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Affaire de la reine d'Es

pagne.

Jurispru

dence fran

Affaire de

guerie.

raison d'actes faits par lui en sa qualité de chef suprême de son peuple; aussi rendit-elle un arrêt qui annulait la saisic et défendait de continuer les poursuites entamées contre la reine de Portugal. § 1464. Le même principe a été appliqué depuis dans des poursuites dirigécs devant le lord maire contre la reine d'Espagne. Celleci n'avait pas précisément été mise en cause en sa qualité de souveraine régnante et de chef de la nation espagnole ; mais la réclamation du demandeur s'appuyait sur un bon de trésorerie du gouvernement espagnol, qu'on alléguait avoir été émis en vertu d'un décret des Cortès, sanctionné par le régent d'Espagne au nom de la reine alors mineure.

§ 1465. La jurisprudence française a consacré les mêmes docçaise. trines. Ainsi, en 1828, le tribunal de première instance de la Seine la maison Bala, dans deux cas différents, l'affaire de la maison Balguerie de Bordeaux contre le gouvernement espagnol (1) et celle de MM. Ternaux, Gandolphe et Cie contre la république d'Haïti (2), maintenu le principe absolu de l'immunité judiciaire des souverains et des gouvernements étrangers par rapport aux tribunaux français.

1828.

Dans la première affaire, le jugement fut libellé en ces termes : << Attendu que le droit de juridiction est une émanation de la souveraineté ;

<«< Attendu que l'article 14 du Code civil ne peut être appliqué à un souverain étranger, d'abord parce qu'il ne dispose que pour les obligations contractées envers un Français par un individu étranger, et encore parce qu'on ne pourrait l'étendre aux souverains étrangers sans porter atteinte au droit qu'a tout gouvernement indépendant d'être seul juge de ses actes;

Attendu en fait que l'opposition formée par la maison Balguerie entre les mains d'Aguado a pour cause un traité passé entre S. M. Catholique et cette maison pour l'affrètement d'un certain nombre de navires destinés à transporter les troupes du gouvernement espagnol;

« Qu'un pareil traité est évidemment un acte d'administration publique qui ne peut, sous aucun rapport, être considéré comme un contrat privé;

<< Attendu, d'un autre côté, que les deniers sur lesquels l'opposition a été formée sont des deniers publics destinés au paiement de l'emprunt royal espagnol, et qui ne pourraient être saisis sans entraver la marche de ce gouvernement;

(1) Gazette des Tribunaux du 19 et du 26 avril 1828.
(2) Gazette des Tribunaux du 26 avril 1828.

« Qu'admettre une personne privée à saisir en France les fonds d'un gouvernement étranger serait violer les principes sacrés du droit des nations et s'exposer ainsi à des représailles funestes;

«< Attendu enfin que les jugements des tribunaux français étant sans autorité hors du royaume, le gouvernement espagnol ne pourrait pas être forcé de s'y soumettre et par conséquent de reconnaître la validité du paiement qui serait fait par Aguado;

<«< D'où il suit que le tribunal est incompétent.

« Fait mainlevée de l'opposition, etc. >>

§ 1466. Il existe sur cette matière un autre jugement non moins important, rendu par le même tribunal de la Seine à la date du 16 avril 1847.

Un sieur Solon avait intenté une action contre le vice-roi d'Egypte, Méhémet Ali, pour le paiement de 100,000 francs qu'il prétendait lui être dus pour ses services comme fondateur et directeur d'une école d'administration établie au Caire. Un jugement par défaut avait tout d'abord accueilli la demande du sieur Solon; mais le vice-roi y ayant formé opposition, M. Odilon Barrot, son avocat, soutint que le tribunal était incompétent, en se fondant principalement sur ce que, d'après les règles du droit des gens, un gouvernement étranger ne peut être mis en cause pour une action personnelle et à raison d'un acte essentiellement gouvernemental. Le tribunal adopta cette doctrine et rendit le jugement suivant :

<< Attendu que selon les principes du droit des gens les tribunaux français n'ont pas juridiction sur les gouvernements étrangers, à moins qu'il ne s'agisse d'unc action à l'occasion d'un immeuble possédé par eux en France comune particulier: ce qui porte attribution territoriale et exécution;

« Attendu qu'en matière de déclinatoire le juge doit avant tout consulter les termes de la demande ;

<< Attendu que l'action de Solon est une action personnelle, qu'il motive sur un prétendu engagement dont la rupture lui aurait causé un préjudice;

<«< Attendu que toutes les expressions de la demande lui donnent le caractère personnel et révèlent qu'elle est dirigée contre le gouvernement égyptien et non contre un particulier, ayant pour cause un intérêt privé, mais un acte administratif et gouvernemental intervenu entre un gouvernement et un fonctionnaire auquel il a été conféré un emploi et une mission dont le demandeur a dù peser les conséquences; qu'il serait, en outre, nécessaire de rechercher les causes de la rupture qui motive l'action ; que de pareilles

19

Affaire du

vice-roi d'É

gypte.

