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Aussi en 1857, lors de leurs premières conférences à Vienne, les États co-possesseurs du Danube crurent-ils devoir rectifier sous ce rapport les arranments du congrès, s'attribuant le droit qui leur avait été dénié. Mais, et c'est à cet égard que leur revendication touche à la question générale traitée dans ces pages, ils proclamèrent hautement ce que j'appellerai le principe Clancarty, en affectant le produit de leur tarif futur au seul et unique remboursement des capitaux employés à l'amélioration fluviale (1).

Cette initiative des États danubiens, d'abord critiquée dans sa forme, fut approuvée quant au fond aux conférences de Londres de 1871 et les mêmes puissances qui avaient participé au congrès de Paris, autorisèrent l'Autriche-Hongrie et la Turquie à établir éventuellement un tarif de navigation sur le haut Danube, pour s'indemniser des frais qu'entraînerait la correction de leur section commune aux Portes de Fer, dernière résolution conventionnelle qui permet de conclure que la règle de la contre prestation en matière d'octroi fluvial a définitivement prévalu dans le droit public.

§ 3.

Le tarif étant approximativement calculé sur le budget technique et sur les frais du personnel et des établissements dépendant du service de la na

(1) Voir art. 20, 21 de l'acte danubien de 1857.

vigation, c'est-à-dire, sur des dépenses variables, il s'ensuit qu'il devrait être l'objet d'une révision périodique. Quant à sa quotité maximum, il va sans dire que la limite générale adoptée en 1815 pour mettre un frein à d'anciens abus, ne saurait plus être d'une application pratique et que le produit de l'octroi étant désormais étranger aux revenus du trésor, les États riverains ne peuvent avoir en vue que l'intérêt du commerce et de la navigation. D'ailleurs, de nos jours, toute recette, comme toute dépense de l'État, est soumise au contrôle des pouvoirs publics, garantie qui n'existait pas autrefois et qui pourrait être rendue plus efficace si, suivant l'usage introduit par la Commission européenne du Danube, l'on publiait officiellement un bilan sommaire des opérations annuelles des différents bureaux de perception, ainsi qu'un état indiquant la répartition et l'emploi des produits du tarif fluvial.

§ 4.

La communauté des dépenses techniques et administratives trouve son complément naturel, sinon nécessaire, dans la communauté des recettes et par conséquent dans l'institution d'un service de perception opérant au nom et pour le compte de l'association riveraine.

Cette organisation, comme je l'ai déjà dit, existait sur le Rhin en 1804 et elle n'a produit que de bons effets. L'on peut représenter toutefois qu'à

cette époque le condominium rhénan se réduisait à deux membres qui, possédant à peu près la même étendue de rives, disposaient chacun d'un nombre égal de bureaux d'octroi, ce qui simplifiait singulièrement l'administration fiscale de la navigation. Il ya en outre à considérer que le règlement des intérêts financiers rencontre maintes difficultés pratiques là où le cours d'eau est partagé entre de nombreuses souverainetés d'inégale importance; que si en général un gouvernement hésite à déléguer une partie de ses attributions à une autorité étrangère, il est surtout jaloux de ses prérogatives en matière d'impôts et que d'ailleurs la centralisation peut n'être point applicable sur tous les fleuves, comme par exemple sur ceux où le tarif épargne certaines régions et a une affectation toute locale.

Aussi conviendrait-il de s'en remettre aux États riverains du soin de prononcer librement, selon les cas, sur le principe d'ailleurs recommandable de la perception commune (1).

$5.

S'il est un point qui ait été mis en relief dans l'œuvre spéciale du comité de navigation de 1815, c'est sans contredit celui qui concerne la nature des rapports nouveaux qui devaient unir les États coriverains; ceux-ci étaient appelés à se constituer

(1) La perception commune existait sur le Pô. Art. 13 de la convention de 1849.

en communauté et à régler ensemble, ainsi que le prescrit l'article 108 du traité général, toutes les questions intéressant l'usage de leur voie d'eau intérieure.

C'est sur cette idée d'association et de concours mutuel permanent que repose toute l'économie de la convention rhénane de 1804, ainsi que celle du projet français soumis au comité dès sa première conférence et adopté dans son ensemble par le congrès (1). Or la communauté entre puissances souveraines a nécessairement pour base l'égalité.

Quoique cette dernière condition ait été plus spécialement stipulée pour le régime fiscal, il est arrivé que plusieurs gouvernements ont procédé en matière de tarif, comme si l'article 111 qui vient d'être discuté, avait été dicté par des vues contraires.

En 1836 un Ordre du cabinet de Berlin introduisit sur la partie prussienne du Rhin diverses réductions et franchises qui furent successivement étendues à tous les pavillons rhénans, sauf au pavillon français. Celui-ci se trouva évincé de fait de la région prusso-hollandaise et l'on put dire avec quelque apparence de raison que, réduit à faire décharger ses marchandises et à les livrer à un bâtiment privilégié, lors de son arrivée à la frontière prussienne, l'expéditeur strasbourgeois subissait indirectement la dure loi des relâches forcées.

(1) Voir article 2 de la Convention de 1804 et art. 1 du projet du duc de Dalberg sur la navigation du Rhin.

Cette sorte d'ostracisme ne portait pas seulement atteinte au principe fondamental du condominium prévu et réglé par le congrès de Vienne; il avait toute la portée d'une infraction consciente à une clause particulière de la convention rhénane qui avait précisément pour but de développer ce principe et de l'adapter au système de l'octroi fluvial. L'article 32 du règlement du 31 mars 1831 portait en effet qu'il serait loisible à chaque État riverain de réduire cet octroi, soit pour certains objets, mais par mesure générale et sans distinction de personnes, soit pour certains bâtiments appartenant à ses propres sujets, disposition dont le commissaire de Bade avait précisé et quelque peu restreint le sens par cette déclaration protocollaire : « Il sera libre à chaque État riverain de consentir sur sa part dans l'octroi du Rhin une diminution des droits de navigation au profit des marchandises qui seront transportées dans ses ports ou qui en seront expédiées; mais dans ce cas, il ne pourra pas être fait de distinction entre les bateliers nationaux et les bateliers étrangers, de même qu'entre les différents ports étrangers d'où les marchandises proviennent ou auxquels elles sont destinées (1). »

La Prusse n'en persista pas moins dans sa thèse des pavillons privilégiés, alléguant notamment que l'isolement d'un État riverain devait l'amener à user de réciprocité à l'égard des autres et à acquérir

(1) Protocole XXIV de 1832.

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