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été changé dans l'armée prussienne, ni quant à ses règlements ni quant à l'organisation de ses régiments; en sorte que la Prusse maintient ses bataillons à quatre compagnies et ses régiments de cavalerie à quatre escadrons: c'est la formation qu'elle regarde à juste titre comme la meilleure.

L'armée prussienne a l'inconvénient que ses généraux, et même beaucoup de ses officiers supérieurs, sont trop vieux et n'inspirent pas grande confiance à l'armée, d'autant plus qu'ils n'ont pas fait la guerre. Elle a encore un système très-nuisible à l'esprit militaire, celui de ne jamais changer de garnison. Mais, en revanche, il règne dans l'armée une discipline parfaite, et nulle part les instructions théoriques et pratiques ne se font avec plus d'ordre, d'activité et avec une gradation mieux combinée.

J'ai pu voir les canons rayés, dont on a formé les batteries dans la proportion d'un tiers, les deux autres tiers étant composés de batteries de douze et d'obusiers. Ces canons rayés sont en acier et se chargent par la culasse, selon le système Warendorff; on en dit beaucoup de bien.

En revenant de Perlin, j'ai jugé à propos de prendre la rive gauche du Rhin pour donner un coup d'œil aux forteresses de Cologne, de Coblentz et de Mayence, que l'on a considérablement augmentées, au moyen surtout de forts détachés. Toutes trois sont fort importantes par le développement qu'on leur a donné, bien disposées et approvisionnées. J'ai également examiné dans cette course trois ponts sur le Rhin, tous construits d'après le système américain: l'un à Cologne, l'autre à Strasbourg, et le troisième à Mayence. Celui de Cologne sert en même temps au chemin de fer et à la circulation des piétons et des voitures; il est assez élevé pour que les bâtiments passent au-dessous, au lieu que celui de Strasbourg, à mon avis, a le grand inconvénient de ne servir qu'au chemin de fer seulement, et celui plus grand encore d'avoir des portières qui s'ouvrent pour livrer passage aux bâtiments: ce qui exige un double mécanisme selon moi trop compliqué. Le pont de Cologne est en plein exercice; celui de Strasbourg est achevé, mais non encore ouvert au public; celui de Mayence est à peine commencé, et j'ignore sur quels plans. J'ai cru convenable de parler de ces ponts, et d'insister surtout sur la différence qui existe entre celui de Cologne et celui de Strasbourg, puisqu'il s'agit de faire un pont à Plaisance, et probablement d'en établir d'autres dans la suite sur le Pô; et il serait fort regrettable qu'en considération d'une économie de quelques centaines de mille francs on reculât devant la construction d'un pout de nature à satisfaire à la fois aux besoins civils et militaires, surtout alors qu'il s'agit d'une forteresse. Notre consul à Cologne m'a assuré

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que pour faire connaître le pont de Cologne, qui est, je crois, le plus complet, il a envoyé au ministre des travaux publics, à Turin, les dessins et les détails de la construction.

Je ne saurais terminer ce rapport sans mentionner à Votre Excellence l'accueil parfait que j'ai reçu à Francfort de M. de Barral et à Berlin de M. de Launay; j'ose même rendre à ces deux diplomates le témoignage qu'ils représentent très-dignement le gouvernement du Roi dans ces deux villes importantes.

Signé LA MARMORA.

No 6

LE CHEVALIER NIGRA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Paris, le 19 novembre 1864.

J'appelle, autant que je puis le dire, sur ce qui suit, toute votre attention.

D'après un entretien que j'ai eu avec M. Drouyn de Lhuys et suivant d'autres informations de sources diverses, mais également dignes de foi, il résulte à mes yeux :

Que l'Autriche ne serait pas éloignée de reconnaitre le royaume d'Italie, et de nouer avec nous des relations diplomatiques régulières;

Que, dans ce dessein, elle ne nous demanderait pas de renoncer à la Vénétie, mais qu'elle se contenterait d'avoir l'assurance que l'Italie accomplira loyalement les devoirs internationaux envers l'empire d'Autriche;

Que l'Autriche ne serait pas éloignée de conclure avec nous des traités de commerce;

Que l'Autriche désirerait que les négociations pour la reconnaissance de l'Italie passassent par les mains de la France et avec l'aide des bons offices de cette puissance;

Que la tendance de la politique autrichienne et de l'opinion publique, à Vienne, se prononce dans le sens d'un rapprochement avec la France, et, par conséquent, avec nous;

Que l'Espagne pourrait être réduite à suivre l'exemple de l'Autriche et à reconnaître le royaume d'Italie;

Que l'Espagne se contenterait que nous laissassions au Souve

ARCH. DIPL. 1873. - IV.

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rain-Pontife un pouvoir très-limité, c'est-à-dire plus limité que les possessions actuelles, quoique réellement indépendant.

Tout cela ne représente encore que des intentions et des dispositions d'esprit. Ces ouvertures n'ont, jusqu'à présent, aucun caractère officiel; on ne peut encore les considérer comme des propositions. Cependant, même sous cette forme, elles ont un tel degré de probabilité et de gravité qu'elles méritent d'être examinées et posées par le gouvernement

du Roi.

C'est à vous qu'il appartient, monsieur le général, de réfléchir à tout cela, et de voir si l'heure n'est pas venue d'entrer dans une voie nouvelle ayant bien ses embarras, mais qui possède l'avantage d'être ouverte et de s'avancer vers un but très-clair, bien défini, de toute évidence, d'une issue certaine, autant du moins que les calculs humains peuvent présenter de sécurité.

