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influence à notre influence traditionnelle et séculaire, et de recueillir la clientèle de « l'Etat déchu ».

L'Empereur d'Autriche pensa qu'elle lui revenait de droit, et chercha toutes les occasions d'imposer sa collaboration à la France.

L'Italie, qui venait à la faveur du désarroi général, d'occuper Rome, crut bon, de son côté, d'affirmer de prétendus droits à la possession des documents concernant les sujets pontificaux.

La Russie, tout en préparant le coup décisif qu'elle allait bientôt porter à la neutralité de la mer Noire, encourageait de plus en plus ouvertement le mouvement panslaviste.

Si l'on ajoute qu'en Syrie, l'Angleterre et la Prusse, dont la haine n'était pas assouvie encore, s'employaient à miner l'influence française par des encouragements habilement donnés à nos ennemis, l'on aura une idée de la réaction universelle qui se produisit contre la France, et qui permit à la Porte de retomber dans ses anciens errements et de s'y enfoncer plus profondément que jamais (1). « La Porte sous le coup des événements qui venaient d'ébranler l'Europe, semblait prise du même vertige qu'après la guerre de Crimée. Alors les victoires de la France avaient exalté le vieil orgueil musulman; cette fois c'étaient ses défaites» (2).

On rêva de reconstituer un vaste Empire musulman et de fonder l'unité islamique. « Cette utopie, dit encore M. Engelhardt, avait le caractère d'une protestation contre

(4) Cf. Sur tout ceci : Engelhardt la Turquie et le Tanzimât t. II, ch. VIII, IX, X et xi.

(2) Engelhardt, T. II. p. 98.

les institutions empruntées aux États chrétiens et elle mettait ainsi en danger les rares conquêtes obtenues au nom de la civilisation moderne.

Disons plus: elle était la négation du principe de sécularisation sans lequel la réforme ne pouvait aboutir. Le peuple turc revenait sur ses pas, en consacrant à nouveau, comme inséparable de sa souveraineté, le pouvoir spirituel du Padischah (1). »

L'accès d'amour-propre de la Porte et l'essai de « selfgovernement » qui en fut la conséquence, ne lui furent pas profitables. A la suite de cette expérience funeste, des troubles se produisirent en Bosnie et en Herzégorine, et le Congrès de Berlin consacra l'intervention des Puissances en Turquie plus étroitement que jamais (2). Mais la guerre de 1870 allait avoir des conséquences d'une bien autre portée.

(4) Engelhardt, loc. cit., p. 117

(2) « Lorsqu'après 1870 la main stimulatrice de la France se fut retirée, le vernis européen se détacha d'un seul coup; les abus, des abus sans nom et sans nombre, suivant le mot d'un de nos agents, s'étalèrent de nouveau au grand jour, si bien que dès 1875 éclatait, en Bosnie et en Herzégovine, une nouvelle insurrection, plus tenace et plus grave que toutes les précédentes. » Conférence Vandal du 2 février 1897,

p. 29.

II. O Revision du Traité de Paris.

La note du prince Gorchakoff.

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rence de Londres, 1871. La France doit y être représentée. Difficultés soulevées par M. de Bismarck pour empêcher Jules Favre de s'y rendre. La question du sauf-conduit et le bombardement de Paris. Traité du 13 mars signé au nom de la France par le duc de Broglie. Nouveau régime de la mer Noire. Le Danube.

« Je ne lis jamais la correspondance de Constantinople »>, disait M. de Bismarck. Le chancelier voulait ainsi faire entendre qu'il se désintéresserait volontiers des affaires d'Orient, si en échange la Russie ne mettait pas d'entrave à sa politique occidentale; et qu'il verrait sans jalousie les conquêtes du tsar en Turquie, pourvu qu'on ne s'opposȧt pas à des conquêtes de la Prusse sur la rive gauche du Rhin. Le Tsar y avait trop d'intérêt pour ne pas comprendre à demi-mot. Aussi bien préparait-il depuis longtemps dans le « recueillement » une revanche qui, pour être pacifique, n'en serait pas moins féconde.