1847.

Affaire de l'Empereur de Russie.

1870.

Réclamation contre l'Em

triche.

1872.

appréciations ne sauraient appartenir à la juridiction française; << Attendu que la demande ne tend pas seulement à faire valider des saisies-arrêts pratiquées sur des marchandises appartenant soit au gouvernement égyptien, soit à Méhémet Ali personnellement, mais d'abord et avant tout préjudiciellement à obtenir contre ce gouvernement la somme de 100,000 francs de dommages et intérêts; «< Reçoit Méhémet Ali opposant au jugement rendu par défaut le 25 août 1846, ct, faisant droit, déclare ledit jugement non avenu*. » § 1467. En 1870, la Cour d'appel de Paris débouta de sa demande une dame Masser, qui, dans le but d'obtenir réparation d'un acte qu'elle qualifiait d'arbitraire, avait cité l'Empereur de Russie devant le tribunal de la Seine.

L'arrêt se base sur ces principes que « l'indépendance réciproque des Etats est consacrée par le droit des gens, et que prétendre soumettre à la justice le souverain d'un autre pays serait évidemment violer une souveraineté étrangère et violer en cette partie le droit des gens; que l'incompétence du tribunal était à cet égard d'ordre public et absolu... »

D

§ 1468. En 1872, la Cour d'appel de Paris rejeta la demande inpereur d'Au- tentée contre l'Empereur d'Autriche et consorts, en qualité d'héritiers de l'Empereur du Mexique, Maximilien, par un sieur Lemaître, qui réclamait le paiement d'une commande de décorations faite par le souverain décédé. La Cour décida qu'il est de principe qu'à raison de l'indépendance réciproque des États les tribunaux français n'ont pas juridiction pour juger les engagements contractés par les souverains. étrangers agissant comme chefs d'État au titre de puissance publique, et qu'une commande de décorations destinées à être distribuées à ceux qui ont reçu la collation d'un ordre pour prix de leurs services est de la part du souverain un acte de l'administration publique. § 1469. Par contre, les tribunaux français sont compétents pour d'Espagne. connaître d'une action dirigée contre un souverain ayant agi à titre de personne privée. Ainsi jugé le 3 juin 1872 par la même Cour à propos du paiement de bijoux achetés par l'ex-reine d'Espagne, non pour le compte du trésor espagnol, mais pour elle-même (1).

Affaire de l'ex-reine

1872.

Cas d'un souverain

§ 1470. Lorsqu'un souverain étranger intente directement une étranger de action devant le tribunal d'un autre pays, il n'est couvert par aucun Affaire du privilège de nature à changer les formes de procédure ou de déplacer roi d'Espagne la loi applicable à tout autre demandeur devant le même tribunal.

mandeur.

contre Hullett

et Wilder.

1853.

Gazette des Tribunaux du 17 avril 1847; Funck Brentano et Sorel, Précis, p. 51.

(1) Clunet, Journal du Droit international privé, 1874, p. 33.

C'est d'après ce principe que la Cour de Chancellerie et la Chambre des Lords en 1853 décidèrent que le roi d'Espagne, quoique agissant comme prince souverain et en sa qualité politique devant une Cour anglaise d'équité, était dans l'obligation de répondre sous serment sur la contre-demande que les défendeurs avaient introduite contre lui.