J'ajouterai que ce plan ne peut être exécuté, à mon jugement, que par le ministre actuel. Il a l'autorité nécessaire pour le faire admettre par l'opinion publique du pays.

Le plan, dont il est question ci-dessus, doit, pour avoir une raison d'exister, être suivi d'un fait intérieur grave. Je sais que je touche un point délicat pour tous et spécialement pour Votre Excellence. Mais je sais que je peux et dois tout vous dire. Vous tiendrez de mon opinion tel compte que vous jugerez utile. Le fait dont je parle est le désarmement. Je crois que si nous entrons dans une voie de rapprochement avec l'Autriche (rapprochement qui peut amener les traités dont vous me parlez dans votre lettre), il n'y aura pas besoin de songer à faire la guerre. Ce serait alors une illusion que de penser à une conflagration européenne. Elle n'aura pas lieu, autant qu'il est possible de faire des conjectures. L'idée de la guerre écartée, et en adoptant le système de la reconnaissance de la part de l'Autriche, et celui de mettre, à tout prix, de l'ordre dans nos finances et dans l'administration, l'idée du désarmement se présente d'elle-même. Je n'ajoute rien sur un sujet sur lequel Votre Excellence est beaucoup plus compétente que moi. Il suffit que je l'aie indiqué. Si vous le jugez à propos, vous me communiquerez votre avis, afin qu'à l'occasion j'aie une direction qui me guide, et ij est probable qu'il portera sur ce dernier point. Quant à ce que M. Drouyn de Lhuys m'a dit et ce que j'ai pu apprendre d'un autre côté, cela n'a trait qu'à la reconnaissance de l'Italie par l'Autriche et par l'Espagne, et nullement à la question du désarmement, sur laquelle personne ne m'a dit le moindre mot.

Signé: NIGRA.

No 7

LE GÉNÉRAL DE LA MARMORA AU CHEVALIER NIGRA, A PARIS

Turin, le 22 novembre 1861.

Les questions sur lesquelles Votre Excellence appelle toute mon attention, dans sa lettre du 19, sont assez graves. Tellement graves qu'avant d'en référer à mes collègues, j'ai l'intention de bien réfléchir moi-même. Personne ne peut douter que la reconnaissance du royaume d'Italie par l'Autriche ne soit un grand fait, en tant qu'il porterait un coup mortel à tous les Princes dépossédés qui ne peuvent plus espérer que dans les secours de l'Autriche.

A mon avis, cette reconnaissance suffirait pour classer l'Italie au nombre des grandes puissances européennes.

Ces avantages et d'autres sont incontestables.

Mais, si nous ne trouvons pas un moyen de laisser au moins comprendre que la reconnaissance de l'Autriche nous peut amener à la cession de la Vénétie, je ne sais comment on pourra faire accepter.

Signé LA MARMORA.

No 8

LE CHEVALIER NIGRA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Paris, le 26 novembre 1864.

Selon M. Drouyn de Lhuys (et selon moi aussi), l'Autriche se refusera à toute proposition de cession de la Vénétie contre une compensation en argent. M. Drouyn de Lhuys n'admet pas le moindre doute pour le moment, mais il croit qu'à l'avenir on pourra vaincre la répugnance de l'Autriche si, au lieu d'argent, on lui propose un échange de territoire.

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No 9

LE GÉNÉRAL DE LA MARMORA AU CHEVALIER NIGRA, A PARIS

Florence, le 4 août 1865.

Après le départ de Votre Excellence de Florence, le ministre de Prusse est venu deux fois chez moi. Il ne m'a pas lu de notes diplomatiques, je ne crois pas qu'il en eût reçu; mais, avec des télégrammes à la main de son premier ministre Bismarck, il m'a demandé la première fois, en insistant davantage la seconde fois, de déclarer quelle serait l'attitude de l'Italie dans le cas probable d'une guerre entre la Prusse et l'Autriche.

Comme Son Excellence peut se l'imaginer, j'ai reçu ces communications avec la plus grande réserve, et, avant de montrer la satisfaction que me faisait éprouver intérieurement un événement aussi favorable à nos destinées, j'ai soulevé des doutes et des difficultés, assurément non dénuées de fondement, mais principalement dans le but de gagner du temps.

Si le gouvernement prussien (ai-je dit au ministre d'Usedom) a sérieusement l'intention de faire la guerre à l'Autriche, qu'elle nous fasse une proposition sérieuse et formelle, et nous l'examinerons; mais s'il s'agit seulement d'une déclaration de notre part pour exercer une pression diplomatique en faveur de la Prusse, cela ne nous convient pas.

Comme, en réponse à mes observations précédentes, le ministre d'Usedom en est venu, lors de sa seconde visite, à me répéter que la Prusse était décidée à faire la guerre à l'Autriche, je lui ai déclaré positivement que nous ne pouvions prendre d'engagement sans connaître quelles seront les intentions de l'empereur des Français, et je n'ai pas hésité à lui suggérer que le gouvernement prussien en fit

autant.

« Vous comprenez, ai-je répliqué à d'Usedom, de quelle importance il est pour nous, et même pour vous, de savoir si la France sera favorable ou contraire à cette guerre. »

J'ai répété à plusieurs reprises au ministre prussien que nous devions mettre beaucoup de prudence à nous engager dans une nouvelle guerre avec l'Autriche, d'autant plus que nous sommes persuadés que ce sera une guerre à outrance. L'Autriche cherchera naturellement à détruire l'Italie, et nous, nous ne pourrous remettre l'épée au

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