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verain. La mission donnée à un étranger près une tierce puissance, bien qu'elle paraisse au premier abord inattaquable, devrait elle-même être évitée comme pouvant occasionner des conflits; du moins sa patrie pourraitelle lui interdire de l'accepter, ou considérer son acceptation comme une renonciation à sa nationalité.

On comprend d'ailleurs que cette exterritorialité judiciaire du ministre au civil ne s'applique qu'en défendant. Il ne peut pas être actionné; mais s'il est demandeur, il est bien forcé d'introduire son action devant le juge naturel du défendeur, qui garde ses droits « actor sequitur forum rei. »

En conséquence, les demandes reconventionnelles du défendeur, quand la procédure les admet en raison de leur connexité avec la demande principale, pourront également être formées devant le tribunal étranger contre le ministre qui s'est constitué demandeur; elles ne sont en effet qu'une suite légale de sa demande ou même une défense à ses fins, auxquelles tout demandeur doit s'attendre.

L'Autriche possède sous le nom de tribunal « du maréchal de la cour (Oberhofmarschallgericht) une juridiction spéciale et privilégiée pour les membres de la famille régnante autres que le souverain, pour certaines hautes personnalités dénommées (prince Wasa, etc.), enfin pour les représentants diplomatiques de l'étranger quand ils sont défendeurs. Absolument, cette juridiction ne serait pas obligatoire pour ces derniers; mais comme son existence et ses attributions sont anciennes, et que tous les états l'ont depuis long

temps reconnue à tour de rôle, les diplomates accrédités près la cour d'Autriche l'acceptent sans exception de leur plein gré; ce qui est d'ailleurs à leur avantage, tant en raison de la procédure plus rapide que de l'autorité de ce tribunal.

Quelques auteurs ont soutenu que le ministre doit se faire autoriser par son souverain, même pour agir en demandant. Nous ne saurions en principe approuver cette rigueur; mais le souverain pourrait sans doute l'imposer à son ministre, et ce dernier fera toujours bien de lui en référer préalablement, si ses instructions sont muettes sur ce point.

Le ministre ne peut d'ailleurs être arrêté ou emprisonné pour dettes, ni ses meubles saisis, sauf ceux qu'il posséderait en une toute autre qualité, comme négociant ou fabricant par exemple. Mais un négoce ou une industrie sont encore moins compatibles avec sa situation qu'avec celle des consuls de carrière; ils compromettent la dignité de l'état représenté et provoquent des conflits.

Les immeubles du ministre sont par contre naturellement soumis au statut réel du lieu, et le ministre est à leur égard dans la situation de tout autre forain. Mais son hôtel, lorsqu'il appartient à l'état qu'il représente, comme par exemple le Palazzo

di Venezia » de l'ambassadeur d'Autriche à Rome, est exterritorial sous tous rapports, même quant aux logements militaires.

Le ministre est également exempt de cette charge quand il n'est que locataire de son hôtel, comme c'est

le cas ordinaire; mais le propriétaire de l'immeuble est alors tenu de s'en racheter (du relutum), ou de loger ailleurs les militaires qu'il doit. Les ministres ont en outre le droit de mettre les armes de leur souverain audessus de leur porte extérieure; mais les consuls font plus souvent usage de cette faculté, afin surtout que leurs compatriotes venus de loin, marins ou autres, puissent plus facilement trouver leurs demeures.

Le ministre est enfin exempt de la juridiction dite gracieuse (non contentieuse ou volontaire). C'est ainsi qu'il peut, comme toute personne autre, s'adresser à un notaire du pays; mais il n'y est pas tenu, alors même que le concours du juge ou du notaire serait obligatoire d'après la loi du pays pour certains actes de juridiction volontaire ou noble (adeligen), suivant l'expression usitée en Autriche.

Le ministre n'a juridiction sur sa suite qu'autant que son souverain lalui a conférée, ce qui n'est guère l'usage de nos jours que pour certains actes de juridiction volontaire. Il peut ainsi recevoir le testament des personnes de sa suite ou même d'autres nationaux, en se conformant à la loi de son pays. Que si les tribunaux étrangers s'adressent à lui pour avoir la déposition ou le témoignage de quelqu'un de sa suite, il peut à son choix l'autoriser à comparaître, ou en faire recevoir la déposition par sa chancellerie et la transmettre au juge du lieu par l'intermédiaire du ministre des affaires étrangères.

Ce que nous avons dit du ministre s'applique également à sa famille et à sa suite. Toutefois ses domes

tiques inférieurs qui seraient sujets de l'état, demeurent soumis à sa juridiction civile comme ils l'étaient auparavant.

§ 62.

- De l'exemption de la juridiction pénale.

Bien qu'exempt de la juridiction pénale étrangère, le ministre n'est pas plus autorisé que personne au monde à commettre impunément des crimes ou des délits contre les sujets de l'état étranger ou contre ce dernier lui-même. Son exemption est simplement une exigence du droit international; elle sauvegarde son indépendance; elle empêche qu'on ne puisse lui imputer des délits vrais ou supposés afin de l'ébranler, de le contraindre, de s'emparer de ses papiers. Montesquieu dit élégamment dans son Esprit des lois (II, 1, 26): « Les ambassadeurs sont la parole vivante du prince qui les envoie, et cette parole doit être libre. Ils peuvent souvent déplaire on pourrait leur imputer des crimes s'ils pouvaient être punis pour des crimes. »

Mais cet intérêt doit naturellement se concilier avec celui de l'état étranger qui les reçoit. Leur exemption n'est nullement une prime d'impunité, une carte blanche du crime. Si le ministre se rend simplement coupable de quelque légère infraction, sans scandale public, l'on feindra de ne s'en être pas aperçu, ou bien l'on se contentera de lui faire donner un avertissement tout confidentiel, ou même, suivant l'importance du cas, l'on pourra s'en plaindre auprès de son souverain. Mais

qu'il s'agisse d'un délit grave ou d'un crime contre un particulier, ordre lui sera aussitôt intimé de quitter le pays, et plainte en forme en sera adressée à son maître, qui ne saurait refuser châtiment et justice sans faire injure au pays lésé dans l'un des siens. Si même le ministre s'oubliait au point de conspirer contre le gouvernement étranger, s'il commettait, au su ou à l'insu de son maître, un véritable crime d'état, toutes mesures de sûreté pourraient être prises contre lui, et sa mort même n'être que l'effet d'une légitime défense du pays offensé. Toutefois le pouvoir étranger qui s'est emparé de sa personne n'aurait pas le droit de le juger et de l'exécuter. Qu'il le mette dans l'impossibilité de nuire, par la force au besoin, en évitant d'aller plus loin, car son châtiment appartient à son souverain, qui en le refusant ou le négligeant, se rendrait solidaire de l'attentat. Que s'ils abusent de leur être représentatif, continue Montesquieu (l. c.), on le fait cesser en les renvoyant chez eux : on peut même les accuser devant leurs maîtres, qui devient par là leur juge ou leur complice. » Et s'il devient leur complice, le conflit ne se plaidera plus en la forme d'un procès ordinaire, mais en la forme internationale de la guerre, alors du moins que l'état outragé a pour lui la puissance au même degré que le bon droit.

« Les causes célèbres du droit des gens » de Martens (2 éd., Leipsig, 1878) nous offrent des exemples connus en ce genre; ainsi, la conspiration du ministre espagnol Bedmar contre Venise (1618), et du ministre également espagnol Cellamare contre la France (1718). On trouve

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