§ 1471. La même doctrine a prévalu dans la décision qui intervint sur le procès intenté au nom du gouvernement colombien contre la maison Rothschild de Londres en 1826. Dans l'espèce ce n'était pas, comme on voit, un souverain en personne qui attaquait judiciairement de simples particuliers, mais un gouvernement tout entier, un gouvernement républicain, agissant par l'entremise du ministre plénipotentiaire qu'il avait accrédité près Sa Majesté Britannique. Il s'agissait d'un règlement de comptes pour fourniture de munitions de guerre, d'armes, etc., et d'un emprunt contracté en Angleterre par les agents du gouvernement de Bogota en vertu d'un décret du Sénat et de la Chambre des représentants de Colombie. Dans le développement de la procédure, il fut établi que la demande avait été introduite par le gouvernement colombien, titre sous lequel avait été également désignée la partie au nom de laquelle l'emprunt avait été émis et les fournitures délivrées; les défendeurs, MM. de Rothschild, opposèrent une exception préjudicielle en sommant le demandeur de définir ses qualités. L'agent colombien n'ayant pu le faire, la Cour admit l'exception d'après le principe que le demandeur doit faire connaître nettement qui il est, afin que le défendeur puisse au besoin répondre par une contredemande.

§ 1472. En 1839, dans une action intentée par la maison Rothschild frères contre la reine dona Maria, S. M. Portugaise étant devenue demanderesse à titre d'opposante, la Cour de l'Échiquier rejeta l'opposition en se fondant sur ce que S. M. Très-Fidèle, en se portant de son plein gré demanderesse devant une cour anglaise, était devenue, pour toute matière se rattachant au procès, justiciable de la cour d'équité, et pouvait par conséquent être contrainte à répondre à la demande primitivement introduite devant la Cour de l'Échiquier par les personnes qu'elle prétendait actionner comme défendeurs par la voie reconventionnelle de l'opposition.

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Affaire de

§ 1473. En 1837, dans une action engagée à la requête de l'Eml'Empereur du pereur du Brésil contre Robinson et autres, la Cour du banc de la Brésil. Reine décida que l'Empereur dom Pedro, ayant fait une opération commerciale qui le rendait justiciable des tribunaux, bien que ré

1837.

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sidant à l'étranger, ne pouvait se soustraire à l'obligation de fournir caution pour les frais du procès, obligation imposée à toute autre personne agissant comme demandeur. La Cour soutint que cette décision était conforme au principe énoncé dans un jugement rendu en 1816 par Lord Ellenborough, qui avait reconnu qu'un ambassadeur résidant dans le pays en sa qualité officielle n'était dispensé de fournir caution que parce qu'il ne pouvait être supposé avoir l'intention de quitter le pays ou de se soustraire à la juridiction territoriale.

§ 1474. Si le souverain étranger est personnellement l'objet d'un libelle calomnieux ou d'une diffamation, il a droit d'exiger pardevant les tribunaux du pays du libelliste ou du diffamateur la même réparation que celle à laquelle les nationaux peuvent avoir droit.

A défaut de satisfaction extrajudiciaire, comme aussi dans le cas où sa qualité d'étranger lui ferait refuser une légitime réparation, il aurait un juste motif de plainte; mais il ne lui serait évidemment pas permis de formuler la moindre récrimination, si le procès ayant été régulièrement engagé et poursuivi dans les formes voulues par les lois ordinaires du pays, le jugement final ne répondait pas pleinement à son attente *.

§ 1475. Lorsqu'un différend s'élève entre deux souverains au sujet de la possession d'une propriété privée, certains publicistes sont d'avis que le différend échappe à l'appréciation des tribunaux respectifs, parce que les saisies ou les mesures d'exécution décrétées par l'un d'eux pourraient jusqu'à un certain point perdre le caractère de procédures civiles ordinaires, pour revêtir celui d'actes de représailles ou d'agression.

Il nous est difficile de partager cette manière de voir, surtout lorsque l'objet du litige est matériellement placé sous la juridiction de l'un des deux souverains. En pareille matière, tout dépend de la situation inamovible faite au juge, de son indépendance absolue à l'égard du pouvoir exécutif, des garanties de liberté et d'impartialité qu'offrent les formes de procédure, en un mot du respect absolu qui entoure dans le pays l'administration de la justice. Lorsque toutes ces conditions se trouvent remplies, nous n'en

* Phillimore, Com., vol. II, §§ 103, 109-113 (a), app., pp. 542-621; Fœlix, t. I, § 212; Klüber, Droit, § 49; Martens, Précis, § 172; Vergé, Précis de Martens, t. II, pp. 11-13; Demangeat, Felix, t. I, pp. 418-421; Revue judiciaire, 1831, t. I, p. 364; Carré, Lois de la procédure, art. 558; Quæst., 1923 bis ; Britz, De la compétence, p. 33, no 12.

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