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pés mortellement, formait la réserve avec deux bataillons de voltigeurs.

Chefs et soldats ont confiance dans le succès, et il semble que les heures s'écoulent trop lentement, au gré de l'impatience de tous.

Vers le soir, les troupes sont dirigées, comme la veille, à leurs postes de combat. Dans la prévision que les Russes pourraient tenter de reconquérir la portion d'embuscades que nous avons conservée à l'extrême gauche, quatre bataillons, aux ordres du général Couston, sont chargés de la couvrir. Le général Duval, avec les six autres bataillons, doit se jeter sur la série d'ouvrages parallèles au grand mur du cimetière, en repousser l'ennemi, le maintenir en échec à distance, et permettre ainsi au géniè de s'y établir assez solidement pour nous en assurer la possession définitive.

Dans ces combats nocturnes, dans ces luttes corps à corps, la stratégie n'a que des calculs impuissants.— C'est l'élan, c'est le courage des soldats, c'est l'impétuosité de l'attaque, l'opiniâtreté de la résistance, qui font tout et décident la victoire.

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XXXIX. Comme la veille, le signal est donné à neuf heures, et comme la veille, nos troupes s'élancent avec impétuosité en dehors des parallèles avancées. Toutes les éventualités ont été prévues pour éviter la confusion pendant le combat.

Les bataillons du 46°, du 98, du 14 et du 80°, ont en quelques minutes tourné et envahi les positions

ennemies que les Russes ne défendent que faiblement : un petit nombre seulement attend à la baïonnette et se fait tuer sur place. Toute la ligne des embuscades est bientôt à nous. Le colonel Guérin et le commandant Durand de Villers dirigent les travaux qui se font, malgré le feu de l'ennemi, avec une prodigieuse activité. Les compagnies, désignées pour couvrir les travailleurs, sont couchées à terre, prêtes à se dresser et à combattre au premier signal; mais nulle part l'ennemi ne tente un assaut impossible.

La plume est impuissante à peindre le tableau héroïque de ces travaux exécutés ainsi sous une grêle de mitraille et de boulets; énergie froide et résolue, qui fait braver, sans combattre, une mort obscure.

Cette seconde nuit avait donc complété le succès de notre entreprise. L'ouvrage considérable, sur lequel l'ennemi comptait pour entraver nos attaques, est entre nos mains; ses propres travaux nous couvrent, ses embuscades sont dirigées contre lui; celles qui n'entraient pas dans le tracé de nos attaques ont été rasées et comblées.

De tous côtés, sur les terrains extérieurs, dans les ravins, partout où la mitraille et les boulets avaient pu fouiller les dépressions du sol, les cadavres sont par monceaux; c'est un sinistre spectacle. Toute victoire a sur la tête une auréole et au coeur une profonde blessure.

Sur la demande réitérée du général Osten-Sacken, il y eut, le 25, un armistice pour enlever les morts. Si

près que nous étions de la place, toute suspension d'armes était pour nous très-délicate, et pouvait entraîner de graves résultats. Aussi, dès que le pavillon blanc fut hissé, toutes les précautions qu'une sage prudence exigeait, furent prises avec soin. Il fallut plus de cinq heures pour accomplir ce pénible devoir.

« Nous avons, écrivait le général en chef, remis plus de douze cents cadavres entre les mains de l'ennemi; ce champ de carnage rappelait au souvenir nos vieilles et mémorables luttes avec les Russes. »

Parmi nos pertes les plus sensibles, il faut compter celle du colonel Boulatigny, excellent et brave offieier (1).

XL. Le 22 mai, pendant que nos troupes se préparaient à l'attaque des positions ennemies, les corps

(1)

LE LIEUTENANT-COLONEL BOULATIGNY.

