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Le canon, la mitraille, les balles avaient surpris les Anglais dans leurs tentes; les boulets venaient tuer les chevaux attachés à leurs piquets et les hommes encore endormis. Quel réveil au milieu de la plus complète sécurité! Officiers et soldats se jettent sur leurs armes au milieu de l'obscurité, et, à peine revêtus de leurs uniformes, s'élancent sans savoir où diriger leurs pas. On entend au milieu de la fusillade et des détonations de l'artillerie les cris des chefs qui rallient les bataillons au drapeau de l'Angleterre; des hourrahs leur répondent de toutes parts, ceux des Anglais qui accourent, ceux des Russes qui avancent: un brouillard épais enveloppe cette scène de confusion et de tumulte. Sur les tentes renversées piétine le combat et s'amoncèlent les morts; le sang court pêlemêle avec les ruisseaux de la pluie, et les bataillons formés à la hâte glissent sur cette boue sanglante.

L'Angleterre se relève de son imprévoyance par son héroïque et indomptable courage.

La seconde division, que commande le major général Pennefather, s'est formée, pendant que les avantpostes combattent et meurent un à un; une brigade se jette sur la pointe des hauteurs avec le général Adams pour arrêter l'ennemi qui s'avance à travers les taillis touffus, sous la protection d'une nuée de tirailleurs, dont le feu est terrible.

La belle brigade des gardes est debout, elle s'élance au front de bataille, à l'extrême droite de la 2o division; à sa tête sont le duc de Cambridge ct le major général

Bentinck. Rien ne les arrête; la mitraille troue leurs rangs qui se reforment aussitôt.

Les bataillons de la division légère commandée par sir George Brown, courent au feu à mesure qu'ils se forment; l'une des brigades s'arrête sur les terrains en pente qui descendent à Sébastopol, l'autre se porte en avant; plus loin, la 4a division du général Cathcart s'est jetée à droite du point d'attaque; une de ses brigades, celle du général Goldie, occupe la gauche de la route d'Inkermann.

Les batteries de la 1 et de la 2 division ont pris position sur le front des lignes et commencent aussitôt un feu inégal contre cette pluie de fer qui vient à la fois de l'artillerie que les Russes ont amenée, des canons de la place et surtout des vaisseaux de guerre qui lancent du fond de la baie des volées de mitraille. Toutes les dispositions sont prises à la hâte, pour arrêter ce torrent humain qui envahit à la fois tout le plateau. Sur la 2o division qui défend le front d'attaque et occupe une petite redoute non armée, d'épaisses colonnes s'élancent en poussant des cris sauvages; d'autres gravissent les pentes qui font face à l'extrémité du port, tandis que de nombreux bataillons viennent aussi menacer le flanc et les derrières des lignes anglaises par les deux routes qui, du fond de la vallée d'Inkermann, conduisent sur la hauteur.

CHAPITRE III.

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XXXIX. Disons, avant de raconter les différents épisodes de cette journée, quels étaient les moyens d'attaque préparés par les Russes. Les forces du corps d'armée du général Dannenberg étaient divisées en deux colonnes; l'une sous les ordres du lieutenant général Soimonoff, l'autre sous ceux du lieutenant général Parloff. La colonne Soimonoff devait se porter rapidement en avant sur la rive gauche du ravin, avant le point du jour, et tourner la position d'Inkermann; la seconde colonne, avec 12 bataillons de chasseurs et des compagnies de tirailleurs, avait mission de balayer les défilés couverts d'épaisses broussailles, tandis que le reste des troupes, avançant par la nouvelle route, se formait en bataille entre le ravin et ces défilés. Les mouvements des deux généraux devaient être simultanés; mais le général Soimonoff, entendant le feu s'engager entre ses tirailleurs et les postes avancés des Anglais, « au lieu, dit le prince Menschikoff, d'appuyer sur la droite, pour tourner la position, ainsi qu'il avait été convenu, lança droit devant lui les régiments formés en colonne par compagnies; » ceux-ci se précipitèrent avec une violence extrême, et jetèrent le désordre dans le camp ennemi par l'impétuosité de leur attaque, envahissant à la fois le terrain dégarni de dé

fenseurs et l'emplacement même des tentes anglaises. - Le général Soimonoff fut tué en atteignant les premières hauteurs du plateau.

