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leur caractère est mixte, à la fois international et public. Mais les lois générales de ces systèmes ne s'adressent également qu'à leurs membres plus ou moins autonomes, et leur ensemble ou l'état collectif se présente seul comme un sujet du droit des gens. Ce n'est que comme tout collectif que la Suisse et les États-Unis envoient ou reçoivent des représentants diplomatiques. S'il en était autrement pour la Suisse d'autrefois, si jusqu'au commencement de ce siècle chacun de ses treize cantons se faisait représenter à la conclusion des traités publics, c'est qu'elle n'était alors qu'une confédération d'états, non un état fédéral.

La doctrine, en s'appliquant à la coutume et à la loi, forme une nouvelle source de droit qui n'est autre que la science du droit. La science éclaire et précise les coutumes, souvent vagues, qui naissent directement des faits; et de même, elle interprète les lois, les ordonne et les ramène à leurs principes.

Nulle part cette source n'est aussi productrice que dans le domaine international, en présence d'états indépendants les uns des autres, qui ne reconnaissent ni juge ni législateur communs. La coutume, et la science, qui l'ennoblit et l'éclaire, remplacent, en effet, un codex juris gentium, un code international qui manque et qui paraît irréalisable. Nos grands maîtres du droit des gens, depuis Grotius jusqu'à nos jours, sont plus que de simples autorités théoriques. Expression de la plus haute conception du droit de leur temps, leurs enseignements ont pénétré dans les traités et les usages, dans la pratique des peuples. Cette puissance morale de

la science du droit des gens et de ses enseignements, leur propagation et leur intime union avec la pratique, sont doublement salutaires dans un domaine où la supériorité physique et l'arbitraire prétendent trop souvent régner. L'usurpateur audacieux qui s'efforce de justifier ses actes violents en invoquant les maîtres de la science, paie lui-même son tribut au droit des gens comme l'hypocrite à la vertu.

§3.

Méthodes du droit des gens.

La science peut suivre ici une triple voie faire l'histoire du droit des gens; exposer les principes de ce droit à une époque déterminée, ou en faire la dogmatique; enfin, en montrer la philosophie.

La matière du droit des gens, comme de tout autre droit, se manifeste à nous dans les progrès de l'histoire ; et l'histoire du droit des gens est également interne ou externe, suivant qu'elle raconte les événements historiques qui ont exercé sur son développement une action directrice, ou qu'elle expose les progrès de ses principes et de ses doctrines.

La dogmatique ou le système du droit des gens positif a pour objet de montrer, à une époque donnée, chez un ou plusieurs peuples et dans une liaison naturelle, les principes du droit des gens dont l'histoire a déroulé sous nos yeux les progrès successifs.

Enfin, la philosophie du droit des gens s'élève audessus des progrès et des stades particuliers ou passagers

pour les ramener aux principes suprêmes. Faisant abstraction des anomalies et des accidents d'une époque, elle dégage les grandes règles dans toute leur pureté, pour en mettre en évidence les plus hautes conceptions. Sans doute, l'histoire elle-même du droit des gens, lorsqu'elle ne veut pas dégénérer en une sèche énumération de dates mais être pragmatique et montrer la liaison des effets et des causes, ne saurait se dispenser d'une vue philosophique ou d'un retour aux principes généraux; et inversement, une dogmatique qui bannirait toute philosophie, ne serait qu'un mécanique rapprochement de formules. Mais n'oublions pas que la philosophie du droit des gens emprunte elle-même ses matériaux à l'histoire, à la vie réelle des peuples. La différence, c'est qu'elle s'efforce essentiellement d'en dégager les principes, de les ordonner et de les purifier, d'aboutir à un tout scientifique et vivant, comme au résultat suprême de son étude des siècles écoulés. Chaque époque a d'ailleurs son système philosophique qui se reflète, comme son type suprême, dans son droit, et surtout dans son droit des gens. A travers les générations qui s'écoulent, l'esprit humain travaille sans relâche au grand œuvre de l'intelligence du monde moral et physique.

Et cependant pas plus qu'aucune époque, aucun système de philosophie ne saurait se prétendre en possession de la vérité tout entière, et par suite la critique des principes suprêmes ne saurait aspirer davantage à constituer un système du droit des gens achevé pour jamais.

Le but du présent traité est de donner un exposé systématique et rapide du droit des gens moderne des États civilisés, et d'en montrer les principes dirigeants, eu égard aux besoins de la pratique et aux exigences de la science.

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Aperçu de l'histoire du droit des gens et de son élaboration scientifique.

Le droit des gens au sens moderne était inconnu des peuples antiques par l'effet de leur exclusivisme politique et religieux. Ce n'est pas qu'on ne rencontre des alliances ou des traités entre nombre d'entre eux, surtout entre tribus congénères, comme entre les Hellènes, par exemple. Mais l'idée d'une vaste communauté embrassant tous les États ne pouvait trouver de place en présence de l'isolement dont chaque État se faisait un principe, ou des tentatives de domination universelle telles que celles des Perses ou des Macédoniens. Isolement ou guerre jusqu'à l'anéantissement de l'existence politique propre de l'adversaire, telle était la règle; les relations amicales n'étaient que l'exception. Les prisonniers de guerre devenaient de plein droit des esclaves.

Lorsque ses relations avec ses voisins se furent multipliées, et que le commerce, qu'elle abandonnait surtout aux étrangers, demanda une réglementation distincte du droit civil rigoureux applicable aux seuls citoyens romains, Rome institua une magistrature spéciale dans le prætor peregrinus, et le droit qui régla petit à petit ces rapports prit le nom de jus gentium. C'est à tort qu'on l'a

souvent confondu avec le droit des gens moderne, car il ne formait qu'une sorte de droit privé commun, dont les règles, fondées sur les besoins de l'homme ou sur la nature des choses, ne s'appliquaient qu'aux rapports de ressortissants d'États différents, et non aux rapports des États entre eux. Le droit fécial cependant se rapproche déjà mieux dans une étroite mesure du moderne droit des gens. Les féciaux étaient, en effet, un collège de prêtres établi par Numa Pompilius et qui intervenaient dans les déclarations de guerre et la conclusion de la paix. Leur droit, ou l'ensemble des actes et formules religieux qu'il comprenait, loin d'épuiser la notion du droit des gens moderne, ne formait ainsi qu'une portion de notre droit de la guerre.

Mais les faibles éléments de ce droit des gens des Romains devinrent eux-mêmes inapplicables quand Rome embrassa tout l'ancien monde connu, et disparurent avec la chute de l'Empire et les grandes migrations qui inondèrent l'Occident.

Les Germains fondent alors sur les débris de Rome de nouveaux royaumes, qui s'absorbent petit à petit à mesure que les conquérants deviennent plus sédentaires dans le vaste Empire des Francs de Charlemagne. Mais cette puissance s'écroule à son tour sous ses faibles successeurs, et une grossière anarchie règne pendant des siècles, jusqu'au jour où les germes d'un nouveau droit des gens réapparaissent lentement, sous l'influence de la suprématie spirituelle du pape, et par l'effet de la religion chrétienne commune, des liens féodaux et de la chevalerie. Si le moyen âge nous avait présenté le spec

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