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cable. Or les étrangers ne peuvent se prévaloir de cette clause.

Il convient d'ailleurs de noter que dans un mémoire justificatif de son projet, le gouvernement prussien insiste sur cette considération que l'abolition des droits de navigation sur le Rhin est le résultat de traités particuliers conclus à différentes époques entre les gouvernements du Zollverein, la Hollande et la France, ce qui veut dire en bonne logique que les étrangers ne pourront profiter de cette abolition qu'au moyen de conventions spéciales analogues.

En résumé l'acte du Rhin de 1868, tout en manquant de clarté, malgré l'assertion contraire de ses signataires allemands (1), tend à mettre en pratique, en ce qui concerne les non riverains, le principe suivant inscrit dans le deuxième protocole de révision du 12 octobre de la même année : « la

(1) La convention revisée du Rhin semble avoir été rédigée d'après le même procédé diplomatique que l'article 109 du traité de 1815 et que les conventions allemandes qui s'y rapportent, c'est-à-dire qu'elle témoigne de la part de ses auteurs d'une sorte de répugnance instinctive pour tout ce qui est clairement défini.

En 1819 l'Autriche, pour dissiper tout malentendu sur le sens de la formule Humboldt, proposa de lui substituer une déclaration plus franche qui indiquât sans détours « que le droit à la navigation sur l'Elbe ne s'étendait pas aux sujets des États non riverains. » La Prusse, naturellement d'accord sur le fond, suggéra et obtint que le principe de l'exclusion des étrangers ne serait point inscrit, comme le voulait l'Autriche, en tête du règlement de l'Elbe, dans son article 2, mais qu'on le ferait indirectement et incidemment résulter de dispositions secondaires relatives à la concession des patentes de bateliers.

commission syndicale du fleuve n'a pas le droit d'accorder aux étrangers des avantages qui exigeraient la réciprocité. >>

Les États rhénans n'auraient-ils pas été plus sincères si, s'abstenant de proclamer une liberté qui, dans leur intention, n'impliquait pas par elle-même l'égalité, ils avaient simplement réédité dans leur préambule la proposition française de 1798 relative à l'éventualité du concours des pavillons étrangers moyennant consentement des riverains? L'on n'aperçoit pas de différence sensible entre cette proposition et les stipulations de 1868, car ces dernières mettant positivement la liberté fluviale au prix d'un gage particulier de réciprocité, réservent par le fait aux riverains le droit d'apprécier la valeur comparative de ce gage et par conséquent celui de refuser cette liberté. En 1798 la motion française répondait à une idée de progrès; il faudrait admettre que sur le point dont il s'agit, le droit des gens serait resté à peu près stationnaire pendant plus d'un demi-siècle.

Ce serait singulièrement réduire la portée morale de l'idée civilisatrice qui, en 1814, a revêtu la forme solennelle d'un traité européen, que de faire de l'affranchissement des grandes voies fluviales au profit de toutes les nations l'objet d'un marché étroit; un bienfait qui doit être payé d'un équivalent n'est plus un bienfait. La liberté de la navigation intérieure, telle qu'elle a été conçue et annoncée au commencement de ce siècle, n'a point

été offerte ou promise moyennant échange; elle a été décrétée généreusement « pour faciliter les communications entre les peuples et les rendre toujours moins étrangers les uns aux autres (1). » Elle a eu pour bases manifestes l'égalité et l'intérêt du commerce général (2); elle devait « répondre à l'attente légitime des contemporains (3), et si elle n'a point encore été formellement élevée, comme autrefois sous la domination de Rome, au rang d'un droit naturel, elle appartient pleinement avec tous les avantages qu'elle comporte et dans les limites que lui assigne le droit des gens moderne, à tout État faisant partie du concert européen.

§ 5.

Une distinction qui n'est pas sans importance se rattache à chacun des deux systèmes qui viennent d'être exposés; il en a été fait mention incidente à propos du règlement danubien.

La navigation fluviale proprement dite est divisée en grande et petite navigation, selon qu'elle s'exerce entre les différents États riverains ou qu'elle sert aux communications entre les ports d'un seul État. A cet égard, et il y a lieu de s'en étonner, les règles suivies sur les cours d'eau internationaux ne sont point partout concordantes. Ici,

(1) Art. 5 du traité de paix de 1814.

(2) Idem.

(3) Circulaire déjà citée de 1814.

comme sur l'Elbe par exemple, les riverains procèdent entre eux d'après un mode analogue à celui qui devait s'appliquer aux pavillons étrangers sur le Danube, c'est-à-dire qu'ils ne se reconnaissent le droit au libre trafic fluvial que d'État à État, et réservent à leurs sujets le cabotage pratiqué sur leur section propre (1).

L'on se demande comment il est possible de concilier une pareille organisation avec les principes élémentaires de toute communauté.

Ailleurs, comme sur le Rhin et sur le Danube, les riverains se traitent, quant au grand et au petit cabotage, sur le pied d'une égalité mutuelle absolue, accord certainement plus conforme à l'esprit des maximes qui régissent les fleuves conventionnels.

§ 6.

:

L'analyse comparée des deux législations de 1857 et de 1868 met en évidence ce double fait la communauté danubienne ménage sans doute une part très restreinte à la navigation étrangère; mais le peu qu'elle concède est gratuit et correspond à un profit immédiat et certain; tandis que la communauté rhénane promet tout et ne donne rien pour rien, c'est-à-dire qu'elle subordonne ses libéralités à des engagements plus ou moins onéreux qui les rendent illusoires, si l'on entend en bénéficier sans compensations contractuelles.

(1) Art. 1er de l'acte de l'Elbe du 23 juin 1821.

En d'autres termes, les États riverains du Rhin ne reconnaissent pas la liberté fluviale dans sa valeur utile comme un bien acquis à tous, mais comme un bien à acquérir, distinction que l'on ne saurait justifier par aucun des trois grands traités européens de 1814, de 1815 et de 1856.

Cette critique conduit naturellement à l'exposé des desiderata dont l'adoption générale ferait de la liberté inscrite au frontispice de toutes les conventions fluviales une réalité féconde et universelle. Ici, je resterai le plus possible sur le terrain pratique, procédant par voie d'amendement et d'extension des dispositions essentielles en vigueur sur les deux principaux fleuves du continent, le Danube et le Rhin.

Déjà, ainsi que je l'ai noté, le cabotage est libre pour les bâtiments de mer de toutes les nations sur une partie de la région inférieure des fleuves conventionnels, et cette latitude existe même sur les voies dont le régime est le plus restrictif. Le parcours ainsi abandonné à l'exploitation de tous est ordinairement limité par un port plus ou moins important où s'opère le contact de la navigation maritime et de la navigation fluviale. Cette sorte de frontière, là où elle ne peut être franchie en vertu des règlements existants, devrait disparaître, de manière que les bâtiments de mer ne fussent désormais arrêtés dans leur marche ascendante que par l'insuffisance des eaux. Admis partout au grand et au petit cabotage, trafic qui, le plus souvent, se ré

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