XL. - C'est alors que se leva, surprise dans son sommeil, l'armée britannique, et qu'elle opposa ses inébranlables poitrines aux baïonnettes russes; c'est alors qu'cut lieu une de ces mêlées indescriptibles, chocs désespérés de masse à masse dans l'obscurité, au milieu de la confusion de l'attaque et de l'héroïque désordre de la défense. courues; nos intrépides alliés ont reconquis une partie du terrain un instant envahi. Mais l'ennemi est là; de toutes parts ses colonnes se pressent, et, reparaissent chaque fois plus menaçantes, plus compactes, plus furieuses.

Toutes les divisions sont ac

C'est du côté de la redoute où était accourue la brigade des gardes que le combat fait fureur, au milieu du brouillard et de la pluie. Là, se fit remarquer dans toute son étendue le froid et infatigable courage des Anglais, couvrant, sans l'abandonner, de leurs cadavres amoncelés, ce sol qu'ils ne peuvent plus défendre.

Le lieutenant général Cathcart, voyant une forte colonne d'infanterie russe déborder la position, espéra, par un mouvement audacieux, faire une diversion en prenant l'ennemi de flanc, et s'élança avec quelques compagnies dans le ravin; mais les Russes étaient déjà maîtres des hauteurs voisines. Le général n'hésite pas,

il se met à la tête de ses soldats, l'épée à la main, et ayant à côté de lui son aide de camp, le colonel Seymour, se précipite sur les rangs ennemis. Bientôt, enveloppé par une autre colonne, que cachait à la fois un pli de terrain et ce voile épais tombé du ciel sur la terre, le général Cathcart est frappé mortellement un des premiers, et près de lui le colonel Seymour, qui cherchait à relever le corps sanglant de son général. Cette poignée de soldats s'élance alors au travers des rangs ennemis avec l'élan du désespoir, et se fraye, pour rejoindre la division, un chemin qu'elle teint de son sang (1).

(1)

LE LIEUTENANT GÉNÉRAL SIR GEORGE CATHCART.

La mort du lieutenant général sir George Cathcart a été pour l'Angleterre un deuil public; car sa loyauté, son patriotisme et son dévouement égalaient sa haute réputation militaire. Après avoir rempli, dans les colonies, un poste important, et y avoir ramené la paix et la tranquillité, il venait à peine de rentrer dans son pays natal, lorsqu'un ordre subit de départ le fit rejoindre l'armée d'Orient.

Sir George Cathcart était né en 1794. A l'âge de 16 ans, il entra dans la garde, avec le grade de cornette, et passa, l'année suivante (1811), lieutenant au 6o dragons.

Il prit une part active aux campagnes de 1813 à 1815, et assista à huit grandes batailles, où l'empereur Napoléon commandait en personne. En 1818, il fut fait capitaine, major et lieutenant-colonel en 1826; colonel en 1841, et major général en 1851.

En 1852, le gouvernement anglais avait besoin d'un officier capable, vigoureux et énergique pour dompter les révoltes des tribus, au cap de Bonne-Espérance. Les qualités brillantes de sir George Cathcart, son caractère audacieux et résolu le désignaient comme l'homme de la situation; il fut nommé gouverneur et commandant militaire au cap de Bonne-Espérance.

A peine débarqué, il signala son arrivée par de brillants succès, et bientôt les tribus révoltées furent battues dans plusieurs rencontres et forcées de mettre bas les armes. Pendant tout le temps qu'il resta au

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