Autriche avait reconnu la souveraineté de la Hongrie et le caractère international de la guerre, il n'eut pas été illicite pour elle de conclure avec la Russie une alliance offensive (la question peut cependant être discutée, à raison du lien unissant la Hongrie à l'Autriche). Mais dès l'instant qu'elle déclarait être en présence d'une guerre civile, il lui était absolument interdit de solliciter une intervention étrangère contre les « rebelles »>. (V. infra, IIIe partie, ch. 1 et 11).

CHAPITRE V

De la guerre entre protecteur et protégé

20. Des divers types de protectorats.

21. Une guerre entre deux Etats met-elle fin au protectorat que l'un exerce sur l'autre ?

22. Influence du traité de protectorat sur le caractère juridique de la guerre.

23. Guerres de Madagascar, d'Abyssinie, du Transvaal.

<< Lorsqu'un Etat, dit Klüber, dépend d'un autre dans l'exercice d'un ou plusieurs droits inhérents à la souveraineté, mais qu'au reste il est libre, on l'appelle dépendant ou mi-souverain (1). » La mi-souveraineté ainsi définie constitue un degré de transition entre la dépendance politique absolue et la pleine souveraineté, transition qui n'a de raison d'être, au dire de Martens, qu'à cause de son caractère provisoire (2). C'est un lien de subordination entre un Etat fort et un Etat faible, privant ce dernier, soit de la capacité d'acquérir des droits internationaux ; soit, plus ordinairement, de la capacité d'exercer ces mêmes droits et de faire des actes juridiques internationaux; lien assez étroit pour que les deux Etats ne jouissent pas, dans leurs rapports réciproques, de la plénitude du droit d'action inter

(1) Klüber, Droit des gens moderne de l'Europe, 1874, § 24. (2) De Martens, Traité... t. I, p. 331.

gentes, et pour que la guerre, entre eux, puisse avoir le caractère civil.

Ainsi la guerre entre Etat souverain et Etat mi-souverain dépendant de lui rentre dans le cadre de notre étude. Nous suivrons en cette matière la division classique qui répartit en deux grandes classes les Etats mi-souverains, et étudierons successivement: les Etats protégés; les Etats

vassaux.

20.

Le mot de protectorat a un sens assez vague; ou, pour mieux dire, il a plusieurs sens différents. En droit, en diplomatie et en politique, on l'emploie couramment pour désigner des situations de fait ou de droit, souvent très dissemblables les unes des autres. Cette ambiguité devient naturellement une cause d'erreurs et d'obscurité lorsqu'on ne prend pas soin de préciser la terminologie.

Nous définirons le protectorat : Une convention juridique bilatérale, conclue entre deux Etats souverains, de puissance et de civilisation inégales, ayant pour effet de placer le plus faible sous la tutelle et la protection du plus fort, tout en le réduisant au rang d'Etat mi-souverain.

Cette définition s'applique au protectorat proprement dit ou protectorat du droit des gens. Elle exclut la vieille forme. historique dite protectorat sauvegarde, ainsi que les procédés d'expansion coloniale que l'Angleterre et l'Allemagne décorent du nom de protectorat colonial, protectorat administratif. A fortiori elle exclut la doctrine de certains diplomates qui veulent que le mot protectorat désigne simplement une situation de fait.

Le protectorat sauvegarde ne nous intéresse pas, car s'il assure à un petit Etat l'amitié protectrice d'un voisin plus

fort, il ne fait peser sur lui aucune obligation et lui laisse la jouissance de sa souveraineté intégrale (1).

Il répond à la définition que donne Vattel: « Lorsqu'une nation n'est pas capable de se garantir elle-même d'insulte et d'oppression, elle peut se ménager la protection d'un Etat plus puissant. Si elle l'obtient en s'engageant seulement à certaines choses, même à payer un tribut, en reconnaissance de la sûreté qu'on lui procure, à fournir des troupes à son protecteur et jusqu'à faire cause commune avec lui dans toutes ses guerres, se réservant du reste le droit de se gouverner à son gré, c'est un simple traité de protection qui ne déroge point à la souveraineté, et qui ne s'éloigne des traités d'alliance ordinaires que par la différence qu'il met dans la dignité des parties contractantes (2). »

Encore le protecteur n'exige-t-il pas l'accomplissement de toutes les obligations qu'énumère Vattel et se contentet-il d'un droit de contrôle sur les relations politiques ou commerciales de son protégé.

L'Etat protecteur et l'Etat protégé restent donc également souverains. Il est évident que si une guerre survient entre eux, elle aura le caractère d'une guerre internationale. Il ne peut y avoir de doutes sur ce point.

Le protectorat sauvegarde d'ailleurs, nous l'avons dit, est une forme qui appartient aujourd'hui au domaine de l'histoire. Elle a eu au siècle dernier d'importantes applications:

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(1) Cf. Despagnet, Essai sur les protectorats, ch. 11, sect. 2, 1. De Martens, Traité, t. I, pp. 345, 346, 354. Gairal, Le protectorat international, p. 69. Sirmagieff, Les Etats mi-souverains.

Sur les protectorats de Cracovie et des Iles Ionniennes, voir une étude très documentée dans les Commentaires de Lawrence. (2) Vattel, Op. cit., 1. I, ch. xvi, § 192.

tels les protectorats de Cracovie et des Iles Ioniennes. On ne peut plus en citer que trois vestiges à l'heure actuelle: le protectorat de la France sur Monaco, celui de l'Italie sur Saint-Marin, et celui de l'Autriche-Hongrie sur le Monténé

gro.

La discussion n'est pas davantage possible pour les pseudo-protectorats, que nous devons également éliminer de suite. Ces pseudo-protectorats sont en réalité des procédés de conquête permettant aux puissances qui les pratiquent de jouir des avantages de l'annexion sans avoir à en supporter les charges, et d'abandonner les nouvelles colonies dans le cas où elles deviendraient un sujet d'embarras pour la Métropole (1).

(1) Sur les pseudo protectorats, cf. Despagnet, Op., cit.

Von Stengel

Constitution et administration des colonies allemandes (Revue de droit public, 1895, p. 275).

Engelhardt Considérations historiques et juridiques sur les protectorats (R. Gand, 1892, sqq.)

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Les protectorats romains (R. D. I. P., 1895, p. 489). Influence de l'établissement d'un protectorat sur les traités antérieurement conclus avec des puissances tierces par l'Etat protégé (R. D. I. P., 1896, p. 613).

Vue d'ensemble sur le droit des gens, d'après les périodiques français (Revue générale de législation et de jurisprudence, 1897, p. 450. V. « Protectorats étrangers ».

Théorie juridique des protectorats, Clunet, 1890, p. 209.

Nous devons faire remarquer que ce dernier auteur intervertit complètement la terminologie usitée. Il appelle protectorat colonial le protectorat administratif et vice versa. La terminologie est d'ailleurs un peu flottante en ces matières, et il faut se garder des confusions de mots.

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