Assurée de la neutralité de la Prusse, et de la bienveillance de l'Autriche (1), la Russie crut le moment venu d'obtenir la suppression des articles du traité de Paris qui

(1) Dans sa fameuse dépêche du 1er janvier 1867, M. de Beust disait qu'il n'y avait dans cette affaire qu'une « question d'amourpropre » à laquelle l'Europe ne devait pas s'arrêter.

lui portaient un grave préjudice : des deux Puissances le plus directement intéressées à s'y opposer, en effet, l'une, la France était dans l'impossibilité matérielle de le faire; l'autre, l'Angleterre avait, par son attitude indifférente dans la guerre franco-allemande, perdu tout crédit au sein du Concert européen.

Telles étaient les dispositions de l'Europe, lorsque fut connue la lettre que le prince Gorchakoff écrivait le 19/31 octobre au baron de Brunnow, ambassadeur à Londres. Dans cette lettre, le chancelier du Tsar dénonce de sa propre autorité, les articles 11, 13 et 15 du traité de Paris et la convention des Détroits. Voici quels motifs il en donne : « Tandis que la Russie désarmait, dans la mer «Noire, dit-il, la Turquie conservait le droit d'entretenir « des forces navales illimitées dans l'archipel et les détroits; <«< la France et l'Angleterre gardaient la faculté de concen«trer leurs escadres dans la Méditerranée.

«En outre, aux termes du Traité, l'entrée de la mer «Noire est formellement et à perpétuité interdite au pavillon de guerre soit des Puissances riveraines, soit «de toute autre Puissance; mais en vertu de la conven«<tion dite « des Détroits », le passage par ces détroits « n'est fermé aux pavillons de guerre qu'en temps de << paix.

Il résulte de cette contradiction que les côtes de l'Em«pire russe se trouvent exposées à toutes les agressions, << même de la part des États moins puissants, du moment << où ils disposent de forces navales auxquelles la Russie << n'aurait à opposer que quelques bâtiments de faibles << dimensions. >>

Cette première partie de la dépêche ne saurait prêter à critique. La Russie subissait, cela est certain, des condi

tions onéreuses; et l'on ne saurait s'étonner qu'elle ait profité des événements pour chercher à en obtenir la suppression. Mais le prince Gorchakoff motivait la résolution de son gouvernement sur des considérations soi-disant juridiques tout au moins contestables.

« Le traité de 1856, disait-il, a été violé notamment en ce qui concerne les Principautés danubiennes, dont l'union avait été formellement prévue et interdite; il a été violé sur un autre point encore : l'accès des détroits et de la mer Noire a été ouvert à « des escadres entières. » Cette dernière assertion était au moins hasardée (1) et la Porte n'eut pas de peine à prouver que les navires de guerre qui avaient pénétré dans la mer Noire l'avaient fait dans des circonstances de nature à excuser la tolérance dont ils avaient bénéficié.

Quant à la Roumanie, il est certain que son existence en tant qu'État un et indépendant était contraire au Traité ; mais la Russie n'ajoutait pas que cette situation avait été consacrée de l'accord unanime des signataires; ce qui la légitimait certainement. Admettons, cependant, qu'il y ait eu de véritables infractions au Traité, on ne pouvait se fonder sur ce motif pour en commettre de nouvelles; et, si l'une des Puissances Contractantes se trouvait lésée par la non-exécution de certaines dispositions, elle devait em

(1) La Turquie, il est vrai, s'était montrée assez tolérante; mais on n'avait contre elle sur ce point aucun grief sérieux. D'ailleurs, à la suite de récriminations des Puissances, la Sublime-Porte avait dit dans une circulaire du 28 septembre 1868 que « désormais il n'y aura absolument d'autre exception que pour celui des bâtiments de guerre sur lequel se trouverait un Souverain ou le chef d'un État indépendant. » Cf. (Recueil des traités de la Porte Ottomane du baron de Testa. t. V. p. 181.)

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