Le 23 mai, le lieutenant-colonel Boulatigny recevait deux blessures en conduisant énergiquement ses soldats au combat; l'une d'elles nécessita l'amputation; un mois après, il succombait, et l'armée perdait en lui un de ses officiers les meilleurs et les plus méritants. Né en 1811, il s'engageait comme soldat au 33° d'infanterie de ligne en 1830; enfant de troupe, c'est en passant par tous les grades qu'il était parvenu à l'honneur de porter les épaulettes de lieutenant-colonel; il avait fait la campagne de Belgique; en 1841, il partait, comme sous-lieutenant, pour l'Afrique, se disant que par son courage, son énergie et une irréprochable conduite de soldat, il forcerait l'avenir à s'ouvrir devant lui; et il avait raison; l'avenir appartient toujours aux nobles cœurs et aux persistants courages; il resta en Algérie jusqu'en 1848, et se fit remarquer dans les jours calmes, comme dans les jours agités de sa vie militaire. En 1849, il prenait part à la campagne d'Italie, et le général Mollière écrivait sur lui cette note: « D'un mérite accompli, que lui seul semble ignorer; cet officier est

désignés pour l'expédition de Kertch s'embarquaient dans le port de Kamiesch. Lorsque la petite escadre s'éloigna de Sébastopol, à l'entrée de la nuit, elle vit l'horizon, du côté de la ville assiégée, s'embraser des feux d'une violente canonnade; et, pendant qu'elle gagnait le large au bruit du combat, la lune, claire et limpide, jouant avec ses rayons au milieu des måtures des vaisseaux, éclairait au loin la mer tranquille sur laquelle glissait la silhouette mouvante des navires.

L'escadre française naviguait, sur deux colonnes, dans le sud de l'escadre anglaise.

Le 24, au matin, la petite flottille doublait le cap Takli, derrière lequel une sinuosité de la côte forme une petite baie (baie de Kamich), choisie pour lieu de débarquement. Le phare du cap était indiqué comme point de rendez-vous général. A droite, se dessinaient les terres basses et arides de l'ile de Taman; un peu plus loin, vers le nord, la pointe fortifiée d'Ak-Bournou et la citadelle d'Iénikalé, forment, en s'avançant, l'extré

plein d'avenir, et il faut se hâter de le pousser aux grades élevés. Intelligence de premier ordre et bravoure à toute épreuve, il aurait mérité d'être cité tous les jours pendant la campagne. »

En 1851, il était nommé chef de bataillon; en 1854, il entra, avec son grade, dans le 2o régiment d'infanterie de la garde, et le général Regnaud de Saint-Jean d'Angély disait : « J'ai la plus grande estime pour cet officier supérieur, que j'ai suivi de près pendant toute la campagne d'Italie. Dignité, zèle, énergie, feu sacré, il a tout pour lui. » En 1855, il partait pour la Crimée, et était nommé lieutenantcolonel le 2 mai, dans le 19° régiment d'infanterie de ligne; le même mois il tombait vaillamment devant l'ennemi.

mité de la baie profonde au fond de laquelle apparaît la ville de Kertch (1).

Dès que les vaisseaux furent en vue du point de débarquement, l'alarme fut donnée sur toute la côte par les vedettes; et, l'ennemi, trop faible pour essayer résistance, prit aussitôt ses mesures de retraite, pendant que les canots, forçant de rames, débarquaient à la fois avec une prodigieuse activité 3000 hommes d'infanterie et 3 batteries d'artillerie attelées.

La plage était à nous.

Une colonne russe, que l'on avait aperçue sur les hauteurs, se repliait dans l'intérieur des terres; quelques Cosaques seulement, placés sur le sommet élevé des tumuli, se détachaient à l'horizon et suivaient d'un œil attentif nos moindres mouvements.

A trois heures et demie, les troupes alliées avaient toutes pris terre.

Les Russes abandonnaient la position et renonçaient à la défendre; mais, fidèles à leurs anciennes traditions,

(1) Dépêche du vice-amiral Bruat, au ministre de la marine.

« Le 24 mai, au point du jour, les deux escadres étaient réunies au lieu du rendez-vous, à 12 milles au sud du cap Takli : les chaloupes, les embarcations et les canots-tambours furent mis à la mer les vapeurs se rangèrent en ligne et se dirigèrent vers la baie, que forme en s'avançant vers l'est, la pointe basse de Kamich.

Toutes les dispositions avaient été prises pour jeter à terre, d'un seul coup, 3000 hommes au moins d'infanterie, qui devaient être fortement soutenus par 3 pièces d'artillerie et par une demi-section de fuséens. »

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